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Grève

Définitions de « grève »

Trésor de la Langue Française informatisé

GRÈVE1, subst. fém.

Terrain plat et uni, généralement constitué de sable et de graviers, sis au bord d'un cours d'eau ou de la mer. Sauter, se briser, s'échouer, s'étaler sur la grève; amener, tirer, abandonner (qqc.) sur la grève; longer, galoper le long de la grève. Le ruisseau s'étalait sur une longue grève plate, d'où émergeaient par places de gros galets noirs (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 230).Une épave abandonnée par les flots sur la grève (Queneau, Pierrot,1942, p. 24).La mer qui bat les grèves de Rimini en s'y brisant répète le nom de Malatesta (Montherl., Malatesta,1946, II, 4, p. 468) :
Ils voulurent revoir la plage; ils redescendirent la valleuse; ils s'assirent devant la mer. Les flots d'une récente tempête avaient amené sur la grève des coquilles des profondeurs, des épaves et des lambeaux d'algue arrachés; les vagues encore gonflées étourdissaient par une clameur continue. Gide, Tentative amour.,1893, p. 78.
[Avec un compl. prép. exprimant la nature] La rivière était bordée par des grèves de sable (Flaub., Éduc. sent., t. 1, 1869, p. 4).La mer abandonne dans sa retombée une grève de galets et de détritus (Malraux, Espoir,1937, p. 797).
P. ext. Synon. de rivage.M. de Chateaubriand, gentilhomme breton, né sur les grèves de l'océan (Lamart., Confid.,1851, p. 284).Il atteignit la grève Des mers dans le pays qui fut depuis Assur (Hugo, Légende, t. 1, 1859, p. 48).
HIST. Place de Grève. [À Paris; devenue place de l'Hôtel de Ville] Place située en bordure de la Seine, où se faisaient les exécutions publiques. Être roué, pendu en place de Grève. Il fallait traverser la moitié de Paris, et descendre sur la place de Grève, en face de l'Hôtel de Ville (Staël, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 396).Quand on brûlera des Juifs en place de Grève, il attisera le bûcher (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 352).Les marchands de la rue Saint-Denis sont allés en place de Grève assister au supplice du marquis de Courboyer (Mauriac, Vie Racine,1928, p. 90).
Absol. La Grève. Ces désœuvrés étaient là, silencieux, immobiles, attentifs comme l'est le peuple à la Grève, quand le bourreau tranche une tête (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 7).Dans trois jours la justice l'y reprendra, et elle sera pendue en Grève (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 446).Quai de la Grève. Il prit sa course, galopa dégingandé, éperdu, le long du quai de la Grève (Zola, Œuvre,1886, p. 7).
Lieu d'embauche. Une des grèves les plus curieuses de Paris est celle qui se tient rue Vaucanson, au coin de la rue Réaumur (Rappel, oct. in Fustier, Suppl. à Delvau (1889) ds Fr. mod. t. 16 1948, p. 300).
[P. réf. aux chômeurs en quête de travail, qui se rassemblaient sur la place de Grève] Être en grève. À la recherche d'un travail. C'est pas possible, il prend ses ouvriers à la grève ce gâche-métier là (Poulot, Sublime,1872, p. 136).
REM.
Grevette, subst. fém.,région. (Aisne). Terre de qualité inférieure, faite de sables graveleux. Le comte l'entraîna dans la cour, rectangle de grevette (H. Bazin, Tête contre murs,1949, p. 79).
Prononc. et Orth. : [gʀ ε:v]. Ds Ac. dep. 1694; ds Ac. 1694 et 1718, s.v. greve. Étymol. et Hist. Ca 1140 (G. Gaimar, Hist. des anglais, éd. A. Bell, 4711). Du lat. pop. *grava « gravier » (attesté en lat. médiév. 876 ds Nierm. au sens de « plage »), d'orig. prélatine; la très grande extension du mot hors de l'aire gallo-romane (A. Långfors ds Romania t. 50, p. 631) rend improbable une orig. gauloise (cf. FEW t. 4, p. 259). Bbg. Darm. Vie 1932, p. 78. - Quem DDL t. 1. - Rigaud (A.). Sous les ponts de Paris. Vie Lang. 1968, pp. 550-560. - Thurneysen 1884, p. 102.

GRÈVE2, subst. fém.

A. − [P. réf. aux chômeurs en quête de travail, qui se rassemblaient sur la place de Grève, à Paris; v. grève1HIST.]
1. [Dans une entreprise] Cessation collective, volontaire et concertée du travail (généralement avec préavis et pour une durée déterminée) par des salariés qui cherchent ainsi à contraindre leur employeur à satisfaire leurs revendications professionnelles. Par suite des grèves, le chargement n'a pu être achevé avant la nuit (Gide, Journal,1936, p. 1243).Des grèves venaient d'éclater en plusieurs villes (Arland, Ordre,1929, p. 210).Ils étaient abattus parce que la grève avait échoué (Aragon, Beaux-Quart.,1936, p. 503).L'ouvrier apprend que d'autres ouvriers dans un autre métier ont, après une grève, obtenu un relèvement de salaires (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945, p. 507) :
1. Le lock-out qui est, si j'ai bien compris, une sorte de grève des capitalistes en réponse aux grèves ouvrières, menace le royaume d'une ruine prochaine. Bloy, Journal,1899, p. 357.
SYNT. Grève illimitée; une longue grève; grève partielle, totale, symbolique; grèves massives, disciplinées; faire (la) grève; être, se mettre en grève; décider, décréter, déclencher, poursuivre, briser une grève; inciter, renoncer, mettre fin à une grève; menace, ordre, journée de grève; préavis, continuation, fin de la grève; mouvements de grève; déclenchement, organisation, règlementation de la grève; femmes, ouvriers, travailleurs en grève; grève-bouchon; grève avec occupation (des usines).
Comité de grève. Comité chargé d'organiser et de contrôler la grève. Ce Volkouski était un des plus âpres travailleurs du comité de grève (G. Leroux, Roul. tsar,1912, p. 85).Il vint rôder autour de la maison des syndicats, où était le comité de grève (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 499).
Piquet de grève. Personnel gréviste mis en place à l'entrée (d'une entreprise) pour empêcher toute reprise éventuelle du travail. Borodine en demanda la création [des syndicats obligatoires], avant de disposer des piquets de grève (Malraux, Conquér.,1928, p. 54).Ne vous fatiguez pas pour les piquets de grève, avait dit le patron. Quand l'atelier ne travaille pas, je fais des économies (Camus, Exil et Roy.,1957, p. 1598).
Briseur de grève. Personne qui continue à travailler dans une entreprise en grève, ou qui a été embauchée à la place d'un gréviste. Synon. vieilli. jaune.Un jeune bourgeois, qui faisait partie, il y avait encore quinze jours, d'une organisation de briseurs de grève (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 122).Il a commencé à m'exposer avec volubilité le rôle que les gangsters avaient joué ces dernières années comme briseurs de grève (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 306).
Faits de grève. Participation à une grève. Un ancien collègue de Gautier, Simon, employé des chemins de fer, révoqué pour faits de grève (Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1281).
Allocation de grève. Allocation versée aux grévistes par une caisse prévue à cet effet. Notre camarade Borodine a dû intervenir au conseil pour faire maintenir le paiement des allocations de grève à Canton (Malraux, Conquér.,1928p. 71).
Droit, liberté de grève Interdiction du droit de grève et de lock-out (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 294).Le gouvernement, en juillet 1963, veut réglementer l'exercice du droit de grève dans les services publics (Reynaud, Syndic. France,1963, p. 145).
[Avec un compl. prép. de ou un déterm. adj. désignant l'entreprise en grève ou l'objet de la production arrêtée] Grève des services publics, des fonctionnaires, des chemins de fer; grèves scolaires; grève des heures supplémentaires. Ta lettre à Gide et mon poème, envoyés au moment de la grève des postes, se sont perdus (Alain-Fournier, corresp. [avec Rivière], 1909, p. 133).Ils ont brisé la fameuse grève des docks en 1898 (Sartre, Nausée,1938, p. 111) :
2. Quel est le mobilisé d'usine (...) qui fait des discours dans l'atelier pour qu'on déclare la grève des obus et qu'on arrête ainsi le massacre des prolétaires?... Romains, Homme bonne vol.,1938, p. 229.
En partic. [Formes de grèves d'entreprises]
Grève(-)surprise. Grève déclenchée avant toute négociation. Un grève-surprise, déclenchée ce matin (Arnoux, Double chance,1958, 200).Une grève d'un type nouveau éclate. Imprévisible, incontrôlable grève-surprise, elle explose dans un atelier, puis elle rebondit dans un autre, là où on s'y attend le moins (Le Nouvel Observateur,8 sept. 1969, p. 19, col. 3).
Grève sur le tas. Grève impliquant la présence des grévistes sur leur lieu de travail. Condamnation implicite des grèves sur le tas (Reynaud, Syndic. France,1963, p. 88).
Grève d'avertissement, de harcèlement. Débrayages de protestation, grèves d'avertissement (Reynaud, Syndic. France,1963p. 143).Les grèves de harcèlement, les grèves spontanées ont tenu beaucoup de place dans les années récentes (Reynaud, Syndic. France,1963p. 151).
Grève de solidarité. Grève faite par une autre entreprise que celle en grève pour soutenir son action revendicative. Le plus incroyable était qu'on autorisât des grèves solidarité (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 43).
Grève tournante; grève articulée (rare). Grève qui affecte successivement les différents secteurs ou services d'une entreprise. Il est compréhensible que le gouvernement réagisse (...) en mettant hors la loi les grèves tournantes dans les services publics (Reynaud, Syndic. France,1963p. 153).À côté de ces mouvements généralisés, on enregistre des grèves « articulées » (c.-à-d. « tournantes ») dans de nombreuses entreprises industrielles (Le Nouvel Observateur,25 mai 1970, p. 28, col. 3).
Grève sauvage. Grève déclenchée en dehors de toute consigne syndicale. « Grève sauvage » échappant au contrôle des centrales syndicales (L'Express,18 nov. 1966, p. 54).Et puis est apparue (...) la grève sauvage, qui naît souvent d'un noyau dur au niveau d'un atelier qui peut bloquer la production et paralyser l'entreprise (Les Informations,12 févr. 1973, p. 46, col. 3).
Grève générale. Grève qui affecte toutes les entreprises d'une région, d'un pays (et qui se rapproche souvent de la grève politique; v. ex. 3). La fédération des syndicats qui proposait la grève générale comme le plus puissant moyen d'agir sur les patrons et l'aide la plus efficace aux révolutionnaires (A. France, Île ping.,1908, p. 412).En septembre 1938, raconte Marat, la C.G.T. donna l'ordre d'une grève générale de 14 heures que les patrons et gouvernement décidèrent de briser (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 173) :
3. ... j'ai toujours interprété la grève générale non comme un moyen de violence, mais comme un des plus vastes mécanismes de pression légale que, pour des objets définis et grands, pouvait manier le prolétariat éduqué et organisé. Jaurès, Ét. soc.,1901, p. XXXV.
P. ext. [Avec l'idée d'un ralentissement dans l'activité ou la production]
Grève perlée. Ralentissement collectif, volontaire et concerté du rythme de travail. Faire la grève perlée, il n'y fallait pas songer à cause du froid (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 88).
Grève du zèle. Ralentissement de la production, lié à l'observation trop méticuleuse des consignes de travail.
2. Grève politique [P. oppos. à la grève syndicaliste qui vise la satisfaction des revendications professionnelles] Cessation générale et volontaire du travail par des salariés qui cherchent ainsi à provoquer le renversement, la chute du pouvoir politique. Aujourd'hui nous possédons assez d'éléments pour comprendre aussi bien la grève syndicaliste que la grève politique (Sorel, Réflex. violence,1908, p. 267).
B. − P. ext. [En tant qu'arrêt d'une activité]
1. [Avec l'idée d'un arrêt collectif et concerté]
[En parlant de travailleurs indépendants, non salariés] Cessation concertée du travail, faite par un corps de métier ou un groupe social, en signe de mécontentement, et provoquant souvent la gêne de ceux qui ont recours à ses services. Grève des boulangers, des bouchers :
4. Chez les paysans, la technique est celle de la cessation des livraisons : ainsi la grève des approvisionnements du blé ou du lait par laquelle les producteurs mécontents des prix fixés par le gouvernement cessent d'envoyer leurs produits aux centres urbains... Meynaud, Groupes pression Fr.,1958, p. 156.
Grève de l'impôt. Refus concerté de payer l'impôt. La proclamation de la « grève » de l'impôt comporte une part très appréciable de bluff (Meynaud, Groupes pression Fr.,1958p. 158).
Grève des femmes. Le M.L.F. organise pour la fin de mai la première grève des femmes. Grève du travail salarié, du travail scolaire et universitaire, du travail domestique, des soins aux enfants (Le Nouvel Observateur,11 mars 1974, p. 52, col. 2).
2. [Au plan individuel ou collectif, mais sans l'idée d'une concertation préalable] Cessation temporaire du travail habituel. Le jeudi, chômage encanaillé, grève en tablier noir et bottine à clous, permet tout. Pendant près de cinq heures, ces enfants ont goûté les licences du jeudi (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 34).
P. ext. Cessation d'activité, suspension d'une action déterminée. Il suffirait, pensaient-ils, de mettre leur appétit en grève, de refuser toute nourriture (Zola, Nouv. contes Ninon,1874, p. 47).Bouderie : une grève de gamins (Renard, Journal,1893, p. 166).Qu'est-ce que cela veut dire? Les contribuables pourront aussi faire grève (Barrès, Cahiers,1907, p. 106).
En partic. Grève de la faim. [Dénomination littéralement impropre] Grève consistant à refuser toute alimentation (généralement en signe de protestation). Ardèle s'est enfermée à clef, elle ne veut ouvrir à personne, elle fait la grève de la faim (Marcel, Heure théâtr.,1959, p. 120) :
5. ... Gandhi choisit de ne pas manger pour fléchir son adversaire. La grève de la faim est sans doute l'expérience rare qui révèle la nature vraiment humaine de nos besoins comme, en un certain sens, la chasteté (monacale ou autre) constitue la sexualité en sexualité humaine. Ricœur, Philos. volonté,1949, p. 90.
REM. 1.
Antigrève, subst. fém.,emploi adj. Une clause antigrève dans une loi (Lexis1975).
2.
Contre-grève, subst. fém.Les prix du revient de la vie deviendront impossibles, si un beau jour, les bourgeois ne font pas de la contre-grève (Goncourt, Journal,1891, p. 111).
3.
Grèver de la faim, loc. verb.,hapax. Faire la grève de la faim. Prêts depuis toujours à grèver de la faim (A. Boudard, La Cerise,1963, 222 ds Quem. DDL t. 13).
Prononc. et Orth. V. grève1. Étymol. et Hist. 1805 (Rapp. 5 prair. an XIII − 25 mai 1805, Aul., Par ... Emp., t. I, p. 801 ds Brunot t. 9, p. 1183, note 7 : Les tailleurs de pierre ont décidé entre eux de faire, demain lundi, ce qu'ils appellent « grève » [c'est-à-dire de quitter l'ouvrage] pour demander de l'augmentation). Du nom de la place de Grève à Paris, au bord de la Seine (actuelle place de l'Hôtel de Ville), (1260, E. Boileau, Métiers, éd. J.-B. Depping, p. 15) où se réunissaient les ouvriers sans travail, en attendant l'embauche.
STAT. − Grève1 et 2. Fréq. abs. littér. : 1850. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2327; b) 2246; xxes. : a) 3972, b) 2288.
BBG.Giraud (J.), Pamart (P.), Riverain (J.). Mots dans le vent. Vie Lang. 1970, pp. 94-107. - Mimin (P.). Terminol. jur. de la grève. Déf. Lang. fr. 1973, no70, p. 22.

GRÈVE3, subst. fém.

Vx. Partie de l'armure protégeant les jambes. (Dict. xixeet xxes.). J'ai les grèves rôties! (Bertrand, Gaspard,1841, p. 95).Du haut en bas des murailles s'étalaient d'éclatantes panoplies (...) brigantines, grèves (A. France, Anneau améth.,1899, p. 97).
Prononc. : [gʀ ε:v]. Étymol. et Hist. 1306 (G. Guiart, Royaux Lignages, éd. de Wailly et Delisle, 20519). Cette partie de l'armure qui couvre le tibia, ou bien la crête antérieure du tibia, ayant pu être comparées à la raie qui sépare en deux la chevelure (cf. FEW t. 16, p. 49 b et A. Thomas ds Romania t. 42, p. 407), le mot est prob. issu par évolution sém. de greve « raie (dans les cheveux) » (fin xies. Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D.S. Blondheim, t. 1, p. 79, no569; ca 1160 Enéas, éd. J.J. Salverda de Grave, 3990), déverbal de graver*.

Wiktionnaire

Nom commun 3 - français

grève \ɡʁɛv\ féminin

  1. (Antiquité) (Armurerie) Partie de l’armure qui couvrait le tibia, la jambe.
    • Du haut en bas des murailles s’étalaient d’éclatantes panoplies […] brigantines, grèves. — (Anatole France, L’Anneau d’améthyste, 1899, page 97)
  2. Jambe.
    • J’ai les grèves rôties ! — (Bertrand, Gaspard, 1841, page 95)

Nom commun 1 - français

grève \ɡʁɛv\ féminin

  1. (Pédologie) Terrain uni et sablonneux le long de la mer ou d’une grande rivière.
    • Deux fois par jour la mer reçut ordre de se lever de nouveau dans son lit et d’envahir ses grèves. — (François René Chateaubriand, Génie, I, IV, 4)
    • En parcourant les grèves laissées à sec par la marée, je faisais lever de nombreuses tribus d’oiseaux de rivage […] — (Jean Louis Armand de Quatrefages de Bréau, L’Archipel de Chausey, souvenirs d’un Naturaliste, Revue des Deux Mondes, tome 30, 1842)
    • Kalumah fut plongée dans l’eau froide dont la fraîcheur la ranima, et quelques instants plus tard, une lame la jetait mourante sur une grève de sable. — (Jules Verne, Le Pays des fourrures, 2 partie, chapitre 9, J. Hetzel et Cie, Paris, 1873, page 291)
    • Démocrite aurait trouvé aux rives du Jourdain et aux grèves de la mer Morte un aspect enchanteur. — (Jules Verne, Claudius Bombarnac, chapitre IV, J. Hetzel et Cie, Paris, 1892, Page:Verne - Claudius Bombarnac.djvu/46)
    • Soumise à des alternatives d’émersion et d’immersion d’amplitude et de durée variables, la grève est occupée par des groupements […] constitués essentiellement par des espèces amphibies adaptées aux « variations du niveau hydrostatique ». — (Gustave Malcuit, Contributions à l’étude phytosociologique des Vosges méridionales saônoises : les associations végétales de la vallée de la Lanterne, thèse de doctorat, Société d’édition du Nord, 1929, p. 54)
    • Chaque soir, lorsque sonnait le couvre-feu, les chiennetiers lâchaient les dogues hors des murs et malheur à qui rôdait alors à travers les grèves où les navires étaient échoués à mer basse […] — (Henri-Georges Gaignard, Connaître Saint-Malo, éd. Fernand Lanore, 1973, page 160)
    • Du reste, les familles du bourg elles-mêmes, moins farouchement cloîtrées que notre petite cellule féminine, n’usaient de la « grève » – on ne disait pas la plage– que parcimonieusement, pour une expédition qui demandait une préparation minutieuse et un chargement de provisions et de lainages. — (Mona Ozouf, Composition française, Gallimard, 2009, collection Folio, page 82)
  2. Banc de sable qui se forme dans la Loire, et que le courant porte tantôt d’un côté, tantôt d’un autre.
  3. (Maçonnerie) (Vieilli) Le gros sable qui sert à faire du béton ou du mortier.

Nom commun 2 - français

grève \ɡʁɛv\ féminin

  1. (Travail, Syndicalisme) Entente, accord des salariés d’une usine, d'une entreprise, d’une profession, pour cesser leur travail jusqu’à ce qu’ils aient obtenu une augmentation de salaire ou certains autres avantages.
    • Les grèves, qui se multiplient chaque jour davantage et qui ont fait, dans le Jura, leur apparition d'une manière éclatante, contraignent pour ainsi dire les populations à s'occuper de cette question tant redoutée qu'on appelle la Question sociale. — (Adhémar Schwitzguébel, Manifeste adressé aux ouvriers du Vallon de Saint-Imier, février 1870)
    • Or, voici que M. Millerand apporte au Conseil des ministres un projet de loi sur la grève obligatoire. Qu'est-ce à dire? C'est-à-dire que, dorénavant, lorsque les ouvriers d'une usine voudront se mettre en grève, il devra être procédé à une consultation préalable. Tous les travailleurs intéressés voteront pour ou contre la cessation du travail. Si la moitié plus un des ouvriers opine pour la grève, la minorité — dans l'espèce la moitié moins un — devra s'incliner. La grève sera obligatoire. — (Joseph Caillaux, Mes Mémoires, I, Ma jeunesse orgueilleuse, 1942, p. 179 & 180)
  2. (Par extension) Cessation d’activité comme moyen de pression politique.
    • Je comprends que ce mythe de la grève générale froisse beaucoup de gens sages à cause de son caractère d’infinité […] — (Georges Sorel, Lettre à Daniel Halévy, 15 juillet 1907, dans Réflexions sur la violence, 1908)
    • Seuls deux sites pétroliers sont encore en grève : le dépôt de carburants de Feyzin (Rhône) et la raffinerie de Gonfreville (Manche), où la grève est reconduite jusqu’à jeudi. — (journal 20 minutes, édition Paris-IDF, 21 octobre 2022, page 4)
    • Ce n’est pas sans regret, sans doute, que les ardoisiers de Fumay feront grève le 11 mars 1912 afin d’appuyer la proposition de loi : une grève soutenue par l’Union départementale des Syndicats […] — (Henri Manceau, Des luttes ardennaises, 1969)
    • C’était l’époque de la Chambre bleu horizon, comme on l’appelait, une Chambre d’extrême droite et d’un patriotisme sourcilleux. Lors de la grève des employés du métro, j’ai vu, de mes yeux, les polytechniciens en grande tenue et en gants blancs conduire les rames de wagons pour faire échec aux ouvriers. — (Georges Simenon, Un homme comme un autre, 1975)
    • Maurice Thorez, ministre d’État, disait : « Il faut savoir finir une grève. Retroussons nos manches. » — (Édouard Bled, J’avais un an en 1900, Fayard, 1987, Le Livre de Poche, page 364.)
    • L’Unef soutiendra les étudiants qui votent le blocage et qui votent la grève dans les universités. — (Jean-Baptiste Prévost, cité par l’AFP, octobre 2010)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

GRÈVE. n. f.
Lieu uni et plat, couvert de gravier, de sable, le long de la mer ou d'une grande rivière. Les vagues se déploient sur la grève. La grève était couverte de débris. Absolument, La Grève, Place publique de Paris, située sur le bord de la Seine, devant l'Hôtel de Ville, où l'on faisait autrefois les exécutions et où se réunissaient les ouvriers sans travail en attendant d'être embauchés. Le coupable fut décapité en Grève, en place de Grève. Par extension, il signifie aujourd'hui Entente, accord des ouvriers d'un atelier, d'une profession, pour cesser leur travail jusqu'à ce qu'ils aient obtenu une augmentation de salaire ou certains autres avantages. Le droit de grève. Faire grève. Se mettre en grève. Faits de grève. Grève perlée.

Littré (1872-1877)

GRÈVE (grè-v') s. f.
  • 1Terrain uni et sablonneux le long de la mer ou d'une grande rivière. Deux fois par jour la mer reçut ordre de se lever de nouveau dans son lit et d'envahir ses grèves, Chateaubriand, Génie, I, IV, 4. Que j'aime à contempler dans cette anse écartée La mer qui vient dormir sur la grève argentée, Sans soupir et sans mouvement ! Lamartine, Harm. I, 10.
  • 2La Grève, place de Paris sur le bord de la Seine, à côté de l'hôtel de ville, où se faisaient les exécutions juridiques. Et pour ses factions il n'ira point en Grève, Régnier, Sat. X. Bien que les spectacles de la Grève ne soient pas de fort belles choses à mander à une personne de votre qualité, je vous dirai pourtant par pure stérilité de nouvelles, que l'on pend et roue ici tous les jours de la semaine, Scarron, Œuv. t. I, p. 209. À la fin tous ces jeux, que l'athéisme élève, Conduisent tristement le plaisant à la Grève, Boileau, Art p. II.

    Ange de Grève, voy. ANGE.

    Faire grève, se tenir sur la place de Grève en attendant de l'ouvrage, suivant l'habitude de plusieurs corps de métiers parisiens (en ce sens on met un petit g).

    Par extension du sens de se tenir sur la place en attendant de l'ouvrage, coalition d'ouvriers qui refusent de travailler, tant qu'on ne leur aura pas accordé certaines conditions qu'ils réclament. La grève des maçons, des charpentiers. Faire grève, se mettre en grève, abandonner les travaux en se liguant pour obtenir une augmentation de salaire.

  • 3 Terme de maçonnerie. Le gros sable qui sert à faire du mortier.
  • 4Nom donné aux bancs de sable qui se forment dans la Loire, et que le courant porte tantôt d'un côté, tantôt d'un autre.

HISTORIQUE

XIIe s. Il orent un vadlet en la greve trové, à cui un cheval unt pur uit deniers lué, Th. le mart. 51.

XIIIe s. Maint ribaus ont les cuers si baus, Portans sas de charbon en Grieve, Que la poine riens ne lor grieve, la Rose, 5065. Je voz donrai vingt tones de vin d'Auchoirre [Auxerre] por cent livres rendus en Greve à Paris, Beaumanoir, XXXIV, 64.

XVe s. Il y a très mauvais pays à chevaucher, pour les graves, Froissart, II, III, 11.

XVIe s. Une autre fois il se promenoit sur la greve le long de la marine…, Amyot, Thémist. 35. Cette matiere gluante, de la quelle se bastit la grave et la pierre, Montaigne, III, 219. Fait cardinal en greve [mis à mort sur la place de Grève], Cotgrave

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Étymologie de « grève »

(Nom commun 1) De l’ancien français grave, greve, du bas latin *grava (« sable, gravier »), probablement d’origine gauloise. Ce mot d’ancien français préserve deux significations distinctes : 1) une formation rocheuse de galets roulés, de graviers ou de sable, éventuellement déplaçable pour aménager une voie ou assécher une route 2) une vaste étendue, plage ou lande, au soubassement composé principalement de ces géo-matériaux. Ainsi par extension le terme apparaît dans la micro-toponymie des plages de sable, des landes ou des dunes sableuses, des successions de terrasses aux sols graveleux (les Graves en Gironde). Il n’est pas exclu que ces formations plus ou moins imposantes soient aussi influencées par le verbe ancien français graver, dans son sens second de « gravir » (le premier sens renvoyant à un déplacement ou enlèvement de matière, par exemple ” graver la cire »).
(Nom commun 2) Première hypothèse (1805) : de faire grève, se tenir sur la place de Grève en attendant du travail, près de l’Hôtel de Ville à Paris, de l’ancien français greve. Deuxième hypothèse : de formes dialectales de l’ancien français grieve, du latin populaire grevis (« conflit, dommage ») ayant aussi engendré l’ancien français grief. Notons que grevis est la forme altérée de l’adjectif latin classique gravis (« lourd, pondéreux »). Ce dernier adjectif peut qualifier le transport des matériaux décrits par l’ancien français grave ou grève, ci-dessus.
(Nom 3) (XIIIe siècle) .
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Berry, grave, gravier ; génev. grave, endroit couvert de gravier ; provenç. grava ; vén. grava, lit d'un torrent ; grison, grava, greva, plaine de sable ; du radical grav ou grau qui se trouve dans le bas-breton grouan, sable, le kimry grou, et dans le sanscrit grāvan, pierre.

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Phonétique du mot « grève »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
grève grɛv

Fréquence d'apparition du mot « grève » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « grève »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « grève »

  • Confondant vitesse et précipitation, en utilisant une procédure d'urgence qui dépossède les partenaires sociaux et nous prive de nos prérogatives, le Gouvernement a mené à bien son entreprise de « criminalisation » de la grève. De nombreux gages ont été donnés aux « ultras », qui regrettaient ouvertement qu’on n'aille pas plus vite et plus loin dans l'interdiction des grèves ou dans la mise en place d'un service normal aux heures de pointe. Leurs tentatives de muscler le projet de loi n'auront pas été vaines : le dispositif sera bien étendu aux transports aériens et maritimes, l'article 12 est explicite.
    Roland Muzeau, 2 août 2007, Assemblée nationale, dans le compte-rendu analytique.
  • Les entreprises de transports seront obligées d'avoir un plan de transport minimum les jours de grève. Un salarié gréviste devra le déclarer deux jours avant. Les salariés non grévistes qui travaillent sur une autre ligne pourront aller travailler sur une ligne en grève. Les jours de grève ne seront pas payés. Au bout de huit jours de grève, il y aurait un scrutin à bulletin secret pour déterminer si une majorité des salariés est en faveur de ce conflit ou pas.
    Nicolas Sarkozy, 20 juin 2007, L'Élysée, dans jdd sur TF1, paru 21 juin 2007.
  • Nous savions déjà que ce texte n’avait pas pour objectif véritable de stimuler le dialogue social, ni d’assurer la continuité du service public dans les transports terrestres, laquelle est mise à mal non tant par les faits de grève – qui représentent moins de 3 % des causes de dysfonctionnements – que par la vétusté de certains matériels, l’état de délabrement d’une part importante du réseau et l’insuffisance des investissements de sécurité.
    Jean Mallot, 2 août 2007, Assemblée nationale, dans le compte-rendu analytique.
  • « Les démagogues font d’autant mieux leurs affaires qu’ils ont jeté leur pays dans la discorde », écrivait Ésope au VIe siècle avant Jésus-Christ…
    Roland Muzeau, 2 août 2007, Assemblée nationale, dans le compte-rendu analytique.
  • Conquête du mouvement ouvrier, reconnu à la Libération et consacré dans la Constitution, le droit de grève est une liberté fondamentale. Nul ne saurait le contester, et ce projet de loi ne le remet absolument pas en cause.
    Christian Blanc, 2 août 2007, Assemblée nationale, dans le compte-rendu analytique.
  • Le Concierge. — Dame ! monsieur le juge, je ne peux pas nier, mais c’est de la prison honorable.Le Juge. — Comment ?Le Concierge. — Oui, monsieur le juge, la première fois, j’étais alors valet de chambre, c’est pour avoir crié, le premier mai : « Vive la grève ! »Le Juge. — Vous étiez valet de chambre chez qui ?Le Concierge. — Chez M. Jaurès.Le Juge. — Ah ! bon, et votre deuxième condamnation ?Le Concierge. — C’est pour avoir crié sur le seuil de Sainte-Clotilde : « Mort aux vaches ! »
    Maurice Blanc et Francis de Croisset — Arsène Lupin
  • Si on ne nous reconnait plus, les vieux de la vieille savent que, quand on était ti-cul, c’était nous les rois de la grève.
    Jonathan Painchaud — « Les vieux chums »

Traductions du mot « grève »

Langue Traduction
Anglais strike
Espagnol huelga
Italien sciopero
Allemand schlagen
Chinois 罢工
Arabe يضرب
Portugais batida
Russe ударять
Japonais ストライク
Basque greba
Corse greva
Source : Google Translate API

Antonymes de « grève »

Combien de points fait le mot grève au Scrabble ?

Nombre de points du mot grève au scrabble : 8 points

Grève

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