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Hyperbate - Figure de style [définition et exemples]

Définition de l’hyperbate

L’hyperbate est une figure de style qui consiste à modifier l’ordre courant des mots ou propositions dans une même phrase de façon inhabituelle. Ces mots, généralement successifs, se retrouvent éloignées tout en restant unis par la syntaxe de la phrase.

Malgré l’altération de l’ordre des mots, la phrase conserve tout de même son sens, renforcé par le lien syntaxique.

Selon Henri Morier, l’hyperbate permet d’ajouter « à la phrase qui paraissait terminée une épithète, un complément ou une proposition, expression qui surprend l’auditeur et se trouve par là-même mise fortement en évidence » (Dictionnaire de Poétique et de rhétotique).

Par exemple, dans l’extrait du roman Le voyage de Sparte, la pensée de Maurice Barrès se poursuit avec la conjonction de coordination et.

À huit heures, la chaleur commence, et les fulgurations.

Maurice Barrès, Journées de mulet dans le Péloponnèse

Parfois, la séparation (disjonction) entre les mots est plus franche comme le montre cet exemple, cité par Patrick Bacry dans Les Figures de style : 

Le rare fut qu’on voulut laisser mettre le Roi à table pour souper, avant d’effrayer par de grands remèdes, et laisser achever son souper sans l’interrompre et sans l’avertir de rien, qui, sur la foi de Fagon et le silence public, croyait Monseigneur [le fils, malade, du Roi] en bon état…

Saint-Simon, Mémoires.

Le pronom qui et son antécédent le Roi sont très éloignés l’un de l’autre. Cette distance produit un effet d’attente chez le lecteur. 

Entre les mots distants sont insérées toutes sortes de mots ou propositions qui créent parfois des constructions de phrases étonnantes, mettant l’accent sur l’élément ajouté ou déplacé.

Par la mise en relief de certains adjectifs ou autres natures de mots, la surprise peut être totale chez le lecteur.

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Pour illustrer ces propos, Henri Suhamy donne un exemple « plein de fantaisie » :

J’ai vu au cours de ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, commettre des actes stupides et nombreux.

Comte de Lautréamont, Les chants de Maldoror, I

Les hyperbates sont très utilisées dans la littérature classique et contemporaine, particulièrement dans les portraits et les descriptions. En poésie, les auteurs usent de la figure de style pour rendre leurs vers plus sensibles, plus rythmés également par l’enjambement produit.

Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! Las ! ses beautés laissé choir
.

Pierre de Ronsard, Odes, I, 17

Pour certains grammairiens, l’hyperbate n’est pas considérée comme une figure de style mais plutôt comme un défaut de langage ou de style dû au désordre engendré dans la syntaxe de la phrase, où les mots apparaissent de manière illogique. Seule la dimension grammaticale de l’hyperbate est soulignée, sans tenir compte de l’effet de style qu’elle apporte au discours.

Franciscus Sanctius, dans Minerve ou les causes de la langue latine, précise que « l’hyperbate n’est rien d’autre que le bouleversement de l’ordre des mots contre toute logique grammaticale ». Il énumère ensuite d’autres figures de style qu’il considère comme des « parties de l’hyperbate », à savoir l’anastrophe, la tmèse, la parenthèse, la synchise et l’anacoluthe.

Origine et étymologie de l’hyperbate

Le terme hyberbale provient du grec ὑπερβατόν / huperbaton. Composé des mots grecs ὑπέρ / huper signifiant « au-delà, au-dessus » et de βαίνειν / bainein pour « aller », il signifie « inversion ».

Autrefois, c’est d’ailleurs le terme inversion qui était utilisé pour désigner l’hyperbate. Cependant, il ne faut confondre ces deux figures. L’hyperbate, selon Henri Suhamy, « a un usage stylistique plus spécialisé : il désigne les transferts de mots, et les constructions réellement insolites qui contribuent à la mutation artistique du langage. »

Exemples d’hyperbates

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !

Paul Verlaine, Sagesse

Lorsqu’il fut de retour enfin
Dans sa partie le sage Ulysse
Son vieux chien de lui se souvint…

Guillaume Apollinaire, Chanson du Mal-Aimé

Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! Las ! ses beautés laissé choir

Pierre de Ronsard, Odes, I, 17

Il y avait longtemps que cette vague aurait voulu faire quelque chose pour l’enfant, mais elle ne savait quoi. (…) N’y tenant plus, elle l’emmena non loin de là, sans mot dire, et comme par la main.

Jules Supervielle, L’enfant de la haute mer

Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose,
En sa belle jeunesse, en sa première fleur

Pierre de Ronsard, Comme on voit sur la branche.

Elle avait de belles mains, mais rouges.

Honoré de Balzac, Albert Savarus

Il est sévère. Il est vertueux. Il est membre,
Ayant de bons tapis sous les pieds en décembre,
Du grand parti de l’ordre et des honnêtes gens.

Victor Hugo, Le Soutien des Empires

Quelques braves gens mourraient, dont c’était le métier

Marguerite Yourcenar, L’œuvre au noir

Et des vaisseaux s’en vont, sans même, un paraphe d’éclair,
Tels des cercueils, par ces vides de brouillard rouge,
Sans même un cri de gouvernail qui bouge
Et tourne, au long des chemins d’eau, qu’ils tracent vers la mer.

Émilie Verhaeren, Une heure de soir

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Natacha Lovato

Natacha Lovato

Natacha Lovato rédige pour La langue française des articles autour de la linguistique, la littérature et les expressions. Passionnée par la langue française, elle s'est aujourd'hui spécialisée dans la communication écrite afin de transmettre ses connaissances. Elle est aussi gérante d'un organisme de formation dédié à la communication écrite, et accompagne les adultes pour des remises à niveaux en français afin de perfectionner leurs écrits professionnels.

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