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Il y a 95 citations sur le noir.
13 juillet.Non, je ne me trompe pas ; je lis dans ses yeux noirs un véritable intérêt pour ma personne et pour mon sort. Je le sens, et, là-dessus, j’ose me fier à mon cœur, elle…. Oh ! pourrai-je, oserai-je exprimer en ces mots le bonheur céleste ? … Je sens que je suis aimé.Je suis aimé ! … Et combien je me deviens cher à moi-même, combien…. J’ose te le dire, tu sauras me comprendre. Combien je suis relevé à mes propres yeux depuis que j’ai son amour ! … Est-ce de la présomption ou le sentiment de ce que nous sommes réellement l’un pour l’autre ? … Je ne connais pas d’homme dont je craigne quelque chose dans le cœur de Charlotte, et pourtant, lorsqu’elle parle de son fiancé, qu’elle en parle avec tant de chaleur, tant d’amour... je suis comme le malheureux que l’on dépouille de tous ses honneurs et ses titres, et à qui l’on retire son épée.16 juillet.Ah ! quel frisson court dans toutes mes veines, quand, par mégarde, mes doigts touchent les siens, quand nos pieds se rencontrent sous la table ! Je me retire comme du feu, et une force secrète m’attire de nouveau…. Le vertige s’empare de tous mes sens. Et son innocence, son âme candide, ne sent pas combien ces petites familiarités me font souffrir. Si, dans la conversation, elle pose sa main sur la mienne, et si, dans la chaleur de l’entretien, elle s’approche de moi, en sorte que son haleine divine vienne effleurer mes lèvres... je crois mourir, comme frappé de la foudre…. Wilhelm, et ce ciel, cette confiance, si j’ose jamais... Tu m’entends…. Non, mon cœur n’est pas si corrompu. Faible ! bien faible !... Et n’est-ce pas de la corruption ? Johann Wolfgang von Goethe — Les Souffrances du jeune Werther
C’est pourquoi, lorsqu’on réfléchit aux relations entre les pays, les blocs et les systèmes sociaux, en Europe ou dans le monde, ce n’est pas la position moraliste qui est la plus saine, celle qui se demanderait comment les choses pourraient aller dans le meilleur des mondes, en ménageant la chèvre et le chou, mais une position impartiale et scientifique qui essaierait d’analyser le présent et l’avenir dans ce qu’ils ont d’inéluctable, malgré toutes les meilleures intentions des uns (c’est-à-dire le plus souvent de la chèvre) et les noirs complots des autres (c’est-à-dire, le plus souvent, du chou). Alexandre Zinoviev — Sans illusions
Dès quatre heures, la descente des ouvriers commençait. Ils arrivaient de la baraque, pieds nus, la lampe à la main, attendant par petits groupes d'être en nombre suffisant. Sans un bruit, d'un jaillissement doux de bête nocturne, la cage de fer montait du noir, se calait sur les verrous, avec ses quatre étages contenant chacun deux berlines pleines de charbon. Des moulineurs, aux différents paliers, sortaient les berlines, les remplaçaient par d'autres, vides ou chargées à l'avance des bois de taille. Et c'était dans les berlines vides que s'empilaient les ouvriers, cinq par cinq, jusqu'à quarante d'un coup, lorsqu'ils tenaient toutes les cases. Un ordre partait du porte-voix, un beuglement sourd et indistinct, pendant qu'on tirait quatre fois la corde du signal d'en bas, "sonnant à la viande", pour prévenir de ce chargement de chair humaine. Puis, après un léger sursaut, la cage plongeait silencieuse, tombait comme une pierre, ne laissait derrière elle que la fuite vibrante du câble. Émile Zola — Germinal
Au bout de la rue Guénégaud, lorsqu’on vient des quais, on trouve le passage du Pont-Neuf, une sorte de corridor étroit et sombre qui va de la rue Mazarine à la rue de Seine. Ce passage a trente pas de long et deux de large, au plus ; il est pavé de dalles jaunâtres, usées, descellées, suant toujours une humidité âcre ; le vitrage qui le couvre, coupé à angle droit, est noir de crasse. Par les beaux jours d’été, quand un lourd soleil brûle les rues, une clarté blanchâtre tombe des vitres sales et traîne misérablement dans le passage. Par les vilains jours d’hiver, par les matinées de brouillard, les vitres ne jettent que de la nuit sur les dalles gluantes, de la nuit salie et ignoble. À gauche, se creusent des boutiques obscures, basses, écrasées, laissant échapper des souffles froids de caveau. Il y a là des bouquinistes, des marchands de jouets d’enfant, des cartonniers, dont les étalages gris de poussière dorment vaguement dans l’ombre ; les vitrines, faites de petits carreaux, moirent étrangement les marchandises de reflets verdâtres ; au-delà, derrière les étalages, les boutiques pleines de ténèbres sont autant de trous lugubres dans lesquels s’agitent des formes bizarres. À droite, sur toute la longueur du passage, s’étend une muraille contre laquelle les boutiquiers d’en face ont plaqué d’étroites armoires ; des objets sans nom, des marchandises oubliées là depuis vingt ans s’y étalent le long de minces planches peintes d’une horrible couleur brune. Une marchande de bijoux faux s’est établie dans une des armoires ; elle y vend des bagues de quinze sous, délicatement posées sur un lit de velours bleu, au fond d’une boîte en acajou. Au-dessus du vitrage, la muraille monte, noire, grossièrement crépie, comme couverte d’une lèpre et toute couturée de cicatrices. Thérèse Raquin — Émile Zola
Charles descendit dans la salle, au rez-de-chaussée. Deux couverts, avec des timbales d’argent, y étaient mis sur une petite table, au pied d’un grand lit à baldaquin revêtu d’une indienne à personnages représentant des Turcs. On sentait une odeur d’iris et de draps humides, qui s’échappait de la haute armoire en bois de chêne, faisant face à la fenêtre. Par terre, dans les angles, étaient rangés, debout, des sacs de blé. C’était le trop-plein du grenier proche, où l’on montait par trois marches de pierre. Il y avait, pour décorer l’appartement, accrochée à un clou, au milieu du mur dont la peinture verte s’écaillait sous le salpêtre, une tête de Minerve au crayon noir, encadrée de dorure, et qui portait au bas, écrit en lettres gothiques : « À mon cher papa. » Gustave Flaubert — Mme Bovary
Il était évident que sa sœur s’était mise sur son trente-et-un pour l’occasion ; elle portait un chaud manteau noir par-dessus un col roulé, une minijupe noire, des bas résille et ses longues bottes noires. Sienna Mercer — Ma soeur est une vampire
Les soldats prirent d'assaut les camions et la foule se dispersa; hommes, femmes, enfants, vieillards, ils étaient tous vêtus de noir et ils cuisaient à l'étouffée dans leurs beaux habits de deuil; en auto, en carriole, en vélo, à motocyclette, à pied, il en était venu de tous les villages… Simone de Beauvoir — Les Mandarins
Voici venir les temps où vibrant sur sa tigeChaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir ;Valse mélancolique et langoureux vertige !Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige ;Valse mélancolique et langoureux vertige !Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige,Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir !Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige.Un cœur tendre, qui hait le néant vaste et noir,Du passé lumineux recueille tout vestige !Le soleil s’est noyé dans son sang qui se figeTon souvenir en moi luit comme un ostensoir ! Charles Baudelaire — Harmonie du soir
Sa femme, une Irlandaise au visage tout boursouflé de petite vérole, et les cheveux teints en noir, régnait sur le local demi-garage et demi-boutique, où la vogue du vélo amenait une foule de jeunes gens à qui ses fils enseignaient l'art de la pédale. Louis Aragon — Les cloches de Bâle
Où étais-je ? Où étais-je ? Je voulais savoir à tout prix, je voulais parler, je voulais arracher la sphère de cuivre qui emprisonnait ma tête. Mais je capitaine Nemo vint à moi et m'arrêta d'un geste. Puis, ramassant un morceau de pierre crayeuse, il s'avance vers un roc de basalte noir et traça ce seul mot : Atlantide. Jules Verne — Vingt mille lieues sous les mers
Selon que vous serez puissant ou misérable,Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir Jean de La Fontaine — Les Animaux malades de la Peste
Nous nous vîmes ensuite, de jour, au Cream Rica près de La Cabafia, au parc de l’Exposition, et on alla au ciné, en se prenant la main et s’embrassant dans le noir. Je l’avais vue deux ou trois fois encore, sur son lieu de travail ou dans la rue, avant cette soudaine irruption dans ma chambre de clinique. Mario Vargas Llosa — Le poisson dans l’eau
Entrent de nouveaux clients, des hommes virils dont un noir, et des enfants, encore. Bruns comme leurs papas. Tasses de café, chips, les gens n'ont pas de soucis. Les enfants s'amusent dans l'eau. Christine Angot — Vu du ciel
Vous, bourgeois, regardez, vil troupeau, vil limon,Comme un glaive rougi qu'agite un noir démon,Le coup d'Etat qui sort flamboyant de la forge !Les tribuns pour le droit luttent : qu'on les égorge !Routiers, condottieri, vendus, prostitués,Frappez ! tuez Baudin ! tuez Dussoubs ! tuez !Que fait hors des maisons ce peuple ? Qu'il s'en aille !Soldats, mitraillez-moi toute cette canaille !Feu ! feu ! tu voteras ensuite, ô peuple roi !Sabrez le droit, sabrez l'honneur, sabrez la loi !Que sur les boulevards le sang coule en rivières !Du vin plein les bidons ! des morts plein les civières !Qui veut de l'eau-de-vie ? En ce temps pluvieuxIl faut boire. Soldats, fusillez-moi ce vieux !Tuez-moi cet enfant ! Qu'est-ce que cette femme ?C'est la mère ? tuez. Que tout ce peuple infâmeTremble, et que les pavés rougissent ses talons !Ce Paris odieux bouge et résiste. Allons !Qu'il sente le mépris, sombre et plein de vengeance,Que nous, la force, avons pour lui, l'intelligence !L'étranger respecta Paris : soyons nouveaux !Traînons-le dans la boue aux crins de nos chevaux !Qu'il meure ! qu'on le broie et l'écrase et l'efface !Noirs canons, crachez-lui vos boulets à la face ! Victor Hugo — Les Châtiments
Il fait noir, enfant, voleur d’étincelles !Il n’est plus de nuits, il n’est plus de jours ;Dors… en attendant venir toutes cellesQui disaient : Jamais ! Qui disaient : Toujours !Entends-tu leurs pas ?… Ils ne sont pas lourds :Oh ! les pieds légers ! — l’Amour a des ailes…Il fait noir, enfant, voleur d’étincelles !Entends-tu leurs voix ?… Les caveaux sont sourds.Dors : Il pèse peu, ton faix d’immortelles :Ils ne viendront pas, tes amis les ours,Jeter leur pavé sur tes demoiselles…Il fait noir, enfant, voleur d’étincelles ! Tristan Corbière — Rondel
Je foule systématiquement au pied sur le feuillage noir de ce qui est sacré – la syntaxe. Systématiquement. […] Je piétine la syntaxe parce qu’elle doit être piétinée. C’est du raisin. Vous saisissez. Les phrases fautives ou vicieuses […], le manque de prévoyance à l’égard de ce qu’on va dire […], l’inattention à la règle, les cascades […], tous les procédés similaires, analogues à la vieille plaisanterie d’allumer sans qu’il s’en rende compte le journal que lit votre voisin […], mettre les coudes sur la table […], ne pas essuyer ses pieds, voilà mon caractère. Louis Aragon — Traité du style
Sans doute faudra-t-il reparcourir le chemin en arrière, revenir aux après-midi éperdus de vos dix ans – vos premières embuscades, vos premiers coups. Vos secrets serrés dans de petits papiers. Rebrousser chemin vers ce noir impalpable de l’enfance qui vous fait pleurer sans bruit. Recoller une à une les images de tout petits morceaux de vies, vibrations au ralenti : balançoire, trahison, chute, léger vertige, juxtaposition de certitudes dégrafées au réel. Au final, il ne vous reste dans la main presque rien, une poignée de souvenirs, quelques lieux, deux trois prénoms – au milieu quelque part se trouve votre nom, chuchoté tout bas. Ce nom-là ne vous appartient pas, vous ne le connaissez pas. Il nous fonde et vous traverse. Certains appellent ça l’inconscient. D’autres encore n’y croient pas. Vous croyez l’entrevoir, mais c’est lui qui vous regarde. Anne Dufourmantelle — Éloge du risque
Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constelléPorte le Soleil noir de la Mélancolie.Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.Suis-je Amour ou Phébus … Lusignan ou Biron ?Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :Modulant tour à tour sur la lyre d’OrphéeLes soupirs de la Sainte et les cris de la Fée. El Desdichado — Gérard de Nerval
Elle a bien soixante dix ans et elle doit avoir les cheveux blancs; je n'en sais rien; personne n'en sait rien, car elle a toujours un serre-tête noir qui lui colle comme du taffetas sur le crâne; elle a, par exemple, la barbe grise, un bouquet de poils ici, une petite mèche qui frisotte par là, et de tous côtés des poireaux comme des groseilles, qui ont l'air de bouillir sur sa figure.Pour mieux dire, sa tête rappelle par le haut, à cause du serre-tête noir une pomme de terre brûlée et, par le bas, une pomme de terre germée: j'en ai trouvé une gonflée, violette, l'autre matin, sous le fourneau, qui ressemblait à grand tante Agnès comme deux gouttes d'eau. Jules Vallès — L’enfant
Mais vous comprenez, on leur dit « C’est bien à vous, Monsieur ? » ils ne vont pas répondre non, surtout qu’ils ne savent même pas, et si moi je viens dire que minute, papillon, c’est pas à eux, tout ça, mais à moi, et que moi je sais très bien où je les ai mis, mes jetons, et même qu’ils peuvent regarder mon tableau, s’ils savent lire, c’est logique, c’est écrit noir sur blanc (…) Emmanuel Carrère — Hors d’atteinte ?