« En fait », « au fait » ou « enfaite » ?
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« Au fait, je me suis rendu compte que c’est en fait trop tard pour voir le film. »
De fait, en fait, par le fait… Les combinaisons avec le mot « fait » sont nombreuses et on peut rapidement s’emmêler les pinceaux quant à leur sens ou même leur orthographe ! Dans cet article, nous nous intéressons en particulier à « en fait » et « au fait ». Quel est leur sens ? Quand les utiliser ? Quelle est leur bonne orthographe ? Nous vous expliquons tout dans cet article. Bonne lecture !
« En fait » et « au fait » : quelle différence ?
Attention, ces deux locutions n’ont pas le même sens, et de nombreuses personnes les confondent.
On écrit « en fait » : « en fait » est une locution adverbiale qui signifie « réellement ; effectivement ; au fond ; quelles que soient les apparences. » On peut aussi écrire « en fait de » pour signifier « en ce qui concerne, en matière de » (voir les définitions complètes).
L’Académie française rappelle qu’il ne faut pas employer « en fait » dans le sens de « mais » :
Un regrettable tic de langage se répand qui consiste à l’employer en lieu et place de la conjonction de coordination « mais », voire à employer les deux à la fois. Il convient d’éviter cette confusion et de conserver à la locution « en fait » son sens plein.
Académie française, « Dire, ne pas dire »
Il existe plusieurs déclinaisons de cette locution :
- Le fait est que
- Poser en fait que (présenter comme certain que)
- De fait
- Par le fait
On écrit « au fait » : « au fait » est une locution adjectivale et conjonctive avec deux sens distincts, « au courant » et « à propos ; tout bien considéré. » En général, lorsqu’on emploie cette locution en début de phrase, elle prend le sens de « à propos. » Au fait dérive de la locution « aller au fait » qui signifie « aller à l’essentiel du sujet », « aller droit au but » (voir les définitions complètes).
On distingue également plusieurs déclinaisons de cette locution :
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- Mettre quelqu’un au fait
- Être au fait de la question
- En venir au fait
- Revenir au fait
- Aller au fait
L’analyse des occurrences des deux locutions dans les textes publiés depuis le XIXe siècle montre que la locution « en fait » est davantage utilisée :
« En faite », « enfait », « enfaite », « au faite », « aufait », « aufaite » sont des fautes d’orthographe
Philippe Martinon remarque dès 1913 qu’on a tendance à prononcer le mot « fait » avec un -t final sonore [fεt] :
Après ai, il n’y a pas d’exceptions, sauf une tendance très marquée à faire sentir le t du substantif fait, au singulier, surtout quand il est final ou accentué: en fait, au fait, par le fait, voie de fait, voici le fait, il est de fait, je mets en fait, je l’ai pris sur le fait, c’est un fait, et même c’est un fait constant, c’est le fait d’un honnête homme, le fait de mentir, le fait du prince; mais on ne doit jamais faire sentir le t au pluriel, ni dans fait divers, singulier identique au pluriel, ni dans en fait de ou tout à fait.
Philippe Martinon, Comment on prononce le français: traité complet de prononciation pratique avec les noms propres et les mots étrangers, page 327
Cette prononciation incite certaines personnes à ajouter de manière erronée un -e final et à écrire « en faite » / « enfaite » ou « au faite » / « aufaite ». Or, on écrit toujours « en fait » et « au fait » sans -e final !
Par ailleurs, on trouve parfois les deux locutions qui nous intéressent écrites en un seul mot (« enfait » ou « aufait »). Encore une fois c’est une erreur d’orthographe, on écrit toujours « en fait » et « au fait » en deux mots.
Exemples d’usage de « en fait » et « au fait »
En fait, le matérialisme dialectique ne peut se priver plus longtemps de la médiation privilégiée qui lui permet de passer des déterminations générales et abstraites à certains traits de l’individu singulier.
Jean-Paul Sartre, Questions de méthode
Mais, en fait, on pouvait dire à ce moment, au milieu du mois d’août, que la peste avait tout recouvert. Il n’y avait plus alors de destins individuels, mais une histoire collective qui était la peste et des sentiments partagés par tous.
Albert Camus, La Peste
En fait, le bûcheron s’est contenté de jeter le manche. Après la cognée. Si bien qu’il n’avait plus rien du tout. Tandis que le manche, au moins, aurait pu lui servir encore.
Raymond Queneau, Les fleurs bleues
Elle se tut. Le prêtre dérouté la regardait. « Voyons, arrivez au fait. » Elle répéta « Je voudrais un autre enfant. »
Guy de Maupassant, Une vie
Il fallait encore gagner du temps mais, cette fois, je perdis pied :
Frédéric-H. Fajardie, « Panne sèche », dans Chrysalide des villes
– Hein, dis donc, hé ! au fait, le moine maudit, qu’est-ce qu’il glandait, ce nase, ce radis noir, ce foutu ratichon ?
Tu m’appelles bientôt ? Promis. Au fait, la pétition pour T. ? Je descends chercher les journaux. Oui, elle est là.
Philippe Sollers, Le Cœur Absolu
Vous savez désormais le sens et la bonne orthographe de ces deux locutions qu’on utilise quotidiennement. N’hésitez pas à poser vos questions en commentaire et à parcourir les autres articles de la section orthographe.
Merci et bon travail.