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Noir

Variantes Singulier Pluriel
Masculin noir noirs
Féminin noire noires

Définitions de « noir »

Trésor de la Langue Française informatisé

NOIR, NOIRE, adj. et subst.

I. − Emploi adj.
A. − [Gén. postposé] Caractérisé par l'absence de couleur (ou par une couleur très sombre) ou bien par l'absence de lumière.
1. Caractérisé par l'absence de couleur (aucune radiation visible n'étant réfléchie) ou par une couleur très sombre.
Rem. À strictement parler, noir ne désigne pas une couleur. Le corps noir absorbe intégralement les rayons qu'il reçoit à sa surface. Mais la langue retient le fait que le noir produit une impression visuelle analogue à celle des couleurs et admet couramment la couleur noire.
a) Qui est de la couleur la plus sombre. L'épaisse et noire colonne de fumée qui s'éleva (...) de la place du Vieux-Marché (Coppée, Bonne souffr., 1898, p.150).Là-bas, des petites taches noires disséminées. Il regardait. Alors il remarquait que deux taches, d'abord assez distantes l'une de l'autre, s'étaient rapprochées. C'étaient bien les taureaux (Montherl.,Bestiaires, 1926, p.434).
SYNT. De l'encre noire; crayon noir; étoffe, satin, velours, drap noir(e); des vêtements noirs de veuve; robe noire; cheveux, cils, poils noirs; yeux noirs; boule noire; perle noire; le tableau* noir; être noir de cheveux; noir comme un corbeau*, une taupe, du jais; noir comme la suie, comme de l'ébène.
Point noir
Synon. de comédon.Après rinçage et séchage, dégraissage de la peau; expression des points noirs pour éliminer le sébum (Quillet Méd.1965, p.303).
,,Petit nuage noir qui annonce l'orage`` (Littré).
Au fig. Menace d'échec, de trouble, de malheur. La richesse terrienne n'est point exposée aux vicissitudes qui sont le point noir des valeurs de bourse (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.130).
Néol. ,,Sur une route: croisement, virage, etc., très dangereux`` (Gilb. 1980).
Moines noirs. V. moine I A.Bénédictin noir. On vit bientôt se présenter au château un noir Bénédictin aux yeux de braise ardente (Boylesve,Leçon d'amour, 1902, p.241).
HIST. Parti noir (celui des députés de l'Assemblée constituante qui siégeaient plus à droite que les monarchistes, et qui arboraient en 1789 une cocarde noire [d'apr. Lar. Lang. fr.]). Blousons noirs. V. fan ex.Drapeau* noir. Chemises noires (celles des fascistes et p.méton. les fascistes eux-mêmes). L'action directe des chemises noires s'exerce plus d'une fois contre les sièges de journaux adverses (Civilis. écr., 1939, p.38-16).Terrorisme noir. Quels sigles terroristes vont donc dominer la scène italienne? Les «rouges» ou les «noirs»? Le «front armé» de gauche ou celui de droite? Le terrorisme noir a fait le premier sa rentrée politique: le 2 août à Bologne (quatre-vingt-quatre morts), puis le 2 septembre, à Rome, avec l'assassinat de Maurizio Di Leo (Le Nouvel Observateur, 20 sept. 1980, p.53, col. 2).
PHYS. Corps noir. ,,Modèle théorique imaginé par les physiciens pour ses propriétés simples et qui est supposé absorber tout un rayonnement reçu par sa surface, laquelle, par conséquent, ne diffuse ni ne réfléchit`` (Muller 1966, s.v. corps noir).
Locutions
Marquer qqc. d'un caillou noir (rare). Considérer quelque chose comme défavorable (v. caillou B 2 c). Les jours à marquer d'un caillou noir, il ignorait toujours que c'étaient ceux où elle avait vainement attendu la lettre de Ludwig (Peyré,Matterhorn, 1939, p.96).
Bête noire. V. bête1II C 1 b et II C 2 a.
Qqn1/qqc.1est la bête noire de qqn2. Quelqu'un a quelqu'un ou quelque chose en horreur. M. Bremond est un pur mystique. La raison est sa bête noire (Bremond,Poés. pure, 1926, p.42).Ils ne m'aimaient pas, ces Delahaie. Leur bête noire, voilà ce que j'étais. Leur bête noire! (Duhamel,Notaire Havre, 1933, p.39).
En partic. [En parlant des produits qui servent à donner la couleur noire] Colorant noir; laque noire. Le pigment noir qui donne la couleur aux encres est obtenu par combustion incomplète de matières animales, minérales ou végétales (Bég.Estampe1977).
b) P. ext. Qui est d'une couleur foncée. Le reste nous était caché par des mamelons couverts de noires forêts de pins (Lamart., Voy. Orient, t.2, 1835, p.80).Le chien s'appelait Noiraud parce qu'il était noir (Aymé,Jument, 1933, p.73).
[En parlant d'un lieu] Être noir de monde. Les gradins noirs de gens (Cladel,Ompdrailles, 1879, p.122).
En partic. (dans des loc. nom. plus ou moins figées où noir ne peut guère être modifié par un adv.).
Boîte noire. V. boîte I B 2 b.
Habit noir (vieilli). Vêtement habillé, tenue de cérémonie. Rumphius, l'égyptologue, conservait, même sous ce brûlant climat, l'habit noir traditionnel du savant avec ses pans flasques, son collet recroquevillé, ses boutons éraillés (Gautier,Rom. momie, 1858, p.153).
Lunettes noires. Synon. lunettes de soleil.V. lunette C 1 a.
Marée* noire. Or* noir.
Pierre noire. À la Mecque, pierre en basalte ou en lave qui fut apportée à Abraham par Gabriel. De longues caravanes de pèlerins traversent tous les ans une partie de l'Asie pour aller baiser une pierre noire à La Mecque (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p.344).
Savon* noir.
Terres noires, sols noirs. ,,Terme général et imprécis désignant des sols de couleur noire, en général`` (George 1970). Synon. tchernoziom.
Vierge noire. ,,Se dit de certaines statues anciennes de la Vierge, généralement sculptées dans le bois et qui sont de couleur très sombre. La Vierge noire du Puy ``(Ac. 1935).
− Domaine de l'alim.
Blé* noir.
Beurre noir. Beurre fondu et foncé à la chaleur. Elle sent la raie au beurre noir (Goncourt,Journal, 1864, p.36).Au fig. Avoir, pocher les yeux au beurre noir. V. beurre A.
Café* noir (p. oppos. à café au lait et à café crème). Lieu* noir (p. oppos. à lieu jaune). Morue* noire (p. oppos. à morue blanche ou verte). Radis* noir (p. oppos. à radis rose). Raisin noir (p. oppos. à raisin blanc). Pain* noir (p.oppos. à pain blanc). Poivre* noir (p. oppos. à poivre rouge, gris ou blanc).
(Viandes) noires. Viandes qui tirent sur le noir, comme la chair du lièvre, p. oppos. aux viandes blanches (veau, poulet). Quant à la volaille noire, telle que les oies et canards, on peut, attendu la fermeté de leur peau, les exposer sans inconvénient à un feu vif (Audot,Cuisin. campagne et ville, 1896, p.628).
MÉD. Maladie noire (vx). ,,Le meloena ou la maladie noire que constitue une hématémèse chronique`` (Encyclop. méthod. Méd. t.10 1821). Sang noir. Sang carboné ou caillé. Dans le ventricule, il y a un mélange de sang noir, venant de l'oreillette droite, et de sang rouge venant de l'oreillette gauche (Coupin,Animaux de nos pays, 1909, p.156).Ses mains avaient du sang noir séché sous les ongles (Montherl.,Bestiaires, 1926, p.563).
BOT., ZOOL. [Qualifie des animaux ou des plantes caractérisés, pour tout ou partie, par leur couleur plus foncée que d'autres de la même espèce] Race noire du Velay; aigle, canard, milan, rat noir; macreuse noire; chêne, hêtre noir.
En emploi adv. Le vieux cracha noir (Zola,Germinal, 1885, p.1136).
c) P. exagér. Rendu foncé
Rendu foncé par une meurtrissure. Elle ôta sa camisole pour montrer son dos et ses bras noirs de coups (Zola,Nana, 1880, p.1308).
Rendu foncé par la saleté, la poussière, la pollution. Façade, maison noire; mains noires; être noir de suie. De maigres doigts jaunes et noirs de boue (Rimbaud,Poés., 1871, p.96).Une vieille femme, presque aveugle, y étalait trois ou quatre sacs de lentilles et de haricots, noirs de poussière (Zola,Germinal, 1885, p.1363).Ces figures violettes de froid, noires de crasse (Adam,Enf. Aust., 1902, p.84).Quand les noires cités névropathes auront enfin rendu la vie des leurs intenable (Montherl.,Bestiaires, 1926, p.471).
[En parlant d'une pers.] Des ouvriers noirs de charbon (Zola,Nana, 1880, p.1455).Passe le noir mécanicien, chargé d'outils et de bidons (Alain,Propos, 1921, p.248).
Les gueules* noires. Pied(-)noir*.
Rendu foncé par les rayons du soleil. Synon. basané, bronzé, hâlé.L'été, j'ai les bras tout noirs (Audiberti,Mal court, 1947, ii, p.155).
d) P. anal., rare. Caractérisé par l'absence d'harmoniques:
1. Les instruments à percussion, timbales, grosse-caisse, font de grands trous noirs [it. ds le texte] dans la masse [orchestrale]; le roulement du tambour est grisâtre... Lavignac,Mus. et musiciens, 1895, p.213.
2. Caractérisé par l'absence de lumière, plongé dans l'obscurité. Synon. sombre.Rues étroites et noires; pièce, entrée noire. Combien de repos haletants sur les marches, dans le petit escalier noir et tortueux? (Maupass.,Contes et nouv., t.2, Mis. hum., 1886, p.648).La façade de Saint-Jean, surmontée de statues qui dansaient, profilaient leurs noires silhouettes (Rolland,J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1450).
Lumière noire. V. lumière A 2 a.Il fait noir, nuit noire; à la nuit noire. Il fait noir. On n'y voit goutte (A. France,Vie fleur, 1922, p.335).Il était nuit noire et Zarouk me répondit (...) qu'il nous suffisait d'avancer dans la direction d'une grosse planète bleu pâle qui se levait à l'horizon (Duhamel,Suzanne, 1941, p.181).
Au fig. J'ouvre les yeux, elle les ouvre et tout de suite il fait noir dans son coeur (Beauvoir,Mandarins, 1954, p.174).
Il fait noir comme dans un four (v. four A); noir comme dans le cul d'un nègre (vulg.).
Un temps noir. Un temps très couvert. Un matelot m'avait volé ma montre. (...) il s'était réfugié sur la troisième vergue, à quarante-quatre mètres du pont. Il faisait un temps de cochon noir. L'homme avait son couteau (Audiberti,Quoat, 1946, 2etabl., p.67).
[P. méton.]
Silence noir. Silence qui règne dans un lieu sombre ou sous un ciel couvert. Dans le grand silence noir des arbres immobiles (Zola,Débâcle, 1892, p.478).
Vent noir (région.). Vent du nord, vent glacial qui règne par temps couvert. Synon. bise noire.Dans les mois du vent noir et des brouillards plombés Les pétales du vieil automne sont tombés (Samain,Chariot, 1900, p.40).
PHOT. Chambre noire. Instrument d'optique où on ne laisse entrer les rayons lumineux que par une ouverture étroite:
2. Mais la photographie ne consiste pas seulement à former une image nette dans une chambre noire, ou à la projeter sur un écran, il s'agit essentiellement de la capter sur une surface sensible pour pouvoir obtenir un cliché négatif et une épreuve. Prinet,Phot., 1945, p.35.
ASTRON. Trou noir. ,,Objet extrêmement dense, au point que les rayons lumineux ne peuvent plus parvenir à un observateur lointain, du fait de la courbure de l'espace introduite par cet objet`` (Astron. 1973, s.v. trou noir).
MÉD. Voile noir. ,,Trouble de la vision observé chez les aviateurs pilotant des appareils rapides lors de virages serrés... (cécité passagère)`` (Méd. Biol. t.1 1970, s.v. anopsie des aviateurs).
B. − [Parfois antéposé] Au fig.
1. Qui inspire de l'inquiétude, de la mélancolie; qui est terrifiant. Noirs pressentiments; noires pensées; pessimisme noir. Un noir chagrin dévore l'ame de Lusignan (Cottin,Mathilde, t.2, 1805, p.264).Il est deux noirs instincts qui bravent la raison: Le goût de suicide et la soif du poison (Amiel,Journal, 1866, p.255).Elle resta ensuite six mois très faible et tourmentée par des idées noires (Janet,Obsess. et psychasth., 1903, p.36).
Faire un tableau noir de la situation. Présenter une situation comme mauvaise. Le commandant de la 2earmée me fit un tableau très noir de la situation de son armée (Joffre,Mém., t.1, 1931, p.408).
Série noire. Suite d'événements malheureux. Allons, décidément, c'est la série noire qui continue! (Bourdet,Sexe faible, 1931, iii, p.463).
Série à la noire (rare). L'accident arrivé à son fils complète pour Christian une vraie série à la noire (A. Daudet,Rois en exil, 1879, p.446).
[En parlant du moment où des événements fâcheux ont lieu] Aux jours noirs de l'été 40, dans la débâcle générale (Ambrière,Gdes vac., 1946, p.273):
3. ... la Bourse venait de vivre une journée de débâcle. Un «mardi noir», disait-on déjà, par référence au triste «jeudi noir» de Wall Street, qui avait donné le signal de la grande crise de 1929. Le Nouvel Observateur, 18 oct. 1976, p.22, col. 2.
OEil, regard noir. Regard irrité et menaçant. Arthur (...) me regardait d'un oeil noir et farouche (Brizeux,Marie, 1840, p.78).Alban lui proposa son billet, mais le vieillard lui fit un oeil noir, croyant qu'il s'agissait d'un revendeur suspect (Montherl.,Bestiaires, 1926, p.482).Madame de Curel me lance un regard noir (Gyp,Souv. pte fille, 1928, p.145).
En partic. Littérature, série noire, roman noir. Qui évoque des péripéties terrifiantes, notamment meurtrières. Aujourd'hui encore, je lis plus volontiers les «Série Noire» que Wittgenstein (Sartre,Mots, 1964, p.61).
Rem. Les romans de la «série noire» paraissent sous couverture noire.
Humour* noir.
MÉD., vx. Bile* noire, vapeurs* noires.
2. Qui est répréhensible, immoral ou illégal. Noirs projets, desseins; noirs complots; noire ingratitude; méchanceté, âme noire. Le monde est moins noir qu'il n'en a l'air. Les bons instincts y sont représentés comme les mauvais (Amiel,Journal, 1866, p.277).J'ai voulu tout avoir. Simplement. C'est le côté noir de ma vie (J. Bousquet,Trad. du silence, 1935, p.22).
Argent noir (v. infra II B 2 travail au noir). Il s'agissait de blanchir «l'argent noir», souci majeur des Américains ayant des ressources illicites (Le Point, 12 janv. 1976, p.106, col. 3).
Bande noire. ,,Association de spéculateurs, d'hommes d'affaires qui s'entendent pour acheter à bas prix des propriétés, des objets mis en vente, qu'ils revendent ensuite à profits communs très élevés`` (Ac. 1935):
4. ... je fais des voeux pour la bande noire (...). Je prie Dieu qu'elle achète Chambord (...), qu'elle l'achète six millions (...) que le tout soit revendu à huit millions à trois ou quatre mille familles (...). Je trouve à cela beaucoup et de grands avantages pour le public et pour un nombre infini de particuliers. Courier,Pamphlets pol., Disc. souscr. acquis. de Chambord, 1821, p.85.
Caisse noire. Fonds qui échappent à la comptabilité légale. Je vous demande un million de marks à prélever sur notre caisse noire (L. Daudet,Ciel de feu, 1934, p.246).
Liste noire. Liste des suspects, des exclus. Tu seras inscrit, moralement, sur une liste noire, où figurent les types nébuleux, incapables, comme ils disent, de faire un homme d'état (Romains,Hommes bonne vol., 1932, p.155).
Magie* noire. Marché* noir. Messe* noire.
Travail, salaire noir. ,,Clandestin, en dehors de la légalité. S'adonner au travail noir`` (Gilb. 1980).
Il n'est pas si diable qu'il est noir (vx). ,,Il n'est pas si méchant qu'il le paraît`` (Ac. 1935).
Rendre noir (vx). ,,Diffamer, faire passer quelqu'un pour méchant, pour criminel. On l'a rendu bien noir dans cette affaire`` (Ac. 1935). Synon. noircir.
HIST. Le cabinet noir. ,,Bureau du ministère de l'intérieur où sont envoyées les lettres de toute personne compromise ou réputée hostile au gouvernement (...). Le cabinet noir a fonctionné sous toutes les monarchies; supprimé à la révolution de juillet 1830, il fut rétabli sous le second empire`` (France 1907).
3. Qui transgresse toute norme; qui atteint un état extrême. Une misère noire. Au fond de la plus noire douleur j'ai surtout souffert de trouver des limites à ma faculté de l'exprimer (J. Bousquet,Trad. du silence,1935,p.25).
Être noir de colère. Être dans une colère extrême. Henriette était noire de colère, ses yeux carrés brûlaient les passants, les tramways, le ciel gris sur lesquels ils se posaient (Triolet,Prem. accroc, 1945, p.137).
Être noir de rire. Être ivre de rire. Les autres étaient noirs de rire. Ils se donnaient de grandes claques sur les cuisses pour mieux manifester leur joie (Guèvremont,Survenant, 1945, p.64).
En partic., pop. Être noir. Être ivre. (Ds Esn. 1966). On coursait les Allemands, on en ramassait qui étaient saouls, perdus, noirs comme du cirage (Dorgelès dsLar. Lang. fr.).Et quand il a la fièvre Quand il est noir quand il est couché le soir Des milliers et des milliers d'adresses Arrivent à toute vitesse et se bagarrent dans sa mémoire (Prévert,Paroles, 1946, p.62).
La Peste noire. Épidémie qui a ravagé l'Europe au xivesiècle. Le virus de la Peste Noire fut la cause première du dépeuplement de l'Europe (M. Bloch,Apol. pour hist., 1944, p.101).
C. − Qui appartient à une race caractérisée essentiellement par la pigmentation très foncée de la peau. Race noire; peuples noirs; hommes et femmes noirs; esclaves noirs. Ce n'est pas parce que les hommes sont blancs ou noirs (...) qu'il leur faut des lois; mais parce qu'ils sont ambitieux, avares, voluptueux, féroces (Bonald,Législ. primit., t.1, 1802, p.192).Une grande richesse a été ajoutée, de main d'homme, d'homme blanc, noir ou jaune, sous la direction de la France, à l'état primitif du Tonkin, du Congo et de Madagascar (Maurras,Kiel et Tanger, 1914, p.131).
[P. méton.] Propre à cette race, habité par elle. Le problème noir; l'âme noire; le continent noir (l'Afrique); les quartiers noirs (de New York); art noir, poésie noire (v. fonctionnel ex. de Sartre). Je songe au drame hindou où l'affluence trop large et trop continue du sang noir provoque une rupture constante d'équilibre (Faure,Espr. formes, 1927, p.68).
II. − Emploi subst.
A. − [Correspond à supra I A] Au masc.
1. Couleur noire.
a) Caractère de ce qui est noir (cf. noirceur). Peindre en noir. Son manteau, d'un noir foncé, est semé d'étoiles et bordé d'une frange lumineuse (Nerval,Filles feu, Isis, 1854, p.657).Ses grosses moustaches étaient d'un noir d'encre (Zola,Germinal, 1885, p.1200).Sous le ciel givré d'astres et d'un noir bleuté insondable (Van der Meersch,Invas. 14, 1935, p.271).Le noir absorbe la lumière et ne la rend pas. Il évoque, avant tout, le chaos, le néant, le ciel nocturne, les ténèbres terrestres de la nuit, le mal, l'angoisse, la tristesse, l'inconscience et la mort (Symboles1969).
ARTS. [En parlant d'un tableau dont les couleurs ont noirci avec le temps] Pousser au noir. Noircir. Les tableaux ont poussé au noir et le coloris en est souvent peu agréable (Ménard,Hist. beaux-arts, 1882, p.165).
En noir et blanc. Anton. en couleurs.Film, reproduction, télévision en noir et blanc. Cela fait 4 vol. in-8., illustrés de nombreuses reproductions en noir et blanc des miniatures de Mir Muhammad (Cendrars,Bourlinguer, 1948, p.17).
Rem. Suivi d'un compl. déterm. (noir d'ébène, noir de jais) ou d'un adj. ou subst. apposé (noir franc, noir jais), noir est inv. et fonctionne comme substantif.
b) Matière colorante servant à teindre en noir. Noir d'acétylène, d'aniline, de Prusse. C'est un de ces papiers enduits de noir de fumée (Curel,Nouv. idole, 1899, ii, 3, p.201).Le noir animal s'obtient en calcinant des os en vase clos. En grains, il a des propriétés décolorantes et désinfectantes; en poudre fine, il sert en teinture. Le noir de fumée s'obtient en recueillant la fumée de bois résineux, d'huiles impures, etc. Le noir d'ivoire résulte de la calcination d'ivoire pulvérisé. Le noir de pêche, de la calcination de noyaux de pêche (Lar. mén.1926).
2. [Sert à désigner des parties d'objets ou des objets caractérisés par la couleur noire]
[En parlant de vêtements, de tentures, notamment pour marquer le deuil] Un vaste appartement tendu de noir (Cottin,Mathilde, t.2, 1805, p.340).Elle était tout en noir et voilée (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.259).Un homme vêtu de noir (Ponson du Terr.,Rocambole, t.3, 1859, p.531).
[P. allus. à la couleur noire de l'habit des prêtres] Quelques commentateurs ont soutenu (...) que le Rouge et le Noir [titre du roman de Stendhal, 1830] désignent le prêtre et le bourreau ou la tache sanglante dont sera éclaboussée la soutane noire. D'autres ont émis l'hypothèse que ces couleurs soulignaient le conflit des idées de la gauche libérale avec les menées des prêtres (...). Beyle de son côté (...) aurait donné une explication aussi plausible: Le Rouge signifierait que venu plus tôt Julien Sorel eût été soldat, mais, que dans l'époque où il vécut, il dut se faire prêtre, de là le Noir (H. Martineau(introd., 1955) ds Stendhal, Rouge et Noir, Paris, Garnier, p.ix).
Fam. Noir, petit noir. Café noir. Le petit noir est un café fabriqué dans des conditions extrêmement simples, lesquelles permettent de le débiter au prix très modique de dix centimes le bol. Été comme hiver, la marchande de petits noirs est à son poste (Comic-Finance, 14 janv. 1869, 2eannée, numéro 2 ds Quem. DDL t.18).
ARTS GRAPH. Parties noires d'un dessin, d'un tableau. Par ses grands blancs et ses noirs profonds, elle [l'héliogravure] rend avec vigueur les contrastes (Civilis. écr., 1939, p.10-13).Les parties d'un dessin ou d'une gravure en noir et blanc, qui sont dessinées ou imprimées très fortement par rapport aux blancs du papier et aux parties plus légèrement traitées. On oppose les noirs d'un dessin aux clairs, parfois aux blancs ou aux lumières (Bég.Dessin1978).
Noir au blanc. ,,Impression dont le fond est noir et les textes et illustrations blancs. Il s'agit donc d'une inversion des valeurs d'une impression, c'est pourquoi le noir au blanc est souvent nommé «texte composé ou dessiné réclamé en inversion`` (Cham. 1969). Synon. (sur écran cathodique) vidéo* inverse.
,,Centre d'une carte, d'une cible où il y a un cercle noir dans lequel les tireurs cherchent à mettre le coup`` (Littré).
Fam., vieilli. Mettre dans le noir. Réussir. Synon. mettre dans le mille*. (Ds DG).
Mettre les choses noir sur blanc. Par écrit. J'aime (...) à mettre les choses noir sur blanc. Mais quand j'essaie de commencer un rapport, la plume me tombe des mains (Gracq,Syrtes, 1951, p.101).
Passer, aller du blanc au noir. ,,Passer d'une opinion à l'opinion contraire, passer d'une extrémité à l'autre`` (Ac. 1798-1878). Si vous lui dites blanc, il répondra noir. ,,Il se plaît à contredire`` (Ac. 1878). Les deux ministres se contredisaient, l'un disant blanc, l'autre disant noir (Maurras,Kiel et Tanger, 1914, p.222).
Être au noir. ,,Expression de marine signifiant pour un navire pétrolier qu'il transporte des produits noirs [les produits pétroliers les plus denses]`` (Pétrol. 1964).
AGRIC. Le noir des céréales. ,,Maladie des céréales et spécialement du froment, produite par un champignon (puccinie des graminées, uredo frumenti)`` (Littré). Au milieu des grains de lupuline [du houblon], on recherche les vestiges de maladie et notamment du miellat et du noir (Boullanger,Malt., brass., 1934, p.63).
Meurtrissure (supra I A 1 c). Synon. bleu:
5. −Non, Monsieur, laissez-moi, je ne joue plus avec vous. −Et pourquoi, ma grosse Victoire? −Parce que vous me pincez. −Oh! si doucement. −Avec ça! J'ai le derrière couvert de noirs. Les Propos du Commandeur ds France1907.
Arg. ,,L'opium. [argot des opiomanes]`` (Sandry, Carrère, Dict. arg. mod., 1953, p.218). P. oppos. à la blanche, «la cocaïne».
3. Obscurité, ténèbres. Il donnait des signes d'inquiétude, sondait anxieusement le noir autour de lui (Courteline,Train 8h 47, 1888, 2epart., iii, p.117).La nuit sidérale, impolluée, le noir absolu, lisse, vide, stérile (Bernanos,Joie, 1929, p.642).Tremblant de peur comme un enfant dans le noir (Prévert,Paroles, 1946, p.166).
Pot(-)au(-)noir. V. pot1.
B. − Au fig., au masc.
1. [Suggère la tristesse, la mélancolie, l'inquiétude] Pousser les choses au noir. À ses yeux, ce mot cruel la cinquantaine jetait du noir sur toute sa vie (Stendhal,Chartreuse, 1839, p.126).N'a-t-elle pas cédé un peu vite, et surtout depuis l'envoi de mes présents?... Bon, je vois les choses trop en noir, et je ne devrais songer plutôt qu'à préparer ma rhétorique amoureuse (Nerval,Filles feu, Corilla, 1854, p.666).Mais elle, qui ne bouge pas de la maison, aperçoit mieux que lui le noir des journées prochaines (Genevoix,Raboliot, 1925, p.231).
Broyer* du noir. Vx. Faire du noir. S'enfoncer dans le noir, dans son noir (Ac. 1798-1878).
Pop. Être dans son noir. ,,Être taciturne,... dans son jour de mauvaise humeur`` (Hautel t.2 1808).
2. [Suggère l'idée d'illégalité, de normes transgressées]
Fam. Travailler au noir, travail au noir. En France, les lois n'interdisent pas aux cover-girls étrangères de venir travailler «au noir» pendant trois mois (Le Nouvel Observateur, 15 juin 1966, p.27, col. 3).
3. [Suggère l'incompréhension] Être dans le noir, être dans le noir le plus complet. ,,Ne rien comprendre à quelque chose, ne plus s'y retrouver`` (Rey-Chantr. Expr. 1979). Anton. y voir clair.
C. − [Désigne des pers.] Au masc. ou au fém.
1. Homme ou femme de race noire. Chez les Noirs, dans la morne Afrique, ou chez les Jaunes, au fond de l'effrayante Asie (Coppée,Bonne souffr., 1898, p.73).Le sens du rythme qui caractérise le Noir (Faure,Espr. formes, 1927, p.97).Victime de la traite des Noirs et de l'esclavage, (...) Atar-Gull fut transporté (...) à la Jamaïque (Sue,Atar-Gull, 1831, p.37).
Rem. Noir/nègre. ,,Pour désigner les peuples de race noire, ces deux mots sont synonymes... Néanmoins le second terme (nègre) étant considéré par les Noirs eux-mêmes comme péjoratif, on emploie le premier de préférence`` (Thomas 1956). V. aussi nègre I A rem. pour l'usage actuel.
2. Vx. Homme ou femme de race blanche qui a le teint ou les cheveux noirs. Il a épousé une brune, ou plutôt une noire (Lar. 19e).
3. HIST. Les noirs. ,,S'est dit des membres du côté droit de l'assemblée constituante, pendant qu'elle siégea au Manége: les membres du côté gauche furent appelés les blancs. Les modérés étaient appelés impartiaux noirs ou impartiaux blancs, selon le côté vers lequel ils penchaient`` (Ac. Compl. 1842).
REM. 1.
Noirement, adv.,littér., rare. a) [Correspond à supra I A] Hapax. En noir. On trouve assez aisément l'Imitation de Corneille (...) en de nobles in-quartos (...), noirement et largement imprimés (Valéry,Pièces sur art, 1931, p.31).b) [Correspond à supra I B] a/) De manière inquiétante, menaçante. La destinée, jusqu'alors simplement impitoyable, se manifeste! (...) noirement atroce (Bloy,Désesp.,1886,p.66).b/) De manière triste, sombre. Et la perspective de la rentrée, dans la maison, de Judith, qu'Estelle déteste (...) rend le ménage noirement songeur (Goncourt,Journal, 1872, p.906).
2.
Noirien, noirin, noireau, noirot, subst. masc.Cépage à raisins noirs cultivé en Languedoc et en basse Bourgogne (noirien), en Beaujolais et dans le Forez (noireau) (d'apr. Fén. 1970). Une grappe de «noirot», raisins à jus très noir (Menon, Lecotté,Vill. Fr., 2, 1954, p.75).Le groupe des noiriens avec le pinot, le gamay, le chardonnay... (Levadoux,Vigne, 1961, p.30).
3.
Noirouffe, adj.,pop. D'un noir foncé. Les toutes petites briques jaunes des murs, lesquelles briques jaunes deviennent au bout de très peu de temps obscurément rougeâtres, puis tout à fait noirouffes (Verlaine,Corresp., t.1, 1872, p.78).Voir Id., Souv. et fantais., 1896, p.259.
4.
Noir(e)té,(Noirté, Noireté) subst. fém.,rare, région. Obscurité de la nuit tombante. Ils sont toute la journée dehors, et quelquefois encore à la noirté (Genevoix,Raboliot, 1925, p.315).
5.
Noirpiaud, -aude, subst.,,Un noirpiaud, dans le patois de la Thiérache, est un individu à teint sombre`` (A. Lefebvre ds Rheims 1969). V.noiraud.Tu ne criais pas quand on te battait. Dis, noirpiaude, vilaine! (Claudel,Violaine, 1892, i, p.503).
Prononc. et Orth.: [nwa:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adj. A. Sens phys. 1. a) ca 1100 neir «se dit d'un corps qui ne réfléchit aucun rayon lumineux» (Roland, éd. J. Bédier, 982); ca 1160 noir (Enéas, éd. J. J. Salverda de Grave, 4012); b) ca 1393 «se dit de vêtements, en signe de deuil» (Ménagier de Paris, éd. Sté Bibliophiles fr., t.2, p.123: robes noires); c) [ca 1675 fig. bête «objet d'aversion» (Retz, Mémoires ds OEuvres, éd. A. Feillet, t.1, p.224: Montrésor, qui étoit sa bête)] 1750 bête noire (Fougeret de Monbron, Le Cosmopolite, p.61); d) 1790 hist. les Noirs (Motion du père Gérard, Pamphlet, 27 avr., in Aulard, La Société des Jacobins, I, 64, Jouaust ds Quem. DDL t.11); e) 1859 le noir «le café» (Monselet, Le Musée secret de Paris, 78-79 ds Quem. DDL t.21); 1867 un petit noir (Goncourt, Man. Salomon, p.364); 1874 café noir (Lar. 19e); f) 1904 phys. corps noir (Le Radium, nov. p.141); 2. ca 1100 neir «de race noire» (Roland, 1917: la neire gent); 1742 Code noir «édit de mars 1685 concernant le statut des esclaves noirs dans les colonies» (Dubos, Hist. crit. de l'établissement de la monarchie fr. dans les Gaules, t.2, p.380); 3. a) ca 1120 neir «privé de lumière, plongé dans l'obscurité» (St Brandan, éd. I. Short et B. Merrilees, 1104: neir calin); b) 1remoitié xives. [date ms.] expr. il fait noir (Adenet Le Roi, Berte, éd. A.Henry, 960: Jusqu'a tant que noir fist); c) 1758 opt. chambre noire (Rousseau, Lettres à M. d'Alembert sur les spectacles, p.82); c) 1835 cabinet noir (Ac., s.v. cabinet); 4. a) ca 1160 noir «d'une couleur très foncée» (Enéas, 2270: char noire); b) 1546 pocher les yeux au beurre noir (Rabelais, Tiers Livre, chap.XX, éd. M. A. Screech, p.149, 122: il m'a presque poché les oeilz au beurre noir); c) 1690 «meurtri» (Fur.: femme [...] toute noire de coups); d) 1690 «sale» (ibid.: mains [...] toutes noires de crasse); 5. ca 1174 neir «qui est plus sombre (dans son genre)» (Étienne de Fougères, Livre des manières, éd. R. A. Lodge, 703: pein de neire paste); 1343 pain noir (Varin, Arch. admin. de Reims, t.2, p.888); 1530 savon noir (Palsgr., p.198b); 6. a) 2emoitié xvies. anc. méd. bile noire (A. Paré, éd. J. Fr. Malgaigne, t.3, p.157a); b) 1604 humeur noire (Montchrestien, Reine d'Écosse, p.75); 7. 1898 arg. «ivre» (arg. des typographes, s. réf. ds Esn.); 1901 (Bruant, p.270 [arg. des lithographes]). B. Sens moral 1. a) 1remoitié xiies. neir «mauvais, méchant» (Lapidaires, éd. P. Studer et J. Evans, FFV 721, p.58); b) a/) 1630 magie noire (v. magie); b/) 1816 roman noir (J. des Débats, 8 août ds Mack. t.1, p.202); c/) 1857-67 messe noire (Baudel., Fl. du Mal, p.283); d/) 1939 humour noir (v. humour); 2. 1160-74 noir «triste» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 3462: le cuer noir); 3. a) ca 1175 neire ire (Chronique Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 18081); 1563 cholère noire (Palissy, Recepte, p.124); b) 1640 regarder noir «regarder d'un oeil plein de colère» (Oudin Curiositez, p.372); 4. 1678 «entaché dans sa réputation» (La Fontaine, Fables, VII, I, 64); 5. Mystérieux, caché, clandestin a) 1702 liste noire (v. liste); b) 1882 caisse noire (v. caisse); c) 1941 marché noir (M. Déat ds L'OEuvre, 3 févr.); d) 1963 travail noir (Lar. encyclop.). II. Subst. A. Sens physique 1. a) 1remoitié xiies. neir «couleur noire» (Lapidaires, éd. citée, FFV 400, p.43); b) dernier quart du xives. noir «la couleur noire, signe de deuil» (Froissart, Chroniques, l. I, § 513, éd. S. Luce, t.6, p.108); 2. a) ca 1130 neir «partie noire de quelque chose» (Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 93); b) 1704 «centre d'une cible» (Trév.); c) 1817 art «partie noire d'un tableau, d'un dessin» (Stendhal, Hist. peint. Ital., t.1, p.219); 3. ca 1200 «obscurité, ténèbres» (Raimbert de Paris, Ogier le Danois, éd. J. Barrois, 9069); 4. Matière colorante noire a) 1260 noir de chaudière (Étienne Boileau, Métiers, éd. G.-B. Depping, Titre L, p.119); b) xives. noir «fard, maquillage» (Moamin, éd. H. Tjerneld, II, 48, 20); c) 1620 noir de fumée (Mayerne, Pictoria, éd. Berger, p.210); d) 1825 noir animal (Annales de chim. et de phys., t.XXVIII, p.183 ds Fonds Barbier); 5. 1556 «personne de race noire» (J. Temporal, trad. : J. Léon Africain, Description de l'Afrique, I, 5 ds Quem. DDL t.21); 6. 1818 «maladie des plantes» (Nouv. dict. d'hist. nat. ds FEW t.7, p.131a). B. Sens moral 1. 1756 broyer du noir ([Grandval], Le Tempérament, 15, Au Grand Caire ds Quem. DDL t.19); 2. 1875 «ce que l'on ne comprend pas» (Zola, Faute Abbé Mouret, p.142: je ne vois que du noir). Du lat. niger «noir; sombre; funèbre, funeste; perfide». Au sens I A 6 a, bile noire est la trad. du gr. μ ε λ α γ χ ο λ ι ́ α (v. mélancolie et atrabile). Fréq. abs. littér.: 25476. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 23556, b) 52005; xxes.: a) 44486, b) 33626. Bbg. Eskenazi (A.). Blanc et noir. B. Soc. Ling. 1977, t.72, pp.XV-XIX. _Grundt (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, pp.249-253. _Kadima-Tshimanga. La Société ds le vocab.: Blancs, Noirs et Évolués. MOTS. 1982, no5, pp.25-50. _Kristol (A.M.). Color. Berne, 1978, pp.95-146. _ Quem. DDL t.3, 11, 20, 21.

Wiktionnaire

Adverbe - français

noir \nwaʁ\

  1. De façon noire.

Adjectif - français

noir \nwaʁ\

  1. Qui absorbe toute la lumière visible qu’il reçoit, donne l’impression d’obscurité ; la plus sombre des couleurs.
    • Les Liméniennes ont toutes de belles couleurs, les lèvres d’un rouge vif, de beaux cheveux noirs et bouclés naturellement, des yeux noirs d’une expression indéfinissable d’esprit, de fierté et de langueur […] — (Flora Tristan, Les Femmes de Lima, dans Revue de Paris, tome 32, 1836)
    • En robe noire comme toujours, parce qu’elle croyait qu’en noir on est toujours bien et que c’est ce qu’il y a de plus distingué, elle avait le visage excessivement rouge comme chaque fois qu’elle venait de manger. — (Marcel Proust, Un amour de Swann, 1913, réédition Le Livre de Poche, page 25)
  2. (Par extension) Qui approchent de cette couleur relativement.
    • Le coucher de soleil est d’un gris inquiétant et de gros nuages noirs s’accumulent vers l’occident. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil, tome 1, De New-York à Tahiti, 1929)
    • Du pain noir ; raisin noir ; des yeux noirs ; du café noir.
  3. (Par extension) Bronzé, en parlant de la peau d’une personne.
    • Il est revenu de vacances avec la peau noire.
  4. (En particulier) Ayant la peau noire, de race noire, en parlant d’une personne.
    • La boxe est très en honneur à Panama. J’assistai à de bons matches et quelques boxeurs noirs étaient tout près de la meilleure classe mondiale. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil, tome 1, De New-York à Tahiti, 1929)
    • La police attend avec des mitrailleuses et des gaz les grévistes noirs de Pennsylvanie. — (Paul Nizan, Les Chiens de garde, 1932)
    • Tandis que les masseuses noires entrent en action, les moins bousculées trouvent le temps de manger et de potiner avec les concubines d'autres harems. — (Jean-Louis Chardans, Les harems, Paris : Éditions Pygmalion, 1979)
    • L’année précédente un caramousal fut pris par le fameux chevalier de Malte Romegas qui trouva à son bord 32 esclaves dont la plupart étaient noirs, sauf quelques Turcs ou Maures. — (François Moureau, Captifs en Méditerranée (XVIe-XVIIIe siècles) : histoires, récits et légendes, Presses Paris Sorbonne, 2008, page 158)
  5. Lié à la communauté noire.
    • En réduisant la musique noire à l’expression des révoltes du peuple noir, on risque cependant de ne pas rendre compte de la richesse d’une expression musicale à la fois mondiale et diverse. — (Yves Raibaud, Musique noire, 2010 → lire en ligne)
    • John Boyega, héros de « Star Wars » et virulent défenseur de la cause noire — (Samuel Blumenfeld, Le Monde, 2020 → lire en ligne)
  6. Sans lumière, obscur, sombre.
    • C’était une nuit noire.
  7. (Vieilli) Qui est livide, meurtri.
    • Être noir de coups. : Avoir la peau toute noire des coups qu’on a reçus.
  8. Sale, crasseux.
    • Lavez vos mains, elles sont toutes noires.
  9. Triste, morne, mélancolique, irrité, hostile, lugubre ou bien funeste.
    • Il a une humeur noire. — Un noir chagrin. — De noirs soucis.
    • Un noir pressentiment. — Des idées noires. — Un regard noir.
  10. (Figuré) Néfaste, diabolique, en parlant des crimes, des mauvaises actions et des personnes qui les commettent.
    • Dans le théâtre de Hugo, Anne Ubersfeld l’a établi, la puissance du souverain est généralement montrée sous son angle le plus noir. — (Florence Naugrette, Le Théâtre romantique, 2001)
    • Une noire trahison. — Une malice noire. — Une noire ingratitude. — Une noire calomnie.
    • Fut-il jamais d’action plus noire ? — Avoir l’âme noire.
  11. (Littéraire) Qui est chargé de menaces, de malheur.
    • Que je le plains, pécheur, en ton heure dernière !
      Les maux les plus affreux sont amassés sur toi ;
      Le noir enfer, séjour rempli d’effroi,
      T’attend au bout de la carrière.
      — (Félix Dupanloup, Mort du pécheur, dans Manuel des petits séminaires et des maisons d’éducation chrétienne, 1844 (2e édition), page 106)
  12. (France) Complètement ivre d’alcool.
    • « Ma tactique était toc » dit Igor qui s’endort, ivre mort, au comptoir du bar
      Un Russe blanc qui est noir
      Quel bizarre hasard se marrent
      Les fêtards paillards du bar
      — (Boby Lapointe, Ta Katie t’a quitté, 1964)
    • Il est complètement noir !
  13. (Sciences) Qui échappe à la détection, que la science ne peut interpréter.
    • Pour les physiciens, « voir » signifie donc « entrer en interaction ». Ils vont donc qualifier de « noir » ce qui résiste à la détection, ce avec quoi l’interaction se fait mal ou ce dont ils ne parviennent pas à capter d’informations avec les moyens à leur disposition. — (Roland Lehoucq, Les idées noires de la physique sur LeMonde.fr, Le Monde. Mis en ligne le 31 mai 2017, consulté le 3 juin 2017)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

NOIR, OIRE. adj.
Il se dit de l'Aspect d'un corps dont la surface, absorbant intégralement toutes les radiations qu'il reçoit, donne l'impression d'obscurité. L'entrée d'une cave vue à quelque distance semble parfaitement noire. Noir comme jais. Noir comme de l'encre. Noir comme du charbon. Noir comme l'aile du corbeau. Une barbe noire. Des cheveux noirs. Un cheval noir. Du drap noir. Habit noir. Robe noire. Cette encre n'est pas assez noire. Substantivement, Le noir de fumée est un corps approximativement noir. Noir animal. Noir d'ivoire. Il porte du noir. Il est en noir. Tout de noir vêtu. Fig. et fam., Mettre du noir sur du blanc. Passer du blanc au noir. Si vous lui dites blanc, il répondra noir.

NOIR se dit aussi de Certaines choses qui approchent de la couleur noire. Du pain noir Des yeux noirs. Du raisin noir. Cette femme a la peau noire. Substantivement, Un noir, Un nègre. Les noirs, Les nègres. La traite des noirs ne se pratique plus. Bêtes noires. Voyez BÊTE. Viandes noires. Voyez VIANDE. Blé noir. Voyez BLÉ. Beurre noir, Beurre fondu qu'on a laissé noircir dans la poêle. En termes de Poésie, L'onde noire, Le Styx. Il a passé l'onde noire, Il est mort.

NOIR signifie en outre Qui est obscur. Des cachots noirs. Cabinet noir. Il y fait noir comme dans un four. Le temps est noir. Une nuée noire. Nuit noire, Nuit complète. Un point noir, Nuage noir qui paraît dans un ciel clair et qui annonce l'orage. Il se dit au figuré de Toute circonstance qui, dans une situation d'ailleurs prospère, fait prévoir des troubles, des malheurs. Il y a plus d'un point noir à l'horizon. Froid noir, Un froid qui s'accompagne d'un état de ciel couvert. En termes de Physique, Chambre noire, Chambre ou boîte close où on ne laisse entrer que par une étroite ouverture les rayons lumineux, en vue de certaines démonstrations d'optique. On donne plus particulièrement ce nom à des Instruments d'optique de formes très variées, à l'aide desquels on voit, sur un papier blanc ou sur un verre dépoli, une peinture exacte, mobile, et pour ainsi dire animée de tous les objets extérieurs. On fait usage de la chambre noire dans la photographie. Cabinet noir. Voyez CABINET. En termes de Beaux-Arts, Les noirs, Les ombres d'un tableau ou d'une estampe. Pousser, tirer au noir, se dit d'un Tableau dans lequel les ombres et les demi-teintes noircissent par l'effet du temps. En termes de Gravure, Manière noire, Manière de graver en taille-douce, qui consiste à couvrir d'abord entièrement le cuivre de points uniformes et à rétablir ensuite plus ou moins le poli de la planche selon qu'on veut avoir des tons plus ou moins clairs. Gravure à la manière noire. Vierges noires se dit de Certaines statues anciennes de la Vierge, généralement sculptées dans le bois et qui sont de couleur très sombre. La Vierge noire du Puy. Perle noire. Voyez PERLE.

NOIR signifie aussi Qui est livide, meurtri. Être noir de coups. Elle a la peau toute noire des coups qu'elle a reçus. Substantivement, Il avait des noirs aux bras. Il signifie encore Qui est sale, crasseux. Lavez vos mains, elles sont toutes noires. Il signifie, au figuré, Qui est triste, morne, mélancolique, irrité, hostile. Il a une humeur noire. Un noir chagrin. De noirs soucis. Un noir pressentiment. Des idées noires. Un regard noir. Quels noirs soupçons vous obsèdent? Fig., Voir tout en noir, Être sujet à prendre les choses du côté fâcheux, à prévoir des événements tristes et funestes. Fig. et fam., Broyer du noir. Voyez BROYER.

NOIR se dit aussi, figurément, des Crimes, des mauvaises actions et des personnes qui les commettent. Une noire trahison. Une malice noire. Une noire ingratitude. Une noire calomnie. Fut-il jamais d'action plus noire? Avoir l'âme noire. On m'a fait cet homme bien noir, on me l'a dépeint bien noir. Rendre noir, Diffamer, faire passer quelqu'un pour méchant, pour criminel. On l'a rendu bien noir dans cette affaire. Messe noire. Voyez MESSE. Bande noire, Association de spéculateurs, d'hommes d'affaires qui s'entendent pour acheter à bas prix des propriétés, des objets mis en vente, qu'ils revendent ensuite à profits communs très élevés. Prov., Il n'est pas si diable qu'il est noir, Il n'est pas si méchant qu'il le paraît. Prov., Cet homme est ma bête noire, Il est pour moi l'objet d'une aversion particulière.

NOIRE s'emploie substantivement en termes de Jeu. La rouge et la noire. En termes de Musique, il désigne une Note qui vaut le double de la croche, la moitié de la blanche, le quart de la ronde.

Littré (1872-1877)

NOIR (noir, noi-r') adj.

Résumé

  • 1° Qui est de la couleur la plus obscure, la plus privée de lumière.
  • 2° Qui tire sur le noir, qui approche de la couleur noire.
  • 3° Livide, meurtri.
  • 4° Obscur, où il n'y a pas de lumière.
  • 5° Sale, crasseux.
  • 6° Triste, morne, mélancolique.
  • 7° Se dit de la noirceur morale, en parlant des personnes.
  • 8° Méchant, avec mélange de trahison, de perfidie, en parlant des choses.
  • 9° Qui mérite la dernière réprobation.
  • 10° Funeste.
  • 11° Se dit de la magie.
  • 12° Bande noire.
  • 13° S. m. Le noir, la couleur noire.
  • 14° La couleur du deuil.
  • 15° Tirer au noir, en parlant d'un tableau.
  • 16° Noir d'ivoire, noir animal, etc.
  • 17° Noir de nickel.
  • 18° Noir animalisé.
  • 19° Ce qui fait frissonner, ce qui excite une sorte de terreur.
  • 20° Ce qui attriste, rend mélancolique.
  • 21° Une meurtrissure.
  • 22° Centre d'une cible.
  • 23° Nom donné à des champignons parasites.
  • 24° Les noirs, sortes d'ouvrages de serrurerie.
  • 25° Homme de race noire.
  • 26° Il se dit d'une personne au teint brun.
  • 27° Nom de partis politiques.
  • 28° Nom de différents animaux.
  • 29° Noir pris adverbialement.
  • 1Qui est de la couleur la plus obscure, la plus privée de lumière. Une robe noire. Du drap noir. Une barbe noire. Noir comme de l'encre. Les corps qu'on nomme noirs, lesquels n'ont point d'autre couleur que les ténèbres, Descartes, Dioptr. I. Je suis noire, mais je suis belle, ô filles de Jérusalem, comme les tentes de Cédar, comme les pavillons de Salomon, Sacy, Bible, Cant. des cant. I, 4. Quand mes cheveux plus noirs ombrageaient mon visage, Boileau, Ép. V. On a découvert un continent entier, un nouveau monde dont la plus grande partie des terres habitées se trouve dans la zone torride, et où cependant il ne se trouve pas un homme noir, tous les habitants de cette partie de la terre étant plus ou moins rouges, plus au moins basanés ou couleur de cuivre, Buffon, Hist. nat. homme, Œuvr. t. V, p. 169. Les corps noirs sont les plus propres à intercepter la lumière ; c'est pourquoi les astronomes font usage de verres enfumés, ou de verres noirs pour observer le soleil, Brisson, Traité de phys. t. II, p. 412, dans POUGENS.

    Le prince Noir, fils d'Édouard III, roi d'Angleterre, ainsi dit à cause de sa cuirasse brune et de l'aigrette noire de son casque, et célèbre par la bataille de Poitiers qu'il gagna.

    Chez le cheval, robe noire ; elle présente trois espèces : le noir jais ou jayet, qui offre un reflet brillant ; le noir franc ou noir proprement dit, et le noir mal teint, tirant un peu sur le brun.

    Terme de graveur. Manière noire, voy. MANIÈRE.

    Terme de jeux. La couleur noire ou la noire, se dit des cartes ou des numéros qui portent cette couleur.

    Fig. Il rentre de piques noires, voy. PIQUES.

    Procession noire, celle que les prêtres d'une paroisse font quelquefois revêtus d'ornement noirs.

    Moines noirs, les bénédictins, ainsi nommés de la couleur de leur robe.

    Point noir, petit nuage noir qui annonce l'orage.

    Fig. Point noir, menace de malheur, de trouble, etc.

    Fig. Il n'est pas si diable qu'il est noir, c'est-à-dire il n'est pas si méchant qu'il en a l'air, ou qu'on ne le puisse mettre à la raison.

    Terme de marine. Synonyme de goudronné, en parlant d'un cordage.

  • 2Qui tire sur le noir, qui approche de la couleur noire. Pain noir. Teint noir. Un monument n'est vénérable qu'autant qu'une longue histoire est empreinte sous ses voûtes toutes noires de siècles, Chateaubriand, Génie, III, I, 8. Au delà, sur la plaine haute, toute l'armée de Kutusof accourait, en deux longues et noires colonnes, par les deux routes, Ségur, Hist. de Nap. IX, 2.

    Bête noire, le sanglier par opposition à bête fauve, le cerf.

    Familièrement. Cet homme est ma bête noire, c'est-à-dire il est pour moi l'objet d'une aversion particulière.

    Viandes noires, certains animaux dont la chair tire un peu sur le noir, comme le lièvre, par opposition à viandes blanches, comme le veau, le poulet, etc.

    Blé noir, dit aussi blé sarrasin, polygonum fagopyrum, L.

    Terme de pêche. Morue noire, celle qui a reçu peu de sel, qui a été séchée doucement, et qui a éprouvé, étant en pile, une petite fermentation.

    Anciennement. Monnaie noire, la monnaie de cuivre.

  • 3Livide, meurtri. Il a l'œil tout noir d'un coup qu'il a reçu.

    Yeux pochés au beurre noir, yeux meurtris (c'est un calembour équivoquant avec œufs pochés).

  • 4Obscur, où il n'y a pas de lumière. Une nuée noire. Et l'eau grosse et rapide et la nuit assez noire M'ont dérobé la fin de la tragique histoire, Corneille, Cinna, IV, 2. Il fait noir comme dans un four ; le ciel s'est habillé ce soir en scaramouche, Molière, le Sicilien, 1. La nuit roule en silence autour de nos demeures Sur les vagues du ciel la plus noire des heures, Lamartine, Harm. IV, 11.

    La nuit noire, le moment où la nuit est devenue tout à fait obscure. Il n'est rentré qu'à la nuit noire.

    Le temps est bien noir, il pleuvra des prêtres, locution plaisante tirée des vêtements noirs des prêtres.

    Froid noir, le froid qu'il fait quand le temps est fort couvert.

    Poétiquement. L'onde noire, le Styx, la mort. Il entre [dans une rivière], et son cheval le met à couvert des voleurs, mais non de l'onde noire ; Tous deux au Styx allèrent boire, La Fontaine, Fabl. VIII, 23.

    Chambre noire ou obscure, lieu où la lumière ne peut entrer que par un trou d'un pouce de diamètre, auquel on applique un verre qui, laissant passer les rayons des objets extérieurs sur le mur opposé, ou sur un drap qu'on y tend, fait voir parfaitement en dedans tout ce qui se présente en dehors. La chambre noire sert dans la photographie.

    Chambre noire ou chapelle noire, s'est dit, dans quelques couvents, d'un endroit obscur où les moines se donnaient la discipline. Gagnez Janot, donnez-lui cent ducats ; Il vous mettra dedans la chambre noire ; Non pour jeûner, comme vous pouvez croire, La Fontaine, Richard Minutolo.

  • 5Sale, crasseux. Des mains noires. Du linge noir. De chiffons ramassés dans la plus noire ordure, Boileau, Sat. X.
  • 6 Fig. Triste, morne, mélancolique. Une paix sanglante et cruelle, noire de deuil et de funérailles, Guez de Balzac, De la cour, 7° disc. Fais m'en haïr, peins-moi d'une humeur noire et fière, Corneille, Attila, III, 1. Et l'honneur qui charmait ses plus noirs déplaisirs, Corneille, Œdipe, II, 4. Je crois que le coadjuteur a été noyé sous le pont d'Avignon ! ah ! mon Dieu ! cet endroit est encore bien noir dans ma tête, Sévigné, 26. Il y avait des heures où mon chagrin était noir, quoique ma raison tâchât de l'éclaircir, Sévigné, 17 avr. 1680. Je reçois toujours les lettres fort noires de mon fils, appelant ses chaînes et son esclavage ce qu'un autre appellerait sa joie et sa fortune, Sévigné, 3 juill. 1680. Les réveils de la nuit ont été noirs, et le matin je n'étais point avancée d'un pas pour le repos de mon esprit, Sévigné, 6 févr. 1671. Comme les pensées noires voltigent assez dans ces bois ici, Sévigné, 8 déc. 1675. D'où vient ce noir chagrin qu'on lit sur son visage ? Boileau, Épigr. XXXIV. D'un noir pressentiment malgré moi prévenue, Racine, Brit. V, 1. Et pourquoi vous en faire une image si noire ? L'hymen de Soliman ternit-il sa mémoire ? Racine, Bajaz. II, 3. Sous un nom emprunté sa noire destinée Et ses propres fureurs ici l'ont amenée, Racine, Iph. V, 6. Mille soupçons plus noirs que l'encre s'emparèrent de son imagination, Hamilton, Gramm. VIII. À de noires terreurs mon esprit s'abandonne, Delavigne, Vêpres sicil. I, 4.

    Vapeurs noires, ainsi dites parce qu'on les supposait provenant de la bile noire, accès d'égarement d'esprit, de mélancolie. Certains insensés dont le cerveau est tellement troublé et offusqué par les noires vapeurs de la bile…, Descartes, Médit. I, 3. J'avais [moi Louis XI] des faiblesses, des visions noires, des emportements furieux, Fénelon, t. XIX, p. 361.

    Il voit tout en noir, il est sujet à prendre les choses du côté fâcheux. Vous voyez, vous peignez tout si noir, que, si j'aimais la solitude, vous me la feriez haïr, Maintenon, Lett. à l'abbé, t. I, p. 67, dans POUGENS.

    Familièrement. Il se dit dans le même sens des personnes… Un mot du Laurier [Condé] qui me paraît bien noir et bien inquiet de tout ce qui menace Baptiste [Pichegru] et par conséquent le buisson [projet], Corresp. du général Klinglin, I, 310.

    Œil noir, regard noir, œil, regard où se peint la colère, le soupçon, etc. Que vous me divertissez tous deux ! vous vous taisez, vous me regardez d'un œil noir, Marivaux, Serm. indiscr. V, 6. Que son regard est noir ! rangeons-nous vers la porte, Boissy, Impatient, II, 9.

  • 7 Fig. Noir, par opposition à blanc, se dit, en parlant des personnes, de la noirceur morale. Le mal est qu'en rimant ma muse trop légère Nomme tout par son nom et ne saurait rien taire ; C'est là ce qui fait peur aux esprits de ce temps, Qui, tout blancs au dehors, sont tout noirs au dedans, Boileau, Disc. au roi. Quand la Discorde encor toute noire de crimes, Boileau, Lutr. I. Ce censeur [Boileau] qu'ils ont peint si noir et si terrible, Fut un esprit doux, simple, ami de l'équité, Boileau, Ép. X. Tantôt j'étais un homme noir, et tantôt un ange de lumière ; je me suis vu dans la même année vanté, fêté, recherché, même à la cour ; puis insulté, menacé, détesté, maudit, Rousseau, Lett. à l'archevêque de Paris. C'était un fou noir et dangereux, Raynal, Hist. phil. IV, 23.

    Blanc ou noir, innocent ou coupable, acquitté ou condamné. Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir, La Fontaine, Fabl. VII, 1. Il se dit, dans le même sens, de l'âme, du cœur. Le chevalier de la Valette, esprit noir mais déterminé, et d'une valeur propre à entreprendre, avait formé le dessein de nous tuer, M. de Beaufort et moi, sur les degrés du palais, Retz, Mém. t. I, liv. II, p. 322, dans POUGENS. Doit-on quelque croyance à des âmes si noires ? Corneille, Nicom. III, 8. La maligne aux yeux faux, au cœur noir, Boileau, Sat. X. Il y a tant d'esprits noirs et mauvais qui ne trouvent de plaisir qu'à mettre le mal où il n'est pas, Massillon, Carême, Pardon des offenses. Vous ne trouvez pas le monde si noir et si pernicieux que nous le disons, Massillon, Carême, Élus. Il [Dieu] a horreur d'un cœur noir à qui ses bienfaits sont à charge, Massillon, Carême, Pâques. Ce petit nombre d'esprits noirs et désespérés que l'incrédulité a produits, Massillon, Carême, Vérité de la religion. Son âme noire, inquiète et turbulente [de Charles le Mauvais] n'enfantait que des projets de désordre et de bouleversement, Saint-Foix, Ess. Paris, Œuvr. t. V, p. 119, dans POUGENS. Il n'y avait, selon eux, qu'une âme noire qui pût s'attacher de préférence aux sujets qu'il [Crébillon] avait choisis, D'Alembert, Éloges, Créb.

  • 8 Fig. Méchant, avec mélange de trahison, de perfidie, en parlant des choses. Après le châtiment d'une action si noire, Corneille, Pomp. IV, 4. Peignez mes actions plus noires que la nuit, Corneille, Médée, II, 2. Les deux accusateurs… N'ont pu bien soutenir un si noir stratagème, Corneille, Nicom. III, 8. En vain l'ambition… D'un faux brillant d'honneur pare son noir ouvrage, Corneille, Sertor. I, 1. Je veux entrer un peu, mais seulement pour voir Quelle est sa contenance après un trait si noir, Molière, Éc. des femmes, III, 5. Voyez si l'auteur d'une si noire supposition ne doit pas passer désormais pour le truchement du père des mensonges, Pascal, Prov. X. Tous ceux qui voulaient louer cette noire satire, Sévigné, 14 mai 1686. Il n'y paraît pas jusqu'ici qu'il y ait rien de noir à leurs sottises [des personnes compromises par la Voisin, empoisonneuse] ; il n'y a pas même du gris brun, Sévigné, 31 janv. 1680. Après l'indigne éclat d'un procédé si noir, Th. Corneille, Ariane, V, 5. L'auteur d'un si noir attentat, Bossuet, Reine d'Anglet. Lorsqu'on est averti d'un complot de cette nature, en est-on quitte pour le blâmer, sans se mettre autrement en peine d'empêcher le progrès d'un crime si noir ? Bossuet, Var. X, 33. Tout ce qu'ont de plus noir et la haine et l'amour, Racine, Théb. IV, 1. Son cœur n'enferme point une malice noire, Racine, Brit. V, 3. D'un mensonge si noir justement irrité, Racine, Phèdre, IV, 2. On me défend, monsieur, de plaider, de ma vie. - De plaider ? - De plaider. - Certes, le trait est noir, Racine, les Plaid. I, 7. Une vengeance déclarée, une calomnie noire, Massillon, Carême, Tiéd. 1. Incapable de rien de noir, d'inique, Massillon, Carême, Mélange. Il n'y a point eu dans l'univers de vengeance noire depuis le sang d'Abel répandu… qui ne se découvre à cette âme innocente, Massillon, Carême, Passion. Il nous vient d'avouer ses noires impostures, Ducis, Oth. V, 6. Un noir poison, Briffaut, Ninus II, I, 1.
  • 9Qui mérite la dernière réprobation. Et je veux que la voix de la plus noire envie Élève au ciel ma gloire et plaigne mes ennuis, Corneille, Cid, III, 4. L'insolence où montait sa noire lâcheté, Corneille, Sertor. V, 7. Et quelque noir orgueil qui te puisse aveugler, Corneille, ib. V, 4. Ô Ciel, le puis-je croire Qu'on ose des fureurs avouer la plus noire ? Racine, Iph. IV, 6. Non, je ne croirai point, ô ciel, que ta justice Approuve la fureur de ce noir sacrifice, Racine, ib. I, 1. Peut-on faire au vainqueur une injure plus noire ? Racine, Théb. I, 5. Tout mon sang doit laver une tache si noire, Racine, Mithr. III, 1. Pour les Romains tes lâches complaisances N'étaient pas à mes yeux d'assez noires offenses, Racine, ib. III, 1. Hélas ! mes frères, vous trouvez si noir et si indigne lorsque ceux dont l'élévation était votre ouvrage vous oublient, vous méconnaissent, se déclarent contre vous…, Massillon, Pet. car. Vices et vert. des gr. Plus le bienfait dont on vous avait favorisé était grand, plus l'ingratitude qui le fait oublier est noire, Massillon, Carême, Rechute, 1. Bailli était fort suspect de jansénisme, la plus noire des taches aux yeux du roi [Louis XIV], Duclos, Œuv. t. V, p. 56.

    Couleurs noires, paroles où l'on représente comme méchante, perverse, une personne ou une action. Mais je ne trouve pas de couleurs assez noires Pour en représenter les tragiques histoires, Corneille, Cinna, I, 3. Autant que sont noires les couleurs dont il nous dépeint, Bossuet, Var. VII, 2. Si je pouvais trouver d'assez noires couleurs, Que j'aimerais à faire une fidèle image Du fond de leurs perfides cœurs ! Deshoulières, Épître chagrine au T. R. P. de la Chaise.

    Rendre noir, diffamer, calomnier. Souvenez-vous, en parlant à la pupille, de les rendre tous plus noirs que l'enfer, Beaumarchais, Barb. de Sév. IV, 1.

  • 10Funeste. Jamais hymen formé sous le plus noir auspice, De l'hymen que je crains n'égala le supplice, Racine, Mithr. I, 2. À mon noir ascendant tu n'as pu résister, Voltaire, Œdipe, V, 4.
  • 11Noir se dit de la magie, à cause de la couleur attribuée au démon. Cela [l'existence des démons] se confirme par cette noire science de la magie à laquelle plusieurs personnes trop curieuses…, Bossuet, 1er sermon, Démons, préambule. Médée, enseigne-moi l'usage De tes plus noirs enchantements ; Formons pour lui quelque breuvage Égal aux poisons des amants, Bernard, Odes, 11.

    Livres noirs, livres de magie.

  • 12Bande noire, voy. BANDE 2.
  • 13 S. m. Le noir, la couleur noire. Un beau noir. Noir de jais. Que d'une serge honnête elle ait son vêtement, Et ne porte le noir qu'aux beaux jours seulement, Molière, Éc. des mar. I, 2. Rien ne m'épouvanta jamais au grand jour ; mais tout m'effarouche dans les ténèbres qui m'environnent ; et je ne vois que du noir dans l'obscurité, Rousseau, Lett. à M. du Belloy, Corresp. t. II, p. 171, dans POUGENS. Lorsque ces rayons primitifs [les sept rayons du spectre] sont unis, le rayon total n'imprime aux objets qu'une couleur blanche, c'est le caractère propre de la lumière, dont le noir n'est que la privation, Bailly, Hist. astron. mod. t. II, p. 563, dans POUGENS. Une femme aux traits réguliers, aux cheveux d'un noir d'enfer, comme dit Alfred de Musset, Th. Gautier, Monit. univ. 3 juin 1867.

    Fig. Aller, passer du blanc au noir, aller d'une extrémité à l'autre, dire ou faire des choses opposées. Voilà l'homme en effet, il va du blanc au noir, Boileau, Sat. VIII. Mais, reprit-elle, il serait peu convenable que le roi parût d'un jour à l'autre passer du noir au blanc, Marmontel, Mém. VI.

    On dit de même : changer du blanc au noir. Enfin, tout d'un coup, tout a changé du blanc au noir, on a eu horreur de ce qu'on estimait, Sévigné, 23 oct. 1680. M. Fléchier, disait un jour Bâville à l'occasion d'un démêlé qu'ils avaient eu, m'a fait changer du blanc au noir. Dites, répondit Fléchier, du noir au blanc, D'Alembert, Éloges, Fléch.

    Familièrement. Par exagération. Si vous lui dites blanc, il vous répondra noir, c'est-à-dire il se plaît à contredire. Quand je veux dire blanc, la quinteuse [la rime] dit noir, Boileau, Sat. II.

    Familièrement. Mettre du noir sur du blanc, écrire, composer.

    Il ne connaît que le blanc et le noir, se dit d'un homme qui ne sait pas lire.

    Le pot au noir, voy. POT.

    Fig. et familièrement. Faire du noir, broyer du noir, se livrer à des réflexions tristes, à des pensées mélancoliques. Vous m'avez écrit quelquefois que je faisais du noir, l'expression n'est pas juste, ce n'est pas moi, monsieur, qui fais du noir ; mais c'est moi qu'on en barbouille, Rousseau, Lett. à M. Laliaud, Corresp. t. VII, p. 160, dans POUGENS.

    Fig. Vendre du noir à quelqu'un, le desservir, le perdre dans l'esprit d'un autre. Pour Fontanieu, il se trouvait taré, et on dit qu'il a trop intrigué parmi les valets de chambre du roi, mais autres que Bachelier, ou bien celui-ci lui vend du noir, D'Argenson, Mém. t. II, p. 132 (éd. de 1860).

  • 14Le noir, la couleur du deuil. Florice, quittons le noir, je vous en prie, ou, s'il faut que nous soyons en deuil, que ce ne soit que pour votre absence, Voiture, Œuvr. t. II, p. 1. C'est un charmant objet qu'un nouvel héritier, Et le noir est pour moi la couleur favorite, Regnard, Distr. II, 7. Devant ma table vint s'asseoir Un pauvre enfant vêtu de noir, Musset, Nuit de décembre.
  • 15 Terme de beaux-arts. Tirer au noir ou pousser au noir, se dit d'un tableau dans lequel les ombres et les demi-teintes noircissent par l'action du temps.

    Il y a trop de noir dans ce tableau, dans cette gravure, les ombres y sont exagérées, ou les transitions ne sont pas assez ménagées.

    Noir aigre et poché, tailles ou hachures que l'eau-forte a fait crevasser et confondre les unes avec les autres.

    Terme de sculpture. Les noirs, nom donné aux parties les plus renfoncées d'une statue, à cause de l'obscurité où elles se trouvent fort souvent.

  • 16Noir d'ivoire, charbon d'ivoire calciné dans un creuset fermé et employé en peinture.

    Noir animal ou charbon animal, charbon d'os obtenu comme le noir d'ivoire ; il est usité dans la peinture commune et pour décolorer les solutions sucrées et autres.

    Noir en grain, poudre grossière de noir animal.

    Noir végétal, charbon de bois broyé qu'on emploie pour diverses épurations.

    Noir d'Espagne, noir fait avec du liége brûlé.

    Noir d'os, charbon d'os. Le cultivateur voulait du noir d'os, on allait lui vendre du noir de tourbe, Livre de la ferme, 2e éd. t. I, p. 61.

    Noir de fumée, suie très noire et légère que donne la poix-résine, et que l'on recueille pour l'employer dans les arts.

    Noir de lampe, beau noir de fumée.

    Noir de pêche, noir qui se fait avec les noyaux de ce fruit.

    Noir de vigne, noir qui s'obtient des sarments brûlés.

  • 17 Terme de minéralogie. Noir de nickel, oxyde de nickel.
  • 18Noir animalisé, engrais désinfecté, composé d'excréments humains desséchés et réduits en poudre, ou de matières animales brûlées, mêlées avec de la terre carbonisée.
  • 19 Fig. Ce qui fait frissonner, ce qui excite une sorte de terreur. [Dans Milton] L'origine de la mort, la manière dont les échos de l'enfer répètent le nom redoutable, tout cela est une sorte de noir sublime inconnu de l'antiquité, Chateaubriand, Génie, II, V, 14. Voici un petit échantillon de mon histoire ; mais c'est du noir, prenez-y garde, Courier, Lett. I, 211.
  • 20 Fig. Ce qui attriste, rend mélancolique. La distance qu'il y a entre nous met un noir et un ennui dans ma vie, Madame du Deffant, Corresp. t. I, p. 6, dans POUGENS.

    S'enfoncer dans le noir, dans son noir, se livrer à des pensées tristes.

  • 21Un noir, une meurtrissure. Le coup lui a laissé un noir. Il a des noirs sur tout le corps.
  • 22Centre d'une carte, d'une cible où il y a un cercle noir dans lequel les tireurs cherchent à mettre le coup.
  • 23Le noir, nom donné par les agriculteurs à des champignons qui recouvrent, sous la forme de croûtes noires, les faces des feuilles et quelquefois les rameaux de certains arbres. Le meilleur moyen de détruire le noir est d'enlever les branches et les feuilles qu'il attaque.

    Noir des céréales, maladie des céréales et spécialement du froment, produite par un champignon (puccinie des graminées, uredo frumenti).

    Maladie des orangers produite par une espèce de champignon microscopique.

  • 24 S. m. pl. Noirs, ouvrages de serrurerie qui n'ont point été polis et blanchis à la lime.
  • 25Homme de race noire, nègre. L'affranchissement des noirs a été proclamé par la première république française, et, en 1848, par la seconde. Les noirs de la côte d'Afrique ont un signe des valeurs, sans monnaie, Montesquieu, Esp. XXII, 8. L'origine des noirs a, dans tous les temps, fait une grande question ; les anciens, qui ne connaissaient que ceux de Nubie, les regardaient comme faisant la dernière nuance des peuples basanés, et il les confondaient avec les Ethiopiens et les autres nations de cette partie de l'Afrique, qui, quoique extrêmement bruns, tiennent plus de la race blanche que de la race noire, Buffon, Hist. nat. homme, Œuv. V, p. 165. Rien n'est plus affreux que la condition du noir dans tout l'archipel américain ; on commence par le flétrir du sceau ineffaçable de l'esclavage, en imprimant, avec un fer chaud, sur ses bras ou sur ses mamelles le nom ou la marque de son oppresseur ; une cabane étroite, malsaine, sans commodités, lui sert de demeure, Raynal, Hist. phil. XI, 22. En supposant qu'il a été acheté quatre-vingt mille noirs en 1777, Raynal, ib. XI, 19. Sur son navire un capitaine Transportait des noirs au marché, Béranger, Nègres.

    Ami des noirs, membre d'une société fondée à Paris en 1790, à l'effet d'appliquer aux colonies françaises les principes consacrés dans la Déclaration des droits de l'homme.

  • 26Noir se prend aussi au sens d'homme de race blanche au teint brun. La pâle est aux jasmins en blancheur comparable ; La noire à faire peur, une brune adorable, Molière, Mis. II, 5.
  • 27Les noirs, s'est dit des membres du côté droit de l'assemblée constituante, pendant qu'elle siégea au manége. Les membres du côté gauche furent appelés les blancs. Les modérés étaient appelés impartiaux noirs ou impartiaux blancs, selon le côté vers lequel ils penchaient.

    Les noirs et les blancs, noms de factions, à Florence, du temps de Dante.

  • 28Noir-aurore, gobe-mouches d'Amérique.

    Noir-bleu, espèce d'oiseau-mouche.

    Noir-brouillard, chevalier brun ou barge.

    Noir-manteau, espèce de goëland.

    Noir-brun, poisson du genre gobie.

    Noir veiné, espèce d'agaric.

  • 29Adverbialement. D'une façon triste, mélancolique. Vous ne vous amusez point à des bagatelles ; vous rêvez noir, ou il vous faut de la conversation, Sévigné, 27 sept. 1671.

    Il voit noir, il voit bien noir, il est sujet à prévoir des événements tristes et funestes.

    Regarder noir, regarder d'un œil irrité. Harlay qui regardait noir le duc de Coislin, Saint-Simon, t. VIII, p. 163, édit. CHÉRUEL. La comtesse se contenta de me regarder fort noir, Comte de Caylus, Mém. des colporteurs, Œuv. t. X, p. 240, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIe s. La neire gent il ad en sa baillie, Ch. de Rol. CXLI.

XIIIe s. Encore font il leur diex noirs et leur deables blans, et font paindre leur ymages de leur sains tretouz noirs, Marc Pol, p. 627. Berte chay pasmée sur un drap noir com saie, Berte, VIII. Jusqu'à tant que noir fist [qu'il fit noir], [elle] ne s'osa redresser, ib. XXXVIII. [Le pain] Noirs ert [était] et pleins de pailles, [il] ne l'ot pas beluté, ib. XLV. Delez lui Blanchefleurs, qui cuer [cœur] ot triste et noir, ib. LXV. Nus ne puet [nul ne peut] à Paris metre en œuvre laine ne fil taint en noir de chaudiere, se il n'i a autre coleur desus, Liv. des mét. 120. Il [Dieu] fait pondre un blanc œuf une geline noire, Chantepleure, ms de St-Germ. f° 104, dans LACURNE.

XIVe s. Et li tonnoires va durement enforsant, Et faisoit si très noir, ce trouvons nous lisant ; Ne scevent où il vont, trop se vont esmaiant, Guesclin. 9629.

XVe s. Mauros, une grosse abbaye de noirs moines, Froissart, II, II, 16. Et feurent exposées les doleances que faisoit le roy, c'est à sçavoir de la monnoie qu'il faisoit d'or et d'argent, et toutes fois il ne la debvoit faire que noire, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1391. [Que] Nul ne porte pour moi le noir, On vent meilleur marchié drap gris, Orléans, Ball. 124. Vint le noir de la nuit, De la Marche, Mém. liv. II, p. 634, dans LACURNE. Je ne donneroye de toy ne de ton escu un noir denier, Perceforest, t. VI, f° 48. Le bon plant se destruit et mue ; Dont le blanc lis devendra noir Par le faulx plant qui tout remue ; Bonne herbe est mise en non chaloir, Deschamps, Poésies mss, f° 7.

XVIe s. Alcibiades, luy donnant la bataille, le rompit, et le chassa jusques à la nuict toute noire, Amyot, Alc. 59. Ô nuict heureuse, o douce noire nuict ! Ta noireté aux amants point ne nuict, Marot, I, 353. Et, qui pis est, mon peché se presente, Incessamment noir et laid devant moi, Marot, IV, 294. La cour porta le noir et toute marque de deuil, D'Aubigné, Hist. II, 8.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

NOIR. Ajoutez :
30 Populairement, un petit noir. Le 4 février, monsieur entre dans mon établissement, demande un petit noir… M. le Président : Qu'est-ce qu'un petit noir ? - Le crémier : Une petite tasse de café noir, Gaz. des Trib. 4 mars 1875, p. 222, 3e col.
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Étymologie de « noir »

Wallon, neûr ; provenc. negre, nier, ner ; espagn. et ital. negro, nero ; du lat. niger.

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(XIIe siècle) Du moyen français noir, de l’ancien français noir, (c. 1100) neir, du latin nĭger (« noir »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « noir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
noir nwar

Fréquence d'apparition du mot « noir » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « noir »

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Citations contenant le mot « noir »

  • Femme nue, femme noireVêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté !J’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeux.Et voilà qu’au cœur de l’Été et de Midi, je te découvre Terre promise, du haut d’un haut col calcinéEt ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigle.Femme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’EstTam-tam sculpté, tam-tam tendu qui grondes sous les doigts du VainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l’Aimée.Femme nue, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peauDélices des jeux de l’esprit, les reflets de l’or rouge sur ta peau qui se moireA l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’ÉternelAvant que le Destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
    Léopold Sédar Senghor —  Chants d’ombre
  • Il faut respecter le noir, un rien le prostitue.
    Odile Redon
  • L’Étudiant noir, journal corporatif et de combat, avait pour objectif la fin de la tribalisation, du système clanique en vigueur au quartier Latin ! On cessait d’être étudiant martiniquais, guadeloupéen, guyanais, africain et malgache, pour n’être qu’un seul et même étudiant noir.
    Leon Gontran Damas — L’Etudiant noir
  • Masques ! O Masques !Masque noir masque rouge, vous masques blanc-et-noirMasques aux quatre points où souffle l’EspritJe vous salue dans le silence !Et pas toi le dernier, Ancêtre à tête de lion. Vous gardez ce lieu forclos à tout rire de femme, à tout sourire qui se fane, Vous distillez cet air d’éternité où je respire l’air de mes Pères.Masques aux visages sans masque, dépouillés de toute fossette comme de toute rideQui avez composé ce portrait, ce visage mien penché sur l’autel de papier blanc A votre image, écoutez-moi !Voici que meurt l’Afrique des empires – c’est l’agonie d’une princesse pitoyable Et aussi l’Europe à qui nous sommes liés par le nombril. […]
    Léopold Sédar Senghor — « Masques »
  • La Négritude est l’ensemble des valeurs culturelles du monde noir, telles qu’elles s’expriment dans la vie et les oeuvres des Noirs. Je dis que c’est là une réalité, un nœud de réalités.
    Léopold Sédar Senghor — l’Etudiant noir
  • Femme nue, femme noireVétue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beautéJ’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeuxEt voilà qu’au cœur de l’Eté et de Midi,Je te découvre, Terre promise, du haut d’un haut col calcinéEt ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigleFemme nue, femme obscureFruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fais lyrique ma boucheSavane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’EstTamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueurTa voix grave de contralto est le chant spirituel de l’AiméeFemme noire, femme obscureHuile que ne ride nul souffle, huile calme aux flancs de l’athlète, aux flancs des princes du MaliGazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau.Délices des jeux de l’Esprit, les reflets de l’or rongent ta peau qui se moireA l’ombre de ta chevelure, s’éclaire mon angoisse aux soleils prochains de tes yeux.Femme nue, femme noireJe chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’EternelAvant que le destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie.
    Léopold Sédar Senghor — « Femme noire »
  • Il fait si noir dans le noir il fait si chien dans la nuit, ça vous colle aux dents, la suie, ça désespère l'espoir.
    Norge — Gros Gibier
  • Le noir est le refuge de la couleur.
    Gaston Bachelard
  • Le noir est l'uniforme de la démocratie.
    Charles Baudelaire
  • Un nounours est la seule chose qui protège du noir.
    Helen Thomson
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Traductions du mot « noir »

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Synonymes de « noir »

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Antonymes de « noir »

Combien de points fait le mot noir au Scrabble ?

Nombre de points du mot noir au scrabble : 4 points

Noir

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