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Être au bout du rouleau : définition et origine de l’expression

Vous êtes au bout du rouleau ? Nous espérons que la lecture de cet article vous redonnera le sourire ! De fait, c’est une drôle d’expression que celle-ci : « être au bout du rouleau », que l’on emploie lorsqu’on manque d’énergie ou d’entrain

Après tout, la formule ne précise pas de quel rouleau il s’agit : de peinture ou à pâtisserie ? De printemps ou de papier toilette (!) ? Un seul indice peut nous mettre sur la voie : la locution est née en France au XIVe siècle… Il faut donc remonter jusqu’aux rouleaux de cette époque (et à leur bout) pour comprendre l’origine, la définition et l’usage de l’expression « au bout du rouleau ».

Définition de l’expression « être au bout du rouleau » 

Comme nous venons de l’évoquer, « être au bout du rouleau » signifie être fatigué ou déprimé, en manque de volonté ou d’énergie, dépourvu de vivacité ou de force. Globalement, c’est se trouver en très petite forme, voire au plus mal : l’expression sous-entend qu’on est « au bout » de ce que l’on pouvait fournir en vigueur ou en ténacité.

Il existe en français d’autres locutions au sens similaire : « au bout de ses forces », « à bout de force » ou encore « à bout de souffle ». En « langage SMS », on relève aussi une forme abrégée : « bdr » pour « bout du rouleau ».

Une fois n’est pas coutume, les équivalences de l’expression chez nos voisins se révèlent riches en images amusantes : en anglais, on dit « être au bout de la corde », en espagnol, « être au bout du chemin », en italien, « être à la fin du repas » et en néerlandais, « être au bout de son latin » !

Origine de l’expression « être au bout du rouleau »

Mais alors, de quel rouleau parle cette expression, exactement ? Lorsque la formule nait, au XIVe siècle, elle se rapporte vraisemblablement aux « rôles », des rouleaux de feuilles comportant du texte. Ces derniers étaient les ancêtres de nos livres modernes. Arriver « au bout du rôle » désigne ainsi le fait d’être au terme de sa lecture.

Par glissement de sens, le « rôle » devient celui que l’on joue dans une pièce de théâtre, puisque les comédiens lisent leur texte sur l’un de ces rouleaux. Les acteurs secondaires ne disposent pour leur part que d’un petit rouleau, appelé « rôlet », car il comporte moins de pages que les autres. Au XVIIe siècle, on dit « être au bout de son rôlet » pour évoquer le fait de ne plus avoir une seule ligne de dialogue : réduit à un rôle de figuration, l’acteur n’a plus rien à faire sur scène.

C’est autour du XIXe siècle que le « rôlet » devient « rouleau », alors que les banques utilisent des rouleaux de papier pour ranger les pièces de monnaie (« être au bout du rouleau » signifie se trouver sans le sou), et que les premiers phonographes emploient des cylindres pour retranscrire le son (arriver au bout de ces « rouleaux » résulte en un son de mauvaise qualité, difficilement audible).

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Dans chaque variation de l’expression, une image demeure : celle d’un déclin progressif, culminant en un point de non-retour, où l’on se trouve démuni, décontenancé, et incapable d’agir

L’expression « être au bout du rouleau » continue d’être évocatrice dans notre monde moderne : chacun peut visualiser l’état de désemparement qui nous saisit lorsqu’un « rouleau », quel qu’il soit, arrive en bout de course, nous laissant ainsi sans ressource.

Exemples de l’usage de l’expression « être au bout du rouleau » 

Après une matinée à égorger, Mehdi se sentait au bout du rouleau. C’était le problème, avec ce travail. Ça le fatiguait beaucoup. La responsabilité, la concentration, la précision et puis aussi cette vie qu’il ôtait et qui se vengeait en lui prenant Dieu savait quoi avant de s’en aller.

Franz-Olivier Giesbert, L’abatteur

Mais le régime était au bout du rouleau, avec tous les gens en place déjà riches et gras qui n’avaient plus rien à gagner et commençaient donc à se prendre au sérieux, à construire des routes, des écoles, et parlaient même de nettoyer la capitale du vice, de façon à tout gâcher pour les autres. Il était vraiment temps que ça change.

Romain Gary, Les mangeurs d’étoiles

Sois pas vache, Jean-Louis. Je suis au bout du rouleau. Il n’y a plus de quoi bouffer à la baraque. J’ai tapé à toutes les portes avant de venir ici. Je sais que tu ne m’aimes pas, d’accord, mais eux, les mômes, ils n’ont rien à voir là-dedans.

Didier Daeninckx, Hors limites

Hugo l’avait chassé sans ménagement ; dans l’après-midi, alors qu’il baguenaudait sous les arcades de Colaba, on l’avait harponné pour les mêmes raisons, pas un délinquant passible de rédemption, mais un camé au bout du rouleau, le genre à vous faire la peau pour trois fois rien.

Élisabeth Barillé, À ses pieds
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Nicolas Lafarge

Nicolas Lafarge

Nicolas Lafarge est rédacteur indépendant, et prête ses mots à différents médias et entreprises. Se décrivant volontiers comme « un geek avec une plume », il se sent dans son élément naturel lorsqu’il écrit sur des sites web tels que La langue française.

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