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Citations sur le deux - Page 4
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Il y a, dans les écrits du docteur Tillotson, un argument contre la présence réelle, aussi précis, aussi solide, & aussi bien exprimé, qu’on en puisse imaginer contre une doctrine qui mérite si peu d’être sérieusement réfutée. On convient universellement, dit ce docte prélat, que l’autorité, tant de l’écriture que de la tradition, ne repose que sur le témoignage des apôtres, qui furent témoins oculaires des miracles par lesquels notre sauveur prouva sa mission divine. L’évidence de la vérité de la religion chrétienne est donc moindre que l’évidence de la fidélité de nos sens : elle n’étoit pas plus grande dans les premiers auteurs de notre religion, & il est manifeste qu’elle a dû diminuer en passant d’eux à leurs disciples : de sorte que nous ne pouvons jamais être aussi certains de la vérité de leur témoignage, que nous le sommes des objets immédiats de nos sens. Or, une moindre évidence ne sauroit détruire une évidence supérieure : donc, quand même la doctrine de la présence réelle seroit clairement révélée dans l’écriture, on ne pourroit pourtant la recevoir, sans choquer les loix les plus saines du raisonnement, car, d’un côté, elle est en contradiction avec les sens, & de l’autre, les fondemens qu’on lui donne, l’écriture & la tradition, ont moins d’évidence, que ces mêmes sens, tant qu’on ne les considere que comme preuves externes, & quelles ne sont point adressées au cœur par l’opération immédiate du Saint-Esprit.Rien ne vaut mieux qu’un argument décisif de cette nature, pour fermer la bouche à la stupide bigoterie & à la superstition orgueilleuse, & pour nous délivrer de leur ridicule empire. Je me flatte d’avoir découvert un argument semblable, qui, s’il est juste, fera pour le savant & pour le sage, un boulevard éternel contre toute sorte d’illusions superstitieuses : & son utilité, par conséquent, s’étendra aussi loin que la durée du monde ; car, je présume que l’histoire profane ne cessera qu’alors de nous raconter des miracles & des prodiges.
David Hume — Essais philosophiques sur l’entendement humain. -
Pour moi, tel que vous me voyez, je m’en escrime un peu quand je veux ; et vous verrez courir de ma façon, dans les belles ruelles de Paris, deux cents chansons, autant de sonnets, quatre cents épigrammes et plus de mille madrigaux, sans compter les énigmes et les portraits.
Molière — Les Précieuses ridicules -
[…] Ennemonde n'est pas un poids mort, c'est un poids vivant de ses regards (toujours si beaux !), de sa chaleur, de son intelligence précise, dont elle a donné tout le long du jour des quantités de preuves et qu'on sent en train de s'intéresser au fait qu'ils sont trois hommes, dont deux de ses fils, à la tripoter. Cet ensemble fait beaucoup plus de cent trente-cinq à cent quarante kilos. Enfin ils l'étendent sur le lit de sangles
Jean Giono — Ennemonde et autres caractères -
La voiture fonce sur la nationale à cent cinquante à l'heure. L'effet du champagne rend toutefois le passager légèrement euphorique. À l'avant, les deux filles fument cigarette sur cigarette et chantent avec la musique «. Et toi François, et toi Sophie, as-tu réussi ton pari ? »
Benoît Duteurtre — Drôle de temps -
Un trouble naïf et touchant se peint sur les traits charmants de la jeune fille. Henri sent s'arrêter le battement de son cœur, un doux regard s'échange rapidement entre eux. Henri, en retournant au château, apprend que cette aimable enfant s'appelle Fleurette et qu'elle habite avec son père, jardinier du château (...). Dès le lendemain, le jardinage est devenu la passion dominante de Henri (...). Depuis près d'un mois, le sensible Henriot en contait à Fleurette; tous deux s'aimaient éperdument, sans trop savoir encore ce qu'ils se voulaient, ils l'apprirent un soir à la fontaine.
Horace Raisson — Code galant ou art de conter fleurette -
On était sûr que Dominique et Luc avaient été dirigés sur Fresnes. Ils n'étaient pas au secret et on pouvait leur envoyer deux colis par mois.
Marie-Anne Comnène — Fin d'Arabelle -
Et les deux messieurs, ayant mis serviette au col, comme les vachers, commencèrent de dîner.
Montherlant — Célibataires -
— C'est bien, que je leur disais à mes trois dégoûtants, pas qu'elle est belle mon histoire ? … [...]— Brigadier, qu'il me fait comme ça, il se servait des deux mains pour faire marcher sa bouche… On est pas contents nous autres, c'est pas d'une histoire comme ça que nous autres on a besoin …
Louis-Ferdinand Céline — Guerre -
Tout est sur la table, dit l’Adélaïde. Tu trouveras deux oignons épluchés à côté de la miche. J’ai mis la bouteille à refroidir dans le seau.
Aymé — Jument -
Je composai deux volumes. J’y mis un titre qui en déterminait le caractère un peu trop printanier.
Fromentin — Dominique -
Car l'union fait la force quand les hommes sont faibles :À nous deux, nous pourrions combattre même des braves !
Homère — Iliade -
À l’heure dite, Cyrus releva ce point, et, en mettant l’un par l’autre avec le soleil deux arbres qui devaient lui servir de repères, il obtint ainsi une méridienne invariable pour ses opérations ultérieures.
Jules Verne — Île mystérieuse -
Les deux époux vécurent, tant bien que mal, avec la pension de retraite, qui, grâce à la recommandation du général Bubna, ne se fit pas attendre.
Stendhal — Chartreuse -
Ils ont ensuite produit des contenus muséographiques pour la journée "mission pilotage", organisée sur deux jours, en mai : des sets de tables pour la brasserie, des quizz et des jeux ainsi qu’une marelle thématique. Certains de ces contenus sont destinés du reste à être pérennisés dans l’espace muséal.
La Dépêche — Blagnac. Les collégiens et l’histoire des femmes dans l’aéronautique -
Elle resta adossée à une portière, croisa les bras en attendant que l'un des deux crétins comprenne avant l'autre que la balade était terminée.
Tonino Benacquista — Malavita -
Qui est Théo Vanderputte, une « si vieille personne » qui s'occupe des enfants des résistants fusillés, jusqu'au jour où ces enfants «s'occupent» de lui à leur tour ? Un monstre qui dort peut-être toujours au fond de l'humain, dans cette tanière obscure où l'Histoire va si souvent le chercher, le réveiller, l'utiliser ? Un martyr, un traître, ou les deux à la fois ?
Romain Gary — La bonne moitié -
Délicieuse maison, n’est-ce pas ? Les deux têtes que vous voyez là sont celles d’esclaves nègres. Une enseigne. La maison appartenait à un vendeur d’esclaves. Ah on ne cachait pas son jeu, en ce temps-là. On avait du coffre, on disait « Voilà, j’ai pignon sur rue, je trafique des esclaves (…) »
Albert Camus — La Chute -
Il faut, autant qu'on peut, obliger tout le monde :On a souvent besoin d'un plus petit que soi.De cette vérité deux Fables feront foi,Tant la chose en preuves abonde.Entre les pattes d'un lionUn rat sortit de terre assez à l'étourdie.Le roi des animaux, en cette occasion,Montra ce qu'il était, et lui donna la vie.Ce bienfait ne fut pas perdu.Quelqu'un aurait-il jamais cruQu'un lion d'un rat eût affaire ?Cependant il advint qu'au sortir des forêtsCe lion fut pris dans des rets,Dont ses rugissements ne le purent défaire.Sire Rat accourut, et fit tant par ses dentsQu'une maille rongée emporta tout l'ouvrage.Patience et longueur de tempsFont plus que force ni que rage.L’autre exemple est tiré d’animaux plus petits.
Jean de La Fontaine — Le Lion et le Rat -
Je veux peindre la France une mère affligée, Qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée. Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts Des tétins nourriciers ; puis, à force de coups D'ongles, de poings, de pieds, il brise le partage Dont nature donnait à son besson l'usage ; Ce voleur acharné, cet Esaü malheureux, Fait dégât du doux lait qui doit nourrir les deux, Si que, pour arracher à son frère la vie,Il méprise la sienne et n'en a plus d'envie.[…] Ni les soupirs ardents, les pitoyables crisNi les soupirs ardents, les pitoyables cris,Ni les pleurs réchauffés ne calment leurs esprits ;Mais leur rage les guide et leur poison les trouble,Si bien que leur courroux par leurs coups se redouble.Leur conflit se rallume et fait si furieuxQue d'un gauche malheur ils se crèvent les yeux.Cette femme éplorée, en sa douleur plus forte ,Succombe à la douleur, mi-vivante, mi-morte ;
Théodore Agrippa d’Aubigné — Je veux peindra la France (Les Tragiques) -
Dans l'hypothèse la plus favorable, si nul créancier nouveau ne survenait, il allait lui rester deux mille francs.
Montherlant — Les Célibataires -
Elle a bien soixante dix ans et elle doit avoir les cheveux blancs; je n'en sais rien; personne n'en sait rien, car elle a toujours un serre-tête noir qui lui colle comme du taffetas sur le crâne; elle a, par exemple, la barbe grise, un bouquet de poils ici, une petite mèche qui frisotte par là, et de tous côtés des poireaux comme des groseilles, qui ont l'air de bouillir sur sa figure.Pour mieux dire, sa tête rappelle par le haut, à cause du serre-tête noir une pomme de terre brûlée et, par le bas, une pomme de terre germée: j'en ai trouvé une gonflée, violette, l'autre matin, sous le fourneau, qui ressemblait à grand tante Agnès comme deux gouttes d'eau.
Jules Vallès — L’enfant -
Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constelléPorte le Soleil noir de la Mélancolie.Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.Suis-je Amour ou Phébus … Lusignan ou Biron ?Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :Modulant tour à tour sur la lyre d’OrphéeLes soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.
El Desdichado — Gérard de Nerval -
Quand Gervaise s’éveilla, vers cinq heures, raidie, les reins brisés, elle éclata en sanglots. Lantier n’était pas rentré. Pour la première fois, il découchait. Elle resta assise au bord du lit, sous le lambeau de perse déteinte qui tombait de la flèche attachée au plafond par une ficelle. Et, lentement, de ses yeux voilés de larmes, elle faisait le tour de la misérable chambre garnie, meublée d’une commode de noyer dont un tiroir manquait, de trois chaises de paille et d’une petite table graisseuse, sur laquelle traînait un pot à eau ébréché. On avait ajouté, pour les enfants, un lit de fer qui barrait la commode et emplissait les deux tiers de la pièce. La malle de Gervaise et de Lantier, grande ouverte dans un coin, montrait ses flancs vides, un vieux chapeau d’homme tout au fond, enfoui sous des chemises et des chaussettes sales ; tandis que, le long des murs, sur le dossier des meubles, pendaient un châle troué, un pantalon mangé par la boue, les dernières nippes dont les marchands d’habits ne voulaient pas. Au milieu de la cheminée, entre deux flambeaux de zinc dépareillés, il y avait un paquet de reconnaissances du mont-de-piété, d’un rose tendre. C’était la belle chambre de l’hôtel, la chambre du premier, qui donnait sur le boulevard.
Émile Zola — L’Assommoir -
Lettre CLIII :Le Vicomte de Valmont à la Marquise de Merteuil.Je réponds sur-le-champ à votre Lettre, et je tâcherai d'être clair ; ce qui n'est pas facile avec vous, quand une fois vous avez pris le parti de ne pas entendre.De longs discours n'étaient pas nécessaires pour établir que chacun de nous ayant en main tout ce qu'il faut pour perdre l'autre, nous avons un égal intérêt à nous ménager mutuellement : aussi, ce n'est pas de cela dont il s'agit. Mais encore entre le parti violent de se perdre, et celui, sans doute meilleur, de rester unis comme nous l'avons été, de le devenir davantage encore en reprenant notre première liaison, entre ces deux partis, dis-je, il y en a mille autres à prendre. Il n'était donc pas ridicule de vous dire, et il ne l'est pas de vous répéter que, de ce jour même, je serai ou votre Amant ou votre ennemi. (…)Deux mots suffisent.Paris, ce 4 décembre 17**.Réponse de la Marquise de Merteuil (écrite au bas de la même Lettre).Eh bien ! la guerre.
Pierre Choderlos de Laclos — Les Liaisons dangereuses -
[...]Un jour au coin du feu nos deux maîtres friponsRegardaient rôtir des marrons.Les escroquer était une très bonne affaire :Nos galands y voyaient double profit à faire,Leur bien premièrement, et puis le mal d'autrui.Bertrand dit à Raton : Frère, il faut aujourd'huiQue tu fasses un coup de maître.Tire-moi ces marrons. Si Dieu m'avait fait naîtrePropre à tirer marrons du feu,Certes marrons verraient beau jeu.Aussitôt fait que dit : Raton avec sa patte,D'une manière délicate,Ecarte un peu la cendre, et retire les doigts,Puis les reporte à plusieurs fois ;Tire un marron, puis deux, et puis trois en escroque.Et cependant Bertrand les croque.Une servante vient : adieu mes gens. RatonN'était pas content, ce dit-on.Aussi ne le sont pas la plupart de ces PrincesQui, flattés d'un pareil emploi,Vont s'échauder en des ProvincesPour le profit de quelque Roi.
Jean de la Fontaine — Fables -
— Une fois, deux fois, trois fois, donnez-vous votre langue au chat ?— Attends !— C'est qu'il a l'air de chercher ! … Oh ! les hommes… Donnez-vous votre langue au chat, oui ou non ?— Eh bien…— Eh bien, la donnez- vous ?
Edmond de Goncourt et Jules de Goncourt — Les Hommes de lettres -
Nous sommes entre nous, mon vieux. Et si Romain était encore là, il se moquerait de vous. Quand j’étais jeune, il n’y avait que deux choses amusantes et assez proches l’une de l’autre pour se haïr à mort et pour se comprendre à demi-mot : le fascisme et le communisme. Ils se sont compris d’ailleurs autant qu’ils se sont haïs, et il n’y a eu que les imbéciles pour pousser des cris d’orfraie à la signature du pacte germano-soviétique.
Jean d’Ormesson — Voyez comme on danse -
L'homme était parti de Marchiennes vers deux heures. Il marchait d'un pas allongé, grelottant sous le coton aminci de sa veste et de son pantalon de velours. Un petit paquet, noué dans un mouchoir à carreaux, le gênait beaucoup ; et il le serrait contre ses flancs, tantôt d'un coude, tantôt de l'autre, pour glisser au fond de ses poches les deux mains à la fois, des mains gourdes que les lanières du vent d'est faisaient saigner. Une seule idée occupait sa tête vide d'ouvrier sans travail et sans gîte, l'espoir que le froid serait moins vif après le lever du jour.
Émile Zola — Germinal -
L’air du bal était lourd ; les lampes pâlissaient. On refluait dans la salle de billard. Un domestique monta sur une chaise et cassa deux vitres ; au bruits des éclats de verre, Madame Bovary tourna la tête et aperçut dans le jardin, contre les carreaux, des faces de paysans qui regardaient. Alors le souvenir des Bertaux lui arriva. Elle revit la ferme, la mare bourbeuse, son père en blouse sous les pommiers, et elle se revit elle-même, comme autrefois, écrémant avec son doigt les terrines de lait dans la laiterie. Mais, aux fulgurations de l’heure présente, sa vie passée, si nette jusqu’alors, s’évanouissait tout entière, et elle doutait presque de l’avoir vécue. Elle était là ; puis autour du bal, il n’y avait plus que l’ombre, étalée sur tout le reste.
Gustave Flaubert — Madame Bovary -
La psychose, elle, est un état chronique de pétage de plombs qui vous fait prendre des vessies pour des lanternes. Les deux principales psychoses sont la schizophrénie et la paranoïa.
Jean-Loup Chiflet — Nouilles ou pâtes : le bon sens des mots -
L’enfant partit avec l’ange et le chien suivit derrière. Cette phrase convient merveilleusement à François d’Assise. On sait de lui peu de choses et c’est tant mieux. Ce qu’on sait de quelqu’un empêche de le connaître. Ce qu’on en dit, en croyant savoir ce qu’on dit, rend difficile de le voir. On dit par exemple : Saint-François-d’Assise. On le dit en somnambule, sans sortir du sommeil de la langue. On ne dit pas, on laisse dire. On laisse les mots venir, ils viennent dans un ordre qui n’est pas le nôtre, qui est l’ordre du mensonge, de la mort, de la vie en société. Très peu de vraie paroles s’échangent chaque jour, vraiment très peu. Peut-être ne tombe-t-on amoureux que pour enfin commencer à parler. Peut-être n’ouvre-t-on un livre que pour enfin commencer à entendre. L’enfant partit avec l’ange et le chien suivit derrière. Dans cette phrase vous ne voyez ni l’ange ni l’enfant. Vous voyez le chien seulement, vous devinez son humeur joyeuse, vous le regardez suivre les deux invisibles : l’enfant – rendu invisible par son insouciance -, l’ange – rendu invisible par sa simplicité. Le chien, oui, on le voit. Derrière. À la traîne. Il suit les deux autres. Il les suit à la trace et parfois il flâne, il s’égare dans un pré, il se fige devant une poule d’eau ou un renard, puis en deux bonds il rejoint les autres, il recolle aux basques de l’enfant et de l’ange. Vagabond, folâtre. L’enfant et l’ange sont sur la même ligne. Peut-être l’enfant tient-il la main de l’ange, pour le conduire, pour que l’ange ne soit pas trop gêné, lui qui va dans le monde visible comme un aveugle en plein jour. Et l’enfant chantonne, raconte ce qui lui passe par la tête, et l’ange sourit, acquiesce – et le chien toujours derrière ces deux-là, tantôt à droite, tantôt à gauche. Ce chien est dans la Bible. Il n’y a pas beaucoup de chiens dans la Bible. Il y a des baleines, des brebis, des oiseaux et des serpents, mais très peu de chiens. Vous ne connaissez même que celui-là, traînant les chemins, suivant ses deux maîtres : l’enfant et l’ange, le rire et le silence, le jeu et la grâce. Chien François d’Assise.
Christian Bobin — Le Très-Bas -
— De quoi ? De quoi ? fit l’ami Pollak Henri, plié en deux par cette extravagante requête.Et de lui expliquer que – minute papillon – il était hors de question de faire des bêtises avant d’y avoir réfléchi, qu’il fallait voir à voir, qu’il avait à l’extérieur, dans le civil, à Montparnasse dont il était natif duquel, y étant né, des copains à lui (c’était nous les copains à lui), et qu’avant toute chose, il allait aller leur demander ce qu’ils en pensaient.
Georges Pérec — Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ? -
La bataille est merveilleuse, la bataille est une mêlée,Le comte Roland ne craint pas de s’exposer.Il frappe de la lance tant que le bois lui dure ;Mais voilà que quinze coups l’ont brisée et perdue.Alors Roland tire Durendal, sa bonne épée nue,Eperonne son cheval et va frapper Chernuble.Il met en pièces le heaume du païen où les escarboucles étincellentLui coupe en deux la coiffe et la chevelure,Lui tranche les yeux et le visage,Le blanc haubert aux mailles si fines,Tout le corps jusqu’à l’enfourchureEt jusque sur la selle qui est couverte de lames d’or.L’épée entre dans le corps du cheval,Lui tranche l’échine sans chercher le joint,Et sur l’herbe drue abat morts le cheval et le cavalier.
La Chanson de Roland — Laisse CX -
R.-L. Dupuy a mieux qu'un violon d'Ingres ; il en a deux le dessin et la sculpture. Il a une prédilection pour la pierre de taille et le travail des « bois flottés Il passe la plus grande partie de ses vacances dans son habitation de troglodyte aux Baux-de Provence où il s'en donne à cœur joie dans les rochers.
Pierre Bruneau — Magiciens de la publicité -
Les femmes avaient paru, près d'un millier de femmes, aux cheveux épars, dépeignés par la course, aux guenilles montrant la peau nue, des nudités de femelles lasses d'enfanter des meurt-de-faim. Quelques-unes tenaient leur petit entre les bras, le soulevaient, l'agitaient, ainsi qu'un drapeau de deuil et de vengeance. D'autres, plus jeunes, avec des gorges gonflées de guerrières, brandissaient des bâtons ; tandis que les vieilles, affreuses, hurlaient si fort, que les cordes de leurs cous décharnés semblaient se rompre. Et les hommes déboulèrent ensuite, deux mille furieux, des galibots, des haveurs, des raccommodeurs, une masse compacte qui roulait d'un seul bloc, serrée, confondue, au point qu'on ne distinguait ni les culottes déteintes, ni les tricots de laine en loques, effacés dans la même uniformité terreuse. Les yeux brûlaient, on voyait seulement les trous des bouches noires, chantant la Marseillaise, dont les strophes se perdaient en un mugissement confus, accompagné par le claquement des sabots sur la terre dure. Au-dessus des têtes, parmi le hérissement des barres de fer, une hache passa, portée toute droite ; et cette hache unique, qui était comme l'étendard de la bande avait, dans le ciel clair, le profil aigu d'un couperet de guillotine.
Émile Zola — Germinal -
Dès qu’ils sont face à face, les deux chevaliers s’élancent l’un contre l’autre à bride abattue et ils se heurtent avec violence. Le choc des lances est tel qu’elles se plient en arc et volent en éclats. Ils prennent leurs épées et se portent de rudes coups qui endommagent les écus, les heaumes et les cottes de maille. Ils font de larges brèches dans le bois des écus, rompent leurs cottes de mailles et se blessent en maints endroits. Ils se rendent leurs coups avec rage comme s’ils respectaient un contrat. Mais souvent, en glissant, les épées atteignent la croupe des chevaux. Elles se rougissent de sang en entaillant le flanc des malheureuses bêtes qui ne tardent pas à tomber mortes toutes les deux. À peine ont-ils roulé à terre, que les deux combattants se ruent à pied l’un contre l’autre. S’ils s’étaient haïs à mort, ils ne se seraient pas battus plus sauvagement avec leurs épées. Ils se frappent à un rythme rapide que celui avec lequel le joueur le plus invétéré lance ses deniers en doublant sa mise chaque fois qu’il perd. (…) Alors il l’assaille de coups redoublés qui pleuvent dru autour de sa tête ; il le bouscule comme un ouragan, le presse et le contraint à céder du terrain. Il le fait reculer et le malmène si durement que l’autre est bien près d’en perdre le souffle et qu’il n’a guère la force de se défendre.
Chrétien de Troyes — Lancelot ou le Chevalier de la charrette -
« Il y a en moi, littérairement parlant, deux bonshommes distincts : un qui est épris de gueulades, de lyrisme, de grands vols d’aigle, de toutes les sonorités de la phrase et des sommets de l’idée ; un autre qui fouille et creuse le vrai tant qu’il peut, qui aime à accuser le petit fait aussi puissamment que le grand, qui voudrait vous faire sentir presque matériellement les choses qu’il reproduit ; celui-là aime à rire et se plaît dans les animalités de l’homme. »
Lettre à Louise Colet — 16 janvier 1852 -
Y a-t-il un signe dans le ciel qui indique que quelque part, dans une ville, au milieu de tant et tant de gens, deux êtres sont en train de vivre...
Jeanne Benameur — Les mains libres -
Richard de Lacy, nous avons été de bons compagnons autrefois et vous trouviez toujours le sermon un peu long quand c'était l'heure d'aller dîner. Je vous saurai gré de m'épargner le vôtre. La lecture de cette citation est de règle, mais tels que je nous connais, elle nous ennuierait tous deux.
Jean Anouilh — Becket ou L'Honneur de Dieu -
Cosette était laide. Heureuse, elle eût peut- être été jolie. Nous avons déjà esquissé cette petite figure sombre. Cosette était maigre et blême ; elle avait près de huit ans, on lui en eût donné à peine six. Ses grands yeux enfoncés dans une sorte d'ombre étaient presque éteints à force d'avoir pleuré. Les coins de sa bouche avaient cette courbe de l'angoisse habituelle, qu'on observe chez les condamnés et chez les malades désespérés. Ses mains étaient, comme sa mère l'avait deviné, "perdues d'engelures". Le feu qui l'éclairait en ce moment faisait saillir les angles de ses os et rendait sa maigreur affreusement visible. Comme elle grelottait toujours, elle avait pris l'habitude de serrer ses deux genoux l'un contre l'autre. Tout son vêtement n'était qu'un haillon qui eût fait pitié l'été et qui faisait horreur l'hiver. Elle n'avait sur elle que de la toile trouée ; pas un chiffon de laine. On voyait sa peau çà et là, et l'on y distinguait partout des taches bleues ou noires qui indiquaient les endroits où la Thénardier l'avait touchée. Ses jambes nues étaient rouges et grêles. Le creux de ses clavicules était à faire pleurer. Toute la personne de cette enfant, son allure, son attitude, le son de sa voix, ses intervalles entre un mot et l'autre, son regard, son silence, son moindre geste, exprimaient et traduisaient une seule idée : la crainte.
Victor Hugo — Les Misérables -
Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu’on te fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : j’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui.
Alfred de Musset — On ne badine pas avec l’amour -
Lorsque la fillette ouvrit la porte, elle poussa un cri en voyant poindre, de dessous la maison, deux pieds chaussés de souliers rouges. Dorothy était épouvantée, mais une petite femme vêtue de blanc s’approcha d’elle : —Je suis la Bonne sorcière du Nord et ta maison vient d’écraser la Méchante Sorcière de l’Est, qui ne manquera à personne. Pour te remercier, prends tes souliers : ils recèlent de grands pouvoirs !Dorothy les chaussa, puis demanda à la Bonne Sorcière de l’aider à rentrer chez elle.—Mon enfant, la seule personne qui peut t’aider est le puissant Magicien d’Oz. Mais pour le rejoindre, un voyage très dangereux t’attend. Suis cette route de briques jaunes jusqu’à la Cité d’Émeraude et tu le trouveras. »Et après l’avoir saluée, la Sorcière disparut.
Lyman Frank Baum — Le Magicien d’Oz