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Saisir

Définitions de « saisir »

Trésor de la Langue Française informatisé

SAISIR, verbe trans.

I. − Prendre quelqu'un/quelque chose vivement.
A. − [Le suj. désigne un être animé]
1. [Le compl. désigne un obj. concr.]
a) [Avec une idée de rapidité et de précision dans le mouvement] Synon. attraper, happer.
α) [L'obj. concr. est en mouvement] Et les enfants couraient, pour saisir des flocons d'écume que le vent emportait (Flaub.,Cœur simple, 1877, p. 22).Les Liliputiens qui courent dans l'herbe verte ont saisi les cordages qu'on leur jette (Barrès,Cahiers, t. 11, 1916, p. 182).
[P. méton. du suj.] Une main de femme (...) lança vers Gamelin un œillet rouge que ses mains liées ne purent saisir, mais qu'il adora (A. France,Dieux ont soif, 1912, p. 305).
[Le compl. d'obj. dir. désigne un animal] Il y avait (...) une petite fille (...) envoyée par ses parents pour saisir de petites anguilles que la baisse des eaux permet d'entrevoir dans la vase (Nerval,Bohême gal., 1855, p. 103).
Loc. Saisir au vol*. Saisir la balle au bond. V. balle1.Saisir qqc. au passage. Synon. intercepter.P. anal. Chaque réverbère saisissait mon ombre au passage, la faisait tournoyer et la repassait au réverbère suivant (Duhamel,Confess. min., 1920, p. 75).
β) [L'obj. n'est pas en mouvement] Saisir un bâton, un fouet, un revolver, une matraque. Tout à coup elle se retourna et saisit la poupée avec emportement. − Je l'appellerai Catherine, dit-elle (Hugo,Misér., t. 1, 1862, p. 493).Il allait (...) perdre l'équilibre, lorsqu'il saisit une touffe d'herbe, parvint à se retenir, donna un dernier coup de reins, et se hissa sur la plate-forme (Martin du G.,Thib., Épil., 1940, p. 870).
Empl. pronom. Je me saisis d'une grosse branche d'arbre qui traînait à terre (Baudel., Poèmes prose, 1867, p. 217).
b) [Seulement avec précision ou avec détermination] « (...) faites (...) chauffer de l'eau; je vais laver cette vaisselle; je ne peux pas supporter la saleté. − Il y a de l'eau chaude », dit Lewis d'un ton résigné. Elle saisit la bouilloire et se mit à laver la vaisselle avec une hâte silencieuse (Beauvoir,Mandarins, 1954, p. 326).
c) Prendre une chose de façon à la porter sans la laisser tomber, de façon à la maintenir fixement dans une certaine position ou encore de manière à s'y tenir accroché. Synon. agripper, empoigner.[Venture] alla jusqu'à la voiture, se glissa à plat-ventre sous le train, entre les roues, saisit l'essieu de derrière à deux mains, passa ses pieds entre le sol et le caisson de la voiture (Ponson du Terr.,Rocambole, t. 3, 1859, p. 512).Le jeune animal qui tette [sic], saisit le trayon à pleine bouche, l'enveloppe avec sa langue disposée en gouttière et aspire en tirant légèrement (Garcin,Guide vétér., 1944, p. 124).
d) Saisir qqc.1par qqc.2(partie de qqc.1).Le prêtre va saisir par le pommeau le glaive (Moréas,Iphigénie à Aulis, 1903, p. 268).L'ouvrier saisit l'outil à l'aide de deux poignées (...) solidaires du bâti et le promène le long de la surface de la peau en lui communiquant contre elle la plus forte pression possible (Bérard, Gobilliard,Cuirs et peaux, 1947, p. 99).
e) Saisir qqc.1avec, à l'aide de qqc.2(instrument).Il faut si le vaisseau est très petit, saisir son orifice avec une pince (Nélaton,Pathol. chir., t. 1, 1844, p. 12).On avait réussi à grand-peine à saisir le câble à l'aide de grappins et à le relever quand ces derniers cassèrent (P. Rousseau,Hist. techn. et invent., 1967, p. 283).
f) P. anal.
α) Saisir une ville, un territoire. S'emparer d'une ville, d'un territoire par une lutte armée. Synon. conquérir.Cet officier [Murat] arrivant à deux heures aux Sablons, s'y trouva avec la tête d'une colonne de la section Lepelletier qui venait saisir le parc (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 338).La fin du siècle (...) avait vu l'Espagne saisir le Portugal et les Deux-Siciles, dominer l'Allemagne, vaincre la France, refouler l'Islam, conquérir l'Amérique (Faure,Hist. art, 1921, p. 62).
β) Empl. pronom. S'approprier quelque chose, s'en emparer. L'université (...) permettait à l'État de se saisir de l'enseignement, laissé auparavant à l'Église (Encyclop. éduc., 1960, p. 19).
g) Spécialement
α) ART CULIN. (Faire) saisir un mets, de la pâte. L'exposer à feu vif en début de cuisson afin de faire cuire l'extérieur tout en conservant l'intérieur saignant ou mou. Une viande bien saisie; saisir une côtelette. Ce sont des filets de sole au gratin pour Monsieur Rambaud, et ça demande à être saisi au dernier moment (Zola,Page amour, 1878, p. 868).La principale falsification du pain est son hydratation exagérée, obtenue en surchauffant le four avant l'enfournage, de façon à saisir fortement la surface du pâton (Macaigne,Précis hyg., 1911, p. 251).
[L'agent réel du procès saisir désigne le froid, la glace] Durcir, geler. On la porte [la noix de bœuf cuite dans le suif] dans un lieu frais, en sorte que le suif, saisi par le froid, forme une enveloppe (Gdes heures cuis. fr., Grimod de La Reynière, 1838, p. 159).
β) INFORMAT. [Corresp. à saisie I B] Enregistrer des informations (ou données) en vue de leur traitement ou de leur mémorisation dans un système informatique. La tendance est de saisir les données sur le lieu de leur création (par un terminal, par ex.) et à les transmettre au centre de traitement par un réseau de téléinformatique (Le Garff1975).
γ) MAR. [Corresp. à saisine II] Amarrer solidement au moyen d'un cordage, d'une saisine. Une gaffe, des avirons, sont ainsi saisis dans les haubans ou contre les chandeliers pour dégager le pont (Soé-Dup.1906).
2. [Le compl. désigne un être animé]
a) Mettre la main sur quelqu'un; le prendre (à, dans, par). Synon. empoigner.Saisir (une femme) dans ses bras; saisir qqn par le bras, par les poignets, par la taille. [Jeanne] le saisit [son père] brusquement par le cou, l'embrassa avec violence (Maupass.,Une Vie, 1883, p. 210).Brusquement, elle saisit la folle entre ses bras, l'enleva doucement, pressant sur la bouche misérable sa joue fraîche (Bernanos,Joie, 1929, p. 657).
P. métaph. [Durtal] songea (...) Dieu m'a subitement saisi et il m'a ramené vers l'Église en utilisant pour me capter mon amour de l'art, de la mystique (Huysmans,Cathédr., 1898, p. 472).[Descartes] pense où il peut bien penser (...) en Allemagne; sur les quais d'Amsterdam, et jusqu'en Suède, où la mort saisit le voyageur (Valéry,Variété IV, 1938, p. 211).
b) [Avec une idée de force ou même de violence] Attraper quelqu'un. Saisir qqn par le cou, par les cheveux, le saisir à bras le corps, au collet; saisir qqn à la gorge. Le magistrat (...) faisait, par les mêmes suppôts, saisir le conscrit réfractaire (Courier,Pamphlets pol., Pétition aux deux Chambres, 1816, p. 6).Sur le devant [de la Chasse aux lions de Rubens], un cavalier maure renversé, son cheval renversé également, est déjà saisi par un énorme lion (Delacroix,Journal, 1847, p. 168).
Empl. pronom. réciproque. Je sens les choses comme la peinture les comporte (...). Les étreintes des guerriers qui se saisissent. En faire un qui expire en mordant le bras de son ennemi (Delacroix,Journal, 1824, p. 100).[P. méton. du suj.] Ils se serrent les mains dans une longue étreinte (...) Et pour mieux savourer l'amour qui les enfièvre, L'une à l'autre parfois se colle chaque lèvre, Folles de se saisir (Rollinat,Névroses, 1883, p. 111).
c) Saisir qqn au corps. Faire arrêter quelqu'un. Marigny. « Ordre de Marguerite de Bourgogne (...) au capitaine Buridan, d'arrêter et saisir au corps, partout où il le trouvera, le sire Enguerrand de Marigny » (Dumas père, Tour Nesle, 1832, iii, tabl. 4, p. 50).
[Avec omission du compl.] J'adore ces vaillantes de la Joie à qui ta Société n'a rien à reprocher, elle qui ne fait que pressurer, emprisonner (...), saisir, guillotiner, et tout! (Verlaine, Œuvres posth., t. 1, Hist. comme ça, 1896, p. 310).
d) Empl. pronom. Se saisir de qqn.S'emparer de quelqu'un (par la force). Vous avez abordé comme des dieux dans une anse sauvage. Mais (...) les gendarmes de (...) Franco se saisirent de vous (Mauriac,Mal Aimés, 1945, p. 151).L'avocat se saisit de l'agresseur et l'emporta sous son bras. L'homme se débattait en silence (Aymé,Uranus, 1948, p. 232).
Rare. Se saisir d'une femme. Posséder une femme. [Rambert] aimait imaginer alors [à quatre heures du matin] la femme qu'il avait laissée. C'était l'heure, en effet, où il pouvait se saisir d'elle (...) on dort à cette heure-là, et cela est rassurant puisque le grand désir d'un cœur inquiet est de posséder interminablement l'être qu'il aime (Camus,Peste, 1947, p. 1307).
e) Au fig. Atteindre. Saisir qqn au dépourvu. Comme il est vrai de tout objet, c'est par l'œuvre qu'on saisit l'homme (Alain,Beaux-arts, 1920, p. 213).
3. Au fig. Qqn saisit qqc.
a) [Le moyen désigne les sens, l'esprit, l'intuition] Percevoir.
[Par le sens]
[Par l'odorat] Sentir. [Duroy] croyait saisir dans l'air enfermé de la pièce une odeur suspecte, une haleine pourrie, venue de cette poitrine décomposée (Maupass.,Bel Ami, 1885, p. 192).
[Par l'ouïe] Percevoir; surprendre. Saisir un son, des propos; bribes de conversation saisies au vol. [Angélique] saisit un murmure à peine distinct, un chuchotement affectueux et triste (Zola,Rêve, 1888, p. 102).
[Par le regard] Apercevoir, embrasser. Ceux qui ne savent point voir cherchent des spectacles rares et bientôt s'y ennuient; au lieu que celui qui a appris à voir finit par saisir la beauté partout (Alain,Beaux-arts, 1920, p. 269).Lorsque nous ouvrons les yeux devant un objet éclairé, nous saisissons sa forme, ses dimensions, ses couleurs (Camefort, Gama,Sc. nat., 1960, p. 232).
[Par l'esprit, par l'intuition] Cerner, discerner; distinguer, appréhender; comprendre. Saisir la portée d'un événement, la raison des choses; ne pas être capable de saisir certaine vérité, certaines analogies ou certaines nuances. Le mysticisme, c'est surtout l'effort de l'être humain pour saisir d'une prise directe, immédiate, l'idéal conçu, espéré, aimé (Weill,Judaïsme, 1931, p. 170).La lucidité qui le déchirait [Proust] devant l'être aimé dut pourtant lui manquer quand (...) il crut appréhender, à jamais capter des « impressions » fugitives; ne dit-il pas avoir saisi l'insaisissable? (G. Bataille,Exp. int., 1943, p. 214).[P. méton. du suj.] La nature n'est pas uniquement composée de forces physiques et mécaniques; la simple contemplation, l'admiration et le calcul n'en saisissent pas le fond (Doeblin,Pages imm. Confucius, 1947, p. 37).Peut-être notre intelligence qui saisit des ensembles de plus en plus étoffés et grandioses, n'est-elle pas, en ce qui concerne son essence, perfectible (Arnoux,Visite Mathus., 1961, p. 247).
Empl. pronom. réfl. Il nous faut bien (...) nous adapter au perpétuel provisoire de nos connaissances et de nos pensées, si nous voulons nous saisir nous-mêmes (L. Febvre,De Linné, [1927] ds Combats, 1953, p. 325).
[P. méton. du suj.] L'âme des musulmans, même à l'heure où elle croyait se saisir, n'a jamais atteint qu'un mirage, une ombre froide étendue pour une heure entre les deux nappes de flamme où les conquérants passaient (Faure,Hist. art, 1912, p. 257).
Empl. pronom. à sens passif. Herder (...) exposait ses Idées sur la philosophie de l'histoire: la nature, dans un devenir qui ne se peut saisir que par intuition, crée les sociétés où les individus se trouvent incorporés (...) sans que leur volonté intervienne (Lefebvre,Révol. fr., 1963, p. 74).
Empl. abs. et fam. Tu saisis? Est-ce clair? Je ne saisis pas (bien), il saisit vite. Synon. fam. piger.Mais aucun de nous, ma pauvre amie, aucun de nous ne se maintient constamment à la hauteur de ce qu'il voudrait être. Tout le drame de notre vie morale est là, précisément... Je ne sais si tu saisis?... (Gide, École femmes, 1929, p. 1306).
b) [Notamment avec l'assistance d'un appareil optique, d'une caméra] Capter. On imagine l'intérêt de ces appareils qui permettent de saisir si rapidement des vues d'aspects nouveaux et fort différents selon l'altitude (Prinet,Phot., 1945, p. 101).
c) Dans le domaine artist., littér.Rendre sensible à d'autres, rendre perceptible(s) ce qui a été appréhendé, perçu, certaines caractéristiques de quelque chose (un objet, un tableau). Personne, sauf Rubens, n'a saisi à ce point l'instantané du mouvement, la fureur du vol (Taine,Voy. Ital., t. 2, 1866, p. 361).Grandeur des poètes de saisir fortement avec leurs mots, ce qu'ils n'ont fait qu'entrevoir faiblement dans leur esprit (Valéry,Tel quel I, 1941, p. 28).
d) S'emparer de; mettre à profit. Anton. laisser échapper, manquer, rater.Saisir un prétexte, une excuse (pour ne pas faire qqc.); saisir la perche; saisir le moment propice; saisir une occasion, une opportunité, une possibilité (qui s'offre); c'est une affaire à saisir. Puisque la vengeance s'offrait, pourquoi ne pas la saisir? (Flaub.,Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 265).Le moment du Seigneur ne comporte pas d'explication, on le saisit ou on le manque (Arnoux,Juif Errant, 1931, p. 31).
B. − [Le suj. désigne un inanimé]
1. [Le compl. désigne un être animé; le suj. désigne notamment]
a) [un phénomène naturel, un élém. phys. (le froid, la neige, le sable)] Surprendre, s'emparer de, faire une impression soudaine et vive sur. Un froid mortel le saisit. Si un voyageur inexpérimenté s'égare de quelques pas, le sable trompeur le saisit, l'aspire, l'enveloppe, l'engloutit, avant que la vigie du château et la cloche du port aient eu le temps d'envoyer le peuple à son secours (Nodier,Fée Miettes, 1831, p. 79).À Brest, où ils arrivèrent un matin incolore au lever du jour, ils [Jean et sa mère] furent saisis, glacés, − eux, les pauvres transfuges d'un pays de soleil, − par ce changement absolu de climat, qu'on sentait en toutes choses (Loti,Matelot, 1893, p. 64).
[Avec une expr. de la partie du corps, ou autre attribut]
Qqc. saisit qqn à + telle partie du corps.À cette pensée, le froid me saisissait aux membres (Joigneaux,Prisons Paris, 1841, p. 45).
Qqc. saisit à qqn + telle partie du corps.Je ne sais quelle fraîcheur sépulcrale me saisissait l'épiderme, et ce ne fut pas sans un léger sentiment de peur que j'entendis murmurer près de moi (Gautier,Tra los montes, 1843, p. 28).
Qqc. saisit + telle partie du corps.La mer lançait des galets contre les jambes nues des hommes (...), un froid saisissait le ventre; après trois jours de piètre nourriture la défaillance guettait (Quéffelec,Recteur, 1944, p. 124).
b) [une odeur, une saveur, le compl. désigne une pers. ou p. méton., l'un de ses sens] Un pain bis, cuit au four de campagne, fumait sur le gazon et saisissait l'odorat par sa vapeur capiteuse (About,Roi mont., 1857, p. 107).La fumée montant du toit était épaisse et vous saisissait à la gorge par son âcreté aromatique (A. Daudet, Jack, t. 2, 1876, p. 225).
c) [un malaise, un accident] Prendre. La fièvre la saisit; une convulsion effroyable l'a saisi. La migraine, l'horrible mal, la migraine qui torture comme aucun supplice ne l'a pu faire (...) la migraine m'avait saisi (Maupass.,Sur l'eau, 1888, p. 306).
d) [une émotion, une sensation, un élém. de la vie psychique, mor.] Une rage furieuse le saisit; une détresse, une gaîté venait de le saisir; être saisi de désespoir, d'étonnement, de joie; être saisi du désir de, d'une envie de (+ inf.). Modeste fut saisie d'un profond dégoût pour les hommes dont les plus distingués trompaient ses espérances (Balzac,Modeste Mignon, 1844, p. 175):
À chaque époque, saisis par un nouveau désespoir, une nouvelle fureur, et comme si rien n'avait été tenté jusque-là (...) des écrivains (...) s'évertuent (...) à enserrer dans une définition le prodige inconcevable et pourtant perpétuel du langage affectif, de la communication lyrique, de ce que Sainte-Beuve appelait « la monade inexprimable ». Arts et litt., 1935, p. 50-13.
Empl. pronom. La terreur qui se saisissait d'elle la faisait grelotter, pliée, cassée en deux, contre le mur où elle demeurait adossée (Carco,Homme traqué, 1922, p. 48).
Empl. abs. Être, demeurer saisi. Être, demeurer interdit, frappé subitement, ému. [Norine] resta saisie, elle blêmit encore (Zola,Fécondité, 1899, p. 620).
Part. passé en empl. adj. La plaque que j'avais heurtée, c'était le numéro: 37 (...). J'étais très saisi et je me répétais le chiffre 37 lorsque je sortis du cimetière (Jouve,Scène capit., 1935, p. 171).
Région. (Belgique). Ahuri. Il a un air saisi (Hanse Nouv. 1983).
e) [un geste, un fait, un élém. se dégageant du comportement d'autrui, d'une situation donnée ou encore d'un spectacle] Faire une impression vive et forte sur quelqu'un; frapper, émouvoir quelqu'un. Depuis que je l'ai décrassée, elle [la Péchina] est devenue moins laide, elle a quelque chose de bizarre, de sauvage qui saisit les hommes (Balzac,Paysans, 1844, p. 193).
Au passif ou au part. passé. C'est la duchesse qui est... couchée... Elle m'a fait appeler toute saisie... un peu saisie de l'arrestation de l'amiral chez elle (Lemercier,Pinto, 1800, iii, 19, p. 108).Lorsque Jacques vint (...) prendre son tour de garde, il fut saisi par le changement survenu depuis le matin (Martin du G.,Thib., Mort père, 1929, p. 1279).
Saisi de (+ inf.).Et Lazare (...) lui allongea un coup de pied (...). Le chien, saisi d'être battu, flairant l'air comme s'il eut compris tout d'un coup, alla se coucher humblement sous le lit (Zola,Joie de vivre, 1884, p. 915).
Rem. À propos de l'empl. de la prép. de/par, Dupré 1972 note: ,,Il n'y a aucune différence de sens dans les constructions de saisir avec de ou par. On dira aussi bien: saisi d'horreur et saisi par l'horreur``.
2. [Le compl. désigne un inanimé]
a) Attraper, happer. [Un vaisseau] a onze griffes de fer pour saisir le granit au fond de la mer (Hugo,Misér., t. 1, 1862, p. 446).Le bateau plongea dans l'obscurité et fut saisi par la houle (Peisson,Parti Liverpool, 1932, p. 226).
b) En partic. [Le suj. désigne notamment]
α) [le froid, la glace] Rare. Durcir, geler (supra I A 2 g γ). Pour que le mortier humide pût saisir la couleur et la cristalliser dans son durcissement graduel, lui prendre un peu de son éclat, lui donner en l'incorporant à l'eau et à la pierre leur terreuse et sourde beauté, il fallut l'élan de l'âme italienne (Faure,Hist. art, 1914, p. 361).
P. métaph. Que cette plus pâle des lampes Saisisse de marbre la nuit! (Valéry,Charmes, 1922, p. 132).
Au part. passé. Gelé, pris (dans la glace). Les ruisseaux, saisis comme ils coulaient encore, déroulaient le long des trottoirs deux rubans de glace (Maupass.,Bel-Ami, 1885, p. 155).
β) [le feu, la flamme] ART CULIN. V. supra I A 1 g α.
C. −
1. DR. [Corresp. à saisie II B]
a) Mettre quelque chose sous la main de la justice par voie de saisie. Saisir des biens (immeubles, meubles); saisir les revenus d'une terre, une rente; impossibilité de saisir la pension (d'un pensionné) en paiement d'une créance. C'est le juge et le commissaire avec la police. Ils ont saisi des papiers chez votre monsieur et mis les scellés partout (A. France,Anneau améth., 1899, p. 396).Un arrêt de la Cour d'appel de Paris, du 10 août 1882 (cité dans l'Annuaire des préfets de 1899), décide qu'on ne peut pas saisir la moitié du traitement d'un fonctionnaire, pour faire une pension alimentaire à sa femme et à ses enfants qu'il a abandonnés (Baradat,Organ. préfect., 1907, p. 55).
Empl. abs. On venait saisir. Je lui ai dit de laisser faire ce qu'ils appellent la justice (Dumas fils, Dame Camélias, 1848, p. 287).
b) P. méton. Saisir qqn.Faire la saisie de ses biens. Saisir un débiteur. On va le [le cabaretier] saisir cette semaine. C'est Lheureux qui le fait vendre. Il l'a assassiné de billets (Flaub.,MmeBovary, t. 1, 1857, p. 154).
Part. passé en empl. adj. Tiers saisi; la partie saisie. Celle-là [la cocotte Cob], ruinée, saisie, était allée tenter un dernier coup à Monte-Carlo (A. Daudet,Sapho, 1884, p. 167).
Empl. subst. masc. [P. oppos. à saisissant] ,,Débiteur qui fait l'objet d'une procédure de saisie`` (Sousi-Roubi Banque 1983).
2. P. ext. [Corresp. à saisie II A] Saisir qqc.Confisquer quelque chose.
a) [Dans le cadre de la réglementation douanière] Saisir des objets de contrebande, de la drogue, des armes. Monsieur le directeur, madame Claire Wilkins (...) désirerait (...) vous entretenir un instant à propos d'un cachemire que viennent de lui saisir vos douaniers (Dumas père, Cachemire vert, 1850, iii, p. 272).
[Dans le domaine de ce qui est écrit ou imprimé] Interdire la parution de quelque chose. Saisir des tracts subversifs; saisir tel numéro d'un journal. Il est interdit notamment de publier des nouvelles pouvant provoquer le désordre, lésant la dignité de la maison impériale ou risquant de porter atteinte à la moralité publique. Le gouvernement a le droit de saisir les journaux (Civilis. écr., 1939, p. 40-4).Le chancelier (...) fit immédiatement saisir et mettre au pilon les exemplaires du livre scandaleux (Philos., Relig., 1957, p. 40-16).
b) MAR. Saisir un navire (neutre, en attendant une décision). Capturer un navire. [L'Espagne] venait de saisir quelques navires anglais à Nootka-Sund sur la côte du Pacifique, au nord de la Californie, baie dont la possession se trouvait depuis longtemps contestée (Lefebvre,Révol. fr., 1963, p. 223).
c) Réquisitionner. − (...) Vous avez des outils? − Très peu. Mais je sais où en saisir. − Fais saisir aussi des vélos: dès que ça commencera il faudrait que chaque section eût son agent de liaison, en plus de celui du centre (Malraux,Cond. hum., 1933, p. 205).
II. − Qqn1saisit qqn2de qqc.
A. − DROIT
1. Vx. Mettre quelqu'un en possession légale d'un héritage. D'Étremont mourait quelque temps après (...) saisissant de la tutelle de sa fille un oncle infirme et taciturne (Jammes,Rom. du lièvre, A. d'Étremont, 1901, p. 158).
Loc. [Le 2ecompl. est sous-entendu] Le mort saisit le vif. L'héritier a la saisine des biens du défunt, sans formalités de justice, dès le moment du décès. Comme dans les familles royales et ducales, à la mort du chef le fils prend son titre (...) ainsi souvent, par un avènement d'un autre ordre, et de plus profonde origine, le mort saisit le vif qui devient son successeur ressemblant, le continuateur de sa vie interrompue (Proust,Sodome, 1922, p. 769).
P. métaph. Une génération de guerre saisit de son énergie une génération de paix (Thibaudet,Hist. litt. fr., 1936, p. 106).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une autorité reconnue, une instance officielle, judiciaire, législative, admin.; p. méton., un tribunal, la justice; le compl. d'obj. indir. désigne une affaire, un différend, une demande, une question, un projet] Porter auprès d'une autorité, d'une juridiction une affaire de son ressort; la charger d'examiner, de juger ce dossier. Anton. dessaisir.C'est le président de l'Assemblée Nationale qui saisit le gouvernement du texte à promulguer (Vedel,Dr. constit., 1949, p. 487).Un bureau de relations publiques a été aménagé dans chaque préfecture pour que les estivants puissent saisir l'administration de leurs réclamations ou de leurs suggestions (Jocard,Tour. et action État, 1966, p. 96).
[Avec omission du compl. d'obj. indir.] Saisir le tribunal, la justice. Après l'accomplissement de (...) formalités à la demande de l'intéressé, celui-ci peut poursuivre l'exécution forcée en saisissant directement l'organe compétent (Traité euratom, 1957, p. 362).En cas d'avis défavorable, le ministre intéressé peut saisir le président du conseil qui décide après avis du ministre de la Construction et du ministre des Finances et des Affaires économiques (Amén. terr., 1964, p. 67).
Au passif. [Sans expression de qqn1] Le tribunal doit être saisi par lettre recommandée adressée au greffier dans un délai de 6 mois à dater de la décision contestée (Lubrano-Lavadera,Législ. et admin. milit., 1954, p. 294).
Empl. abs. La Justice est saisie, la vindicte publique aura son cours, rien ne peut l'arrêter (Balzac,Cabinet ant., 1839, p. 113).
Empl. pronom. réfl. Si le conseil économique se saisit lui-même d'un projet ou d'une proposition de loi de sa compétence, il doit donner son avis dans un délai de 20 jours (Vedel,Dr. constit., 1949, p. 450).
B. − Au fig. Saisir l'opinion publique. Depuis bientôt un siècle l'opinion publique française est saisie de projets de construction d'un transsaharien (Albitreccia,Gds moyens transp., 1931, p. 58).
REM.
Saisisseur, subst. masc.,hapax. Celui qui saisit, qui prend. Tant de hauteur n'épuisera la rive accore de ton seuil, ô Saisisseur de glaives à l'aurore, ô Manieur d'aigles par leurs angles, et Nourrisseur des filles les plus aigres sous la plume de fer! (Saint-John Perse,Exil, 1942, p. 213).
Prononc. et Orth.: [sεzi:ʀ], [-e-], (il) saisit [-zi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1100 saisir qqn de qqc. « mettre quelqu'un en possession de quelque chose » (Roland, éd. J. Bédier, 3213); 2. 1270 le mort* saisit le vif; 3. 1549 saisir une juridiction d'une affaire « porter une affaire devant une juridiction » (Est.). B. 1. a) Ca 1100 « mettre quelque chose en sa main avec détermination, force ou rapidité » (Roland, 721); 1534 pronom. se saisir de qqc. « s'emparer vivement de quelque chose » (Rabelais, Gargantua, XXV, 80, éd. R. Calder et M. A. Screech, p. 171); b) α) ca 1100 « prendre, retenir brusquement ou avec force (un animé) » (Roland, 2280); ca 1175 pronom. « se rendre maître de quelqu'un par la force » (Benoit, Chronique Ducs Normandie, 3012 ds T.-L.); β) 1466 saisir au corps (doc. ap. Bartzsch, p. 87); c) ca 1100 « s'emparer de, enlever de vive force (un objectif militaire) » (Roland, 972); d) 1832 « exposer (un aliment) à un feu vif au début de la cuisson » (Raymond, s.v. saisi); e) 1972 informat. (Bureau); 2. a) α) ca 1200 au fig. « s'emparer brusquement de l'esprit de quelqu'un en provoquant une vive surprise, une émotion violente » (Châtelain de Couci, Chansons, éd. A. Lerond, XXV, 27); β) 1553 « provoquer une sensation physique désagréable, qui affecte tout le corps » (La Bible, s.l., impr. J. Gérard, Ps. 48, 7 d'apr. FEW t. 17, p. 21b); b) 1580 « percevoir par les sens une sensation difficilement décelable » (Montaigne, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 590); c) α) 1669 se saisir d'un prétexte (Molière, Tartuffe, II, 4 ds Œuvres, éd. E. Despois et P. Mesnard, t. 4, p. 447); β) 1673 trans. « tirer avantageusement parti d'une chose au moment où elle se présente » (Racine, Mithridate, II, 3 ds Œuvres, éd. P. Mesnard, t. 3, p. 43); d) α) 1694 « se mettre en mesure de comprendre, de connaître par la raison, par un effort de réflexion » (Ac.); β) 1923 empl. abs. « comprendre » (Martin du G., Thib., Belle sais., p. 1033); e) 1763 « appréhender un objet, un concept, une idée pour le rendre perceptible à d'autres ou le fixer » (Marmontel, Poétique fr., t. 1, p. 374); 3. a) 1495 dr. « mettre sous la main de la justice par une saisie » (Coutumes du comté de Ponthieu, CXVI ds Nouv. Coutumier gén., éd. Bourdot de Richebourg, t. 1, p. 96a); b) 1580 saisi subst. masc. « celui dont on a saisi les biens » (Coutumes de la prevosté et vicomté de Paris, CCCXLVIII, ibid., t. 3, p. 54b); c) 1809 saisir qqn « faire la saisie de ses biens » (Napoléon Ier, Corresp., Paris, 1865, t. 19, p. 624, cf. Littré Suppl.). Empr. à l'a. h. all.*sazjan, cf. le m. h. all. setzen « mettre quelqu'un en possession de quelque chose ». Le mot est att. vers 700 par le lat. médiév. sacire « id. » (Nierm.). Le sens originel en fr. est prob. « mettre quelqu'un en possession de quelque chose » d'où, par le pronom. se saisir de, saisir « prendre possession de » et « mettre quelque chose en sa main avec détermination ». Le sens jur. « mettre sous la main de la justice » (B 3 a) est att. en a. prov. dès 1278 [ms. du xives.] (Cartulaire de Beaumont ds Levy Prov.). Fréq. abs. littér.: 11 796. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 16 927, b) 14 010; xxes.: a) 17 401, b) 17 747). Bbg. Quem. DDL t. 6, 16. − Raymondis (L.M.), Le Guern (M.). Le Lang. de la justice pénale. Paris, 1976, pp. 94-97.

Wiktionnaire

Verbe - français

saisir \sɛ.ziʁ\ ou \se.ziʁ\ transitif 2e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se saisir)

  1. Prendre vivement, rapidement, délibérément, avec vigueur.
    • Elle saisit le feuillage d’une façon très-singulière, faisant sortir pour cet effet une langue longue, rugueuse, très-étroite et noire, en l’entortillant autour de l’objet qu’elle convoîte. — (Étienne Geoffroy Saint-Hilaire, Quelques Considérations sur la Girafe, 1827)
    • D’une main, l’assassin avait dû saisir la vieille femme à la gorge et, de l’autre main, la bâillonner pour l’empêcher d’appeler au secours. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
    • Mais, pas un instant, Virginie n'avait tenté de saisir le flingue que Coste avait confisqué dans son baisenville. — (André Caroff, La roue de l'écureuil, Fleuve Noir, 1983)
    • Il saisit rageusement sa perruque, qui lui redonnait pour un soir la chevelure bananoïde de ses chères sixties, et la jette dans le lavabo où elle se met à sombrer comme un transatlantique. — (Jacques Jouet, sur un scénario de François Rivière, Jonathan Cap : Racket à Roland-Garros, Éditions Nathan, 2015, chapitre 1)
    • Au moment précis où les mouchards accostaient les fugitifs et tendaient la main pour les saisir, Mme Hyde braqua sur eux le volumineux parapluie qu'elle tenait à la main et l'ouvrit subitement; […]. — (G. Lenotre, Femmes, amours évanouies: ouvrage orné de quatre héliogravures, Éditions Bernard Grasset, 1933, page 133)
    • Saisir l’occasion, saisir le moment favorable, Se hâter d’en profiter.
    • Saisir un prétexte, Prendre la première raison qui se présente, bonne ou mauvaise, pour faire une chose, ou se justifier de l’avoir faite.
    • Saisir une chose du regard, L’apercevoir rapidement et avec netteté.
    • Il saisit d’un regard la configuration du terrain.
  2. Prendre une chose de manière à pouvoir la tenir, la porter, à ne pas la laisser échapper.
    • Il saisit Héloïse, l’enlève entre ses bras comme une balle de fougère, une sachée de linaigrettes floconneuses, et la transporte doucement, parmi les couvertures qu’il rabat sur elle. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Le manche de cet outil est trop gros, est trop court, on a de la peine à le saisir, on ne peut le saisir commodément.
    • Saisir par l’anse une marmite qui est sur le feu, pour l’en retirer.
    • L'explication parfois proposée après un incident est "le saisissage a lâché". Cependant, c'est rarement la cause principale si les conteneurs ont été arrimés et saisis selon les stipulations du manuel de saisissage. — (Transport de conteneurs en sécurité, Dossier MARS 200885, afcan.org)
  3. Inscrire de façon à avoir une trace tangible, comptabiliser, noter.
    • Tu as saisi cette écriture comptable dans le compte de report à nouveau ?
    • Saisir des données dans un ordinateur et les sauvegarder ensuite.
  4. (Figuré) Discerner, concevoir nettement, comprendre.
    • Bien sûr, il n’y pige rien et comme il croit, dur comme fer, qu’on lui débite des cochoncetés, il voudrait bien saisir. — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928)
    • Tu saisis ? Moi, sur la banquette arrière, bien assis, et le cigare au bec, comme le gros patron avec sa dactylo. La môme à mes pieds, tu saisis ? Le grand patron, tu saisis ? — (Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, 1949, réédition Le Livre de Poche, page 20)
    • Je ne saisis pas, quant à moi, un seul mot de leur jargon. Ni le maire, ni le curé je ne les entends. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Il a saisi sur-le-champ mon intention.
    • Vous n’avez pas bien saisi le sens de ses paroles.
    • Saisissez bien ce que je vous dis.
  5. Représenter, croquer avec exactitude, esquisser avec précision.
    • Ce poète comique saisit parfaitement les ridicules.
    • Cet artiste a bien saisi la ressemblance de son modèle, il a su le représenter d’une manière très ressemblante.
  6. (Cuisine) Brûler modérément la partie extérieure d’un solide.
    • Il faut d’abord cuire à la vapeur un potimarron une dizaine de minutes jusqu’à ce qu’il soit tendre. Ensuite, saisir rapidement au wok dans l’huile d’olive chaude les blancs de dinde (320 g) découpés en dés et les remuer souvent. — (Dinde et potimarron : une recette pour célébrer le nouvel an chinois de Clémentine Gallot pour Libération du 27 janvier 2017)
  7. (Figuré) S’emparer vivement et fortement d’une personne, en parlant des maux du corps, des maladies, des passions, des sentiments.
    • Le froid l’a saisi.
    • La douleur, la crainte, le désespoir l’a saisi.
    • Cette pensée m’a saisi.
    • Être saisi de joie, de peur, d’étonnement, de respect, etc.
    • (Absolument) Être saisi, être frappé subitement, touché de plaisir, pénétré de douleur.
    • Quand on lui dit cette nouvelle, elle fut tellement saisie, qu’elle perdit connaissance.
    • J’en suis encore saisi, tout saisi.
    • Yves demanda pourquoi on ne lui avait pas télégraphié ou téléphoné.
      — J’ai eu peur qu’une dépêche te saisisse. Au téléphone, on ne se comprend pas.
      — (François Mauriac, Le Mystère Frontenac, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 184)
  8. (Droit) Confisquer, arrêter, retenir par voie de saisie.
    • J'avais voulu inscrire l'avion à son nom. On m'a charitablement avertie que le premier soin des créanciers serait de le saisir... — (Georges Simenon, Le Blanc à lunettes, chapitre IV, Gallimard, 1937)
    • Saisir les revenus d’une terre entre les mains des fermiers.
    • Il y a des objets qui ne peuvent être saisis pour aucune créance.
    • Saisir des objets de contrebande.
    • Le garde-chasse lui a saisi son fusil.
    • On a saisi ce numéro de journal.
  9. (Marine) Utiliser un matériel adéquat, en particulier des saisines, pour immobiliser ou au contraire transporter un objet volumineux dans la cale ou sur le pont d’un navire.
    • La présente partie de l’ISO 9367 prescrit les caractéristiques minimales permettant d’arrimer et de saisir efficacement les véhicules routiers embarqués à bord des navires rouliers et spécifie, en particulier, les points de saisissage sur les véhicules et le mode de fixation à utiliser. — (ISO 9367-1:1989 Dispositifs d’arrimage et de saisissage des véhicules routiers en transport maritime sur navires rouliers -- Conditions générales -- Partie 1: Véhicules utilitaires et ensembles de véhicules, semi-remorques exceptées, iso.org)

saisir de transitif

  1. Mettre en possession de.
    • Être saisi d’un gage.
    • Saisir d’une affaire un tribunal, une juridiction, Porter, par les voies de procédure normale, une affaire devant la juridiction compétente.
    • Il a saisi la Cour d’appel de son affaire.
    • La seconde chambre du tribunal de première instance est saisie, a été saisie de cette affaire.
    • L'honorable M. Bertauld nous a dit encore : Je repousse votre projet de loi parce que c'est un expédient, une loi de circonstance, et qu'il n'appartient pas aux assemblées politiques de se saisir de faits particuliers pour en faire l'objet d'une modification législative. — (« Séance du 18 février 1873 », dans les Annales de l'assemblée nationale: compte-rendu in extenso des séances : Annexes, Paris : Imprimerie du Journal officiel, volume 16, page 117)
    • Après délibération du conseil des ministres, le Parlement est saisi du projet de loi au moyen d’un décret de présentation préparé par le secrétariat général du Gouvernement. — (Secrétariat général du gouvernement et Conseil d’État, Guide de légistique, 3e version, La Documentation française, 2017, ISBN 978-2-11-145578-8 → lire en ligne)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SAISIR. v. tr.
Prendre vivement, rapidement, délibérément, avec vigueur. Saisir quelqu'un au collet, lui saisir le bras. Saisir la bride de son cheval. Saisir quelqu'un par les cheveux, par le bras. Saisir quelqu'un au passage. Saisir au vol. Saisir avec la main, avec les dents, avec le bec, etc. Fig., Saisir l'occasion, saisir le moment favorable, Se hâter d'en profiter. Saisir un prétexte, Prendre la première raison qui se présente, bonne ou mauvaise, pour faire une chose, ou se justifier de l'avoir faite. Fig., Saisir une chose du regard, L'apercevoir rapidement et avec netteté. Il saisit d'un regard la configuration du terrain.

SAISIR signifie aussi, simplement, Prendre une chose de manière à pouvoir la tenir, la porter, à ne pas la laisser échapper. Le manche de cet outil est trop gros, est trop court, on a de la peine à le saisir, on ne peut le saisir commodément. Saisir par l'anse une marmite qui est sur le feu, pour l'en retirer.

SAISIR signifie encore, au figuré, Discerner, concevoir nettement, comprendre. Vous n'avez pas bien saisi, vous avez mal saisi ce que j'ai dit. Il a saisi sur-le-champ mon intention. Vous n'avez pas bien saisi le sens de ses paroles. Saisissez bien ce que je vous dis. Ce poète comique saisit parfaitement les ridicules. Cet artiste a bien saisi la ressemblance de son modèle, Il a su le représenter d'une manière très ressemblante.

SAISIR se dit figurément des Maux du corps, des maladies, des passions, des sentiments qui s'emparent vivement et fortement d'une personne. Le froid l'a saisi. La fièvre l'a saisi. La douleur, la crainte, le désespoir l'a saisi. Cette pensée m'a saisi. Être saisi de joie, de peur, d'étonnement, de respect, etc. Absolument, Être saisi, Être frappé subitement, touché de plaisir, pénétré de douleur. Quand on lui dit cette nouvelle, elle fut tellement saisie, qu'elle perdit connaissance. J'en suis encore saisi, tout saisi. En termes de Procédure et en matière de Douanes, de Contributions indirectes et de Police, il signifie Faire une saisie, arrêter, retenir par voie de saisie. Saisir des meubles et des immeubles. Saisir-arrêter. Saisir une rente. Saisir réellement des immeubles. Saisir les revenus d'une terre entre les mains des fermiers. Il y a des objets qui ne peuvent être saisis pour aucune créance. Saisir des objets de contrebande. Le garde-chasse lui a saisi son fusil. On a saisi ce numéro de journal.

SAISIR DE signifie Mettre en possession de. Être saisi d'un gage. En termes de Jurisprudence, Le mort saisit le vif, À l'instant où quelqu'un meurt, son héritier devient propriétaire de son bien, sans qu'il soit besoin de formalités de justice. Saisir d'une affaire un tribunal, une juridiction, Porter, par les voies de procédure normale, une affaire devant la juridiction compétente. Il a saisi la Cour d'appel de son affaire. La seconde chambre du tribunal de première instance est saisie, a été saisie de cette affaire.

SE SAISIR DE signifie S'emparer, se rendre maître d'une personne ou d'une chose. Il faut se saisir de cet homme-là, c'est un voleur. Il s'est saisi de l'argent, des meubles, du cheval. Il faut se saisir de cette forteresse, de cette place. Se saisir d'un couteau, d'une épée. Le participe passé

SAISI s'emploie adjectivement et se dit, en termes de Cuisine, d'un Morceau de viande qui a été exposé à un grand feu et qui est grillé extérieurement et rose encore intérieurement. Une viande bien saisie.

SAISI s'emploie aussi comme nom masculin en termes de Procédure et désigne le Débiteur sur lequel on a fait une saisie, la Partie saisie. Le saisi et le saisissant. Tiers saisi, Celui entre les mains duquel on a fait une saisie-arrêt, une opposition.

Littré (1872-1877)

SAISIR (sé-zir) v. a.
  • 1Prendre avec vigueur, avec effort et tout d'un coup. Saisir quelqu'un par le bras. Mon ordre porte encor de saisir votre épée, Rotrou, Bélis. V, 4. Je suis une ombre à ton service, Et non pas un corps qu'on saisisse, Scarron, Virg. V. Qu'on le saisisse, Oui, lui-même, Pharnace, allez ; et de ce pas Qu'enfermé dans la tour on ne le quitte pas, Racine, Mithr. III, 2. [Lors de l'enterrement de Henri IV] les gardes saisirent un conseiller qui faisait résistance [le parlement voulait précéder les évêques] ; c'était Paul Scarron, le père du fameux poëte burlesque Paul Scarron, plus célèbre encore par sa femme, Voltaire, Hist. parl. XLV. L'athlète Cléomède entra dans une école destinée à l'éducation de la jeunesse, saisit une colonne qui soutenait le toit et la renversa, Barthélemy, Anach. ch. 38.

    Fig. Je suis homme à saisir les gens par leurs paroles, Et j'ai présentement besoin de cent pistoles, Molière, Éc. des fem. I, 6.

  • 2Prendre un objet pour le tenir, pour s'en servir ou pour le porter. Le manche de cet outil est trop gros, on ne peut le saisir. Saisir une marmite par les anses.

    Fig. Saisir le moment, l'occasion favorable, en profiter. Les Romains, saisissant l'occasion de leur ressentiment [des Étoliens] ou plutôt de leur folie, firent alliance avec eux, Montesquieu, Rom. 5. Je saisis cette occasion pour apprendre à cinq ou six lecteurs qui ne s'en soucient guère, que l'article Messie, imprimé dans le grand dictionnaire encyclopédique… n'est pas mon ouvrage…, Voltaire, Mél. litt. à M. de la Harpe. Pour étouffer les révolutions, il est un premier moment qu'il faut saisir, Raynal, Hist. phil. XVIII, 43.

    On dit dans le même sens : saisir un avantage. Je suis vaincu ; Pompée a saisi l'avantage D'une nuit qui laissait peu de place au courage, Racine, Mithr. II, 3.

    Saisir un prétexte, s'en servir, s'en autoriser.

  • 3S'emparer de, occuper en force. Envoyez des soldats à chaque coin des rues ; Saisissez l'Hippodrome avec ses avenues, Corneille, Héracl. III, 4. Nous saisissons la porte, et les gardes se rendent, Corneille, ib. V, 7. Pendant deux nuits il avait fait une incroyable diligence pour faire le tour d'une montagne presque inaccessible dont les alliés avaient saisi presque tous les passages, Fénelon, Tél. XVI.
  • 4Unir, agglutiner. De gros sables qui furent saisis et agglutinés par la pâte d'argile, Buffon, Min. t. II, p. 114.

    Terme de marine. Lier étroitement deux objets par des cordages ou de toute autre façon.

  • 5 Fig. Embrasser par le regard, s'emparer par le coup d'œil. La peinture saisit son objet en action, mais ne le présente jamais qu'en repos, Marmontel, Élém. litt. Œuv. t. IX, p. 408. Ses yeux ont d'un regard saisi le monde entier, Delille, Parad. perdu, III.
  • 6 Fig. Comprendre, discerner. Le traducteur a mal saisi le sens de son auteur. Ce qu'on doit ne point voir, qu'un récit nous l'expose ; Les yeux en le voyant saisiraient mieux la chose ; Mais il est des objets que l'art judicieux Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux, Boileau, Art p. III. Comme nous saisissons aisément ce qui est simple et bien ordonné et que nous apercevons sans peine les rapports des parties qui font l'ensemble…, Dumarsais, Œuvr. t. V, p. 38. La plupart des jeunes gens, les plus vifs et les moins pensants, qui ne voient que par les yeux du corps, saisissent cependant merveilleusement le ridicule des figures, Buffon, Disc. nat. anim. Œuv. t. V, p. 364. Il y a un âge pour bien saisir l'usage du monde, Rousseau, Ém. IV. Il [Dieu] est le principe de tout ; il est impassible, invisible, incorruptible, il n'y a que l'entendement qui le saisisse, Diderot, Opin. des anc. philos. (Pythagorisme). On entend par visible ce qui est fait pour être aperçu par l'œil, et M. Hutcheson entend par beau ce qui est fait pour être saisi par le sens interne du beau, Diderot, Œuv. t. II, p. 413, dans POUGENS. Il n'a pas saisi ce principe si bien développé par Locke, Hobbes, Condillac, que nous recevons nos idées par nos sensations ; mais il l'entrevoit, Champagne, Instit. Mém. sc. mor. et pol. t. III, p. 88.
  • 7Il se dit d'une attaque vive de maladie, d'une impression sur les sens. Un parfum saisit agréablement notre odorat quand nous y pensons le moins, Fénelon, t. III, p. 282. À ces dernières paroles [d'une harangue au roi] la voix lui manqua [à l'avocat général Servin] ; une apoplexie le saisit, et on l'emporta expirant, Voltaire, Hist. parl. XLIX. Le soir la fièvre me saisit ; mon domestique se sentit frappé en même temps que moi, Marmontel, Mém. IX.

    Fig. Un vertige soudain saisit les éléments, Delavigne, Paria, IV, 7.

    Il se dit de l'impression soudaine du froid. Le grand air l'aura saisi, Beaumarchais, Barb. de Sév. III, 12.

  • 8 Fig. Mettre sous l'impression vive et soudaine de quelque sentiment, de quelque passion, de quelque vue. L'impérieuse aigreur de l'âpre jalousie, Dont en secret dès lors mon âme fut saisie, Corneille, Sertor. I, 1. Fuyez donc les fureurs qui saisissent mon âme, Corneille, Nicom. V, 7. Considérez la pieuse reine devant les autels ; voyez comme elle est saisie de la présence de Dieu, Bossuet, Mar.-Thér. Les cœurs sont saisis d'une joie soudaine par la grâce inespérée d'un beau jour d'hiver, Bossuet, ib. Une sainte frayeur des jugements de Dieu le saisissait ; on voyait sa foi dans ses yeux et dans ses paroles, Fléchier, Duc de Mont. C'est lui ! d'horreur encor tous mes sens sont saisis, Racine, Athal. II, 7. Que malgré la pitié dont je me sens saisir, Dans le sang d'un enfant je me baigne à loisir ? Racine, Andr. I, 2. Va voir si la douleur ne l'a point trop saisie, Racine, Bérén. III, 4. L'épouvante saisit les cœurs, Fénelon, Tél. XVI. Veut-il [Homère] peindre deux hommes que personne ne puisse méconnaître et qui saisissent le spectateur, il vous met devant les yeux la folie incorrigible de Pâris et la colère implacable d'Achille, Fénelon, t. XXI, p. 208. Il y a de certaines idées d'uniformité qui saisissent quelquefois les grands esprits, Montesquieu, Esp. XXIX, 18. Cette formule criminelle digne tout au plus de Grégoire VII ou de Boniface VIII, et dont la seule lecture nous saisit d'indignation : Nous réhabilitons Henri dans sa royauté [Henri IV], Voltaire, Frag.sur l'hist. XVI. Tout ce qui saisit l'imagination des hommes ne leur permet pas une justice si exacte, Duclos, Consid. mœurs, 14. Je n'avais point encore été saisie par une affection qui pût me dominer, Staël, Corinne, XIV, 4.

    Absolument. Voilà ce qui surprend, frappe, saisit, attache, Boileau, Art p. III. Se précipitant entre les hommes et les chevaux, ils [les montagnards écossais, à Preston-Pans] tuent les chevaux à coups de poignards, et attaquent les hommes le sabre à la main ; tout ce qui est nouveau et inattendu saisit toujours, Voltaire, Louis XV, 24.

  • 9Être saisi, être frappé subitement de douleur ou de plaisir ou d'étonnement. Je suis encore tout saisi de cette nouvelle. Elle a été si excessivement saisie de ce procédé, qu'elle en est devenue une image de Benoît, Sévigné, 400. Mme de Chaulnes fut saisie du refus de ma mère ; elle se tut, elle rougit, elle s'appuya, Ch. Sévigné, dans SÉV. 25 juill. 1689.
  • 10Faire une saisie, retenir par voie de saisie. L'huissier a saisi son mobilier. Ce fut alors que ce roi, le vainqueur et le père de ses sujets [Henri IV], ordonna qu'on ne saisirait plus, sous quelque prétexte que ce fût, les bestiaux des laboureurs et les instruments de labourage, Voltaire, Pol. lég. Diatribe à l'aut. des Éph. M. l'abbé Terrai me saisit tout le bien libre que j'avais en rescriptions, les seuls effets dont je pusse disposer, Voltaire, Lett. Florian, 21 mars 1770. Aucun livre ne peut entrer en France sans être saisi par les commis, qui se font depuis quelque temps une assez jolie bibliothèque, Voltaire, Lett. à Mme du Deffant, 6 janv. 1764. J'apprends par une lettre de mon père que ma malle a été saisie et confisquée aux Rousses, bureau de France sur les frontières de Suisse, Rousseau, Conf. V. On s'était attendu, en saisissant les biens des jésuites dans cette province [Buenos-Ayres], de trouver dans leurs maisons des sommes considérables ; on en a néanmoins trouvé fort peu, Bougainville, Voy. t. I, p. 201. J'ai de la fraude en pacotille Qu'à la barrière on saisirait, Béranger, Portrait.

    Absolument. Permis de saisir. Pour vendre, chez le vieux Remi On saisissait avant l'aurore, Béranger, Jacques.

  • 11Mettre en possession de. Vous régnez en ma place, et les dieux l'ont souffert ; Je dis plus, ils vous ont saisi de ma couronne, Corneille, Œd. II, 1. Et ceux qu'aura ma mort saisis de mon emploi, S'instruiront contre vous, comme vous contre moi, Corneille, Sertor. III, 2.

    Terme de jurisprudence. Le mort saisit le vif, l'héritier est immédiatement investi des biens du défunt.

  • 12Saisir un tribunal d'une affaire, la porter devant lui. Ils [les jésuites] disaient pour se défendre, que l'Eglise universelle était saisie de leur cause par l'appel qu'ils avaient fait au futur concile, D'Alembert, Destr. des jés. Œuv. t. V, p. 77, dans POUGENS.
  • 13Se saisir, v. réfl. S'empoigner l'un l'autre. Nous nous saisîmes l'un l'autre ; nous nous serrâmes à perdre la respiration, Fénelon, Tél. V.
  • 14S'emparer, se rendre maître d'une personne ou d'une chose. Il se saisit du port, il se saisit des portes, Met des gardes partout, Corneille, Pomp. III, 1. Vous vous saisissez par vos mains De plus que votre récompense, Corneille, Agés. III, 1. César m'a commandé de me saisir de vous, Rotrou, Bélis. V, 4. À dix heures du soir, ils [des partisans ennemis qui s'étaient avancés jusque près de Versailles] aperçurent sur le pont de Sèvres un carrosse à six chevaux, aux armes du roi [Louis XIV] et des gens avec sa livrée ; c'était M. de Beringhen, premier écuyer, dont ils se saisirent, croyant que c'était M. le Dauphin, Saint-Foix, Ess. Paris, Œuv. t. III, p. 72, dans POUGENS. L'ordre fut donné de se saisir d'Avignon et de tout le comtat Venaissin, Voltaire, Louis XV, 39.

    Fig. Et vous vous saisissez d'un prétexte frivole Pour vous autoriser à manquer de parole, Molière, Tart. II, 4.

  • 15 Fig. Il se dit dans un sens analogue avec un nom de chose pour sujet. Tu n'as fait, lui dit-il [à Dieu], que détourner ta face, Et le trouble aussitôt s'est saisi de mon cœur, Corneille, Imit. II, 9. Qui ne voit que l'esprit de séduction s'est saisi de leur cœur ? Bossuet, Hist. II, 9. Afin que la séduction se saisisse à la fois des sens, de l'esprit et de l'âme, Marmontel, Œuv. t. VIII, p. 275.
  • 16Évoquer devant soi une affaire. On se divisa, et le parlement d'Angleterre se saisit de la contestation, Raynal, Hist. phil. XIV, 22.
  • 17S'émouvoir, être saisi. Cet homme se saisit au moindre contre-temps qui lui arrive. Ne t'étonne donc point de cette jalousie Dont à ce froid abord mon âme s'est saisie, Corneille, Sophon. II, 1. Le beau vous touche, et ne seriez d'humeur à vous saisir pour une baliverne, Racine, Épig. sur la Judith de Boyer.

HISTORIQUE

XIe s. Guenes li quens l'ad dessuz lui saisie [la lance], Ch. de Rol. LV. Ne il n'en fut [du fief] ne vestut ne saisit, ib. CCXXXI.

XIIe s. Car nessuns hom [nul homme], puis k'amours l'a saisi, Ne devroit jà si grief faix entreprendre [que la croisade], Couci, XXIV. Pour quoi Mancel [les Manceaux] ne fussent de lor vies saisi [maîtres de la vie des messagers], Sax. XXIV. Tut saisi [le roi] en sa main e terres e mustiers, Th. le mart. 64. Les cordes de enfern [l'enfer] me unt lied, et les laz de mort m'unt saisid, Rois, p. 205.

XIIIe s. Et sesist chascun de la terre endroit soi ce qu'il pot, Villehardouin, CXII. Et quant je serai saisis de ma terre et de ma cité, Villehardouin, CXVI. [Pinçon] Qu'espervier fameilleus tient saisi en la groe [griffe], Berte, XXXIII. Par le très grant avoir dont il erent [étaient] saisi [en possession], ib. CXLIII. Par le [la] reson de ce que li mors saisist le vif, Beaumanoir, XLI, 9.

XVe s. Item, Charles… Doffin… saesy le royaume et se fist nommer roy, Fenin, 1422. Je vueil ce bon boucler [bouclier] cesir, Qui pour coups ne puet desmentir, la Pass. de N. S. J. C.

XVIe s. Ce disant, se saisit du baston de la croix, Rabelais, Garg. I, 27. Mon maistre est, à ta furieuse venue, saisy de grand desplaisir, Rabelais, ib. I, 31. Il le feit saisir à des bourreaux, Montaigne, I, 3. La ville feut saisie [prise] par surprinse, Montaigne, I, 27. Des peuples entiers s'en veoyent souvent saisis [de terreur], Montaigne, I, 64. Je saisis [je gagne] le mal que j'estudie, et le couche en moy, Montaigne, I, 91. Son principal effect [de la conscience], c'est de nous saisir de telle sorte qu'à peine soit il en nous de…, Montaigne, I, 115. Douaire coutumier saisit [les fruits et arrérages en sont dus dès le décès, sans qu'il soit besoin d'aucune demande judiciaire], Loysel, 145. Les creanciers leur faisoient [aux plébéiens] saisir ce peu de bien qu'ilz avoient, à faulte de payer les usures ; et ceulx qui n'avoient du tout rien, estoient eulx mesmes saisis au corps, Amyot, Cor. 6. Ilz saisirent un quartier de la ville, Amyot, Agésil. 52. Il nia qu'il l'eust prise, mais il en fut trouvé saisy, Amyot, Anton. 104.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SAISIR.
1Ajoutez :

Saisir quelqu'un dans ses biens, exercer une saisie sur ses biens. Comme les tribunaux ne pourraient pas faire saisir le préfet par corps ni dans ses biens pour la non-exécution du contrat, Corresp. de Napoléon 1er, t. XIX, n° 15880.

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Étymologie de « saisir »

Provenç. sazir, sayzir ; ital. sagire et staggire ; angl. to seize ; gaélique, sàs ; bas-lat. (dans les lois barbares) ad proprium sacire, s'emparer. Comme ad proprium sacire a pour synonyme ad proprium ponere, Diez pense que l'étymologie est l'ancien haut-allemand sazjan, mettre, poser, l'ital. sagire s'y rapportant comme palagio se rapporte à palatium. Scheler, sans rien proposer, objecte que cette étymologie ne rend pas compte de la forme staggire ; mais il est douteux que staggire, dont le sens propre paraît être fixer, arrêter, soit le même mot que sagire ; probablement staggire se rapporte à stagio, demeure, séjour, étai. Depuis, Scheler, dans un article sur l'étymologie de saison, s'est rapproché de cette dernière manière de voir sur staggire.

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En latin médiéval sacīre « revendiquer, affecter à », de l'ancien français saisir, issu du vieux haut allemand *sazjan[1] (« mettre quelqu'un en possession de quelque chose »), qui donne l’allemand setzen (« poser »). La forme pronominale se saisir signifie « se mettre en possession de, prendre » et explique le sens moderne. Le bas latin ad proprium sacire est synonyme de ad proprium ponere[2].
Le Wiktionary[3] donne pour étymon *sakan « accuser, intenter une action en justice » qui donne sake (« cause, égard ») en anglais.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « saisir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
saisir sɛzir

Fréquence d'apparition du mot « saisir » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « saisir »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « saisir »

  • Il en est de l'argent comme du hérisson, plus facile à saisir qu'à retenir.
    Archiloque
  • L'occasion. Notre seul pouvoir est de la saisir.
    Jean Grenier — Lexique
  • L'important quand on aime, c'est de saisir la fragilité des choses.
    Clément Gaumont — La petite fleur du Vietnam
  • Il faut être bien savant pour saisir un fait.
    Alain — Propos
  • Si tu laisses tout fuir d'entre tes mains, c'est que tu as renoncé à saisir.
    Antoine de Saint-Exupéry — Citadelle
  • Stereocap X Alonzo, la collab à saisir de toute urgence ! Stereocap dévoile sa nouvelle collection de casques audio et le succès est déjà au rendez-vous, ma marque a d’ailleurs choisi une égérie de taille.
    13OR-du-HipHop — Alonzo X Stereocap, la collaboration à saisir de toute urgence ! (Vidéo)
  • Assurance-vie Darjeeling : jusqu’à 350 euros offerts sous conditions, à saisir avant le 31 juillet 2020
    Guide Epargne — Assurance-vie MIF : 60€ offerts pour 1.000 euros versés, à saisir avant le 14 septembre 2020 : Actualités Assurance-Vie
  • Opportunité. Occasion favorable pour saisir une déception.
    Ambrose Bierce — Le dictionnaire du Diable
  • MC Alger : Le Conseil d’administration va saisir le MJS
    La Gazette du Fennec — MC Alger : Le Conseil d'administration va saisir le MJS
  • La maire de Paris, Anne Hidalgo (Parti socialiste), a annoncé, vendredi 24 juillet, saisir la justice pour « les graves injures publiques » prononcées contre la mairie, au lendemain d’une manifestation qualifiant l’Hôtel de Ville de « Pédoland » et de la démission de Christophe Girard, son adjoint à la culture, visé par ces manifestations.
    Le Monde.fr — Affaire Matzneff : Anne Hidalgo va saisir la justice après la démission de son adjoint Christophe Girard
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Traductions du mot « saisir »

Langue Traduction
Anglais grab
Espagnol agarrar
Italien cogliere
Allemand greifen
Chinois
Arabe إختطاف
Portugais agarrar
Russe грейфер
Japonais つかむ
Basque grab
Corse catturà
Source : Google Translate API

Synonymes de « saisir »

Source : synonymes de saisir sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « saisir »

Combien de points fait le mot saisir au Scrabble ?

Nombre de points du mot saisir au scrabble : 6 points

Saisir

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