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Citations sur le moyen
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Recevoir cette fortune de cette façon, ce serait avouer… avouer de ta part une liaison coupable, et de la mienne une complaisance infâme… Comprends-tu comment on interpréterait notre acceptation ? Il faudrait trouver un biais, un moyen adroit de pallier la chose.
Guy de Maupassant — Bel-ami -
Il n’y a plus de honte maintenant à cela ; l’hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. Le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer. Aujourd’hui, la profession d’hypocrite a de merveilleux avantages. C’est un art de qui l’imposture est toujours respectée ; et, quoiqu’on la découvre, on n’ose rien dire contre elle. Tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement ; mais l’hypocrisie est un vice privilégié qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d’une impunité souveraine. On lie, à force de grimaces, une société étroite avec tous les gens du parti. Qui en choque un, se les attire tous sur les bras ; et ceux que l’on sait même agir de bonne foi là-dessus, et que chacun connaît pour être véritablement touchés, ceux-là, dis-je, sont toujours les dupes des autres ; ils donnent bonnement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglément les singes de leurs actions. Combien crois-tu que j’en connaisse qui, par ce stratagème, ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se font un bouclier du manteau de la religion, et, sous cet habit respecté, ont la permission d’être les plus méchants hommes du monde ? On a beau savoir leurs intrigues, et les connaître pour ce qu’ils sont, ils ne laissent pas pour cela d’être en crédit parmi les gens ; et quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d’yeux, rajustent dans le monde tout ce qu’ils peuvent faire. C’est sous cet abri favorable que je veux me sauver, et mettre en sûreté mes affaires. Je ne quitterai point mes douces habitudes ; mais j’aurai soin de me cacher, et me divertirai à petit bruit. Que si je viens à être découvert, je verrai, sans me remuer, prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers et contre tous. Enfin, c’est là le vrai moyen de faire impunément tout ce que je voudrai. Je m’érigerai en censeur des actions d’autrui, jugerai mal de tout le monde, et n’aurai bonne opinion que de moi. Dès qu’une fois on m’aura choqué tant soit peu, je ne pardonnerai jamais, et garderai tout doucement une haine irréconciliable. Je ferai le vengeur des intérêts du ciel ; et, sous ce prétexte commode, je pousserai mes ennemis, je les accuserai d’impiété, et saurai déchaîner contre eux des zélés indiscrets, qui, sans connaissance de cause, crieront en public contre eux, qui les accableront d’injures, et les damneront hautement de leur autorité privée. C’est ainsi qu’il faut profiter des faiblesses des hommes, et qu’un sage esprit s’accommode aux vices de son siècle.
Molière — Dom Juan -
Le en n'est pas un descriptif intérieur-extérieur, il joue un rôle purement instrumental : on dira en pour tout nouveau moyen de locomotion, en tricycle si la machine a trois roues, en side-car, et aussi, par pure logique fonctionnelle, en tandem (et jamais à tandem). Cela montre bien que dans l'esprit du locuteur en n'a pas la connotation « dedans-dehors » mais seulement « par le moyen de ».
Claude Duneton — Le Figaro -
Quoi que fassent ceux qui règnent chez eux par la violence et hors de chez eux par la menace, quoi que fassent ceux qui se croient les maîtres des peuples et qui ne sont que les tyrans des consciences, l'homme qui lutte pour la justice et la vérité trouvera toujours le moyen d'accomplir son devoir tout entier.
Victor Hugo — Les Châtiments -
Depuis que j’écris ces pages, je me dis qu’il y a un moyen, justement, de lutter contre l’oubli. C’est d’aller dans certaines zones de Paris où vous n’êtes pas retourné depuis trente, quarante ans et d’y rester un après-midi, comme si vous faisiez le guet. Peut-être celles et ceux dont vous vous demandez ce qu’ils sont devenus surgiront au coin d‘une rue, ou dans l’allée d’un parc, ou sortiront de l’un des immeubles qui bordent ces impasses désertes que l’on nomme « square » ou « villa ». Ils vivent de leur vie secrète, et cela n’est possible pour eux que dans des endroits silencieux, loin du centre. Pourtant, les rares fois où j’ai cru reconnaître Dannie, c’était toujours dans la foule. Un soir, Gare de Lyon, quand je devais prendre un train, au milieu de la cohue des départs en vacances. Un samedi de fin d’après-midi, au carrefour du boulevard et de la Chaussée d’Antin dans le flot de ceux qui se pressaient aux portes des grands magasins. Mais, chaque fois, je m’étais trompé.Un matin d’hiver, il y a vingt ans, j’avais été convoqué au tribunal d’instance du treizième arrondissement, et vers onze heures, à la sortie du tribunal, j’étais sur le trottoir de la place d’Italie. Je n’étais pas revenu sur cette place depuis le printemps de 1964, une période où je fréquentais le quartier. Je me suis aperçu brusquement que je n’avais pas un sou en poche pour prendre un taxi ou le métro et rentrer chez moi. J’ai trouvé un distributeur de billets dans une petite rue derrière la mairie, mais après avoir composé le code une fiche est tombée à la place des billets. Il y était écrit : « Désolé. Vos droits sont insuffisants. » De nouveau, j’ai composé le code, et la même fiche est tombée avec la même inscription : « Désolé. Vos droits sont insuffisants. » J’ai fait le tour de la mairie et de nouveau j’étais sur le trottoir de la place d’Italie.Le destin voulait me retenir par ici et il ne fallait pas le contrarier. Peut-être ne parviendrais-je plus jamais à quitter le quartier, puisque mes droits étaient insuffisants. Je me sentais léger à cause du soleil et du ciel bleu de janvier. Les gratte-ciel n’existaient pas en 1964, mais ils se dissipaient peut à peu dans l’air limpide pour laisser place au café du Clair de lune et aux maisons basses du boulevard de la Gare. Je glisserais dans un temps parallèle où personne ne pourrait plus m’atteindre.Les paulownias aux fleurs mauves de la place d’Italie… Je me répétais cette phrase et je dois avouer qu’elle me faisait monter les larmes aux yeux, ou bien était-ce le froid de l’hiver ? En somme, j’étais revenu au point de départ et, si les distributeurs de billets avaient existé vers 1964, la fiche aurait été la même pour moi : Droits insuffisants. Je n’avais à cette époque aucun droit ni aucune légitimité. Pas de famille ni de milieu social bien défini. Je flottais dans l’air de Paris.
Patrick Modiano — L'Herbe des nuits -
Là, ces livres furent tantôt cloués au pilori suivant le vieil adage allemand, le Moyen Âge étant subitement redevenu à la mode, et j’ai moi-même possédé un exemplaire d’un de mes livres transpercé par un clou, qu’un étudiant de mes amis avait sauvé de l’exécution pour m’en faire cadeau – […]
Stefan Zweig — Le Monde d’hier -
Hier soir il s’est vu dans ses rêves tombant sur trois mille moutons blancs. Après ça plus moyen de dormir ! Il s’est mis en route pour aller les trouver. Il est passé par monts et par vaux, à travers forêts de sapins et de pins, de châtaigniers et de chênes verts.
Zacharias Papantoniou — Les Hautes Montagnes -
Alors, je n'ai plus aucune chance de le joindre à Antibes ? Ah non. sa chambre doit déjà être occupée par quelqu'un d'autre. Peut-être par Monsieur. Il me désigna le grand blond à tête de cheval qui prenait toujours des notes sur son carnet. Et il n'y a aucun moyen de savoir où il est ?
Patrick Modiano — Dimanches d'août -
Phédon a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre; il dort peu, et d’un sommeil fort léger; il est abstrait, rêveur, et il a avec de l’esprit l’air d’un stupide: il oublie de dire ce qu’il sait, ou de parler d’événements qui lui sont connus; et s’il le fait quelquefois, il s’en tire mal, il croit peser à ceux à qui il parle, il conte brièvement, mais froidement; il ne se fait pas écouter, il ne fait point rire. Il applaudit, il sourit à ce que les autres lui disent, il est de leur avis; il court, il vole pour leur rendre de petits services. Il est complaisant, flatteur, empressé; il est mystérieux sur ses affaires, quelquefois menteur; il est superstitieux, scrupuleux, timide. Il marche doucement et légèrement, il semble craindre de fouler la terre; il marche les yeux baissés, et il n’ose les lever sur ceux qui passent. Il n’est jamais du nombre de ceux qui forment un cercle pour discourir; il se met derrière celui qui parle, recueille furtivement ce qui se dit, et il se retire si on le regarde. Il n’occupe point de lieu, il ne tient point de place; il va les épaules serrées, le chapeau abaissé sur ses yeux pour n’être point vu; il se replie et se renferme dans son manteau; il n’y a point de rues ni de galeries si embarrassées et si remplies de monde, où il ne trouve moyen de passer sans effort, et de se couler sans être aperçu. Si on le prie de s’asseoir, il se met à peine sur le bord d’un siège; il parle bas dans la conversation, et il articule mal; libre néanmoins sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu des ministres et du ministère. Il n’ouvre la bouche que pour répondre; il tousse, il se mouche sous son chapeau, il crache presque sur soi, et il attend qu’il soit seul pour éternuer, ou, si cela lui arrive, c’est à l’insu de la compagnie: il n’en coûte à personne ni salut ni compliment. Il est pauvre.
Phédon — « Des Biens de fortune » -
ARGAN, assis, une table devant lui, comptant des jetons les parties de son apothicaire.Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt ; trois et deux font cinq. « Plus, du vingt-quatrième, un petit clystère insinuatif, préparatif et rémollient, pour amollir, humecter et rafraîchir les entrailles de monsieur. » Ce qui me plaît de monsieur Fleurant, mon apothicaire, c'est que ses parties sont toujours fort civiles. « Les entrailles de monsieur, trente sols. » Oui ; mais, monsieur Fleurant, ce n’est pas tout que d’être civil ; il faut être aussi raisonnable, et ne pas écorcher les malades. Trente sols un lavement ! Je suis votre serviteur, je vous l’ai déjà dit ; vous ne me les avez mis dans les autres parties qu’à vingt sols ; et vingt sols en langage d’apothicaire, c’est-à-dire dix sols ; les voilà, dix sols. « Plus, dudit jour, un bon clystère détersif, composé avec catholicon double, rhubarbe, miel rosat, et autres, suivant l’ordonnance, pour balayer, laver et nettoyer le bas-ventre de monsieur, trente sols. » Avec votre permission, dix sols. « Plus, dudit jour, le soir, un julep hépatique, soporatif et somnifère, composé pour faire dormir monsieur, trente-cinq sols. » Je ne me plains pas de celui-là ; car il me fit bien dormir. Dix, quinze, seize, et dix-sept sols six deniers. « Plus, du vingt-cinquième, une bonne médecine purgative et corroborative, composée de casse récente avec séné levantin, et autres, suivant l’ordonnance de monsieur Purgon, pour expulser et évacuer la bile de monsieur, quatre livres. » Ah ! monsieur Fleurant, c’est se moquer : il faut vivre avec les malades. Monsieur Purgon ne vous a pas ordonné de mettre quatre francs. Mettez, mettez trois livres, s’il vous plaît. Vingt et trente sols. « Plus, dudit jour, une potion anodine et astringente, pour faire reposer monsieur, trente sols. » Bon, dix et quinze sols. « Plus, du vingt-sixième, un clystère carminatif, pour chasser les vents de monsieur, trente sols. » Dix sols, monsieur Fleurant. « Plus, le clystère de monsieur, réitéré le soir, comme dessus, trente sols. » Monsieur Fleurant, dix sols. « Plus, du vingt-septième, une bonne médecine, composée pour hâter d’aller et chasser dehors les mauvaises humeurs de monsieur, trois livres. » Bon, vingt et trente sols ; je suis bien aise que vous soyez raisonnable. « Plus, du vingt-huitième, une prise de petit lait clarifié et dulcoré pour adoucir, lénifier, tempérer et rafraîchir le sang de monsieur, vingt sols. » Bon, dix sols. « Plus, une potion cordiale et préservative, composée avec douze grains de bézoar, sirop de limon et grenades, et autres, suivant l’ordonnance, cinq livres. » Ah ! monsieur Fleurant, tout doux, s’il vous plaît ; si vous en usez comme cela, on ne voudra plus être malade : contentez-vous de quatre francs, vingt et quarante sols. Trois et deux font cinq et cinq font dix, et dix font vingt. Soixante et trois livres quatre sols six deniers. Si bien donc que, de ce mois, j’ai pris une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept et huit médecines ; et un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix, onze et douze lavements ; et, l’autre mois, il y avoit douze médecines et vingt lavements. Je ne m’étonne pas si je ne me porte pas si bien ce mois-ci que l’autre. Je le dirai à monsieur Purgon, afin qu’il mette ordre à cela. Allons, qu’on m’ôte tout ceci. (Voyant que personne ne vient, et qu’il n’y a aucun de ses gens dans sa chambre.) Il n’y a personne. J’ai beau dire : on me laisse toujours seul ; il n’y a pas moyen de les arrêter ici. (Après avoir sonné une sonnette qui est sur la table.) Ils n’entendent point, et ma sonnette ne fait pas assez de bruit. Drelin, drelin, drelin. Point d’affaire. Drelin, drelin, drelin. Ils sont sourds… Toinette. Drelin, drelin, drelin. Tout comme si je ne sonnois point. Chienne ! coquine ! Drelin, drelin, drelin. J’enrage. (Il ne sonne plus, mais il crie.) Drelin, drelin, drelin. Carogne, à tous les diables ! Est-il possible qu’on laisse comme cela un pauvre malade tout seul ? Drelin drelin, drelin. Voilà qui est pitoyable ! Drelin, drelin, drelin ! Ah ! mon Dieu ! Ils me laisseront ici mourir. Drelin, drelin, drelin.
Molière — Le Malade imaginaire -
Tu n'es pas du tout vertueuse,Je ne suis pas du tout jaloux :C'est de se la couler heureuseEncor le moyen le plus doux.Vive l'amour et vivent nous !
Paul Verlaine — Tu n'es pas du tout vertueuse -
Sachant que j'avais droit seulement à trois tentatives, je tentai de retrouver la combinaison par un moyen mnémotechnique. Pour la carte bancaire, me semblait-il, c'était le numéro de mon immeuble, multiplié par l'âge de ma mère. Sans véritable certitude, j'effectuai l'opération et tapai les quatre chiffres.
Benoït Duteurtre — Service clientèle -
Avant était surtout adverbe dans la langue du moyen âge. Il l’est constamment dans la Chanson de Roland. En moyen français l’usage de avant préposition se développe et triomphe à partir du XVIe siècle. Au XVIIe siècle, ces deux prépositions ne se distinguent pas encore d’une manière précise ; les conjonctions avant que et devant que sont en concurrence, mais, malgré les préférences de Vaugelas pour cette dernière, avant que l’emporte.
Joseph Anglade — Grammaire élémentaire de l’Ancien français -
C'est le cas de le dire les arbres sont rouges, les truites font leur nid dans les buissons les montagnes, obéissant au moindre mot, se mettent en marche. C'est le seul moyen pour ne jamais être Gros-Jean comme devant.
Jean Giono — Les Grands chemins -
Deux heures de récriminations, de discussions, d’engueulades entre les hommes, entre les gradés, se passèrent ainsi, dans la nuit et la neige, avant qu’on eût trouvé moyen de donner à tout le monde le petit morceau de ruine auquel il pensait avoir droit.
Romains — Les Hommes de bonne volonté -
Ils sont. gais, hein? Ils s’amusent. Que voulez-vous, c’est de leur âge. Nous aussi, on avait de ces fous rires. il n’y avait pas moyen de s’arrêter.
Nathalie Sarraute — Vous les entendez ? -
Il est donc à croire que les besoins dictèrent les premiers gestes, et que les passions arrachèrent les premières voix. En suivant avec ces distinctions la trace des faits, peut-être faudrait-il raisonner sur l'origine des langues tout autrement qu'on n'a fait jusqu'ici. Le génie des langues orientales, les plus anciennes qui nous soient connues, dément absolument la marche didactique qu'on imagine dans leur composition. Ces langues n'ont rien de méthodique et de raisonné ; elles sont vives et figurées. On nous fait du langage des premiers hommes des langues de géomètres, et nous voyons que ce furent des langues de poètes.Cela dut être. On ne commença pas par raisonner, mais par sentir. On prétend que les hommes inventèrent la parole pour exprimer leurs besoins ; cette opinion me paraît insoutenable. L'effet naturel des premiers besoins fut d'écarter les hommes et non de les rapprocher. Il le fallait ainsi pour que l'espèce vînt à s'étendre, et que la terre se peuplât promptement ; sans quoi le genre humain se fût entassé dans un coin du monde, et tout le reste fût demeuré désert.De cela seul il suit avec évidence que l'origine des langues n'est point due aux premiers besoins des hommes ; il serait absurde que de la cause qui les écarte vînt le moyen qui les unit. D'où peut donc venir cette origine ? Des besoins moraux, des passions. Toutes les passions rapprochent les hommes que la nécessité de chercher à vivre force à se fuir. Ce n'est ni la faim, ni la soif, mais l'amour, la haine, la pitié, la colère, qui leur ont arraché les premières voix. Les fruits ne se dérobent point à nos mains, on peut s'en nourrir sans parler ; on poursuit en silence la proie dont on veut se repaître : mais pour émouvoir un jeune cœur, pour repousser un agresseur injuste, la nature dicte des accents, des cris, des plaintes. Voilà les plus anciens mots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes et passionnées avant d'être simples et méthodiques. Tout ceci n'est pas vrai sans distinction, mais j'y reviendrai ci-après.
Jean-Jacques Rousseau — Essai sur l’Origine des langues -
Au demeurant, ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ce ne sont qu'accointances et familiarités nouées par quelque occasion ou commodité, par le moyen de laquelle nos âmes s'entretiennent. En l'amitié de quoi je parle, elles se mêlent et confondent l'une en l'autre, d'un mélange si universel qu'elles effacent et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes. Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, je sens que cela ne se peut exprimer, qu'en répondant : « Parce que c'était lui, parce que c'était moi. »Il y a, au-delà de tout mon discours, et de ce que j'en puis dire particulièrement, ne sais quelle force inexplicable et fatale, médiatrice de cette union. Nous nous cherchions avant que de nous être vus, et par des rapports que nous oyions l'un de l'autre, qui faisaient en notre affection plus d'effort que ne porte la raison des rapports, je crois par quelque ordonnance du ciel ; nous nous embrassions par nos noms.
Michel de Montaigne — Les essais -
La pression des pneus, l’état des freins. Il aura fallu qu’un détail échappe à l’attention de mon garagiste. Une fuite peut-être. Cette fois l’aiguille a atteint la zone dangereuse, teintée de rouge sur le cadran. Impossible de continuer, je risque gros, mais pas moyen non plus de rester au milieu de la chaussée ni de monter sur le trottoir trop étroit, encombré de piétons, lesquels vont pousser des cris d’orfraie.
Roger Vrigny — Accident de parcours -
La photo, d'abord modeste moyen de diffusion destiné à faire connaître les chefs-d'œuvre incontestés à ceux qui ne pouvaient en acheter la gravure, semblait devoir confirmer les valeurs acquises.
André Malraux — Le Musée Imaginaire -
L’équilibre est donc une notion très importante pour les anciens principes de justice et de morale ; l’équilibre est la base de la justice. Si, aux époques barbares, celle-ci dit « œil pour œil, dent pour dent », elle considère l’équilibre comme atteint et veut conserver cet équilibre au moyen de cette faculté de rendre la pareille : de telle sorte que, si l’un commet un délit au détriment de l’autre, l’autre ne pourra plus exercer sa vengeance avec une colère aveugle. Grâce à la loi du talion l’équilibre entre les puissances, qui avait été détruit, est rétabli : car un œil, un bras de plus, dans ces conditions primitives, c’est une somme de pouvoir, un poids de plus.
Nietzsche — Humain -
Je m’efforce de reparcourir ma vie pour y trouver un plan, y suivre une veine de plomb ou d’or, ou l’écoulement d’une rivière souterraine, mais ce plan tout factice n’est qu’un trompe-l’œil du souvenir. De temps en temps, dans une rencontre, un présage, une suite définie d’événements, je crois reconnaître une fatalité, mais trop de routes ne mènent nulle part, trop de sommes ne s’additionnent pas ; je perçois bien dans cette diversité, dans ce désordre, la présence d’une personne, mais sa forme semble presque toujours tracée par la pression des circonstances ; ses traits se brouillent comme une image reflétée sur l’eau. Je ne suis pas de ceux qui disent que leurs actions ne leur ressemblent pas. Il faut bien qu’elles le fassent, puisqu’elles sont ma seule mesure, et le seul moyen de me dessiner dans la mémoire des hommes, ou dans la mienne propre ; puisque c’est peut-être l’impossibilité de continuer à s’exprimer et à se modifier par l’action qui constitue la différence entre l’état de mort et celui de vivant. Mais il y a entre moi et ces actes dont je suis fait un hiatus indéfinissable.
Marguerite Yourcenar — Mémoires d’Hadrien -
Ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ce ne sont qu’accointances et familiarités nouées par quelque occasion ou commodité, par le moyen de laquelle nos âmes s’entretiennent. En l’amitié de quoi je parle, elles se mêlent et confondent l’une en l’autre, d’un mélange si universel qu’elles effacent et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes. Si on me presse de dire pourquoi je l’aimais, je sens que cela ne peut exprimer qu’en répondant : “Parce que c’était lui, parce que c’était moi”.
Montaigne — Essais -
C’est ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t’avertit, dès l’entrée, que je ne m’y suis proposé aucune fin, que domestique et privée. Je n’y ai eu nulle considération de ton service, ni de ma gloire. Mes forces ne sont pas capables d’un tel dessein. Je l’ai voué à la commodité particulière de mes parents et amis : à ce que m’ayant perdu (ce qu’ils ont à faire bientôt) ils y puissent retrouver aucuns traits de mes conditions et humeurs, et que par ce moyen ils nourrissent, plus altière et plus vive, la connaissance qu’ils ont eue de moi. Si c’eût été pour rechercher la faveur du monde, je me fusse mieux paré et me présenterais en une marche étudiée. Je veux qu’on m’y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans contention et artifice : car c’est moi que je peins. Mes défauts s’y liront au vif, et ma forme naïve, autant que la révérence publique me l’a permis. Que si j’eusse été entre ces nations qu’on dit vivre encore sous la douce liberté des premières lois de nature, je t’assure que je m’y fusse très volontiers peint tout entier, et tout nu. Ainsi, lecteur, je suis moi-même la matière de mon livre : ce n’est pas raison que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain.
Montaigne — Essais -
Après le tremblement de terre qui avait détruit les trois quarts de Lisbonne, les sages du pays n’avaient pas trouvé un moyen plus efficace pour prévenir une ruine totale que de donner au peuple un bel auto-da-fé ; il était décidé par l’université de Coïmbre que le spectacle de quelques personnes brûlées à petit feu, en grande cérémonie, est un secret infaillible pour empêcher la terre de trembler. il était décidé par l’université de Coïmbre que le spectacle de quelques personnes brûlées à petit feu, en grande cérémonie, est un secret infaillible pour empêcher la terre de trembler.On avait en conséquence saisi un Biscayen convaincu d’avoir épousé sa commère, et deux Portugais qui en mangeant un poulet en avaient arraché le lard : on vint lier après le dîner le docteur Pangloss et son disciple Candide, l’un pour avoir parlé, et l’autre pour l’avoir écouté avec un air d’approbation : tous deux furent menés séparément dans des appartements d’une extrême fraîcheur, dans lesquels on n’était jamais incommodé du soleil : huit jours après ils furent tous deux revêtus d’un san-benito, et on orna leurs têtes de mitres de papier : la mitre et le san-benito de Candide étaient peints de flammes renversées, et de diables qui n’avaient ni queues ni griffes ; mais les diables de Pangloss portaient griffes et queues, et les flammes étaient droites. Ils marchèrent en procession ainsi vêtus, et entendirent un sermon très-pathétique, suivi d’une belle musique en faux-bourdon. Candide fut fessé en cadence, pendant qu’on chantait ; le Biscayen et les deux hommes qui n’avaient point voulu manger de lard furent brûlés, et Pangloss fut pendu, quoique ce ne soit pas la coutume. Le même jour la terre trembla de nouveau avec un fracas épouvantable.
Voltaire — Candide ou l’Optimisme -
Ne pouvant vous joindre, je vous fais parvenir cette lettre par le moyen habituel.
Henri Vincenot — Le sang de l’Atlas -
Et Blum : « Et alors … » (mais cette fois Iglésia n’était plus là : tout l’été ils le passèrent une pioche (ou, quand ils avaient de la chance, une pelle) en main à des travaux de terrassement puis au début de l’automne ils furent envoyés dans une ferme arracher les pommes de terre et les betteraves, puis Georges essaya de s’évader, fut repris (par hasard, et non par des soldats ou des gendarmes envoyés à sa recherche mais – c’était un dimanche matin – dans un bois où il avait dormi, par de paisibles chasseurs), puis il fut ramené au camp et mis en cellule, puis Blum se fit porter malade et rentra lui aussi au camp, et ils y restèrent tous les deux, travaillant pendant les mois d’hiver à décharger des wagons de charbon, maniant les larges fourches, se relevant lorsque la sentinelle s’éloignait, minables et grotesques silhouettes, avec leurs calots rabattus sur leurs oreilles, le col de leurs capotes relevé, tournant le dos au vent de pluie ou de neige et soufflant dans leurs doigts tandis qu’ils essayaient de se transporter par procuration c’est-à-dire au moyen de leur imagination, c’est-à-dire en rassemblant et combinant tout ce qu’ils pouvaient trouver dans leur mémoire en fait de connaissances vues, entendues ou lues, de façon-là, au milieu des rails mouillés et luisants, des wagons noirs, des pins détrempés et noirs, dans la froide et blafarde journée d’un hiver saxon – à faire surgir les images chatoyantes et lumineuses au moyen de l’éphémère, l’incantatoire magie du langage, des mots inventés dans l’espoir de rendre comestible – comme ces pâtes vaguement sucrées sous lesquelles on dissimule aux enfants les médicaments amers – l’innommable réalité dans cet univers futile, mystérieux et violent dans lequel, à défaut de leur corps, se mouvaient leur esprit: quelque chose peut-être sans plus de réalité qu’un songe, que les paroles sorties de leurs lèvres: des sons, du bruit pour conjurer le froid, les rails, le ciel livide, les sombres pins.
Claude Simon — La Route des Flandres -
Il s’y trouvait des métaphores aussi monstrueuses que des orchidées et aussi subtiles de couleurs. La vie des sens y était décrite dans des termes de philosophie mystique. On ne savait plus par instants si on lisait les extases spirituelles d’un saint du Moyen Âge ou les confessions morbides d’un pêcheur moderne. C’était un livre empoisonné.
Oscar Wilde — Le Portrait de Dorian Gray -
Nos enfants souffrent, ils rêvent de bien, d’amour et de jeux, ils les entraînent dans le mal, la haine et l’oisiveté. Ils n’ont que ce moyen pour vivre, se faire harraga, brûler la route, comme jadis on brûlait ses vaisseaux pour n’avoir pas à revenir.
Boualem Sansal — Harraga -
Oui, monsieur, je vois l’art et non la fortune! Avant tout, ne dois-je pas faire parler de moi pour arriver ? Selon moi, le meilleur moyen est de ne pas tripoter avec les fournisseurs, de réaliser de beaux effets à bon marché
Honoré de Balzac — César Birotteau -
L’huître, de la grosseur d’un galet moyen, est d’une apparence plus rugueuse, d’une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C’est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l’ouvrir : il faut alors la tenir au creux d’un torchon, se servir d’un couteau ébréché et peu franc, s’y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s’y coupent, s’y cassent les ongles : c’est un travail grossier. Les coups qu’on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d’une sorte de halos.À l’intérieur l’on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d’en dessus s’affaissent sur les cieux d’en dessous, pour ne plus former qu’une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l’odeur et à la vue, frangé d’une dentelle noirâtre sur les bords.Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d’où l’on trouve aussitôt à s’orner.
Francis Ponge — Le parti pris des choses -
[Pyrrhus] avait perdu une grande partie des forces qu’il avait amenées, et presque tous ses amis et principaux commandants ; il n’avait aucun moyen d’avoir de nouvelles recrues (…). Tandis que, comme une fontaine s’écoulant continuellement de la ville, le camp romain se remplissait rapidement et abondamment d’hommes frais, pas du tout abattus par la défaite, mais gagnant dans leur colère une nouvelle force et résolution pour continuer la guerre.
Plutarque — Apophtegmes de rois et de généraux -
Sous les gouvernements autoritaires, comme le premier Empire, l'Etat s’en est servi pour contraindre le clergé catholique à la soumission la plus humiliante, aux adulations les plus basses, même à un rôle répugnant de policier, en usant contre les ministres des cultes récalcitrants de moyens coercitifs violents.
Discours d’Émile Combes à Auxerre — 4 septembre 1904 -
Eufrosinia raisonne comme Ivan, comme Staline. On dira qu'elle s’affaire cupidement pour elle et pour son parentage quand Ivan et Staline se dépensent héroïquement pour la nation. La fin justifie les moyens mais ce ne sont pas les mêmes fins.
Barthélemy Amengual — Que viva Eisenstein! -
Par ailleurs, les sondages effectués démontrent que l'âge moyen du campeur adulte est passé de 28 ans en 1954 à 38 ans en 1964.
Journal officiel de la République française: Avis et rapports du Conseil économique et social — n°1 -
"C'est que Fuqua est ce qu'on appelle communément chez nous « un moyen quétaine ».
Le Devoir — 23 mars 2007" -
Pour guérir le dernier-né de la Reine, qui souffrait d'un abcès à la gorge et qu’Hadès semblait encore une fois attirer dans ses ténèbres, le médecin Olympos avait jugé qu'il fallait prendre les grands moyens : une incubation, et à Canope.
Françoise Chandernagor — Les Enfants d'Alexandrie -
Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d’irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Ce moyen peut être soulevé pour la première fois en appel ou en cassation et ne peut être soulevé d’office.
Secrétariat général du gouvernement et Conseil d’État — Guide de légistique -
... nous pouvons tenter une première délimitation des « nouvelles classes moyennes » en les situant par rapport aux classes moyennes traditionnelles qui sont constituées par la bourgeoisie des affaires et du négoce, les fonctionnaires, les enseignants, les militaires de carrière. Des groupes nouveaux se sont en effet assez récemment développés, à côté des précédents. Ce sont ceux que l'on appelle les « cadres ». Univ. écon. et soc.,1960, p. 5-12.
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Aujourd’hui lundi, je savais bien que la tâche serait rude. Mme Galant a été indisposée, prise d’étourdissements, tellement « les moyens » étaient insupportables. De fait, pendant toute la durée de la classe, je n’ai cessé de les entendre taper des pieds.
Léon Frapi é — La maternelle -
Les nobles cependant étaient encore [au XVIIIes.] une classe privilégiée : ils conservaient la haute et la moyenne justice, avaient des droits féodaux
Las Cases — Mémorial de Sainte-Hélène -
Durtal se mit à rire. − Il y aurait peut-être un moyen terme : ne jamais faire acte de chair avec celle que l'on aime et, pour avoir la paix, fréquenter, quand on ne peut faire autrement, celles que l'on n'aime pas.
Huysmans — Là-bas