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Citations sur le surgir
Il y a 20 citations sur le surgir.
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Comme ils franchissaient le seuil, des formes invisibles surgirent, brusquement, de l'ombre. C'était les slouguis qui se précipitaient, menaçants. Mme Durelle poussa un cri.
Victor Margueritte — Un cœur farouche -
Sois soumis, mon chagrin, puis dans ton coin sois sourd.Tu la voulais la nuit, la voilà, la voici :Un air tout obscurci a chu sur nos faubourgs,Ici portant la paix, là-bas donnant souci.Tandis qu’un vil magma d’humains, oh, trop banals,Sous l’aiguillon Plaisir, guillotin sans amour,Va puisant son poison aux puants carnavals,Mon chagrin, saisis-moi la main ; là, pour toujours,Loin d’ici. Vois s’offrir sur un balcon d’oubli,Aux habits pourrissants, nos ans qui sont partis ;Surgir du fond marin un guignon souriant ;Apollon moribond s’assoupir sous un arc,Puis ainsi qu’un drap noir traînant au clair ponant,Ouïs, Amour, ouïs la Nuit qui sourd du parc.
George Perec — La Disparition -
Lumikki sursauta en voyant surgir un garçon au tournant du couloir : Tuukka. Dix-huit ans, acteur en herbe se croyant sorti de la cuisse de Jupiter, et fils du proviseur.
Salla Simukka — Je m'appelle Lumikki -
Bloch était flatté de surnager seul dans le naufrage universel. Mais là encore il aurait voulu des précisions, savoir de quelles inepties voulait parler M. de Norpois. Bloch avait le sentiment de travailler dans la même voie que beaucoup, il ne s'était pas cru si exceptionnel. Il revint à l'affaire Dreyfus, mais ne put arriver à démêler l'opinion de M. de Norpois. Il tâcha de le faire parler des officiers dont le nom revenait souvent dans les journaux à ce moment-là ; ils excitaient plus la curiosité que les hommes politiques mêlés à la même affaire, parce qu'ils n'étaient pas déjà connus comme ceux-ci et, dans un costume spécial, du fond d'une vie différente et d'un silence religieusement gardé, venaient seulement de surgir et de parler, comme Lohengrin descendant d'une nacelle conduite par un cygne.
Marcel Proust — À la recherche du temps perdu -
Pour moi, l’auto, et sa manière fourbe de surgir, de s’emballer follement dans une sale histoire avec des effets de chapeaux de roues grinçants, était responsable d’un climat général qui allait se dégrader.
Anne de Gasperi — Trois grains de sable dans le Niger -
Et Blum : « Et alors … » (mais cette fois Iglésia n’était plus là : tout l’été ils le passèrent une pioche (ou, quand ils avaient de la chance, une pelle) en main à des travaux de terrassement puis au début de l’automne ils furent envoyés dans une ferme arracher les pommes de terre et les betteraves, puis Georges essaya de s’évader, fut repris (par hasard, et non par des soldats ou des gendarmes envoyés à sa recherche mais – c’était un dimanche matin – dans un bois où il avait dormi, par de paisibles chasseurs), puis il fut ramené au camp et mis en cellule, puis Blum se fit porter malade et rentra lui aussi au camp, et ils y restèrent tous les deux, travaillant pendant les mois d’hiver à décharger des wagons de charbon, maniant les larges fourches, se relevant lorsque la sentinelle s’éloignait, minables et grotesques silhouettes, avec leurs calots rabattus sur leurs oreilles, le col de leurs capotes relevé, tournant le dos au vent de pluie ou de neige et soufflant dans leurs doigts tandis qu’ils essayaient de se transporter par procuration c’est-à-dire au moyen de leur imagination, c’est-à-dire en rassemblant et combinant tout ce qu’ils pouvaient trouver dans leur mémoire en fait de connaissances vues, entendues ou lues, de façon-là, au milieu des rails mouillés et luisants, des wagons noirs, des pins détrempés et noirs, dans la froide et blafarde journée d’un hiver saxon – à faire surgir les images chatoyantes et lumineuses au moyen de l’éphémère, l’incantatoire magie du langage, des mots inventés dans l’espoir de rendre comestible – comme ces pâtes vaguement sucrées sous lesquelles on dissimule aux enfants les médicaments amers – l’innommable réalité dans cet univers futile, mystérieux et violent dans lequel, à défaut de leur corps, se mouvaient leur esprit: quelque chose peut-être sans plus de réalité qu’un songe, que les paroles sorties de leurs lèvres: des sons, du bruit pour conjurer le froid, les rails, le ciel livide, les sombres pins.
Claude Simon — La Route des Flandres -
Voilà. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, son oncle, qui est le roi. Elle pense qu’elle va mourir, qu’elle est jeune et qu’elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n’y a rien à faire. Elle s’appelle Antigone et il va falloir qu’elle joue son rôle jusqu’au bout… Et, depuis que ce rideau s’est levé, elle sent qu’elle s’éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène, qui bavarde et rit avec un jeune homme, de nous tous, qui sommes là bien tranquilles à la regarder, de nous qui n’avons pas à mourir ce soir.Le jeune homme avec qui parle la blonde, la belle, l’heureuse Ismène, c’est Hémon, le fils de Créon. Il est le fiancé d’Antigone. Tout le portait vers Ismène : son goût de la danse et des jeux, son goût du bonheur et de la réussite, sa sensualité aussi, car Ismène est bien plus belle qu’Antigone ; et puis un soir, un soir de bal où il n’avait dansé qu’avec Ismène, un soir où Ismène avait été éblouissante dans sa nouvelle robe, il a été trouver Antigone qui rêvait dans un coin, comme en ce moment, ses bras entourant ses genoux, et il lui a demandé d’être sa femme. Personne n’a jamais compris pourquoi. Antigone a levé sans étonnement ses yeux graves sur lui et elle lui a dit « oui » avec un petit sourire triste… L’orchestre attaquait une nouvelle danse, Ismène riait aux éclats, là-bas, au milieu des autres garçons, et voilà, maintenant, lui, il allait être le mari d’Antigone. Il ne savait pas qu’il ne devait jamais exister de mari d’Antigone sur cette terre et que ce titre princier lui donnait seulement le droit de mourir.Cet homme robuste, aux cheveux blancs, qui médite là, près de son page, c’est Créon. C’est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. Avant, du temps d’Œdipe, quand il n’était que le premier personnage de la cour, il aimait la musique, les belles reliures, les longues flâneries chez les petits antiquaires de Thèbes. Mais Œdipe et ses fils sont morts. Il a laissé ses livres, ses objets, il a retroussé ses manches, et il a pris leur place.Quelquefois, le soir, il est fatigué, et il se demande s’il n’est pas vain de conduire les hommes. Si cela n’est pas un office sordide qu’on doit laisser à d’autres, plus frustes… Et puis, au matin, des problèmes précis se posent, qu’il faut résoudre, et il se lève, tranquille, comme un ouvrier au seuil de sa journée.La vieille dame qui tricote, à côté de la nourrice qui a élevé les deux petites, c’est Eurydice, la femme de Créon. Elle tricotera pendant toute la tragédie jusqu’à ce que son tour vienne de se lever et de mourir. Elle est bonne, digne, aimante. Elle ne lui est d’aucun secours. Créon est seul. Seul avec son petit page qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui.Ce garçon pâle, là-bas, au fond, qui rêve adossé au mur, solitaire, c’est le Messager. C’est lui qui viendra annoncer la mort d’Hémon tout à l’heure. C’est pour cela qu’il n’a pas envie de bavarder ni de se mêler aux autres. Il sait déjà…Enfin les trois hommes rougeauds qui jouent aux cartes, leurs chapeaux sur la nuque, ce sont les gardes. Ce ne sont pas de mauvais bougres, ils ont des femmes, des enfants, et des petits ennuis comme tout le monde, mais ils vous empoigneront les accusés le plus tranquillement du monde tout à l’heure. Ils sentent l’ail, le cuir et le vin rouge et ils sont dépourvus de toute imagination. Ce sont les auxiliaires toujours innocents et toujours satisfaits d’eux-mêmes, de la justice. Pour le moment, jusqu’à ce qu’un nouveau chef de Thèbes dûment mandaté leur ordonne de l’arrêter à son tour, ce sont les auxiliaires de la justice de Créon.Et maintenant que vous les connaissez tous, ils vont pouvoir vous jouer leur histoire. Elle commence au moment où les deux fils d’Œdipe, Étéocle et Polynice, qui devaient régner sur Thèbes un an chacun à tour de rôle, se sont battus et entre-tués sous les murs de la ville, Étéocle l’aîné, au terme de la première année de pouvoir, ayant refusé de céder la place à son frère. Sept grands princes étrangers que Polynice avait gagnés à sa cause ont été défaits devant les sept portes de Thèbes. Maintenant la ville est sauvée, les deux frères ennemis sont morts et Créon, le roi, a ordonné qu’à Étéocle, le bon frère, il serait fait d’imposantes funérailles, mais que Polynice, le vaurien, le révolté, le voyou, serait laissé sans pleurs et sans sépulture, la proie des corbeaux et des chacals… Quiconque osera lui rendre les devoirs funèbres sera impitoyablement puni de mort.Pendant que le Prologue parlait, les personnages sont sortis un à un. Le Prologue disparaît aussi. L’éclairage s’est modifié sur la scène. C’est maintenant une aube grise et livide dans une maison qui dort. Antigone entr’ouvre la porte et rentre de l’extérieur sur la pointe de ses pieds nus, ses souliers à la main. Elle reste un instant immobile à écouter. La nourrice surgit.
Jean Anouilh — Antigone -
La grande aventure, c’est de voir surgir quelque chose d’inconnu, chaque jour, dans le même visage. C’est plus grand que tous les voyages autour du monde.
Alberto Giacometti -
Le tournant peut surgir de façon subite. Une force fait signe, un soutien survient, une alliance qu'on n'attendait plus se décide, rien n'est fatal ni définitif.
Philippe Sollers — Passion fixe -
D'un amas de pierres peuvent surgir soit des fondations, soit des ruines.
Valeriu Butulescu — Aphorismes -
Je ne vois que la photographie qui puisse, autant que le baiser, faire surgir de ce que nous croyons une chose à aspect défini les cent autres choses qu’elle est tout aussi bien, puisque chacune est relative à une perspective non moins légitime.
Lee Friedlander -
Derrière tout problème négligeable, il y en a un de taille prêt à surgir.
Paul Hughes -
Demain du ventre du temps surgira une année nouvelle.
Njabulo S. Ndebele — Portrait de l'amour -
Qu'il est difficile d'être oublié ! Pendant des années, parfois pendant des siècles, les écrits témoins ne cessent de surgir. Comme les villes mortes sortent des sables, les paquets de lettres jaunies émergent des coffrets.
André Maurois — La Vie de Byron -
Pour le colonisé, la vie ne peut surgir que du cadavre en décomposition du colon.
Frantz Fanon — Les damnés de la Terre -
Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons d’eux.
René Char — Chants de la Balandrane -
Voir surgir quelque chose d’inconnu, chaque jour, dans le même visage, c’est peut-être cela la grande aventure…
François Poirié — Comme une apparition -
Un jour on verra surgir à l'horizon des menaces de paix. Or, nous ne sommes pas prêts.
Tristan Bernard — Le poil civil -
Comme la femme enceinte ne sait pas ce que son ventre prépare, nous ignorons quelles merveilles peuvent encore surgir du développement de la complexité cosmique.
Hubert Reeves — Intimes convictions -
La plus haute tâche de la tradition est de rendre au progrès la politesse qu'elle lui doit et de permettre au progrès de surgir de la tradition comme la tradition a surgi du progrès.
Jean d'Ormesson — Réponse au discours de réception à l'Académie française de Madame Yourcenar