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Il y a 203 citations sur le jamais.
J’ai fait un voyage sur le plus beau bateau qui ait jamais été construit ; particularité étrange, à bord de ce transatlantique, passagers et hommes d’équipage étaient à cheval !Le capitaine, cavalier émérite, montait un pur-sang de courses, il portait un costume de chasse et sonnait du cor pour diriger la manœuvre, quant à moi, ayant horreur de l’équitation, j’avais pu obtenir de passer mes journées sur le cheval de bois de la salle de gymnastique. Nous débarquâmes sur une terre nouvelle où les chevaux étaient inconnus ; les indigènes prirent pour un animal à deux têtes les passagers montés de notre navire, ils n’osèrent s’en approcher en proie à la terreur ; moi seul, reconnu semblable à ces êtres primitifs, je fus fait prisonnier par eux. C’est de la prison ou l’on m’enferma que j’écrivis les lignes qui vont suivre. Cette prison était une île absolument déserte le jour, mais la nuit, les habitants d’une grande ville continentale ou le mariage et l’union libre étaient également défendus, s’y donnaient rendez-vous pour faire d’amour, j’ai pù ainsi rapporter de mon exil la plus splendide collection de peignes de femmes qui soit au monde, depuis le triste celluloïd jusqu’à l’écaille la plus transparente, couverte de pierres précieuses. J’ai offert cette collection à l’un de mes oncles, conchyliologiste distingué, chez lequel elle fait pendant à une vitrine de coquillages indiens. Francis Picabia — Jésus-Christ Rastaquouère
Facilité, dis-je, me voilà ramené droit à Eluard. En effet, des mots de cette ardente langue française, qui jamais ne fut aussi femme que lorsque c’était lui qui la couchait sur le papier, il en est peu qui lui appartiennent autant que celui-là sous la forme de l’adjectif dérivé. André Pieyre de Mandiargues — Préface de Capitale de la douleur
Car, on avait bien vu dernièrement un lieutenant de louveterie (il était venu avec l’ingénieur des mines de La Mûre et un chocolatier de Grenoble, soi-disant pour une battue aux sangliers qui s’était transformée finalement en partie de miroir aux alouettes suivie d’un dîner de garçon) mais on n’avait jamais vu de commandant. Jean Giono — Un roi sans divertissement
Va-t’en, lui disais-je, gueule de flic, gueule de vache, va-t’en je déteste les larbins de l’ordre et les hannetons de l’espérance. Va-t’en mauvais gris-gris, punaise de moinillon. Puis je me tournais vers des paradis pour lui et les siens perdus, plus calme que la face d’une femme qui ment, et là, bercé par les effluves d’une pensée jamais lasse je nourrissais le vent, je délaçais les montres et j’entendais monter de l’autre côté du désastre, un fleuve de tourterelles et de trèfles de la savane que je porte toujours dans mes profondeurs à hauteur inverse du vingtième étage des maisons les plus insolentes et par précaution contre la force putréfiante des ambiances crépusculaires, arpentée nuit et jour d’un sacré soleil vénérien. Aimé Césaire — Cahier d’un retour au pays natal
Au bout du petit matin, une autre petite maison qui sent très mauvais dans une rue très étroite, une maison minuscule qui abrite en ses entrailles de bois pourri des dizaines de rats et la turbulence de mes six frères et sœurs, une petite maison cruelle dont l’intransigeance affole nos fins de mois et mon père fantasque grignoté d’une seule misère, je n’ai jamais su laquelle, qu’une imprévisible sorcellerie assoupit en mélancolique tendresse ou exalte en hautes flammes de colère; et ma mère dont les jambes pour notre faim inlassable pédalent, pédalent de jour, de nuit, je suis même réveillé la nuit par ces jambes inlassables qui pédalent la nuit et la morsure âpre dans la chair molle de la nuit d’une Singer que ma mère pédale, pédale pour notre faim et de jour et de nuit. Aimé Césaire — Cahier d’un retour au pays natal
Je ne me suis même jamais senti tellement vivant et tellement batailleur qu’en ce moment. Il se peut que ma situation soit redressée et même devienne brillante avant l’automne ; mais la vie m’a appris à ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Roger Vailland — Lettres à sa famille
Voilà. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, son oncle, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n’y a rien à faire. Elle s’appelle Antigone et il va falloir qu’elle joue son rôle jusqu’au bout… Et, depuis que ce rideau s’est levé, elle sent qu’elle s’éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes là bien tranquilles à la regarder, de nous qui n’avons pas à mourir ce soir.Le jeune homme avec qui parle la blonde, la belle, l’heureuse Ismène, c’est Hémon, le fils de Créon. Il est le fiancé d’Antigone. Tout le portait vers Ismène : son goût de la danse et des jeux, son goût du bonheur et de la réussite, sa sensualité aussi, car Ismène est bien plus belle qu’Antigone ; et puis un soir, un soir de bal où il n’avait dansé qu’avec Ismène, un soir où Ismène avait été éblouissante dans sa nouvelle robe, il a été trouver Antigone qui rêvait dans un coin, comme en ce moment, ses bras entourant ses genoux, et il lui a demandé d’être sa femme. Personne n’a jamais compris pourquoi. Antigone a levé sans étonnement ses yeux graves sur lui et elle lui a dit « oui » avec un petit sourire triste… L’orchestre attaquait une nouvelle danse, Ismène riait aux éclats, là-bas, au milieu des autres garçons, et voilà, maintenant, lui, il allait être le mari d’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.Cet homme robuste, aux cheveux blancs, qui médite là, près de son page, c’est Créon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. Avant, du temps d’Œdipe, quand il n’était que le premier personnage de la cour, il aimait la musique, les belles reliures, les longues flâneries chez les petits antiquaires de Thèbes. Mais Œdipe et ses fils sont morts. Il a laissé ses livres, ses objets, il a retroussé ses manches, et il a pris leur place.Quelquefois, le soir, il est fatigué, et il se demande s’il n’est pas vain de conduire les hommes. Si cela n’est pas un office sordide qu’on doit laisser à d’autres, plus frustes… Et puis, au matin, des problèmes précis se posent, qu’il faut résoudre, et il se lève, tranquille, comme un ouvrier au seuil de sa journée.La vieille dame qui tricote, à côté de la nourrice qui a élevé les deux petites, c’est Eurydice, la femme de Créon. Elle tricotera pendant toute la tragédie jusqu’à ce que son tour vienne de se lever et de mourir. Elle est bonne, digne, aimante. Elle ne lui est d’aucun secours. Créon est seul. Seul avec son petit page qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui.Ce garçon pâle, là-bas, au fond, qui rêve adossé au mur, solitaire, c’est le Messager. C’est lui qui viendra annoncer la mort d’Hémon tout à l’heure. C’est pour cela qu’il n’a pas envie de bavarder ni de se mêler aux autres. Il sait déjà…Enfin les trois hommes rougeauds qui jouent aux cartes, leurs chapeaux sur la nuque, ce sont les gardes. Ce ne sont pas de mauvais bougres, ils ont des femmes, des enfants, et des petits ennuis comme tout le monde, mais ils vous empoigneront les accusés le plus tranquillement du monde tout à l’heure. Ils sentent l’ail, le cuir et le vin rouge et ils sont dépourvus de toute imagination. Ce sont les auxiliaires toujours innocents et toujours satisfaits d’eux-mêmes, de la justice. Pour le moment, jusqu’à ce qu’un nouveau chef de Thèbes dûment mandaté leur ordonne de l’arrêter à son tour, ce sont les auxiliaires de la justice de Créon.Et maintenant que vous les connaissez tous, ils vont pouvoir vous jouer leur histoire. Elle commence au moment où les deux fils d’Œdipe, Étéocle et Polynice, qui devaient régner sur Thèbes un an chacun à tour de rôle, se sont battus et entre-tués sous les murs de la ville, Étéocle l’aîné, au terme de la première année de pouvoir, ayant refusé de céder la place à son frère. Sept grands princes étrangers que Polynice avait gagnés à sa cause ont été défaits devant les sept portes de Thèbes. Maintenant la ville est sauvée, les deux frères ennemis sont morts et Créon, le roi, a ordonné qu’à Étéocle, le bon frère, il serait fait d’imposantes funérailles, mais que Polynice, le vaurien, le révolté, le voyou, serait laissé sans pleurs et sans sépulture, la proie des corbeaux et des chacals… Quiconque osera lui rendre les devoirs funèbres sera impitoyablement puni de mort.Pendant que le Prologue parlait, les personnages sont sortis un à un. Le Prologue disparaît aussi. L’éclairage s’est modifié sur la scène. C’est maintenant une aube grise et livide dans une maison qui dort. Antigone entr’ouvre la porte et rentre de l’extérieur sur la pointe de ses pieds nus, ses souliers à la main. Elle reste un instant immobile à écouter. La nourrice surgit. Jean Anouilh — Antigone
De surcroît, pour ranimer votre courage, elle vous donne toutes les raisons de croire que l’aile de l’abbaye que vous habitez est sans aucun doute hantée et vous informe qu’il n’y aura pas un seul domestique à portée de voix. Sur ces paroles rassurantes, elle s’en va après avoir tiré sa révérence. Vous écoutez décroître le bruit de ses pas tant que le dernier écho résonne à vos oreilles et quand, le cœur défaillant, vous essayez de fermer votre porte, vous vous apercevez, plus inquiète que jamais, qu’elle n’a pas de verrou. Jane Austen — L’Abbaye de Northanger
Rien n’est jamais acquis à l’homme Ni sa force Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix Et quand il croit serrer son bonheur il le broie Sa vie est un étrange et douloureux divorce Il n’y a pas d’amour heureux […]Il n’y a pas d’amour qui ne soit à douleur Il n’y a pas d’amour dont on ne soit meurtri Il n’y a pas d’amour dont on ne soit flétri Et pas plus que de toi l’amour de la patrie Il n’y a pas d’amour qui ne vive de pleurs Il n’y a pas d’amour heureux Mais c’est notre amour à tous les deux. Louis Aragon — La Diane française
Un beau désordre suit les guerres qui s’achèvent Les négociateurs y pratiquent le tri Des peuples des espoirs des terres et des rêves Et les aventuriers jonglent de la patrie […]Je ne demande pas le pardon des outragesLa pitié d’une enfance ou Dieu sait quel oubliLes longs labeurs m’ont fait un homme d’un autre âgeEt j’ai bu le vin noir et j’ai laissé la lieMais j’aurai beau savoir comme on dit à merveille Quelles gens mes amis d’alors sont devenus Rien ne fera jamais que je prête l’oreille A ce que dira d’eux qui ne les a connus. Louis Aragon — Les Yeux et la Mémoire
Il restait couché toute la journée sur un lit, il fumait, il lisait des livres policiers, mes brochures. Il fermait les yeux, ça durait des heures, comme ça. Il n’écrivait pas. Ça a duré deux mois. Je commençais à m’inquiéter, je ne l’avais jamais vu écrire de ma vie. Une nuit, il s’est levé brusquement, s’est mis à la table et s’est mis à écrire. Là, son visage s’est transformé, il faisait peur. Sa bouche se crispait. Il était d’une nervosité incroyable. Il a écrit sa pièce en huit jours sans presque de ratures. J’ai compris que lorsqu’il fermait les yeux, étendu sur le lit, il faisait sa pièce dans sa tête, phrase par phrase, acte par acte. A la table, il devenait son propre secrétaire. Jean Marais — interviewé à la radio française
Le tout, avec les personnes un peu dingues, jamais les heurter en rien ! de faire tout comme si « ça va de soi ». jamais heurter ! les bêtes non plus ! jamais de surprises ! toujours « ça va de soi » ! naturel ! entendu ! incisions, piqûres, bistouri. pareil ! « ça va de soi » ! Louis-Ferdinand Céline — D’un château l’autre
L’art révèle le transitoire comme absolu et comme l’existence transitoire se perpétue à travers les siècles, il faut aussi qu’à travers les siècles l’art perpétue cette révélation qui ne sera jamais achevée. Simone de Beauvoir — Pour une morale de l’ambiguïté
Peut-être Antoinette partage-t-elle cette opinion car je n’ai jamais entendu une bonne faire autant de bruit qu’elle dans la cuisine. Porte-toi bien, profite de la vie et dors. James Joyce — Lettres
Thomas buvait Gabriel, s’en emplissait en silence, amoureux décidé à brûler ses vaisseaux, convaincu qu’une telle occasion ne se présenterait jamais plus, qu’il tenait là l’unique chance de passer ses lèvres sur ce grain de peau lumineux qui lui ôtait le sommeil depuis des mois. Mathieu Riboulet — Le corps des anges
Quant à A. Dumas, tout le monde sait sa verve prodigieuse, son entrain facile, son bonheur de mise en scène, son dialogue spirituel et toujours en mouvement, ce récit léger qui court sans cesse, et qui sait enlever l’obstacle et l’espace sans jamais faillir. Il couvre d’immenses toiles sans fatiguer jamais ni son pinceau ni son lecteur. Il est amusant. Il embrasse, mais il n’étreint pas comme Balzac. Des trois derniers, Balzac est celui qui étreint et qui creuse le plus. Sainte-Beuve — Causeries du Lundi
Je ne trouve jamais la bonne clé du premier coup. Et, même quand je suis sûr que c’est la bonne, la serrure, immanquablement, refuse de fonctionner, au moins pendant un certain temps, comme pour un baroud d’honneur. Oreste del Bueno — Rien que la vie
Je vois des cheveux ou un profil, une façon de marcher qui ressemble à la tienne. La fille se retourne et ce n’est jamais toi, pourtant je crois te voir partout. Moi, ce que je vois partout, ce sont nos sosies. Emily Tanimura — La tentation de l’après
On le perçoit mais il est difficile de le localiser. Ce qu’on voit n’en est jamais que l’effet. En soi, le sourire se dérobe toujours Patrick Drevet — Le Sourire
Aussitôt le mur s’ouvre. Il en sort une petite table couverte d’une nappe. Biscuits, jromage, fruits et vin. Lancelot recule. Et voilà Guenièvre. Guenièvre, jamais vous n’avez bu de vin. Une fois n’est pas coutume. Jean Cocteau — Les Chevaliers de la Table ronde