« Ennuyant » ou « ennuyeux » ?
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« Je trouve l'hiver ennuyeux. Le discours de mon ami est très ennuyant. »
Il y a parfois des mots de la langue française qui sont synonymes mais dont le sens varie de manière subtile. C'est le cas de « ennuyant » et « ennuyeux ». Quelle est leur différence de sens ? Quand employer l'un ou l'autre ? Nous vous expliquons tout dans cet article. Bonne lecture !
Quelle différence entre « ennuyant » et « ennuyeux » ?
Si les deux mots sont des synonymes et signifient « qui ennuie », « qui provoque un sentiment de lassitude », l'Office québécois de la langue française (OQLF) estime qu'ils n'ont pas tout à fait le même sens. On utilise l'un ou l'autre selon la durée de l'ennui dont il est question.
Le Littré est du même avis :
L'homme ennuyant est celui qui ennuie par occasion ; cela est accidentel ; l'homme ennuyeux est celui qui ennuie toujours ; cela est inhérent. Un homme ennuyant peut n'être aucunement ennuyeux. Mais le fait est que dans l'usage ces deux mots se confondent ; seulement, ennuyeux est plus usité qu'ennuyant.
Littré, entrée « ennuyant »
On écrit « ennuyant » : « ennuyant » est le participe présent du verbe « ennuyer » mais peut être utilisé en tant qu'adjectif. Selon la règle précédemment évoquée, on l'utilise lorsque l'ennui est passager, pour une courte période. « Ennuyant » est ainsi à prendre dans le sens « qui ennuie passagèrement ».
Exemples :
- Le film que je suis en train de regarder est ennuyant ;
- La voiture vient de tomber en panne, c'est ennuyant ! ;
- Je trouve très ennuyant son comportement aujourd'hui.
On écrit « ennuyeux » : « ennuyeux » est un adjectif qu'on utilise au contraire pour un désagrément qui dure dans le temps. « Ennuyeux » est ainsi à prendre dans le sens « qui cause toujours de l'ennui, qui ennuie de manière durable ».
Exemples :
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- Ce débat m'a toujours semblé ennuyeux ;
- Être condamné à rester au chômage toute sa vie est bien ennuyeux ;
- Il me semble toujours ennuyeux de devoir parler à ce genre d'individu.
À noter qu'on trouve également l'usage du mot « ennuyeux » en tant que substantif pour désigner une personne par métonymie. Par exemple dans À la recherche du temps perdu de Proust :
Au moindre mot que lâchait un habitué contre un ennuyeux ou contre un ancien habitué rejeté au camp des ennuyeux [...] elle poussait un petit cri, fermait entièrement ses yeux d’oiseau qu’une taie commençait à voiler, et brusquement, comme si elle n’eût eu que le temps de cacher un spectacle indécent ou de parer à un accès mortel, plongeant sa figure dans ses mains qui la recouvraient et n’en laissaient plus rien voir, elle avait l’air de s’efforcer de réprimer, d’anéantir un rire qui, si elle s’y fût abandonnée, l’eût conduite à l’évanouissement.
Marcel Proust, Du côté de chez Swann
Le dictionnaire de l'Académie française ajoute cependant que « ennuyant » est d'usage vieilli et qu'il est désormais préférable d'utiliser « ennuyeux ». Il se trouve que ce dernier est beaucoup plus utilisé que le premier :
L'OQLF précise que le mot « ennuyant » demeure encore à ce jour préféré au Québec, en Belgique et dans les Antilles, quand les autres pays francophones utilisent davantage « ennuyeux ».
Exemples d'usage des mots « ennuyant » et « ennuyeux »
On remarque que les auteurs de littérature ne respectent pas toujours la règle édictée plus haut.
Dès lors, il ne s’étonna plus que Swann, aussi bien qu’un autre, fréquentât l’Élysée, et même il le plaignait un peu d’aller à des déjeuners que l’invité avouait lui-même être ennuyeux.
Marcel Proust, Du côté de chez Swann
Puis, comme leurs deux visages se reflétaient, l’un contre l’autre, dans l’eau si claire dont les plantes noires du fond faisaient une glace limpide, Jean souriait à cette tête voisine qui le regardait d’en bas, et parfois, du bout des doigts, lui jetait un baiser qui semblait tomber dessus.
Guy de Maupassant, Pierre et Jean
— Ah ! que vous êtes ennuyeux, disait la jeune femme ; mon cher, il ne faut jamais faire deux choses à la fois.
Voici l’architecture mazarine, le mauvais pasticcio italien des Quatre-Nations. Voici les palais de Louis XIV, longues casernes à courtisans, roides, glaciales, ennuyeuses.
Victor Hugo, Notre-Dame de Paris
Je suis de ceux qui (…) rêvent ou plutôt rêvassent, hargneux et pestiférés, sans savoir ce qu'ils veulent, ennuyés d'eux-mêmes et ennuyants.
Flaubert, Correspondance
Au retour de l'église, elle régala son mari d'une scène de pleurs fort ennuyante.
George Sand, Valentine
Vous savez désormais comment différencier ces mots synonymes. N'hésitez pas à lire nos autres articles d'orthographe pour connaître toutes les subtilités de la langue française.