L'autobiographie
Sommaire
Qu’est qu’une autobiographie ?
Une autobiographie est un récit authentique fait par l’auteur sur sa propre vie. Dans ses textes, ce dernier exprime son réel ressenti sur ses expériences vécues. Il s’agit du seul genre littéraire où l’auteur et le narrateur ne font qu’un.
Parfois, il est difficile de faire la part des choses entre la fiction et l’autobiographie. Quelle est vraiment la part de réelle dans le récit de vie ? On parle de pacte autobiographique passé entre l’auteur et le lecteur. Ce dernier considérant qu’il y a une véritable sincérité dans les propos. Effectivement, l’auteur relate les faits tels qu’ils se sont réellement déroulés.
Les motivations qui encouragent l’auteur à rédiger une autobiographie peuvent être multiples. L’autobiographie est souvent une façon d’analyser son évolution personnelle, en décrivant sa vie passée, tel un autoportrait. L’auteur se libère de ses émotions d’autant plus s’il s’agit de souvenirs douloureux, et les partage avec les lecteurs. Parfois, il s’agit de relater son point de vue ou les expériences vécues : informer ou de dénoncer des faits, qu’ils soient positifs ou négatifs, dans le but d’en tirer un enseignement.
Étymologie du mot autobiographie
Apparu au XIXe siècle, le terme autobiographie provient des mots grecs graphè signifiant « écriture », bios signifiant « vie » et autos pour « lui-même ». Il s’agit donc d’écrire sur sa propre existence. Le terme auto marque le fait que le récit est rédigé par soi-même.
Il ne faut pas confondre l’autobiographie avec la biographie, qui n’est pas narrée par celui qui vécu la vie qui est décrite. Le principe est le même mais le narrateur est différent.
Histoire de l’autobiographie
Même si les premiers textes autobiographiques datent du XVIe siècle avec Les essais de Montaigne, qui a été le premier auteur à parler de lui, Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau représente la naissance du genre autobiographique. Cette œuvre du XVIIIe siècle est composée de douze livres. Il y raconte les cinquante-trois premières années de sa vie.
Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple et dont l’exécution n’aura point d’imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme ce sera moi.
Moi seul. Je sens mon cœur et je connais les hommes. Je ne suis fait comme aucun de ceux que j’ai vus ; j’ose croire n’être fait comme aucun de ceux qui existent. Si je ne vaux pas mieux, au moins je suis autre. Si la nature a bien ou mal fait de briser le moule dans lequel elle m’a jeté, c’est ce dont on ne peut juger qu’après m’avoir lu.
Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, Livre I
À partir du XVIIIe siècle et jusqu’à ce jour, des auteurs tels que Chateaubriand, Malraux, Stendhal, André Gide, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir et bien d’autres ont exercé leurs talents d’écriture dans ce genre littéraire.
Cependant, on pouvait trouver des textes plus anciens considérés comme autobiographiques.
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Citons par exemple Les Confessions de Saint-Augustin écrites au IVe siècle, où l’auteur décrit une partie de sa vie et plus particulièrement de son évolution religieuse.
Par la suite sont apparus quelques textes du Moyen-Âge comme ceux de Pierre Abélard : Historia calamitatum (Histoire de mes malheurs) est écrit sous la forme d’une correspondance. Une lettre adressée par l’auteur à un ami moine, dans laquelle il retrace les évènements de sa propre vie et son amour pour Héloïse.
Souvent l’exemple a plus d’effet que la parole pour exciter ou pour calmer les passions humaines. Aussi, après les consolations que j’ai pu t’offrir directement dans notre entretien, je veux, de loin, te mettre sous les yeux, dans une lettre animée des mêmes sentiments, le tableau de mes propres infortune s: j’espère qu’en comparant mes malheurs et les tiens, tu reconnaîtras que tes épreuves ne sont rien ou qu’elles sont peu de chose, et que tu auras moins de peine à les supporter. […]
J’arrivai enfin à Paris, où depuis longtemps la dialectique était particulièrement florissante, auprès de Guillaume de Champeaux, qui devint mon maître, alors considéré, à juste titre, comme le premier dans cet enseignement ; mais, bien reçu d’abord, je ne tardai pas à lui devenir incommode, parce que je m’attachais à réfuter certaines de ses idées, et que, ne craignant pas en mainte occasion d’argumenter contre lui, j’avais parfois l’avantage dans la dispute. Cette hardiesse excitait aussi l’indignation de ceux de mes condisciples qui étaient regardés comme les premiers, indignation d’autant plus grande que j’étais le plus jeune et le dernier venu. Tel fut le commencement de la série de mes malheurs, qui durent encore : ma renommée grandissant chaque jour davantage, l’envie des autres s’alluma contre moi.
Histoire des malheurs d’Abélard adressée à un ami, Traduit par Octave Gréard
Les caractéristiques d’une autobiographie
Un récit autobiographique regroupe certaines caractéristiques et peut appartenir à diverses catégories. Découvrons ensemble les spécificités de ce genre littéraire.
Un récit à la première personne du singulier
Dans le genre autobiographique, l’auteur est le narrateur. Une personne unique, une seule identité qui représente le personnage principal. Contrairement à la bibliographie où la vie du personnage est racontée à la troisième personne, la personne qui écrit une autobiographie utilise le pronom personnel « je ».
Dans son œuvre autobiographique Les Mots, Jean-Paul Sartre expose de manière très personnelle la vie au sein de sa famille.
Un jour, j’avais sept ans, mon grand-père n’y tint plus : il me prit par la main, annonçant qu’il m’emmenait en promenade. Mais, à peine avions-nous tourné le coin de la rue, il me poussa chez le coiffeur en me disant : « Nous allons faire une surprise à ta mère ». J’adorais les surprises. Il y en avait tout le temps chez nous. Cachotteries amusées ou vertueuses, cadeaux inattendus, révélations théâtrales suivies d’embrassements : c’était le ton de notre vie. Quand on m’avait ôté l’appendice, ma mère n’en avait pas soufflé mot à Karl pour lui éviter des angoisses qu’il n’eut, de toute manière, pas ressenties.
Jean-Paul Sartre, Les Mots
Les formes des genres autobiographiques
Des récits, dont les caractéristiques sont proches de celles de l’autobiographie, entrent dans la catégorie du genre autobiographique. Nous pouvons parler de sous-genres du récit autobiographique.
Les Mémoires
Lorsqu’un auteur relate l’histoire de sa vie en s’appuyant sur les faits historiques, il s’agit de Mémoires. Ces textes autobiographies sont écrits par des personnages publics qui présentent des évènements liées à l’Histoire, plutôt en tant que témoins. Les Mémoires se différencient des autobiographies personnelles fondées sur la vie privée de l’auteur, où celui-ci évoque sa personnalité. Les Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand ont été publiées après sa mort. Ce dernier se livre sur son identité tout en abordant les évènements politiques et militaires du XIXe siècle.
Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d’une grive perchée sur la plus haute branche d’un bouleau. À l’instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel ; j’oubliai les catastrophes dont je venais d’être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j’entendis si souvent siffler la grive. Quand je l’écoutais alors, j’étais triste de même aujourd’hui ; mais cette première tristesse était celle qui naît d’un désir vague de bonheur, lorsqu’on est sans expérience ; la tristesse que j’éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l’oiseau dans les bois de Combourg m’entretenait d’une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. Je n’ai plus rien à apprendre, j’ai marché plus vite qu’un autre, et j’ai fait le tour de la vie.
François René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe
Les journaux intimes
Lorsque les évènements sont racontés au jour le jour, il s’agit d’un journal (intime), une forme d’autobiographie car l’auteur se livre sur sa vie personnelle. Citons Le Journal d’André Gide, journal qui a été tenu durant toute la vie de l’auteur. Publié au XXe siècle et présenté sous forme d’anthologie, le Journal apparaît comme un témoignage au cours duquel l’auteur présente ses réflexions sur des questions à la fois d’ordre littéraire mais aussi politique, littéraire, religieux, pratique…
(Quelques semaines plus tard.) Que me sert de reprendre ce journal si je n’ose y etre sincere et si j’y dissimule la secrète occupation de mon cœur ? Jamais je ne me suis senti plus jeune et plus heureux que le mois dernier, au point que meme je ne savais rien en ecrire. Je n’eusse pu que balbutier… (Quelques semaines plus tard.) J’ai reçu de Michel, hier, une lettre d’une fantaisie et d’une grâce exquises, dont toutes mes pensees restent ensoleillees… Depuis huit jours, j’attends une lettre de Michel, avec une impatience angoissee…
André Gide, Le Journal
Les romans autobiographiques
Le roman autobiographique mèle la fiction à la réalité. Il inclut des éléments de la vie de l’auteur mais certains sont transformés purement inventés. Que ce soit au niveau des personnages, de la chronologie des évènements, des faits relatés, les romans autobiographiques comportent une part de réél inspirée de la vie de l’auteur.
Dans La Promesse de l’Aube, Romain Gary, qui qualifie son récit comme étant « d’inspiration autobiographique », évoque la forte relation qui l’unissait à sa mère, un amour démesuré.
– Je sais bien que c’est ta mère, mais c’est tout de même beau, un amour comme ça. Ça finit par vous faire envie… Y aura jamais une autre femme pour t’aimer comme elle, dans la vie. Ça, c’est sûr.
C’était sûr. Mais je ne le savais pas. Ce fut seulement aux abords de la quarantaine que je commençai à comprendre. Il n’est pas bon d’être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ça vous donne de mauvaises habitudes. On croit que c’est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours.
Romain Gary, La Promesse de l’aube
Exemples d’autobiographies
Une petite sélection de récits de genres et sous-genres autobiographiques.
Mes amies, et Zaza elle-même, jouaient avec aisance leur rôle mondain; elles paraissaient au « jour » de leur mère, servaient le thé, souriaient, disaient aimablement des riens; moi je souriais mal, je ne savais pas faire du charme, de l’esprit ni même des concessions. Mes parents me citaient en exemple des jeunes filles « remarquablement intelligentes » et qui cependant brillaient dans les salons. Je m’en irritais car je savais que leur cas n’avait rien de commun avec le mien: elles travaillaient en amateurs tandis que j’avais passé professionnelle. Je préparais cette année les certificats de littérature, de latin, de mathématiques générales, et j’apprenais le grec ; j’avais établi moi-même ce programme, la difficulté m’amusait; mais précisément, pour m’imposer de gaieté de cœur un pareil effort, il fallait que l’étude ne représentât pas un à-côté de ma vie mais ma vie même: les choses dont on parlait autour de moi ne m’intéressaient pas. Je n’avais pas d’idées subversives; en fait, je n’avais guère d’idées, sur rien; mais toute la journée je m’entraînais à réfléchir, à comprendre, à critiquer, je m’interrogeais, je cherchais avec précision la vérité: ce scrupule me rendait inapte aux conversations mondaines.
Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée
L’extrait qui suit est extrait de l’autobiographie « Une vie » de Simone Veil, qui cite en début d’ouvrage « Maupassant, Maupassant que j’aime, ne m’en voudra pas d’avoir emprunté le titre d’un de ses plus jolis romans pour décrire un parcours qui ne doit rien à la fiction ».
Jour après jour, nous attendions donc tous les quatre, Maman, ma sœur Milou, mon frère et moi, un départ pour l’Allemagne dont nous ignorions aussi bien la date que la destination, avec le seul espoir de ne pas être séparés. Personne n’avait entendu parler d’Auschwitz, dont le nom n’était jamais prononcé. Comment aurions-nous pu avoir une idée quelconque de l’avenir que les nazis nous réservaient ? Aujourd’hui, il est devenu difficile de réaliser à quel point l’information, sous l’Occupation, était rationnée et cloisonnée. Elle l’était du fait de la police et de la censure. On a peine à croire, à présent, que personne, hors les quartiers concernés, n’ait entendu parler de la grande rafle du Vél d’Hiv de juillet 1942, laquelle, depuis lors, a fait couler tant d’encre et nourri tant de polémiques. Lorsque, bien plus tard, j’en ai eu moi-même connaissance, j’ai partagé la stupeur collective face à la révélation de la police parisienne.
Simone Veil, Une vie
Considéré comme un objet de mémoire collective, Le Journal d’Anne Franck est un récit autobiographique composé à partir du journal intime que tenait la jeune adolesente juive Anne Franck, pendant l’Occupation allemande. Ce journal, dans lequel elle transmet ses émotions avec authenticité, relate le quotidien de sa famille pendant cette période tragique de l’Histoire.
8 Août 1942 : « A trois heures (Bonjour était parti mais devait revenir plus tard), la sonnette a sonné. Je ne l’ai pas entendu, puisque j’étais sur le balcon, lisant paresseusement au soleil. Un peu plus tard, Margot apparut à la porte de la cuisine, l’air très agitée. «Mon père a reçu un avis de rappel des SS», murmura-t-elle. « Mère est allée voir M. van Daan» (M. van Daan est le partenaire commercial de mon père et un bon ami.) J’ai été stupéfait. Une commande : tout le monde sait ce que cela signifie. Des visions de camps de concentration et de cellules isolées me traversaient la tête. Comment pourrions-nous laisser Père aller vers un tel destin? «Bien sûr qu’il ne va pas», déclara Margot en attendant maman dans le salon. « Mère est allée voir M. van Daan pour lui demander si nous pouvons déménager demain dans notre cachette. Les van Daans nous accompagnent. Nous serons sept en tout. » Silence. On ne pouvait pas parler. La pensée du Père d’aller rendre visite à quelqu’un à l’hôpital juif et totalement inconscient de ce qui se passait, la longue attente de Mère, la chaleur, le suspense – tout cela nous a réduits au silence.
Le Journal d’Anne Franck
bonjour Madame, Monsieur,
je vous informe qu'une faute de frappe s'est glissée dans l’extrait de l’autobiographie « Une vie » de Simone Veil,
Comment uarions-nous
merci