Épanalepse – Figure de style [définition et exemples]
Définition de l'épanalepse
L'épanalepse est une figure de style qui consiste à répéter un mot identique ou un groupe de mots dans le même membre de phrase. Sous forme de répétition simple, les mots se suivent de manière contigüe et immédiate comme par exemple, dans ces vers de Pierre de Ronsard :
Le temps s’en va, le temps s’en va, ma Dame…
Ronsard, Je vous envoie un bouquet…
Pierre Fontanier précise dans ses Figures du discours que « la Répétition consiste à employer plusieurs fois les mêmes termes ou le même tour, soit pour le simple ornement du discours, soit pour une expression plus forte et plus énergique de la passion. »
Appartenant à la classe des figures de répétitions, l'épanalepse produit une variété étonnante d'effets de style pouvant susciter des émotions allant de l’angoisse à l'humour.
En poésie, cette figure de style rythme les vers en ajoutant une certaine musicalité et suggère, au travers des répétitions, des sentiments de mélancolie, de plénitude ou de douleur.
Ô triste, triste était mon âme
Verlaine, Romances sans paroles
À cause, à cause d’une femme.
Un autre exemple avec le poème L’expiation, récit de la bataille de Waterloo, dans lequel Victor Hugo exprime son attente douloureuse :
Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine !
Victor Hugo, L’expiation
L'épanalepse est aussi employée au théâtre en raison de ses effets comiques comme dans Les Fourberies de Scapin, où le seigneur Géronte répète plusieurs fois de suite la phrase « Que diable allait-il faire dans cette galère ? » ou encore dans Le bourgeois Gentilhomme, de Molière où M. Jourdain répète « Monsieur le Philosophe » sept fois !
L’épanalepse est ainsi employée dans tous les genres littéraires mais également dans le discours, la musique, les slogans publicitaires ou encore quelques proverbes comme « Un monde fou, fou, fou ».
Les hommes politiques emploient régulièrement des répétitions pour appuyer leur raisonnement, l’objectif étant de convaincre et marquer l’auditoire. Le général de Gaulle a utilisé l'énapalepse à plusieurs reprises et particulièrement lors de l'appel du 18 juin 1940 :
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Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n’est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire.
Charles de Gaulle, Appel du 18 juin 1940.
Car la France n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle a un vaste Empire derrière elle.
Pour certains linguistiques, l’épanalepse peut être également « la reprise d’un nom ou d’un pronom par un terme de même fonction syntaxique, à l’intérieur d’une même proposition », comme par exemple dans la phrase « Ce film, je l’ai déjà vu » , où le terme « film » est repris par le pronom « l ».
Jules Marouzeau dans le Lexique de la terminologie linguistique et Brian Gill dans son Dictionnaire de la linguistique considèrent l'épanalepse « comme une figure syntaxique consistant à la reprise d’un mot ou d’un groupe de mots par un pronom qui le représente, proche de la pronominalisation ou de l’anaphore lexicale. »
Histoire et étymologie de l'épanalepse
Le terme épanalepse vient du mot grec ἐπανάληψις/ epanalepsis qui signifie « reprise, répétition ». Composé du préfixe ἐπὶ, ἀνὰ (à la suite, immédiatement après, sur) et du verbe λῆψις (action de prendre), elle est souvent nommée « reprise à la suite ».
Exemples d’épanalepses
L'ombre d'elle-même ! l'ombre d'elle-même ! la malheureuse a vieilli de cent ans ! de cent ans !
Colette, Chéri
[…] Il entassait adage sur adage
Voltaire, Le pauvre diable
Il compilait, compilait, compilait
On le voyait sans cesse écrire, écrire
Ce qu’il avait jadis entendu dire.
L’argent, l’argent, dit-on, sans lui tout est stérile.
Nicolas Boileau-Despréaux ; Épitres V
Rompez, rompez tout pacte avec l’impiété…
Jean Racine, Athalie
Ma fille, tendre objet de mes dernières peines,
Voltaire, Zaïre
Songe au moins, songe au sang qui coule dans tes veines
Le roi, le roi lui-même, au milieu des bourreaux,
Voltaire, La Henriade
Poursuivant des proscrits les troupes égarées,
Du sang de ses sujets souillait ses mains sacrées.
Mais voyager sur des nuages,
Jean-François Marmontel, Opéra Zémir et Azor
Et voir là-bas, là-bas, là-bas,
La terre s’enfuir sous ses pas,
Cela dégoûte des voyages.
Viens. Là sur des joncs frais ta place est toute prête
André Chénier, Anthologie de la poésie française du XVIIIe siècle au XXe siècle
Viens, viens. Sur mes genoux viens reposer ta tête.
De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace...
Danton, Discours du 2 septembre 1792
Combien de temps, Seigneur, combien de temps encore
Jean Racine, Athalie
Verrons-nous contre toi les méchants s'élever ?
Jusque dans ton saint temple ils viennent te braver.
Ils traitent d'insensé le peuple qui t'adore.
Combien de temps, Seigneur, combien de temps encore
Verrons-nous contre toi les méchants s'élever ?
Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle
Jean Racine, Andromaque
Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle ;
Belles, belles, belles comme le jour (belles, belles, belles)
Claude François, Belles, Belles, Belles
Belles, belles, belles comme l'amour (belles, belles)
Elles te rendront fou de joie
Fou de douleur, mais, crois-moi plus fou
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