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Il y a 103 citations sur le parler.
Cette fumée estompait sans la voiler la Tourgue dont la haute plate-forme dominait tout l’horizon. Entre cette plate-forme et la guillotine il n’y avait que l’intervalle du ravin. De l’une à l’autre on pouvait se parler. Victor Hugo — Quatrevingt-treize
Il passa contre nous, ne s’interrompit pas de parler à sa voisine, et nous fit du coin de son œil bleu un petit signe en quelque sorte intérieur aux paupières et qui, n’intéressant pas les muscles de son visage, put passer parfaitement inaperçu de son interlocutrice ; mais, cherchant à compenser par l’intensité du sentiment le champ un peu étroit où il en circonscrivait l’expression, dans ce coin d’azur qui nous était affecté il fit pétiller tout l’entrain de la bonne grâce qui dépassa l’enjouement, frisa la malice ; Marcel Proust — Du côté de chez Swann
« Un jour que le peuple romain réclamait instamment et hors de propos une distribution de blé, Caton, essayant de l'en détourner, commença ainsi son discours : « Citoyens, il est difficile de parler à un ventre qui n'a point d'oreilles. » (239) Plutarque — Vie de Caton
ACTE I - SCENE PREMIEREDORANTE.Ce mage, qui d'un mot renverse la nature,N'a choisi pour palais que cette grotte obscure.La nuit qu'il entretient sur cet affreux séjour,N'ouvrant son voile épais qu'aux rayons d'un faux jour,De leur éclat douteux n'admet en ces lieux sombresQue ce qu'en peut souffrir le commerce des ombres.N'avancez pas : son art au pied de ce rocherA mis de quoi punir qui s'en ose approcher ;Et cette large bouche est un mur invisible,Où l'air en sa faveur devient inaccessible,Et lui fait un rempart, dont les funestes bordsSur un peu de poussière étalent mille morts.Jaloux de son repos plus que de sa défense,Il perd qui l'importune, ainsi que qui l'offense ;Malgré l'empressement d'un curieux désir,Il faut, pour lui parler, attendre son loisir :Chaque jour il se montre, et nous touchons à l'heureOù pour se divertir il sort de sa demeure.PRIDAMANT.J'en attends peu de chose, et brûle de le voir.J'ai de l'impatience, et je manque d'espoir.Ce fils, ce cher objet de mes inquiétudes,Qu'ont éloigné de moi des traitements trop rudes,Et que depuis dix ans je cherche en tant de lieux,A caché pour jamais sa présence à mes yeux.Sous ombre qu'il prenait un peu trop de licence,Contre ses libertés je roidis ma puissance ;Je croyais le dompter à force de punir,Et ma sévérité ne fit que le bannir.Mon âme vit l'erreur dont elle était séduite :Je l'outrageais présent, et je pleurai sa fuite ;Et l'amour paternel me fit bientôt sentirIl l'a fallu chercher : j'ai vu dans mon voyageLe Pô, le Rhin, la Meuse, et la Seine, et le Tage :Toujours le même soin travaille mes esprits ;Et ces longues erreurs ne m'en ont rien appris.Enfin, au désespoir de perdre tant de peine,Et n'attendant plus rien de la prudence humaine,Pour trouver quelque borne à tant de maux soufferts,J'ai déjà sur ce point consulté les enfers.J'ai vu les plus fameux en la haute scienceDont vous dites qu'Alcandre a tant d'expérience :On m'en faisait l'état que vous faites de lui,Et pas un d'eux n'a pu soulager mon ennui.L'enfer devient muet quand il me faut répondre,Ou ne me répond rien qu'afin de me confondre.[…] Corneille — L'illusion comique
[…] Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vueUn trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;Je sentis tout mon corps et transir et brûler ; […] Racine — Phèdre
LE MILAN ET LE ROSSIGNOLAprès que le Milan, manifeste voleur,Eut répandu l'alarme en tout le voisinageEt fait crier sur lui les enfants du village,Un Rossignol tomba dans ses mains, par malheur.Le héraut du printemps lui demande la vie :« Aussi bien que manger en qui n'a que le son ?Écoutez plutôt ma chanson ;Je vous raconterai Térée et son envie.— Qui, Térée ? est-ce un mets propre pour les Milans ?— Non pas, c'était un Roi dont les feux violentsMe firent ressentir leur ardeur criminelle :Je m'en vais vous en dire une chanson si belleQu'elle vous ravira : mon chant plaît à chacun. »Le Milan alors lui réplique :« Vraiment, nous voici bien : lorsque je suis à jeun,Tu me viens parler de musique.— J'en parle bien aux Rois. — Quand un roi te prendra,Tu peux lui conter ces merveilles.Pour un Milan, il s'en rira :Ventre affamé n'a point d'oreilles. Jean de La Fontaine — Fables
C'est dans ce bienheureux centre où si le ventre affamé qui n'a point d'oreilles pouvait parler, il dirait bien, n'en déplaise aux puissances de la terre, que messieurs les chartiers savourent des plaisirs dont les rois et les princes ne sont pas capables. Théophile de Viau — Libertins du XVIIᵉ siècle
Pour la troisième fois, j'ai refusé de recevoir l'aumônier. Je n'ai rien à lui dire, je n'ai pas envie de parler, je le verrai bien assez tôt. Ce qui m'intéresse en ce moment, c'est d'échapper à la mécanique, de savoir si l'inévitable peut avoir une issue. On m'a changé de cellule. De celle-ci, lorsque je suis allongé, je vois le ciel et je ne vois que lui. Toutes mes journées se passent à regarder sur son visage le déclin des couleurs qui conduit le jour à la nuit. Couché, je passe les mains sous ma tête et j'attends. Je ne sais combien de fois je me suis demandé s'il y avait des exemples de condamnés à mort qui eussent échappé au mécanisme implacable, disparu avant l'exécution, rompu les cordons d'agents. Je me reprochais alors de n'avoir pas prêté assez d'attention aux récits d'exécution. On devrait toujours s'intéresser à ces questions. On ne sait jamais ce qui peut arriver. Comme tout le monde, j'avais lu des comptes rendus dans les journaux. Mais il y avait certainement des ouvrages spéciaux que je n'avais jamais eu la curiosité de consulter. Là, peut-être, j'aurais trouvé des récits d'évasion. J'aurais appris que dans un cas au moins la roue s'était arrêtée, que dans cette préméditation irrésistible, le hasard et la chance, une fois seulement, avaient changé quelque chose. Une fois ! Albert Camus — L’étranger
Quant il furent amdui ensamble, si li fet lors un parlement de paroles ou il li ment : por passer les chievres, les chous,sachiez qu’il n’estoit mie fous. Puis li sot bien trere par l’oel la plume. « Seneschaus, ge voel a vos parler mout a loisir. Jean Renart — Le Roman de la Rose
Où étais-je ? Où étais-je ? Je voulais savoir à tout prix, je voulais parler, je voulais arracher la sphère de cuivre qui emprisonnait ma tête. Mais je capitaine Nemo vint à moi et m'arrêta d'un geste. Puis, ramassant un morceau de pierre crayeuse, il s'avance vers un roc de basalte noir et traça ce seul mot : Atlantide. Jules Verne — Vingt mille lieues sous les mers
Il reste à parler d'un état de l'âme qui, ce nous semble, n'a pas encore été bien observé : c'est celui qui précède le développement des passions, lorsque nos facultés, jeunes, actives, entières, mais renfermées, ne se sont exercées que sur elles-mêmes, sans but et sans objet. Plus les peuples avancent en civilisation, plus cet état du vague des passions augmente ; car il arrive alors une chose fort triste : le grand nombre d'exemples qu'on a sous les yeux, la multitude de livres qui traitent de l'homme et de ses sentiments rendent habile sans expérience. On est détrompé sans avoir joui ; il reste encore des désirs, et l'on n'a plus d'illusions. L'imagination est riche, abondante et merveilleuse ; l'existence pauvre, sèche et désenchantée. On habite avec un cœur plein un monde vide, et sans avoir usé de rien on est désabusé de tout. Chapitre IX — 2e partie
Nous avons marché sans parler quelque temps le long de la digue. Nous étions à l’extérieur de Cannes. Tu la connais depuis longtemps, Claude? Non. Nous nous étions vus deux fois à Paris. Et puis, le hasard. nous sommes dans le même hôtel. Roger Nimier — Les Épées
Il parut alors une beauté à la cour, qui attira les yeux de tout le monde, et l'on doit croire que c'était une beauté parfaite, puisqu'elle donna de l'admiration dans un lieu où l'on était si accoutumé à voir de belles personnes. Elle était de la même maison que le vidame de Chartres, et une des plus grandes héritières de France. Son père était mort jeune, et l'avait laissée sous la conduite de madame de Chartres, sa femme, dont le bien, la vertu et le mérite étaient extraordinaires. Après avoir perdu son mari, elle avait passé plusieurs années sans revenir à la cour. Pendant cette absence, elle avait donné ses soins à l'éducation de sa fille ; mais elle ne travailla pas seulement à cultiver son esprit et sa beauté ; elle songea aussi à lui donner de la vertu et à la lui rendre aimable. La plupart des mères s'imaginent qu'il suffit de ne parler jamais de galanterie devant les jeunes personnes pour les en éloigner. Madame de Chartres avait une opinion opposée ; elle faisait souvent à sa fille des peintures de l'amour ; elle lui montrait ce qu'il a d'agréable pour la persuader plus aisément sur ce qu'elle lui en apprenait de dangereux ; elle lui contait le peu de sincérité des hommes, leurs tromperies et leur infidélité, les malheurs domestiques où plongent les engagements ; et elle lui faisait voir, d'un autre côté, quelle tranquillité suivait la vie d'une honnête femme, et combien la vertu donnait d'éclat et d'élévation à une personne qui avait de la beauté et de la naissance. Mais elle lui faisait voir aussi combien il était difficile de conserver cette vertu, que par une extrême défiance de soi-même, et par un grand soin de s'attacher à ce qui seul peut faire le bonheur d'une femme, qui est d'aimer son mari et d'en être aimée.Cette héritière était alors un des grands partis qu'il y eût en France ; et quoiqu'elle fût dans une extrême jeunesse, l'on avait déjà proposé plusieurs mariages. Madame de Chartres, qui était extrêmement glorieuse, ne trouvait presque rien digne de sa fille ; la voyant dans sa seizième année, elle voulut la mener à la cour. Lorsqu'elle arriva, le vidame alla au-devant d'elle ; il fut surpris de la grande beauté de mademoiselle de Chartres, et il en fut surpris avec raison. La blancheur de son teint et ses cheveux blonds lui donnaient un éclat que l'on n'a jamais vu qu'à elle ; tous ses traits étaient réguliers, et son visage et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes. Mme de La Fayette — La Princesse de Clèves
Phédon a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre; il dort peu, et d’un sommeil fort léger; il est abstrait, rêveur, et il a avec de l’esprit l’air d’un stupide: il oublie de dire ce qu’il sait, ou de parler d’événements qui lui sont connus; et s’il le fait quelquefois, il s’en tire mal, il croit peser à ceux à qui il parle, il conte brièvement, mais froidement; il ne se fait pas écouter, il ne fait point rire. Il applaudit, il sourit à ce que les autres lui disent, il est de leur avis; il court, il vole pour leur rendre de petits services. Il est complaisant, flatteur, empressé; il est mystérieux sur ses affaires, quelquefois menteur; il est superstitieux, scrupuleux, timide. Il marche doucement et légèrement, il semble craindre de fouler la terre; il marche les yeux baissés, et il n’ose les lever sur ceux qui passent. Il n’est jamais du nombre de ceux qui forment un cercle pour discourir; il se met derrière celui qui parle, recueille furtivement ce qui se dit, et il se retire si on le regarde. Il n’occupe point de lieu, il ne tient point de place; il va les épaules serrées, le chapeau abaissé sur ses yeux pour n’être point vu; il se replie et se renferme dans son manteau; il n’y a point de rues ni de galeries si embarrassées et si remplies de monde, où il ne trouve moyen de passer sans effort, et de se couler sans être aperçu. Si on le prie de s’asseoir, il se met à peine sur le bord d’un siège; il parle bas dans la conversation, et il articule mal; libre néanmoins sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu des ministres et du ministère. Il n’ouvre la bouche que pour répondre; il tousse, il se mouche sous son chapeau, il crache presque sur soi, et il attend qu’il soit seul pour éternuer, ou, si cela lui arrive, c’est à l’insu de la compagnie: il n’en coûte à personne ni salut ni compliment. Il est pauvre. Phédon — « Des Biens de fortune »
Alors lui me répondit avec un air de reproche triste « Au moins, vous savez bien, frère, que je suis changé maintenant et qu'il y a quelque chose qui est bien fini ce n'est pas de cela que vous voulez parler ? » Et, moi, je serrai la main de mon frère Yves, en essayant de sourire comme quelqu'un qui aurait tout à fait confiance. Pierre Loti — Mon frère Yves
Libre alors aux médecins de parler de « tendances paranoïaques », ce qui n'était certes pas le cas de l'ambassadeur de France, bien connu par sa lucidité et son self-control souriant et très anglais, mais comment se protéger contre ces « tendances » lorsqu'elles se manifestent chez les autres et s'exercent à vos dépens ? Romain Gary — Europa
De Santa Cruz, tout a été dit. Mais si j’avais à en parler, j’oublierais les cortèges sacrés qui gravissent la dure colline, aux grandes fêtes, pour évoquer d’autres pèlerinages. Albert Camus — L’été
Jour après jour, nous attendions donc tous les quatre, Maman, ma sœur Milou, mon frère et moi, un départ pour l’Allemagne dont nous ignorions aussi bien la date que la destination, avec le seul espoir de ne pas être séparés. Personne n’avait entendu parler d’Auschwitz, dont le nom n’était jamis prononcé. Comment uarions-nous pu avoir une idée quelconque de l’avenir que les nazis nous réservaient ? Aujourd’hui, il est devenu difficile de réaliser à quel point l’information, sous l’Occupation, était rationnée et cloisonnée. Elle l’était du fait de la police et de la censure. On a peine à croire, à présent, que personne, hors les quartiers concernés, n’ait entendu parler de la grande rafle du Vél d’Hiv de juollet 1942, laquelle, deouis lors, a fait couler tant d’encre et nourri tant de polémiques. Lorsque, bien plus tard, j’en ai eu moi-même connaissance, j’ai partagé la stupeur collective face à la révélation de la police parisienne. Simone Veil — Une vie
J'use de ma permission de rire tout mon soûl, quand je vous entends parler sérieusement de cet ivrogne. Renan — Drames philosophiques
Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, l'œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée. Il parle avec confiance ; il fait répéter celui qui l’entretient, et il ne goûte que médiocrement tout ce qu’il lui dit. Il déploie un ample mouchoir et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut. Il dort le jour, il dort la nuit, et profondément ; il ronfle en compagnie. Il occupe à table et à la promenade plus de place qu’un autre. Il tient le milieu en se promenant avec ses égaux ; il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’on marche : tous se règlent sur lui. Il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole : on ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler ; on est de son avis, on croit les nouvelles qu’il débite. S’il s’assied, vous le voyez s’enfoncer dans un fauteuil, croiser les jambes l’une sur l’autre, froncer le sourcil, abaisser son chapeau sur ses yeux pour ne voir personne, ou le relever ensuite, et découvrir son front par fierté et par audace. Il est enjoué, grand rieur, impatient, présomptueux, colère, libertin, politique, mystérieux sur les affaires du temps ; il se croit du talent et de l’esprit. Il est riche. Portrait de Giton — Les Caractères