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Citations sur l'alors - Page 2
Il y a 155 citations sur l'alors.
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Mais ce coeur généreux se voit alors aux côtés de ce qu'il a le plus détesté en ce monde, l'injustice.
Albert Camus — L'Homme révolté -
— L’avez-vous embrassé en juillet ?— Non.— Alors taisez-vous, sceptique.— Les sceptiques sont les hommes les plus consciencieux.— Ils n’ont pas de conscience.— Que dites-vous ? ils en ont au moins deux.
Honoré de Balzac — La Peau de chagrin -
Alors, pendant qu'une ouvrière l'alléchait [l'enfant] avec un morceau de sucre, la femme s'en fut doucement, la tête baissée, bégayant des mercis, avalant ses larmes.
Huysmans — Soeurs Vatard -
Alors, je dis "non" à tout le reste ! Un homme qui a un métier à exercer ne doit pas s'en laisser distraire pour aller faire la mouche du coche dans les affaires auxquelles il n'entend rien. Moi, j'ai un métier. J'ai à résoudre des problèmes précis, limités, qui sont de mon ressort, et dont souvent dépend l'avenir d'une vie humaine d'une famille, quelquefois.
Roger Martin du Gard — Les Thibault -
Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé,Et de tous les côtés au soleil exposé,Six forts chevaux tiraient un Coche.Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu.L'attelage suait, soufflait, était rendu.Une Mouche survient, et des Chevaux s'approche ;Prétend les animer par son bourdonnement ;Pique l'un, pique l'autre, et pense à tout momentQu'elle fait aller la machine,S'assied sur le timon, sur le nez du Cocher ;Aussitôt que le char chemine,Et qu'elle voit les gens marcher,Elle s'en attribue uniquement la gloire ;Va, vient, fait l'empressée ; il semble que ce soitUn Sergent de bataille allant en chaque endroitFaire avancer ses gens, et hâter la victoire.La Mouche en ce commun besoinSe plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin ; Qu'aucun n'aide aux Chevaux à se tirer d'affaire.Le Moine disait son Bréviaire ;Il prenait bien son temps ! une femme chantait ;C'était bien de chansons qu'alors il s'agissait !Dame Mouche s'en va chanter à leurs oreilles,Et fait cent sottises pareilles.Après bien du travail le Coche arrive au haut.Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt :J'ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.Ça, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.Ainsi certaines gens, faisant les empressés,S'introduisent dans les affaires :Ils font partout les nécessaires,Et, partout importuns, devraient être chassés.
Jean de La Fontaine — Le Coche et la Mouche -
Alors, Zarazoff, je lui ai dit que la prochaine fois et caetera, et comme il y avait des témoins et que je n'étais pas très populaire dans le quartier, parce que ma mère m'envoyait casser la gueule à untel ou untel qui l'avait « offensée ».
Romain Gary — La nuit sera calme -
Non, certes, je ne méconnais pas les services modestes et précieux que rendent journellement les gardiens de la paix à la vaillante population de Paris. Et je n’aurais pas consenti à vous présenter, Messieurs, la défense de Crainquebille, si j’avais vu en lui l’insulteur d’un ancien soldat. On accuse mon client d’avoir dit : “Mort aux vaches!“. Le sens de cette phrase n’est pas douteux. Si vous feuilletez le dictionnaire de la langue verte, vous y lirez : “Vachard, paresseux, fainéant; qui s’étend paresseusement comme une vache, au lieu de travailler”. - Vache, qui se vend à la police ; mouchard. “Mort aux vaches!” se dit dans un certain monde. Mais toute la question est celle-ci : Comment Crainquebille l’a-t-il dit? Et même, l’a-t-il dit? Permettez-moi, Messieurs, d’en douter. Je ne soupçonne l’agent Matra d’aucune mauvaise pensée. Mais il accomplit, comme nous l’avons dit, une tâche pénible. Il est parfois fatigué, excédé, surmené. Dans ces conditions il peut avoir été la victime d’une sorte d’hallucination de l’ouïe. Et quand il vient vous dire, Messieurs, que le docteur David Matthieu, officier de la Légion d’honneur, médecin en chef de l’hôpital Ambroise-Paré, un prince de la science et un homme du monde, a crié : ” Mort aux vaches!”, nous sommes bien forcés de reconnaître que Matra est en proie à la maladie de l’obsession, et, si le mot n’est pas trop fort, au délire de la persécution. Et alors même que Crainquebille aurait crié: “Mort aux vaches!“, il resterait à savoir si ce mot a, dans sa bouche, le caractère d’un délit. Crainquebille est l’enfant naturel d’une marchande ambulante, perdue d’inconduite et de boisson, il est né alcoolique. Vous le voyez ici abruti par soixante ans de misère. Messieurs, vous direz qu’il est irresponsable.
Anatole France — L’Affaire Crainquebille -
Le Concierge. — Dame ! monsieur le juge, je ne peux pas nier, mais c’est de la prison honorable.Le Juge. — Comment ?Le Concierge. — Oui, monsieur le juge, la première fois, j’étais alors valet de chambre, c’est pour avoir crié, le premier mai : « Vive la grève ! »Le Juge. — Vous étiez valet de chambre chez qui ?Le Concierge. — Chez M. Jaurès.Le Juge. — Ah ! bon, et votre deuxième condamnation ?Le Concierge. — C’est pour avoir crié sur le seuil de Sainte-Clotilde : « Mort aux vaches ! »
Maurice Blanc et Francis de Croisset — Arsène Lupin -
Je me rappelle le jour où j’ai compris que j’étais devenu adulte. Je vivais déjà avec Marie, nous avions Agustín depuis deux ou trois ans, je travaillais depuis des années comme je le fais toujours plus ou moins aujourd’hui, charpentier ici et là, bricoleur à droite et à gauche, électricien quand il faut, plombier ou même jardinier si on me le demande, ni trop souvent ni trop peu, juste ce qu’il faut pour maintenir le juste équilibre, rapporter à la maison ma part de revenus et me garder du temps à moi, ne pas me perdre tout entier en chantiers. Marie était déjà traductrice, traduisait déjà Lodoli et d’autres auteurs qu’elle aimait. C’est-à-dire que notre vie était déjà à peu près ce qu’elle est maintenant, et que nous en étions satisfaits, nous songions souvent que nous avions de la chance, nous nous plaisions à V., nous avions des amis, nous sentions que c’était un endroit où nous étions susceptibles de rester un bon moment encore, bref nous allions bien.Et un matin je me suis levé et je me suis dit que ça y est, tu es grand. J’ai réalisé qu’il fallait que j’arrête de me répéter ces mots, plus tard quand je serai grand. Que c’était fait : j’étais grand. Je l’étais devenus à mon insu. Sans que personne vienne me prévenir. J’ai compris qu’il n’y aurait pas d’épreuve. Pas de monstre à vaincre ni de noeud à trancher. Pas de coup de gong solennel. Pas de voix paternelle pour me souffler à l’oreille ces mots, c’est maintenant, t’y voilà. J’ai compris qu’il n’y aurait nulle ligne à franchir. Nul cap à passer. Nul obstacle à surmonter. Qu’être grand simplement désormais ce serait ça : la continuation de ce présent, de cette lente translation, de ce glissement presque imperceptible, seulement décelable à l’érosion de certaines de mes facultés, au grisonnement de mes tempes et de celles de Marie, à notre renoncement de plus en plus fréquent à telle ou telle folie qui autrefois nous aurait semblé le sel même de la vie, à la taille chaque année accrue d’Agustín, à son énergie toujours plus fascinante. À son appétit d’ogre lui aussi décidé à nous dévorer chaque jour un peu plus.J’ai réalisé qu’il ne se passerait rien. Qu’il n’y avait rien à attendre. Que toujours ainsi les semaines continueraient de passer, que le temps continuerait d’être cette lente succession d’années plus ou moins investies de projets, de désirs, d’enthousiasmes, de soirées plus ou moins vécues. De jours tantôt habités avec intensité, imagination, lumière, des jours pour ainsi dire pleins, comme on dit carton plein devant une cible bien truffée de plombs. Tantôt abandonnés de mauvais gré au soir venu trop tôt. Désertés par excès de fatigue ou de tracas. Perdus. Laissés vierges du moindre enthousiasme, De la moindre récréation, du moindre élan véritable. Jours sans souffle, concédés au soir trop tôt venu, à la nuit tombée malgré nos efforts pour différer notre défaite, et résignés alors nous marchons vers votre lit en nous jurant d’être plus rusés le lendemain – plus imaginatifs, plus éveillés, plus vivants.
Sylvain Prudhomme — Par les routes – L’Arbalète -
Le projet fait sens, Thomas Pesquet a toujours rêvé de devenir basketteur et le monde de la sneakers « lui parle ». Le club de la ville rose donne alors son aval aux deux artisans de LBT sneakers et les met en relation avec l'astronaute français.
Le Figaro — Une paire de « Space Jordan 1 » -
L'image de la voiture de Breedlove, une ruine recouverte d'une épaisse couche de grasse poussière urbaine, passa dans l'esprit de Ben. C'était l'hôpital qui se fout de la charité, alors? observa-t-il. Les yeux de Daniels se braquèrent vers lui. Hein? Je veux dire que sa vieille Ford était pas très reluisante.
Thomas H. Cook — Les rues de feu -
BIRON - N’ai-je pas dansé une fois avec vous en Brabant ?ROSALINE - N’ai-je pas dansé une fois avec vous en Brabant ?BIRON - Je suis sûr que oui.ROSALINE - Combien il était inutile alors — de faire la question !BIRON - Vous le prenez trop vivement.ROSALINE - C’est votre faute. Vous me provoquez avec de telles questions.BIRON - Votre esprit a trop de fougue ; il court trop vite : il se fatiguera.ROSALINE - Pas avant d’avoir jeté le cavalier dans la boue.BIRON - Quelle heure est-il ?ROSALINE - L’heure où les fous la demandent.BIRON - Bonne chance à votre masque !ROSALINE - Belle chance à la face qu’il couvre !BIRON - Le ciel vous envoie beaucoup d’amants !ROSALINE - Amen ! pourvu que vous n’en soyez pas un !BIRON - Aucun danger ! je me retire.
William Shakespeare — Peines d’amour perdues -
On fait un match ? Naturellement. Ils sourient, comme si juste ils allaient passer un bon après-midi, alors que quelque chose est en cours qui transformera leur vie…
Mathieu Lindon — Merci -
Puis, une après-midi, elle mourut paisiblement, non point, à proprement parler, de maladie, et fut enterrée dans sa robe de mariée. Ah, dit Quentin Oui. Mais il y eut, pendant l'été 70, une après-midi où l'une de ces tombes (il n'y en avait alors que trois) fut littéralement arrosée de larmes.
William Faulkner — Absalon -
On prétend que c'est la chose la moins mauvaise que la faiblesse humaine ait pu inventer... Bien inhumaine, pourtant, et inutile, à mon avis ! Plusieurs peuples, en cela moins « barbares » que les Grecs et les Romains, qui les appellent pourtant ainsi, estiment qu'il est horrible et cruel de faire souffrir et démembrer un homme, dont la faute n'est pas avérée. Que peut-il contre cette ignorance ? N'êtes-vous pas injustes, sous prétexte de ne pas le tuer sans raison, de lui faire subir quelque chose de pire encore que la mort ? Et pour preuve qu'il en est bien ainsi, voyez comment bien des fois il préfère mourir sans raison que de passer par cette épreuve. Elle est plus pénible que le supplice final lui-même, et bien souvent, tellement insupportable, qu'elle le devance et même l'exécute.Je ne sais d'où je tiens cette histoire, mais elle reflète bien la conscience dont sait faire preuve notre justice. Devant le Général d'armée, grand justicier, une villageoise accusait un soldat d'avoir enlevé à ses jeunes enfants ce peu de bouillie qui lui restait pour les nourrir, l'armée ayant tout ravagé. Mais pas de preuves !... Le Général somma la femme de bien considérer ce qu'elle disait, car elle devrait répondre de son accusation si elle mentait. Mais comme elle persistait, il fit alors ouvrir le ventre du soldat pour connaître la vérité. Et la femme se trouva avoir raison. Voilà bien une condamnation instructive.
Michel de Montaigne — Les essais -
« Alors, vous comprenez ? Moi, j'avoue que je ne comprends pas, je ne suis pas initié », mais j'aurais pu lui rendre la pareille, je ne saisissais pas l'esprit ou la sottise, l'éloquence ou l'enflure qu'il trouvait dans une réplique ou dans un discours et l'absence de toute raison perceptible pour quoi ceci était mal et ceci bien [...]
Marcel Proust — À la recherche du temps perdu -
Tu as dit deux sous de poivre ? Deux sous de rien, mon cher ami ! À part les yeux. Alors paye-toi du luxe (pour elle) avec un corps de maison déjà coquet, difficile à remuer avec les ancêtres ; son mari qui faisait la pluie et le beau temps jusqu’à la Préfecture, incluse et y comprise ; qui refusait surtout l’essentiel et à tire-larigot ; un pays cabochard, comme ci, comme ça, pas très rond, prêt à la traîner dans la boue.
Jean Giono — L’Iris de Suse -
Car cette beauté dont tu es revêtu n'est rien que l'habillement heureux de mon cœur, lequel dans ton sein vit comme le tien dans moi alors comment pourrais-je être plus vieux que toi ?
William Shakespear — Sonnets -
Je baisse les yeux. Je la fuis. Je les relève. Je trouve les tiens. Je trouve les tiens dans ceux de cette femme. Je les fixe. Je crois que je leur souris et la femme alors cesse de passer sa main sur son front et me regarde.
Philippe Claudel — J'abandonne -
Alors voilà il a conté fleurette à une dame mariée. Le démon, dit Mme la Supérieure. J'approuve, et je poursuis. Une femme mariée qui a une très bonne situation.
Jean Giono — Les Grands chemins -
Mais pourquoi Stella n'avait-elle pas mis le manteau dans un colis ? Puisque tout le reste était empaqueté, pourquoi pas le manteau ? Ou alors, Janie aurait-elle volé le manteau plus tôt dans la journée, avant que Stella ne fasse son colis ? Dans ce cas, cela contribuerait dans une certaine mesure à affaiblir les accusations qui pesaient sur elle.
John Le Carré — Chandelles noires -
Les Enfants du paysan« Les enfants d'un paysan ne parvenaient pas à s'entendre. Malgré ses instances, comme il ne trouvait pas de mots pour les persuader de s'amender, il résolut d'illustrer son propos, et leur demanda de lui apporter un faisceau de baguettes. Lorsqu'ils se furent exécutés, il leur rendit tout d'abord les baguettes liées ensemble, puis leur ordonna de les briser : ses enfants redoublèrent d'efforts, mais n'y parvinrent pas. Alors, après les avoir déliées, il leur donna les baguettes l'une après l'autre : ils les rompirent sans difficulté. « Vous aussi, mes enfants », conclut le paysan, « si vous vivez en bonne intelligence, vous n'offrirez aucune prise à vos ennemis ; mais si vous êtes brouillés, vous leur serez une proie facile ! »La fable montre qu'autant l'union fait la force, autant la discorde est aisément vaincue. »
Ésope — Fables -
Pourtant ses journées lui paraissaient encore longues. Il n'avait pas encore détaché son temps d'une carcasse d'habitudes qui lui servaient de points de repère. Il n'avait rien à faire et son temps prenait alors toute son extension.
Albert Camus — La mort heureuse -
Aussi, fier de son service, qui nécessitait un louage de chevaux extraordinaire, Pierrotin disait-il : « Nous avons joliment marché ! » Pour pouvoir faire neuf lieues en cinq heures dans cet attirail, il supprimait alors les stations que les cochers font, sur cette route, à Saint-Brice, à Moisselle et à La Cave.
Honoré de Balzac — Un Début dans la vie -
BERTRAND : Oh! ce n'est pas que vous avez des nerfs. C'est que vous tapez sur les miens. GERMAINE : Alors je m'en vais, tant pis. BERTRAND : Germaine ! GERMAINE : Je vous le dis tant pis, tant pis, tant pis !
Roland Dubillard — Naïves hirondelles -
Alors, y a-t-il eu disfonctionnement ? Et surtout, son suivi était-il défaillant ?
BFMTV.com — 24.03.2018 -
Le soleil en effet balaierait tout le studio, comme un projecteur de poursuite dans un music-hall frontalier. C’était dimanche, dehors les rumeurs étouffées protestaient à peine, parvenant presque à ce qu’on les regrettât. Ainsi tous les jours chômés, les heures des repas tendraient à glisser les unes sur les autres, on s’entendit pour quatorze heures – ensuite on s’y met. Un soleil comme celui-ci, développa le père de Paul, donne véritablement envie de foutre le camp. Ils s’exprimèrent également peu sur la difficulté de leur tâche qui requerrait, c’est vrai, de la patience et du muscle, puis des scrupules d’égyptologues en dernier lieu. Fabre avait détaillé toutes les étapes du processus dans une annexe aux plans. Ils mangèrent donc vers quatorze heures mais sans grand appétit, leurs mâchoires broyaient la durée, la mastication n’était qu’horlogère. D’un tel compte à rebours on peut, avant terme, convoquer à son gré le zéro. Alors autant s’y mettre, autant gratter tout de suite, pas besoin de se changer, on a revêtu dès le matin ces larges tenues blanches pailletées de vieilles peintures, on gratte et des stratus de plâtre se suspendent au soleil, piquetant les fronts, les cafés oubliés. On gratte, on gratte, et puis très vite on respire mal, on sue, il commence à faire terriblement chaud.
Jean Echenoz — L’Occupation des sols – Éditions de Minuit 1998 -
Mais l'étudiant n'était pas encore arrivé au point d'où l'homme peut contempler le cours de la vie et la juger. Jusqu'alors il n'avait même pas complètement secoué le charme des fraîches et suaves idées qui enveloppent comme d'un feuillage la jeunesse des enfants élevés en province. Il avait continuellement hésité à franchir le Rubicon parisien.
Honoré de Balzac — Le Père Goriot. -
Une souris trottinait sur le corps d’un lion endormi. Celui-ci s’éveilla, la saisit, et s’apprêta à la croquer. Mais la souris le supplia de la relâcher, lui disant que s’il l’épargnait, elle le payerait de retour ; le lion éclata de rire et la laissa partir. Peu après, il arriva que le lion dut son salut à la reconnaissance de la souris. Il fut en effet capturé par des chasseurs qui l’attachèrent à un arbre avec une corde ; alors, entendant ses gémissements, la souris vint ronger son lien et le détacha. « Naguère, tu t’es ri de moi » dit-elle, « parce que tu ne croyais pas que je m’acquitterais de ma dette : sache désormais qu’on trouve de la gratitude jusque chez les souris ! »La fable montre que dans les revers, les gens les plus puissants ont besoin des plus faibles.
Ésope — Le Lion et la Souris reconnaissante -
Mais alors ? serait-ce une solution de dire que cette connexion tout idéale de la pensée et d'un monde externe se suffit à elle-même, et de traiter d'illusoire le besoin qu'éprouve l'esprit de fonder cette connexion ?
Gabriel Marcel — Journal métaphysique -
Un des travaux de l'ISIS est donc de tracer ces courbes de dominations changeantes, internationales, fastidieuses, boueuses, filandreuses, où apparaît rarement (mais alors, quel éclair!) une connexion logique de premier plan.
Philippe Sollers — Le Secret -
[…] Malgré moi, un grand frisson me courut entre les épaules. Cette vision de l'animal dans ce lieu, a cette heure, au milieu de ces gens éperdus, était effrayant à voir. Alors, pendant une heure, le chien hurla sans bouger ; il hurla comme dans l'angoisse d'un rêve ; et la peur, l'épouvantable peur entrait en moi ; la peur de quoi ? Le sais-je ? C'était la peur, voila tout.
Guy de Maupassant — La Peur -
Mais aucun des projets d'une telle action, que préconisaient alors les esprits les plus éclairés d'Occident, ne fut mis en œuvre, en raison de la politique bornée et égoïste menée surtout par les Etats italiens, et notamment par le Saint-Siège, qui entendait faire tirer les marrons du feu par les Albanais, les peuples balkaniques ou d'autres encore.
Ismaïl Kadaré — Les Tambours de la pluie -
L’air du bal était lourd ; les lampes pâlissaient. On refluait dans la salle de billard. Un domestique monta sur une chaise et cassa deux vitres ; au bruits des éclats de verre, Madame Bovary tourna la tête et aperçut dans le jardin, contre les carreaux, des faces de paysans qui regardaient. Alors le souvenir des Bertaux lui arriva. Elle revit la ferme, la mare bourbeuse, son père en blouse sous les pommiers, et elle se revit elle-même, comme autrefois, écrémant avec son doigt les terrines de lait dans la laiterie. Mais, aux fulgurations de l’heure présente, sa vie passée, si nette jusqu’alors, s’évanouissait tout entière, et elle doutait presque de l’avoir vécue. Elle était là ; puis autour du bal, il n’y avait plus que l’ombre, étalée sur tout le reste.
Gustave Flaubert — Madame Bovary -
Alors Poltrier, jusque-là parfaitement gentil et compréhensif, se dressa comme un coq : « Aucun individu n’a de droits sur un autre. » « Et les gens de votre parti alors, ils n’ont pas de droits sur vous ? » « Minute, papillon, dit Poltrier, n’embrouillons pas tout. Le Parti a tous les droits sur moi, quant à ses membres. »
Clarisse Francillon — Les Meurtrières -
Alors tu montes ou tu prends racine ? Minute papillon, j'arrive, fit-elle. T'es aimable, c'est un plaisir. Denise s'installa avec précaution à côté de lui, claqua la portière.
Agathe Godard — Pousse avec ton pain -
J’suis le roi du rodéo. Y a pas pire que moi pour filer des coups de pied en vache et des coups de pied aux vaches, faire le diable à quatre, écorcher les chats, filer des coups de latte aux chiens et pousser la mémé dans les orties, j’suis un pas fréquentable, alors viens ici, sois mignon, et donne un bisou à ton vieux tonton.
Mark Richard — Fishboy -
Quand Griffet qui cherchait à se planquer près des lavabos a vu tout ça, il en est devenu dingue : ses « précieux » illustrés volés « à prix d’or » à la librairie du coin. On n’avait pas grand-chose et ce qui était à nous était à nous, merde alors ! Fallait pas pousser mémère dans les orties, comme on disait.
Alain Sasson — Coups de sang -
Tout à coup il crut avoir été appelé par une voix terrible, et tressaillit comme lorsqu’au milieu d’un brûlant cauchemar nous sommes précipités d’un seul bond dans les profondeurs d’un abîme. Il ferma les yeux ; les rayons d’une vive lumière l’éblouissaient ; il voyait briller au sein des ténèbres une sphère rougeâtre dont le centre était occupé par un petit vieillard qui se tenait debout et dirigeait sur lui la clarté d’une lampe. Il ne l’avait entendu ni venir, ni parler, ni se mouvoir. Cette apparition eut quelque chose de magique. L’homme le plus intrépide, surpris ainsi dans son sommeil, aurait sans doute tremblé devant ce personnage extraordinaire qui semblait être sorti d’un sarcophage voisin. La singulière jeunesse qui animait les yeux immobiles de cette espèce de fantôme empêchait l’inconnu de croire à des effets surnaturels ; néanmoins, pendant le rapide intervalle qui sépara sa vie somnambulique de sa vie réelle, il demeura dans le doute philosophique recommandé par Descartes, et fut alors, malgré lui, sous la puissance de ces inexplicables hallucinations dont les mystères sont condamnés par notre fierté ou que notre science impuissante tâche en vain d’analyser.[…] Le moribond frémit en pressentant que ce vieux génie habitait une sphère étrangère au monde où il vivait seul, sans jouissances, parce qu’il n’avait plus d’illusion, sans douleur, parce qu’il ne connaissait plus de plaisirs. Le vieillard se tenait debout, immobile, inébranlable comme une étoile au milieu d’un nuage de lumière, ses yeux verts, pleins de je ne sais quelle malice calme, semblaient éclairer le monde moral comme sa lampe illuminait ce cabinet mystérieux. Tel fut le spectacle étrange qui surprit le jeune homme au moment où il ouvrit les yeux, après avoir été bercé par des pensées de mort et de fantasques images.
Honoré de Balzac — La peau de chagrin -
Puis Achille sauta de la berge au milieu du fleuve. Mais le fleuve se gonfla, furieux. Il soulevait toutes ses eaux ; les cadavres sans nombre qui encombraient son lit, il les rejetait sur la terre en mugissant comme un taureau. Les vivants, il les sauvait en les cachant dans ses profonds tourbillons. Le flot tumultueux se levait, terrible, autour d’Achille et le courant se pressait contre son bouclier. Le héros chancelait sur ses pieds. Alors il agrippa de ses mains un grand orme qui s’écroula, déraciné, emportant toute la berge. De ses branches serrées, l’arbre arrêta le courant et fit un pont sur le fleuve. Achille, sortant de l’eau, s’élança dans la plaine, effrayé. Mais le grand dieu ne s’arrêtait pas : il s’élança vers lui pour mettre fin à l’œuvre du divin Achille et éloigner le malheur des troyens.
Homère — L’Iliade -
Dès qu’ils sont face à face, les deux chevaliers s’élancent l’un contre l’autre à bride abattue et ils se heurtent avec violence. Le choc des lances est tel qu’elles se plient en arc et volent en éclats. Ils prennent leurs épées et se portent de rudes coups qui endommagent les écus, les heaumes et les cottes de maille. Ils font de larges brèches dans le bois des écus, rompent leurs cottes de mailles et se blessent en maints endroits. Ils se rendent leurs coups avec rage comme s’ils respectaient un contrat. Mais souvent, en glissant, les épées atteignent la croupe des chevaux. Elles se rougissent de sang en entaillant le flanc des malheureuses bêtes qui ne tardent pas à tomber mortes toutes les deux. À peine ont-ils roulé à terre, que les deux combattants se ruent à pied l’un contre l’autre. S’ils s’étaient haïs à mort, ils ne se seraient pas battus plus sauvagement avec leurs épées. Ils se frappent à un rythme rapide que celui avec lequel le joueur le plus invétéré lance ses deniers en doublant sa mise chaque fois qu’il perd. (…) Alors il l’assaille de coups redoublés qui pleuvent dru autour de sa tête ; il le bouscule comme un ouragan, le presse et le contraint à céder du terrain. Il le fait reculer et le malmène si durement que l’autre est bien près d’en perdre le souffle et qu’il n’a guère la force de se défendre.
Chrétien de Troyes — Lancelot ou le Chevalier de la charrette -
Je ne pouvais plus avoir de doutes, l'abbé Sérapion avait raison. Cependant, malgré cette certitude, je ne pouvais m'empêcher d'aimer Clarimonde et je lui aurais volontiers donné tout le sang dont elle avait besoin pour soutenir son existence factice. D'ailleurs, je n'avais pas grand-peur; la femme me répondait du vampire, et ce que j'avais entendu et vu me rassurait complètement; j'avais alors des veines plantureuses qui ne se seraient pas de sitôt épuisées, et je ne marchandais pas ma vie goutte à goutte. Je me serais ouvert le bras moi-même et je lui aurais dit : « Bois ! et que mon amour s'infiltre dans ton corps avec mon sang! ». J'évitais de faire la moindre allusion au narcotique qu'elle m'avait versé et à la scène de l'aiguille, et nous vivions dans le plus parfait accord. Pourtant mes scrupules de prêtre me tourmentaient plus que jamais, et je ne savais quelle macération nouvelle inventer pour mater et mortifier ma chair. Quoique toutes ces visions fussent involontaires et que je n'y participasse en rien, je n'osais pas toucher le Christ avec des mains, aussi impures et un esprit souillé par de pareilles débauches réelles ou rêvées. Pour éviter de tomber dans ces fatigantes hallucinations, j'essayais de m'empêcher de dormir, je tenais mes paupières ouvertes avec les doigts et je restais debout au long des murs, luttant contre le sommeil de toutes mes forces; mais le sable de l'assoupissement me roulait bientôt dans les yeux, et, voyant que toute lutte était inutile, je laissais tomber les bras de découragement et de lassitude, et le courant me rentraînait vers les rives perfides.
Théophile Gautier — La Morte Amoureuse