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Citations sur le nuit
Il y a 106 citations sur le nuit.
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Ne regrettons pas l’attente de la nuit. Tout ce qui bouge, croit, aime, est né la nuit. La nuit est le contraire du silence. La nuit vit. La nuit parle. Le bois craque, l’eau chuinte, le sable crisse, la forêt appelle, les bêtes feulent, jappent, roquent.
Mémoires de sept vies. Tome 2 : Croire et Oser, Jean François Deniau, éd. Plon, 1997 (ISBN 2-259-18561-4), p. 446 -
Comment pouvait-on accepter la mort de ceux que l’on aime ? La réponse l’avait réconciliée avec la vie, avec cette douleur culpabilisante de leur survivre. On n’accepte jamais.
Petit éloge de la nuit, Ingrid Astier, éd. Gallimard-Folio 2 €, 2014 (ISBN 978-2-07-045933-9), p. 46 (voir la fiche de référence de l'œuvre) -
Toi, fleur de feu, nuitamment tu me tiens lieu de soleil, et tu luis profondément dans le cœur secret de l'homme. Février 1900.
Journal (1957), Paul Klee, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1959 (ISBN 978-2-246-27913-6), Journal I, p. 42 -
La « vie inimitable », Antoine et Cléopâtre donnèrent ce nom à l'association qu'ils formèrent à Alexandrie pour profiter au maximum des plaisirs de l'existence. Ce ne sont pourtant pas les fêtes de nuit sur le Nil, les banquets somptueux, ou les représentations à grand spectacle qui constituèrent l'essentiel de la « vie inimitable » de ce couple d'amants terribles. Pour retenir son amant, la reine l'initie à des plaisirs nouveaux : on commence par se déguiser et l'on emprunte aux plus humbles des serviteurs leurs habits. Et puis, toute la nuit, on vagabonde dans les ruelles populeuses du quartier de Rhacotis. On commet quelques déprédations, on se bagarre dans les cabarets.
Les bas-fonds de l'Antiquité (1982), Catherine Salles, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2004 (ISBN 2-228-89817-1), partie 2. Le monde latin — La ville, chap. 12. La « vie inimitable », Vagabondage de reine et d'empereur, p. 301 -
Le " devoir de mémoire", c'était une obligation civique, le signe d'une conscience juste, vun nouveau patriotisme. Après quarante ans de consentement à l'indifference envers le génocide juif _ on ne pouvait pas dire que le film Nuit et brouillard ait attiré la foule, non plus que les livres de Primo Levi et de Robert Antelme _ on croyait ressentir de la honte mais c'était une honte retardée. C'est seulement en regardant Shoah que la conscience contemplait avec effroi l'étendue possible de sa propre inhumanité.
Annie Ernaux — Les années -
Toutes les couleurs disparaissent dans la nuit, et le désespoir ne tient pas de journal.
Charles Robert Maturin — Melmoth, l'Homme errant, 1820 -
Ce pauvre Gustave! Il nous manque, il est tombé dans la profonde nuit de la mort!
Krüdener — Valérie -
La nuit blanche existe. Elle est rare, mais elle existe. Les neuro-psychiatres disent la constater une fois, deux fois, pas plus, chez certains de leurs patients
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Comme la nuit porte conseil Thomas remit au lendemain le fils Le Berre
Henri Queffélec — Recteur -
Là, ils avaient passé des hivers parmi les Hyperboréens blottis dans leurs huttes sordides, puantes, à peine éclairées, et rythmé avec eux l'interminable nuit polaire par la préparation des engins de pêche, de chasse et de commandement, bois de rennes, mâchoires de rennes et de phoques, os de baleine qu'ils gravaient d'images précises comme les souvenirs de leur vie monotone qui recommençait chaque année avec le retour du soleil pâle.
Faure — Histoire de l'art -
Habituée [l'âme] pour un temps à l'éblouissante lumière, elle ne distingue plus rien dans l'ombre. Elle ne se rend pas compte du travail profond qui s'accomplit obscurément en elle. Elle sent qu'elle a beaucoup perdu; elle ne sait pas encore que c'est pour tout gagner. Telle est la «nuit obscure» dont les grands mystiques ont parlé, et qui est peut-être ce qu'il y a de plus significatif, en tout cas de plus instructif, dans le mysticisme chrétien.
Henri Bergson — Les Deux sources de la morale et de la religion -
Le lendemain de l'exécution, il était nuit, mais une nuit des Tropiques, une belle nuit claire et transparente, inondée de la molle clarté de la lune
Sue — Atar-Gull -
Je monte sur le pont et aperçois dans la nuit très noire les nombreuses lumières d’un vapeur qui s’éloigne.
Alain Gerbault — À la poursuite du soleil ; tome 1 : De New-York à Tahiti -
Nous avions mis trois jours à l’œuvre, Varsovie n’eut besoin que d’une nuit, de la nuit du 29 novembre 1830! — (François-Vincent Raspail, De la Pologne — Les deux insurrections, 1839)
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Des danses chevaleresques ont-elles lieu quand vous glissez de vos cadres pour gavotter dans les salles après que le gardien de nuit s’est endormi ?
Joseph O'Connor — Muse -
C’est un autre genre de vie qu’on mène à Tansonville, chez Mme de Saint-Loup, un autre genre de plaisir que je trouve à ne sortir qu’à la nuit, à suivre au clair de lune ces chemins où je jouais jadis au soleil ; et la chambre où je me serai endormi au lieu de m’habiller pour le dîner, de loin je l’aperçois, quand nous rentrons, traversée par les feux de la lampe, seul phare dans la nuit.
Marcel Proust — Du côté de chez Swann -
[…]Voyez… Les spectateurs, dans une nuit profonde,Écarquillaient leurs yeux et ne pouvaient rien voirL’appartement, le mur, tout était noir.Ma foi ! disait un chat, de toutes les merveillesDont il étourdit nos oreilles,Le fait est que je ne vois rien.Ni moi non plus, disait un chien.Moi, disait un dindon, je vois bien quelque chose ;Mais je ne sais pour quelle causeJe ne distingue pas très bien.Pendant tous ces discours, le Cicéron moderneParlait éloquemment et ne se lassait point.Il n’avait oublié qu’un point :C’était d’éclairer sa lanterne.
Jean-Pierre Claris de Florian — Fables -
Sunoco,-les lacs de la Ravine, Grandiose et Vert.L’image de la lune.– la Danse des Pléiades,CLINTON, Roc.– la Danse des Ratons Laveurs,La nuit sur les réserves.– la Danse de la Guerre,La rivière de la Mauvaise-Hache, affluent du père des fleuves.L’apparition des premières étoiles.– la Danse du Pow Wow,CLINTON.– la Danse du Broiement du Maïs,Le bleu du ciel qui s’approche du noir.– la fameuse Danse des Dons,MONTICELLO.– «Chant d’Amour indien»,MONTICELLO, Etat du chardonneret oriental.– Cérémonie auprès d’un Chef à P Agonie!… »Ah, dès les premiers débarqués, comme ils attendaient la révolte!..Le lac de l’Épervier-Noir,- ou le costume de Maître-de-la-Lune: « l’hommede demain. Toute d’une pièce, satin de rayonne jaune avec dessins stencilés rouge,noir et gris, capuchon et masque spatial en plastique.
Michel Butor — Mobile -
Joëlle (la quarantaine éprouvée) vient d’être engagée comme garde de nuit chez madame Chevalier (la quatre-vingt-dizaine furieuse) qui supporte difficilement les gardes diplômées que lui impose sa fille Geneviève (la cinquantaine dynamique). Mais Joëlle, ex-chômeuse, est prête à tout pour garder sa place.
Sceneweb — Milena Csergo, Catherine Hiegel, Clotilde Mollet dans Trois Femmes de Catherine Anne - Sceneweb -
Quelle épaisse nuit sur la terre ! et Nous serons morts quand il fera jour !
Alfred de Musset — La Confession d’un enfant du siècle) -
Le bambin fuyait la chemise ou le bonnet de nuit avec lequel la marquise le menaçait parfois ; il gardait sa collerette brodée, riait à sa mère quand elle l’appelait, en s’apercevant qu’elle riait elle-même de cette rébellion enfantine […]
Honoré de Balzac — La Femme de trente ans -
Sois soumis, mon chagrin, puis dans ton coin sois sourd.Tu la voulais la nuit, la voilà, la voici :Un air tout obscurci a chu sur nos faubourgs,Ici portant la paix, là-bas donnant souci.Tandis qu’un vil magma d’humains, oh, trop banals,Sous l’aiguillon Plaisir, guillotin sans amour,Va puisant son poison aux puants carnavals,Mon chagrin, saisis-moi la main ; là, pour toujours,Loin d’ici. Vois s’offrir sur un balcon d’oubli,Aux habits pourrissants, nos ans qui sont partis ;Surgir du fond marin un guignon souriant ;Apollon moribond s’assoupir sous un arc,Puis ainsi qu’un drap noir traînant au clair ponant,Ouïs, Amour, ouïs la Nuit qui sourd du parc.
George Perec — La Disparition -
Oh, je voudrais tant que tu te souviennes,Des jours heureux quand nous étions amis,Dans ce temps-là, la vie était plus belle,Et le soleil plus brûlant qu’aujourd’hui.Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,Tu vois je n’ai pas oublié.Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,Les souvenirs et les regrets aussi,Et le vent du nord les emporte,Dans la nuit froide de l’oubli.Tu vois, je n’ai pas oublié,La chanson que tu me chantais.C’est une chanson, qui nous ressemble,Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais.Nous vivions, tous les deux ensemble,Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais.Et la vie sépare ceux qui s’aiment,Tout doucement, sans faire de bruit.Et la mer efface sur le sable,Les pas des amants désunis.Nous vivions, tous les deux ensemble,Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais.Et la vie sépare ceux qui s’aiment,Tout doucement, sans faire de bruit.Et la mer efface sur le sableLes pas des amants désunis…
Jacques Prévert — « Les Feuilles mortes » -
Attys Attys Attys charmant et débrailléC’est ton nom qu’en la nuit les elfes ont raillé
Guillaume Apollinaire — Le vent nocturne -
Ce déshabillé crème, sous lequel on apercevait la chemise de nuit avec ses incrustations de dentelle
Aragon — Beaux quartier -
Il est neuf heures du soir. Enfermé dans ma chambre de bord, je jouis de cette quiétude égoïste que les marins seuls connaissent, celle de l'officier qui a fini son quart. J'ai la « nuit franche », comme cela s'appelle en marine, plus de service avant demain midi... , 1878-
Pierre Loti — Journal -
Je me rendis à l’armoire à pharmacie, m’équipai pour la fin de cette nuit de Noël et pour la fin de tout. Je me jetai encore sur le lit, les yeux morts rivés au plafond. Noël, oui. Il sentait le sapin, celui-là. Le sapin gluant de résine des cercueils à bas prix.
René Fallet — Y a-t-il un docteur dans la salle ? -
Tu es sur le point de commencer le nouveau roman d’Italo Calvino, Si une nuit d’hiver un voyageur. Détends-toi. Recueille-toi. Chasse toute autre pensée de ton esprit. Laisse le monde qui t’entoure s’estomper dans le vague. Il vaut mieux fermer la porte ; là-bas la télévision est toujours allumée. Dis-le tout de suite aux autres : « Non, non, je ne veux pas regarder la télévision. » Lève la voix, sinon ils ne t’entendront pas : « Je suis en train de lire ! Je ne veux pas être dérangé. » Il se peut qu’ils ne t’aient pas entendu avec tout ce bazar ; dis-le à haute voix, crie : « Je vais commencer le nouveau roman d’Italo Calvino ! » Ou si tu ne veux pas, ne le dis pas ; espérons qu’ils te laissent tranquille.
Italo Calvino — Si une nuit d’hiver un voyageur -
Anton Voyl n’arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. Il poussa un profond soupir, s’assit dans son lit, s’appuyant sur son polochon. Il prit un roman, il l’ouvrit, il lut; mais il n’y saisissait qu’un imbroglio confus, il butait à tout instant sur un mot dont il ignorait la signification.Il abandonna son roman sur son lit. Il alla à son lavabo; il mouilla un gant qu’il passa sur son front, sur son cou.Son pouls battait trop fort. Il avait chaud. Il ouvrit son vasistas, scruta la nuit. Il faisait doux. Un bruit indistinct montait du faubourg. Un carillon, plus lourd qu’un glas, plus sourd qu’un tocsin, plus profond qu’un bourdon, non loin, sonna trois coups. Du canal Saint-Martin, un clapotis plaintif signalait un chaland qui passait.Sur l’abattant du vasistas, un animal au thorax indigo, à l’aiguillon safran, ni un cafard, ni un charançon, mais plutôt un artison, s’avançait, traînant un brin d’alfa. Il s’approcha, voulant l’aplatir d’un coup vif, mais l’animal prit son vol, disparaissant dans la nuit avant qu’il ait pu l’assaillir.
Georges Perec — La Disparition -
en pareille matière on ne peut pas dire qu' abondance de biens ne nuit pas ;
Henri Poincaré — La Valeur de la science -
Femme nue, femme noireVétue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beautéJ’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeuxEt voilà qu’au cœur de l’Eté et de Midi,Je te découvre, Terre promise, du haut d’un haut col calcinéEt ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigleFemme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’EstTamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l’AiméeFemme noire, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.Délices des jeux de l’Esprit, les reflets de l’or rongent ta peau qui se moireA l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’EternelAvant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
Léopold Sédar Senghor — « Femme noire » -
Va-t’en, lui disais-je, gueule de flic, gueule de vache, va-t’en je déteste les larbins de l’ordre et les hannetons de l’espérance. Va-t’en mauvais gris-gris, punaise de moinillon. Puis je me tournais vers des paradis pour lui et les siens perdus, plus calme que la face d’une femme qui ment, et là, bercé par les effluves d’une pensée jamais lasse je nourrissais le vent, je délaçais les montres et j’entendais monter de l’autre côté du désastre, un fleuve de tourterelles et de trèfles de la savane que je porte toujours dans mes profondeurs à hauteur inverse du vingtième étage des maisons les plus insolentes et par précaution contre la force putréfiante des ambiances crépusculaires, arpentée nuit et jour d’un sacré soleil vénérien.
Aimé Césaire — Cahier d’un retour au pays natal -
Au bout du petit matin, une autre petite maison qui sent très mauvais dans une rue très étroite, une maison minuscule qui abrite en ses entrailles de bois pourri des dizaines de rats et la turbulence de mes six frères et sœurs, une petite maison cruelle dont l’intransigeance affole nos fins de mois et mon père fantasque grignoté d’une seule misère, je n’ai jamais su laquelle, qu’une imprévisible sorcellerie assoupit en mélancolique tendresse ou exalte en hautes flammes de colère; et ma mère dont les jambes pour notre faim inlassable pédalent, pédalent de jour, de nuit, je suis même réveillé la nuit par ces jambes inlassables qui pédalent la nuit et la morsure âpre dans la chair molle de la nuit d’une Singer que ma mère pédale, pédale pour notre faim et de jour et de nuit.
Aimé Césaire — Cahier d’un retour au pays natal -
J’ai fait un voyage sur le plus beau bateau qui ait jamais été construit ; particularité étrange, à bord de ce transatlantique, passagers et hommes d’équipage étaient à cheval !Le capitaine, cavalier émérite, montait un pur-sang de courses, il portait un costume de chasse et sonnait du cor pour diriger la manœuvre, quant à moi, ayant horreur de l’équitation, j’avais pu obtenir de passer mes journées sur le cheval de bois de la salle de gymnastique. Nous débarquâmes sur une terre nouvelle où les chevaux étaient inconnus ; les indigènes prirent pour un animal à deux têtes les passagers montés de notre navire, ils n’osèrent s’en approcher en proie à la terreur ; moi seul, reconnu semblable à ces êtres primitifs, je fus fait prisonnier par eux. C’est de la prison ou l’on m’enferma que j’écrivis les lignes qui vont suivre. Cette prison était une île absolument déserte le jour, mais la nuit, les habitants d’une grande ville continentale ou le mariage et l’union libre étaient également défendus, s’y donnaient rendez-vous pour faire d’amour, j’ai pù ainsi rapporter de mon exil la plus splendide collection de peignes de femmes qui soit au monde, depuis le triste celluloïd jusqu’à l’écaille la plus transparente, couverte de pierres précieuses. J’ai offert cette collection à l’un de mes oncles, conchyliologiste distingué, chez lequel elle fait pendant à une vitrine de coquillages indiens.
Francis Picabia — Jésus-Christ Rastaquouère -
Femme nue, femme noireVêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté !J’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeux.Et voilà qu’au cœur de l’Été et de Midi, je te découvre Terre promise, du haut d’un haut col calcinéEt ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigle.Femme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’EstTam-tam sculpté, tam-tam tendu qui grondes sous les doigts du VainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l’Aimée.Femme nue, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peauDélices des jeux de l’esprit, les reflets de l’or rouge sur ta peau qui se moireA l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’ÉternelAvant que le Destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
Léopold Sédar Senghor — Chants d’ombre -
C’est une nuit d’été ; nuit dont les vastes ailesFont jaillir dans l’azur des milliers d’étincelles ;Qui, ravivant le ciel comme un miroir terni,Permet à l’œil charmé d’en sonder l’infini ;Nuit où le firmament, dépouillé de nuages,De ce livre de feu rouvre toutes les pages !Sur le dernier sommet des monts, d’où le regardDans un trouble horizon se répand au hasard,Je m’assieds en silence, et laisse ma penséeFlotter comme une mer où la lune est bercée.[…]Que le séjour de l’homme est divin, quand la nuitDe la vie orageuse étouffe ainsi le bruit !
Alphonse de Lamartine — “Une nuit d’été” -
[…] « j’ai voulu suivre un pétale de rose. Il a dansé sur la cascade, puis une pie l’a emporté dans les branches d’un chêne. Il a repris sa course avec le vent et, la nuit, a rêvé parmi les colonnes de marbre. Le voici sur la table d’un poète, lequel déjà l’immortalise, non sans mentir un peu. Dans un monde meilleur que le mien, je choisirais, je crois, d’être un pétale. »
Alain Bosquet — Le tourment de Dieu -
« Eh après tout, vous n’avez qu ’à vous répéter le proverbe arabe “Les chiens aboient, la caravane passe.” » Ce conseil que m’avait donné Gide m’est revenu bien des fois à la mémoire. Et à l’occasion je me représente (sur le mode romantique le plus désuet) comme un vagabond à l’échelle de la planète, un de ces voyageurs en train d’errer la nuit au milieu du désert, et passant près de campements désolés aux feux éteints, où de farouches natifs sont tapis (…)
Truman Capote — Les chiens aboient -
Il restait couché toute la journée sur un lit, il fumait, il lisait des livres policiers, mes brochures. Il fermait les yeux, ça durait des heures, comme ça. Il n’écrivait pas. Ça a duré deux mois. Je commençais à m’inquiéter, je ne l’avais jamais vu écrire de ma vie. Une nuit, il s’est levé brusquement, s’est mis à la table et s’est mis à écrire. Là, son visage s’est transformé, il faisait peur. Sa bouche se crispait. Il était d’une nervosité incroyable. Il a écrit sa pièce en huit jours sans presque de ratures. J’ai compris que lorsqu’il fermait les yeux, étendu sur le lit, il faisait sa pièce dans sa tête, phrase par phrase, acte par acte. A la table, il devenait son propre secrétaire.
Jean Marais — interviewé à la radio française -
C’est une chose étrange à la fin que le mondeUn jour je m’en irai sans en avoir tout ditCes moments de bonheur ces midi d’incendieLa nuit immense et noire aux déchirures blondes […]Il y aura toujours un couple frémissantPour qui ce matin-là sera l’aube premièreIl y aura toujours l’eau le vent la lumièreRien ne passe après tout si ce n’est le passant […]Malgré tout je vous dis que cette vie fut telleQu’à qui voudra m’entendre à qui je parle iciN’ayant plus sur la lèvre un seul mot que merciJe dirai malgré tout que cette vie fut belle
Louis Aragon — Les Yeux et la mémoire