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Abstrait

Définitions de « abstrait »

Trésor de la Langue Française informatisé

ABSTRAIT, AITE, part. passé, adj. et subst. masc.

I.− Part. passé de abstraire*.
II.− Adjectif
A.− [En parlant de la pensée hum. ou de ses produits] Qui relève de l'abstraction.
1. [En parlant de la connaissance en tant qu'acte de pensée] Qui procède par abstraction :
1. Je ne suis plus bon, les hommes m'irritent. Je ne vois plus que des criminels ou des lâches; la pitié pour le malheur, le besoin d'être utile, de servir mes semblables, d'aller au-devant de toutes les infortunes pour les soulager, tous ces sentiments expansifs et généreux qui étaient jusqu'à présent mes principes d'action, s'éteignent chaque jour dans mon cœur dont la chaleur semble s'éteindre, pendant que mon esprit est exclusivement occupé de spéculations abstraites, étrangères à tous les intérêts de ce monde. Ces spéculations m'empêchent heureusement de penser beaucoup aux hommes, car je ne puis y penser que pour les haïr ou les mépriser. Maine de Biran, Journal,1815, p. 89.
2. Pour moi, dit Augustin, j'ai dû y venir d'un point de vue abstrait, presque méthodologique. C'est un défaut d'universitaire. Ils ne voient des choses que leur idée platonicienne. J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 2, 1933, p. 167.
2. [En parlant du produit de la pensée : concept, idée, thème, système, savoir, etc.] Qui a un haut degré de généralité :
3. ... je dois expliquer encore que, quand je dis de la première sensation que j'éprouve, ou plutôt de l'idée que j'en ai, que je la juge agréable, je ne prétends pas dire que je vois déjà cette idée comme une idée de mode, bien distincte, bien séparée et de l'être qu'elle affecte et de celui qui la cause; et que je vois qu'une autre idée (celle d'être agréable) abstraite, générale, tirée de plusieurs êtres, leur convenant à tous, convient aussi à cette première idée. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie, Logique, 1805, p. 262.
4. Toutes ces opinions sont justes, relativement au côté par lequel on considère l'idée de la liberté; mais dans aucune on ne la voit sous tous ses aspects, et on ne l'embrasse dans toute son étendue. Cherchons donc ce que toutes ces différentes espèces de liberté ont de commun, et sous quel point de vue elles se ressemblent toutes; car c'est cela seul qui peut entrer dans l'idée générale, abstraite de toutes les idées particulières, et qui les renferme toutes dans son extension. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Commentaire sur l'Esprit des lois de Montesquieu,1807, p. 141.
5. ... si on entend par positif tout ce qui n'est pas abstrait, tout ce qui est réel, tout ce qui tombe sous la prise immédiate et directe de quelqu'une de nos facultés, il faut accorder que l'idée d'infini, de temps et d'espace est aussi positive que celle de fini, de succession et de corps, puisqu'elle tombe sous la raison, faculté tout aussi réelle et tout aussi positive que les sens et la conscience, quoique ses objets propres ne soient pas des objets d'expérience. V. Cousin, Hist. de la philosophie du 18esiècle,1829, p. 188.
6. ... Vient ensuite l'abstraction qui, s'ajoutant à ces données primitives, complexes, concrètes et particulières, sépare ce que la nature vous avait donné réuni et simultané, et considère isolément chacune des parties du tout. Cette partie isolée du tout, cette idée détachée du sein du tableau total des idées primitives, devient une idée abstraite et simple jusqu'à ce qu'une abstraction plus savante et plus profonde fasse sur cette prétendue idée simple ce qu'elle a déjà fait sur l'ensemble des idées antérieures, la décompose, en fasse sortir plusieurs autres idées qu'elle considère isolément, abstractivement les unes des autres; jusqu'à ce qu'enfin, de décomposition en décomposition, l'abstraction et l'analyse arrivent à des idées tellement simples, qu'on ne suppose plus qu'elles soient décomposables. V. Cousin, Hist. de la philosophie du 18esiècle,1829p. 290.
7. Plus une idée a de simplicité, plus elle a de généralité; plus une idée est abstraite, plus elle a d'étendue. Nous débutons par le concret, et nous allons à l'abstrait nous débutons par le déterminé et le particulier pour aller au simple et au général. V. Cousin, Hist. de la philosophie du 18esiècle,1829p. 290.
8. Il y a des idées abstraites qui correspondent à des faits généraux, à des lois supérieures auxquelles sont subordonnées toutes les propriétés particulières par lesquelles les objets extérieurs nous deviennent sensibles... A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 231.
9. Nous allons passer à cette autre catégorie d'idées abstraites auxquelles l'esprit s'élève par voie de synthèse, afin de relier dans une unité systématique les apparences variables des choses qui sont l'objet immédiat de ses intuitions. Ce sont là les idées ou les conceptions auxquelles nous attribuons le nom d'entités... A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851p. 242.
10. La mort n'est pas seulement un thème stoïcien, ni seulement un phénomène biologique, mais elle est une chose qui arrive pour de bon. Ah! Si nous avions su... Mais nous savions de la chose tout ce qu'il y avait à en savoir et nous découvrons aujourd'hui ce que nous savions depuis toujours. Car voici le mot de tout : on peut apprendre ce que l'on sait déjà; comme on peut être surpris par la chose la plus attendue : et la dissipation du malentendu mesure toute la distance qui sépare le savoir abstrait, conceptuel, générique qu'on a de ces choses à vingt ans et l'intuition gnostique qu'on en prend à soixante quand on les découvre du dedans et que la mort devient notre affaire privée. V. Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 145.
3. [En parlant du lang. en tant qu'expr. de la pensée] Qui traduit des idées abstr. :
11. ... Tout ce que nous venons de dire, est un peu abstrait, et a exigé beaucoup d'attention, parce qu'il est assez difficile de se bien transporter dans une situation dans laquelle on n'a jamais été; délassons-nous actuellement à voir les conséquences qui résultent de ces faits. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie, Grammaire, 1803, p. 293.
12. Les nominaux ne voyaient que les noms ou signes dans les idées générales ou abstraites ils ne tenaient même aucun compte des opérations intellectuelles dont les signes abstraits expriment le résultat. Les réalistes, au contraire, admettent les idées indépendamment des signes, antérieures et innées. Maine de Biran, Journal,1819, p. 237.
13. ... elle se jeta à des études qui auraient usé la puissance de travail d'un homme. Interprètes de l'ancien et du nouveau testament, apologistes, controversistes, elle parcourut des livres sans nombre, jusqu'aux plus secs, aux plus ardus, aux plus abstraits de la théologie, emplissant des extraits, des volumes de cahiers, tourmentée par la perplexité de sa destinée éternelle qui rejetait toujours son angoisse à la peine de nouvelles et plus studieuses recherches, où chaque jour pourtant elle s'approchait un peu plus de cette certitude qu'elle appelait, qu'elle implorait, qu'elle faisait naître, pour ainsi dire, de l'ardeur de son désir et de la secrète complaisance de ses efforts. E. et J. de Goncourt, Madame Gervaisais,1869, p. 181.
14. Bergson observe (...) que langage et pensée sont de nature contraire : celle-ci fugitive, personnelle, unique; celui-là fixe, commun, abstrait. D'où vient que la pensée, obligée en tout cas de passer par le langage qui l'exprime, s'y altère et devienne à son tour, sous la contrainte, impersonnelle, inerte et toute décolorée. J. Paulhan, Les Fleurs de Tarbes,1941, p. 78.
Péj. Synon. de vague :
15. J'ai écrit une longue lettre à G pour me soustraire à certaines idées. − Repris et achevé la vie de Buffon par Condorcet. − Pâteusement écrite, avec abus de mots vagues, abstraits, sans couleur. J. Barbey d'Aurevilly, Premier Memorandum,1838, p. 67.
16. ... La langue de la politique elle-même prit alors quelque chose de celle que parlaient les auteurs; elle se remplit d'expressions générales, de termes abstraits, de mots ambitieux, de tournures littéraires. Ce style, aidé par les passions politiques qui l'employaient, pénétra dans toutes les classes et descendit avec une singulière facilité jusqu'aux dernières. A. de Tocqueville, L'Ancien régime et la Révolution,1856, p. 240.
4. P. anal. [En parlant d'obj., de milieu, etc.] Qu'on se représente par des concepts abstr. :
17. Tout problème peut être ramené par l'analyse au simple, sans qu'on ait besoin d'envisager pour elle-même l'organisation intrinsèque du composé. Ainsi se constitue le premier milieu tout abstrait et tout homogène où se déploieront, comme en une hiérarchie de formes de plus en plus organisées, les complications croissantes de la science; ainsi, par une élaboration originale, se dégagent de l'expérience les principes fondamentaux de la mécanique rationnelle. M. Blondel, L'Action,1893, p. 57.
18. Il allait jusqu'à (...) transformer, comme à Notre-Dame de Paris, la cathédrale vivante en cathédrale abstraite. A. France, Pierre Nozière,1899, p. 243.
5. Spécialement
a) B.-A. [En parlant d'un art ou d'une compos. plastique ou mus.] Qui évite la réf. dir. à un être identifiable du monde réel ou imaginaire.
ARTS PLAST.
P. oppos. à expressionniste :
19. Ses peintures (de Degas) ne disent rien de son âme, c'est un abstrait, un exact, on ne sait rien de lui, ni son plaisir, ni son émotion, ... C. Mauclair, Les Maîtres de l'impressionnisme,1904, p. 96.
P. oppos. à figuratif (et donc synon. de non-figuratif) :
20. ... l'impressionnisme montre qu'on peut jouer de la couleur pure, sans se soucier du rendu de la matière dont elle est solidaire, sans la contraindre à épouser un volume, donc un modelé, ni une ligne de contour : aussi la génération suivante, celle de Gauguin et des Nabis, en particulier, passera sans difficulté à un emploi de la couleur pour elle-même de la ligne pour elle-même, pour leur propre épanouissement, pour leur plaisir, pourrait-on presque dire. L'élan sera donné au cubisme, et, derrière lui, à l'art abstrait. R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 161.
MUS. P. oppos. à concret (cf. abstraction II B).
b) ÉPISTÉMOLOGIE. Science abstraite. ,,[Science] qui s'applique aux lois des phénomènes et non à un corps particulier.`` (Littré) :
21. ... la durée ne peut pas être le sujet d'une science abstraite, totalement distincte de l'histoire des êtres auxquels appartient cette durée, et n'ayant pour objet que les propriétés de la durée elle-même. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie, Logique, 1805, p. 487.
22. Il y a des sciences, comme les sciences abstraites, dont l'objet n'a rien de commun avec l'ordre chronologique des événements, et qui n'ont, par conséquent, aucun emprunt à faire à l'histoire, aucune donnée historique à accepter. Les théorèmes de géométrie, les règles du syllogisme, sont de tous les temps et de tous les lieux... A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 455.
c) GRAMM. Terme abstrait :
23. ... on appelle termes concrets les adjectifs, tels que pur, bon, etc. qui expriment une qualité considérée comme unie à son sujet; tandis que l'on appelle termes abstraits, les mots pureté, bonté, etc., qui expriment ces qualités séparées de tout sujet. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie,Idéologie proprement dite, 1801, p. 88.
d) MATH. Nombre abstrait. ,,Se dit d'un nombre énoncé sans désignation d'aucun objet particulier.`` (Littré) :
24. ... trois mètres est un nombre concret, et (...) trois tout court est un nombre abstrait. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie,Idéologie proprement dite, 1801, p. 88
25. La théorie de Locke ne peut (...) donner ni Dieu, ni le corps, ni le moi, ni leurs attributs : à cela près, j'accorde, si l'on veut, qu'elle peut donner tout le reste. Elle donne les mathématiques, direz-vous. Oui, je l'ai dit moi-même, et je le répète; elle donne les mathématiques, la géométrie et l'arithmétique en tant que sciences des rapports des grandeurs et des nombres; elle les donne, mais à une condition, c'est que vous considériez ces nombres et ces grandeurs comme des grandeurs et des nombres abstraits, n'impliquant pas l'existence. V. Cousin, Hist. de la philosophie du 18esiècle,1829, p. 428.
e) PHILOS. État abstrait. [Dans la philos. d'A. Comte] Âge de l'humanité où la pensée procède par abstraction. Synon. métaphysique :
26. Les variations quelconques des opinions humaines ne sauraient jamais devenir purement arbitraires, quoique je ne puisse démêler aucunement leur marche générale. (...) (Celle-ci) consiste (...) dans le passage nécessaire de toute conception théorique par trois états successifs : le premier théologique, ou fictif; le second métaphysique, ou abstrait; le troisième, positif, ou réel. Le premier est toujours provisoire, le second purement transitoire, et le troisième seul définitif. Ce dernier diffère surtout des deux autres par sa substitution caractéristique du relatif à l'absolu, quand l'étude des lois remplace enfin la recherche des causes. A. Comte, Catéchisme positiviste,1852, p. 82.
Rem. Abstrait fonctionne le plus souvent en concurrence synon. ou anton. avec, et dans l'ordre des fréquences, général, simple, universel, intelligible, différent du sensible (cf. en partic. ex. 3 à 10, 17).
B.− [En parlant d'une pers. ou de son air ou apparence habituelle]
1. [Avec correspondance à l'emploi actif du verbe abstraire]
a) Qui use d'abstractions dans son lang.
Avec nuance péj. :
27. Le grand abus des abstractions est de prendre, en métaphysique, les êtres de raison, tels que la pensée, pour des êtres réels, etc., et de traiter, en politique, les êtres réels, tels que le pouvoir exécutif, comme des êtres de raison. Avant que l'abstraction soit devenue pour l'esprit une chose qu'il puisse se représenter, et même concevoir, que de temps il lui faut! Par combien de retouches il faut fortifier cette ombre! Combien de gens se font abstraits pour paraître profonds! J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 321.
P. ext. [En parlant de la pensée] :
28. Il faut choisir dans les lettres entre deux mépris : celui que l'auteur a pour lui-même s'il écrit des vulgarités populaires et celui que le vulgaire a pour lui s'il enveloppe sa pensée d'une forme d'art qui la rend plus belle, plus abstraite et plus difficile à comprendre. A. de Vigny, Le Journal d'un poète,1851, p. 1288.
b) Dont la pensée se complaît dans l'abstraction :
29. « Orgueil et faiblesse, pensa-t-il. Et mauvaise foi. Un petit visage bourgeois bouleversé par un égarement abstrait des traits charmants, mais sans générosité. » J.-P. Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 120.
30. Il avait eu comme condisciple à Stanislas Marcel Bouteron, grand spécialiste de Balzac; il en parlait avec commisération : il trouvait dérisoire qu'on consumât sa vie dans de poussiéreux travaux d'érudition. Il nourrissait contre les professeurs de plus sérieux griefs; ils appartenaient à la dangereuse secte qui avait soutenu Dreyfus : les intellectuels. Grisés par leur savoir livresque, butés dans leur orgueil abstrait et dans leurs vaines prétentions à l'universalisme, ceux-ci sacrifiaient les réalités concrètes − pays, race, caste, famille, patrie − aux billevesées dont la France et la civilisation étaient en train de mourir : les droits de l'homme, le pacifisme, l'internationalisme, le socialisme. S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 177.
P. ext., rare :
31. ... quand je lui ai dit que j'aimerais visiter les nouvelles installations, il s'est étonné de voir un intellectuel abstrait et léger comme moi s'intéresser aux précisions viriles de la technique. P. Nizan, La Conspiration,1938, p. 158.
2. [Avec correspondance à l'emploi pronom. du verbe abstraire] Qui par la pensée s'isole du monde environnant. Avec nuance péj., indifférent à ce qui se passe autour de lui. Vieilli, distrait :
32. J'étais né pour être bénédictin. La contemplation continue et non interrompue de toute chose est un bonheur, et l'état naturel pour moi est l'abstraction. Je suis né abstrait, mon professeur de grec me répétait : vous êtes abstrait et distrait. L'action publique n'est que secondaire et je suis né désenchanté de la vie et n'y trouvant rien qui soit digne d'attention, si ce n'est la contemplation et la passion pour la beauté. A. de Vigny, Le Journal d'un poète,1850, p. 1275.
33. Il voulut s'arrêter devant une vitrine, mais elle se dit qu'elle serait tout de suite remarquée, surveillée; et elle continua à marcher vite, d'un pas égal, sans rien voir, l'air abstrait, fermé, fuyant l'interrogation furtive partout dardée sur elle. J. Chardonne, L'Épithalame,1921, p. 239.
34. Nerveux, on le voyait sans cesse mâchonner sa moustache ou se mordre les doigts, ou remuer son râtelier. Débraillé, souvent sale, il faisait son cours en bras de chemise, le melon sur la tête, une main en arrière dans la ceinture de son pantalon, confirmant de l'autre, à grands gestes majestueux, la solennité des formules qu'il annonçait emphatiquement. Invraisemblablement abstrait, distrait et lunatique, négligent de sa personne au delà de toute idée, les mains rongées d'acide, les doigts bruns de nicotine, toujours sur le point de perdre son mouchoir ou son porte-mine, le nœud de cravate pendant, mal boutonné, mal ciré, mal brossé, rarement peigné et toujours en retard, il passait dans l'existence comme une espèce de grand gamin rêveur et puéril, ... M. Van der Meersch, L'invasion 14,1935, p. 71
35. Van Bergen savait que Maria aimait rire. Et il la plaisantait en néerlandais, lui faisait une cour pressante, qui soulevait de grands éclats de gaieté. Seul, Josef Van Oostland restait impassible dans son coin, entre le poêle de faïence et la petite fenêtre à rideaux blancs, et fumait, les yeux mi-clos, l'air abstrait et indifférent, une longue pipe de terre blanche, à la Brauwer. M. Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 139.
3. [Avec correspondance à l'emploi passif du verbe abstraire] (êtres ou entités vivantes) dont on se fait une représentation vidée de contenu concr. :
36. Hommes pieux, qui parlez de Dieu avec tant de certitude et de confiance, veuillez nous dire ce qu'il est; faites-nous comprendre ce que sont ces êtres abstraits et métaphysiques que vous appelez Dieu et âme, substances sans matière, existence sans corps, vies sans organes ni sensations. J.-F. de Volney, Les Ruines,1791, p. 206.
37. L'homme, parce qu'il n'est qu'un effet, a voulu que le monde en fût aussi un, et dans le délire de sa métaphysique il a imaginé un être abstrait appelé Dieu, séparé du monde et cause du monde, placé au-dessus de la sphère immense qui circonscrit le système de l'univers, et lui seul s'est trouvé garant de l'existence de cette nouvelle cause; c'est ainsi que l'homme a créé Dieu. C.-F. Dupuis, Abrégé de l'origine de tous les cultes, préf., 1796, p. 10.
38. ... (les) passions nommées amour, amitié, haine, etc., ont leur siège et leur résidence en nous, existent subjectivement en nous, à tel point que si elles n'étaient pas en nous, bien qu'invisibles, nous ne serions pas. Ainsi d'abord ces passions bonnes ou mauvaises, c'est nous, ce sont des hommes, c'est l'homme. Et bien, il en est de même, sous ce premier rapport, de l'être abstrait ou universel appelé humanité. L'humanité, c'est la nature humaine en nous, c'est-à-dire la nature générique de l'homme contenue virtuellement en nous dans toute son infinité, et réalisée partiellement d'une certaine façon constituant à la fois notre particularité et notre vie présente. P. Leroux, De l'Humanité,1, 1840, p. 254.
39. ... un ami c'est quelqu'un, et (...) le public ce n'est personne; (...) un ami a un visage, et (...) le public n'en a pas; (...) un ami est un être présent, écoutant, regardant, un être réel, et (...) le public est un être invisible, un être de raison, un être abstrait, (...) un ami a un nom et (...) le public est anonyme; (...) un ami est un confident et (...) le public est une fiction. Je rougis devant l'un parce que c'est un homme, je ne rougis pas devant l'autre parce que c'est une idée; ... A. de Lamartine, Nouvelles confidences,1851, p. 30.
III.− Emploi subst., PHILOS. Ce qui a les caractères de la pensée ou de l'expression abstraite :
40. La masse d'amour que le ciel lui avait donnée, il ne la jeta pas sur un être ou sur une chose, mais il l'éparpilla tout alentour de lui, en rayons sympathiques, animant la pierre, conversant avec les arbres, aspirant l'âme des fleurs, interrogeant les morts, communiant avec le monde. Il se retirait petit à petit du concret, du limité, du fini, pour demeurer dans l'abstrait, dans l'éternel, dans le beau. Il aimait moins de choses à force d'en aimer davantage, il n'avait plus d'opinions politiques à force de s'occuper d'histoire. G. Flaubert, La Première éducation sentimentale,1845, p. 157.
41. Aller du connu à l'inconnu, c'est notre lot; autant dire du simple et abstrait vers le concret et l'individuel, que nous n'épuiserons pas. Alain, Propos,1922, p. 400.
42. ... je procède, dans ces confidences relatives, du concret vers l'abstrait, des impressions aux pensées, ... P. Valéry, Variété 3,1936, p. 239.
Prononc. : [ab̭stʀ ε], fém. [ab̭stʀ εt]. Enq. : / apstʀe1, D; apstʀe2t /.
Étymol. − Corresp. rom. : prov. abstrayt; ital. astratto; esp. abstracto; cat. abstracte; port. abstracto. I.− 1. 1372 (1522) « (terme) qui exprime un concept indépendant de l'objet » terme de gramm. (J. Corbichon, Propriété des choses, I, 7, éd. 1522 ds Quem. t. 1 1959 et DG : noms... que les grammairiens appellent abstractz); 2. a) 1568 « séparé (de la matière) » terme philos. (Louis Le Roy, trad. des Politiques d'Aristote, I, 3, Commentaire ds Hug. : que les intellectz abstractz sont coëternelz avec Dieu); b) 1605 « séparé (des contingences terrestres) » (Ph. de Marnix, Différ. de la Relig. II, 1, 2 ibid., : Dieu... ne peut en aucune façon estre cogneu ni apprehendé sinon d'une ame abstracte, et retirée de la contemplation de toutes choses terriennes). II.− 1400-3 « retiré, caché (d'une vie) » terme gén. (Christine de Pisan, Mutation de fortune, éd. Solente 23 635-6 : Paix, solitude volumtaire, Vie astracte, solitaire). Empr. au lat. abstractus, part. passé de abstrahere, attesté au sens I, emploi math. (dep. Cassiodore, De arte grammat., VII, 214, 3 ds TLL s.v. : abstracta... quantitas dicitur, quam intellectu a materia separantes vel ab aliis accidentibus sola ratiocinatione tractamus); cf. avec emploi I 1, Albert le Grand, Comm. in sent. P. Lombardi, 1, 33, 1 ds Mittellat. W. s.v., 63, 5 : utrum liceat proprietates abstracto nomine significari; cf. avec I 2a, Id., Quaest. super lib. de animalibus, 1, 1, ibid. 62, 68 : illud quod est universalius, est a materia abstractus; cf. avec I 2 b, Id., De somno, 3, 1, 6, ibid. 4, 3 : quidam sortiuntur animas altiores... quanto fuerint abstractiores. II, terme gén., élargissement de sens à partir de I. HIST. − À l'orig. un seul mot avec 2 orth. : abstract / abstrait indifféremment empl. jusqu'à Fur. 1690; puis les 2 orth. donnent 2 mots, mais dont les sens sont assez mal définis : d'une part, l'adj. abstract, de l'autre, le part. passé adjectivé abstrait de abstraire. Ac. 1718 regroupe pour la 1refois tous les sens sous une vedette unique abstrait, alors que Fur. 1690 et Trév. continuent à distinguer 2 vedettes jusqu'en 1771, tout en donnant abstract pour ,,un peu barbare``. I.− Sens disparus av. 1789. − « Retiré, caché, isolé », extension du sens premier (cf. inf. II) : Les wantiers de ceste ville n'avoient lieu comode au marchié pour estaller (...) pour vendre leur (...) marchandises par ce qu'ilz estoient en lieu abstrat. (10 nov. 1552, Reg. aux Publicat., Arch. Tournai ds Gdf.). − Rem. Emploi particulier : « retiré, caché » (en parlant d'une vie), ca 1400, cf. étymol. II. II.− Hist. du sens et des emplois attestés apr. 1789. − Un seul sens (cf. déf. par Dub.) et différents emplois. Le sens apparaît pour la 1refois en 1372 (cf. étymol. I 1) dans la lang. techn. de la gramm. Attesté ensuite comme terme de philos. (Fur. 1690), dogmatique (Ac. 1694) ou didactique (Ac. 1762), il a multiplié ses emplois et reste bien vivant. A.− Emplois se rapportant à l'inanimé. − 1. Emploi gén. « qui s'attache à l'aspect purement intellectuel d'une chose en dehors de toute qualité sensible et individuelle. » 1reattestation au xviies. : Ce discours quoique abstrait, me paraît assez bon. Regnard, 1655-1709 ds Journet-Petit t. 1 1966, Rob. Rich. t. 1 1680 lui donne une valeur péjorative : Qui est détaché des choses sensibles, malaisé à pénétrer, vague. Discours abstrait. − Permanence de ce sens, mais avec une valeur péj. plus prononcée (cf. sém.). 2. Emplois partic. : ce sont des emplois techn. déf. par le cont. (l'adj. étant toujours associé à un mot qui détermine son champ d'application : terme pour la gramm., nombre, sciences, art, etc.). Ils sont énumérés ci-après dans l'ordre chronol. d'apparition : a) terme abstrait (gramm.) : 1reattest. au xives. (cf. étymol. I 1); permanence de cet emploi : xviies. : La blancheur est un terme abstrait (...) (Fur. 1690). xixeet xxes. cf. sém. A 5 c. b) sc. abstraites. Apparition au xviies. : J'avais passé beaucoup de temps dans l'étude des sciences abstraites; mais le peu de gens avec qui on en peut communiquer m'en avait dégoûté. (Pascal ds Journet-Petit t. 1 1966, Rob.). Rich. t. 1 1680 lui donne un sens péj. « malaisé à pénétrer, vague ». Permanence de ce sens (cf. sém.). c) nombre abstrait. Apparaît ds Trév. 1771, subsiste. d) math. abstraites. Dès le xviiies. : Les Mathématiques abstraites ou pures sont celles qui considèrent la grandeur ou la quantité absolument en général, sans se borner à aucune espèce particulière, comme la Géométrie et l'Arithmétique. Dans ce sens elles sont opposées aux Mathématiques mixtes. (Trév. 1771). Emploi attesté au xixes. (Ac. Compl. 1842), mais inusité au xxe. e) art abstrait. N'apparaît qu'au xxes. (cf. sém.). B.− Emploi se rapportant à l'animé : ,,se dit d'un homme qui est comme isolé, séparé du monde extérieur, absent, distrait, indifférent à ce qui se passe autour de lui, absorbé, renfermé en lui-même.`` (Rob.). Apparaît au xvies. d'abord dans le cont. partic. du supra-sensible, sans nuance péj. cf. étymol. I 2 et aussi : En tel personnaige studieux vous voirez suspendues toutes les facultez naturelles (...) vous le jugerez (...) estre hors soy abstraict par ecstase. (Rabelais, Tiers Livre, 1546, 31 ds Hug., s.v. abstraire). − Rem. 1. Au xviies., Rich. t. 1 1680 note une nuance péj.; le mot se charge d'un contenu affectif, être abstrait est une disposition caractérielle : Phédon est abstrait, rêveur, et il a avec de l'esprit, l'air d'un stupide. (La Bruyère, Caractères, VI, 83 ds Cayrou 1948). 2. La confusion abstrait / distrait est dénoncée par Trév. 1771, mais la distinction devient nette ds Ac. 1798 : On est abstrait pour être appliqué à une seule chose. On est distrait par inapplication et légèreté. 3. Au xixes., dans le lang. cour., se dit d'une personne : « qui pense par idées abstraites, s'exprime dans un langage abstrait et par suite, est difficile à comprendre ». Kant est un philosophe abstrait. (Littré). C.− Emploi comme adj. substantivé : l'abstrait ou les abstraits. Terme issu de la scolastique p. oppos. au concret. Il apparaît au xviies. et subsiste : xviies. : De la connoissance des abstracts on parvient à celle des concrets, qui est le terme opposé. (Fur. 1690). xviiies. : La connaissance des concrets est toujours antérieure à celle des abstraits. (Leibniz, Nouv. essais, II, 12 ds DG). xixeet xxes. : cf. sém.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 2 466. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 2 890, b) 1 952; xxes. : a) 3 053, b) 5 139.
BBG. − Bailly (R.) 1969. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Bonnaire 1835. − Dagn. 1965. − Dam.-Pich. Gloss. 1949. − Foulq.-St-Jean 1962. − Girard 1756. − Goblot 1920. − Gramm. t. 1 1789. − Guizot 1864. − Julia 1964. − Knauer (K.). Beiträge zum Ausdruck vom Abstrakten im Französischen. Rom. Forsch. 1930, t. 44, pp. 185-254. − Kold. 1902. − Laf. 1878. − Lal. 1968. − Lav. Diffic. 1846. − Littré-Robin 1865. − Mar. Lex. 1961 [1951]. − Miq. 1967. − Piéron 1963. − Privat-Foc. 1870. − Rey-Cottez 1968, t. 36, no2, p. 139. − Romeuf t. 1 1956. − Sardou 1877. − Sommer 1882. − Spr. 1967. − Springh. 1962. − Synon. 1818. − Théol. cath. Table 1929. − Uv.-Chapman 1956.

Wiktionnaire

Nom commun - français

abstrait \ap.stʁɛ\ masculin

  1. Nominalisation de l’adjectif.
    • L’abstrait et le concret.
    • L’un des passages cités, analysé avec plus de détails, est interprété comme une sorte d’autoportrait, et donne l’occasion de proposer un tableau des présupposés gonséthiens sur l’abstrait et le quotidien, et d’apporter quelques touches aux idées arbitraire et d’ouverture à l’expérience. — (Éric Emery, Actes du colloque du centenaire de Ferdinand Gonseth, 2006)

Adjectif - français

abstrait \ap.stʁɛ\

  1. Qui n’est pas concret, qui n'est pas réel ou qui relève de l’abstraction.
    • Dieu, l’éternité, l’infini sont des concepts abstraits.
    • Une science abstraite.
  2. Abstrait d’une ou plusieurs collections d’objets, soit imaginées soit concrètes, en parlant d’une qualité ou d’un concept considéré tout seul, séparé de son origine.
    • Une couleur abstraite est transmise au bébé avec le mot “bleu”, en réalité les objets bleus qu’il perçoit ne sont pas tous du même bleu.
    • Propriétés communes à certains objets concrets, par exemple tous bleus, nous avons conçu dans notre enfance nos premiers objets abstraits : des couleurs et des nombres.
    • L’idée de ces valeurs abstraites, conçues en tant qu’abstraites, n’est nullement, comme certains le prétendent, une idée que des métaphysiciens prêtent gratuitement à la conscience humaine. Elle lui est consubstantielle et l’on a l’une dès qu’on a l’autre. — (Julien Benda, La Trahison des clercs : Appendice des valeurs cléricales, 1927, éd. 1946)
    • Rondeur, blancheur, bonté sont des termes abstraits ; et rond, blanc, bon, unis à des noms de substances, comme pain rond, vin blanc, bon prince, sont des termes concrets.
    • Une idée abstraite.
  3. Se dit d’un art, par opposition à figuratif, qui ne représente rien existant dans le monde connu.
    • L’art abstrait, la musique abstraite.
    • Ni mouvement ni discipline, l’art abstrait est surtout l’ouverture d’une nouvelle gamme de possibles. — (Laure-Caroline Semmer, L’Art abstrait, 2010)
  4. Qui est difficile à saisir, à pénétrer.
    • Ce discours est abstrait.
    • Cette question est bien abstraite.
    • Un écrivain, un philosophe abstrait.
  5. (Grammaire) Nom signifiant une idée abstraite.
    • Nom abstrait.
  6. (Programmation orientée objet) Dans certains langages, se dit d’une classe qui n’est que partiellement définie.
    • Une classe abstraite possède certaines méthodes sans corps ou implémentation. Ces méthodes sont dites abstraites (ou virtuelles en C++).
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ABSTRAIRE. (J'abstrais, nous abstrayons. J'abstrayais. J'ai, j'avais, j'eus, etc., abstrait. Il est inusité aux autres temps.) v. tr.
Considérer isolément par abstraction des choses qui sont unies. Abstraire l'accident du sujet, de la substance. En algèbre, on abstrait la quantité, le nombre de toutes sortes de sujets.

S'ABSTRAIRE signifie Se plonger dans la méditation ou dans la rêverie, n'avoir de pensée et d'attention que pour l'objet intérieur qui occupe. Il a une telle faculté de s'abstraire qu'il travaille au milieu du bruit.

Littré (1872-1877)

ABSTRAIT (ab-strè, trè-t')
  • 1 Part. passé. Séparé. Ils [les grands hommes] ne sont pas suspendus en l'air, tout abstraits de notre société, Pascal, P. div. 107. Les choses immortelles, universelles, abstraites de la matière, La Mothe le Vayer, 80.
  • 2 Adj. Qui a le caractère d'une abstraction. La contemplation des choses abstraites. Les vérités abstraites des mathématiques. Les vérités ou les erreurs abstraites. La plus abstraite analyse.
  • 3Terme abstrait, terme qui exprime une qualité considérée indépendamment du sujet, comme la blancheur, la rondeur.
  • 4Nombre abstrait, nombre énoncé sans désignation d'aucun objet particulier, sept, neuf, etc. par opposition à nombre concret, sept pommes, neuf francs.
  • 5Idée abstraite, idée qui ne s'applique pas à un objet particulier. L'humanité, en tant qu'indiquant l'espèce humaine, est une idée abstraite. Tout édifice bâti sur des idées abstraites est un temple élevé à l'erreur, Buffon, Animaux, systèmes de génération.
  • 6 S. m. L'abstrait, par opposition au concret. La rondeur est un abstrait, et le rond est un concret.
  • 7Science abstraite, celle qui s'applique aux lois des phénomènes, et non à un corps particulier. Les mathématiques sont une science abstraite, s'appliquant aux nombres, aux formes et aux mouvements. La chimie est une science abstraite, s'appliquant aux lois de composition et de décomposition de toutes les substances, tandis que la géologie, la minéralogie sont des sciences concrètes, s'appliquant à l'étude de corps particuliers, la terre, les minéraux. J'avais passé beaucoup de temps dans l'étude des sciences abstraites, Bouhours, Nouv. rem. N'étant point, dans leur état, à portée de ces sciences abstraites et trop relevées pour eux, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 275. Le monde moderne lui doit tout [à la religion chrétienne] depuis l'agriculture jusqu'aux sciences abstraites, Chateaubriand, Génie, I, 1.
  • 8Difficile à saisir, à pénétrer. Un esprit abstrait. Raisonnements abstraits. Discours abstraits. Écrivain abstrait. Kant est un philosophe abstrait. Argumentation trop abstraite.
  • 9Qui n'a d'attention que pour l'objet intérieur qui le préoccupe ; qui rêve. C'est un homme fort abstrait ; il est abstrait, rêveur. Un esprit trop abstrait se jetant loin du sujet de la conversation. Théocrine est abstrait, dédaigneux, et il semble toujours rire en lui-même de ceux qu'il croit ne le valoir pas, La Bruyère, 1.

    Abstrait se met d'ordinaire après son substantif.

SYNONYME

ABSTRAIT, DISTRAIT. Signification commune, défaut d'attention, avec cette différence que ce sont nos propres idées, nos méditations intérieures qui nous rendent abstraits, tandis que nous sommes distraits par les objets extérieurs, qui nous attirent et nous détournent, Guizot.

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Étymologie de « abstrait »

Abstractus, de abstrahere, abstraire (voy. ABSTRAIRE) ; provenç. abstrayt ; catal. abstret ; espagn. abstracto ; ital. astratto. Dans le XVIIe siècle à côté d'abstrait on disait aussi abstract.

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(1372) Du latin abstractus.
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Phonétique du mot « abstrait »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
abstrait apstrɛ

Fréquence d'apparition du mot « abstrait » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « abstrait »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « abstrait »

  • Phédon a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre; il dort peu, et d’un sommeil fort léger; il est  abstrait, rêveur, et il a avec de l’esprit l’air d’un stupide: il oublie de dire ce qu’il sait, ou de parler d’événements qui lui  sont connus; et s’il le fait quelquefois, il s’en tire mal, il croit peser à ceux à qui il parle, il conte brièvement, mais  froidement; il ne se fait pas écouter, il ne fait point rire. Il applaudit, il sourit à ce que les autres lui disent, il est de leur  avis; il court, il vole pour leur rendre de petits services. Il est complaisant, flatteur, empressé; il est mystérieux sur ses  affaires, quelquefois menteur; il est superstitieux, scrupuleux, timide. Il marche doucement et légèrement, il semble  craindre de fouler la terre; il marche les yeux baissés, et il n’ose les lever sur ceux qui passent. Il n’est jamais du nombre de  ceux qui forment un cercle pour discourir; il se met derrière celui qui parle, recueille furtivement ce qui se dit, et il se  retire si on le regarde. Il n’occupe point de lieu, il ne tient point de place; il va les épaules serrées, le chapeau abaissé sur  ses yeux pour n’être point vu; il se replie et se renferme dans son manteau; il n’y a point de rues ni de galeries si  embarrassées et si remplies de monde, où il ne trouve moyen de passer sans effort, et de se couler sans être aperçu. Si on  le prie de s’asseoir, il se met à peine sur le bord d’un siège; il parle bas dans la conversation, et il articule mal; libre  néanmoins sur les affaires publiques, chagrin contre le siècle, médiocrement prévenu des ministres et du ministère. Il  n’ouvre la bouche que pour répondre; il tousse, il se mouche sous son chapeau, il crache presque sur soi, et il attend qu’il  soit seul pour éternuer, ou, si cela lui arrive, c’est à l’insu de la compagnie: il n’en coûte à personne ni salut ni compliment.  Il est pauvre.
    Phédon — « Des Biens de fortune »

Traductions du mot « abstrait »

Langue Traduction
Anglais abstract
Espagnol abstracto
Italien astratto
Allemand abstrakt
Chinois 抽象的
Arabe خلاصة
Portugais abstrato
Russe абстрактный
Japonais 概要
Basque abstraktua
Corse astrattu
Source : Google Translate API

Antonymes de « abstrait »

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Nombre de points du mot abstrait au scrabble : 10 points

Abstrait

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